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Chroniques d'une parentalité en construction [scènettes de la famille Avaloy]

Roy Calder
Roy CalderPropriétaire d'un haras
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Chroniques d'une parentalité en construction [scènettes de la famille Avaloy] Icon_minitimeSam 29 Juil 2023 - 13:51
5 avril 2014, à Oxford avant le départ pour Londres

Par chance, la météo était de leur côté. Fait rare pour un week-end d’avril, la pluie n’était pas prévue pour la journée et le soleil tentait même quelques éclaircies passagères, derrière la légère couverture nuageuse. Un large sourire aux lèvres, Roy échangea un regard complice avec Vivianne qui entra dans la cuisine, déjà douchée et habillée.

« Il reste du lait chaud si tu veux te faire un chocolat » lui indiqua t-il en désignant la casserole qu’il avait fait chauffer pour Alma.

Le bébé -qui était une petite fille de plus de deux ans désormais mais que Roy appelait toujours son bébé- s’agita sur sa chaise haute en voyant arriver sa mère derrière Vivianne.

« C’est la su’pise, maman ! C’est la su’piiise ! »

Alma agitait ses petits poings avec excitation, en gigotant sur sa chaise. La veille, Roy lui avait expliqué qu’ils allaient se rendre dans un endroit secret pour fêter l’anniversaire d’Avalon et que ce serait une surprise. Depuis, il n’y avait que ce sujet dans sa tête et elle avait bondi sur son lit en se réveillant, encore plus curieuse que sa mère de découvrir ce qu’il avait préparé.

« On va voir la su’pise main’nant ?
-Non pas maintenant, princesse. Après le petit-déjeuner, dès que tu auras fini ton porridge » répondit-il en replaçant devant elle le bol tiède et son bavoir autour de son cou. Il leva brièvement la tête pour embrasser Avalon qui s’approchait d’eux. « Tu essayes de pas en mettre partout, bébé ? »

Il savait que cette demande était illusoire et que la table finirait maculée de tâches mais Alma avait le mérite d’essayer ; elle se concentrait très fort en tenant sa cuillère, puis fronçait ses petits sourcils quand elle échouait à viser correctement sa bouche, ce que Roy trouvait très mignon. Et il finissait presque par en oublier la petite voix maniaque qui râlait dans sa tête.

Laissant Alma à son petit-déjeuner, il reporta son attention sur sa femme qui préparait son café. Avalon ne savait pas plus que leur fille quelle surprise l’attendait, car Roy avait fait bien attention à ne laisser filtrer aucun indice. Cela faisait trois semaines que le secret planait entre eux, puisqu’ils avaient célébré son anniversaire le jour-même ; après un romantique dîner dans l’un des restaurants préférés d’Avalon, Roy lui avait offert une simple enveloppe où se trouvait un bon mystérieux pour la journée du cinq avril.

Et il se délectait des dernières minutes de ce secret.

« J’espère que tu as bien dormi car la journée va être chargée, s’amusa t-il à la titiller, en lui lançant un regard équivoque.
-Et fatigante ! appuya Vivianne, qui s’amusait tout autant d’être la seule dans la confidence.


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Avalon Calder
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Chroniques d'une parentalité en construction [scènettes de la famille Avaloy] Icon_minitimeSam 29 Juil 2023 - 19:32
Avalon adorait les surprises. Elle était, en revanche, difficile à surprendre. « Déformation professionnelle » se justifiait-elle en riant ; elle avait été Auror puis milicienne pendant plus douze ans et avait été formée à collecter des indices et à résoudre des enquêtes. Pourtant, cela faisait trois semaines qu’elle était incapable de deviner ce que Roy lui réservait comme surprise pour son anniversaire. Tout avait commencé par une enveloppe qu’il lui avait donné le jour de ses trente-deux ans, après un dîner en tête-à-tête dans le restaurant préféré d’Avalon. A l’intérieur, il y avait un papier blanc, sur lequel quelques mots avaient été tracés pour lui demander de réserver entièrement la journée du cinq avril. Et c’était tout.

Avalon avait questionné Roy plus ou moins subtilement pour essayer d’obtenir quelques informations sur cette journée mais il avait déjoué chacune de ses techniques. Elle avait deviné que ses frères et sœurs avaient été conviés – Galaad était très mauvais menteur – mais c’était bien le seul indice qu’elle avait pu récolter. Et plus les jours passaient, plus elle sentait une certaine impatience s’emparer d’elle.

Une impatience que sa fille partageait visiblement, ce qui lui tira un rire attendri lorsqu’elle pénétra dans la cuisine.

« Mais oui mon cœur, c’est le jour de la surprise ! » rebondit-elle en venant déposer un baiser sonore sur sa joue. Elle passa ses mains dans ses cheveux pour lisser en lisser les mèches noires. « Tu as bien dormi ?
-Ouiiii. »

Avalon se pencha à nouveau vers elle pour embrasser le sommet de son crâne avant de voler un baiser à Roy qui s’était approché pour réajuster le bavoir de leur fille. Il s’était occupé seul d’Alma ce matin, lui laissant la possibilité de s’octroyer une (petite) grasse matinée. Evidemment, Avalon avait sauté sur l’occasion ; ces moments étaient devenus bien trop rares depuis qu’ils étaient parents.

Elle s’éloigna de quelques mètres pour se servir un café dans une grande tasse bleue. Elle ajouta un peu de lait et un sirop de caramel, souriant face aux remarques de Roy et de Vivianne qui semblaient bien s’amuser de la situation.

« Oui d’ailleurs ! Vous ne voulez pas me dire où on va, mais vous pouvez au moins me dire comment je dois m’habiller… lança Avalon l’air de rien, en récupérant une tranche de brioche grillée qu’elle entreprit de recouvrir de beurre de cacahuète.
-J’ai l’impression que tu veux nous piéger… commenta Vivianne, qui versait du lait chaud sur du chocolat en poudre.
-Moi ? s’étonna Avalon en pelant une banane. Jamais. D’ailleurs…
-Maaamaaaan, je peux avoi’ une nanane ? s’exclama Alma pointant sa cuillère vers elle.
-Oui, bien sûr Almalita. Tu veux que je mette de la banane dans ton porridge ?
-Ouiii, si-te-plaît. »

Alors qu’Avalon sortait un couteau pour couper une partie du fruit qu’elle avait entre les mains, elle reprit son argumentaire :

« Je disais juste ça pour être certaine de vivre au mieux cette journée. Et pour être préparée à toute éventualité ! »  


Avalon Calder

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Chroniques d'une parentalité en construction [scènettes de la famille Avaloy] Icon_minitimeDim 30 Juil 2023 - 21:46
« Bien tenté pour nous soutirer des infos l’air de rien, on voit que t'as bossé dans la police, toi » ricana Roy, en cassant des oeufs au-dessus d’une poêle. Il répondit toutefois à la question première : « Tu peux t’habiller comme d’habitude. »

Par chance, Avalon n’était pas le genre de personne à porter des talons au quotidien, aussi Roy ne se faisait pas de souci sur la compatibilité de la tenue qu’elle allait choisir avec l’activité prévue pour la journée. Puisqu’ils étaient tous pressés de sortir, leur petit-déjeuner traîna moins en longueur qu’à leur habitude. Ce fut au moment d’habiller Alma que Roy révéla malgré lui quelques indices sur leur destination ; sa tenue bien chaude, complétée par des bottes de pluie, laissait aisément deviner qu’ils allaient passer la journée dehors.

Il était onze heures quand la petite famille se retrouva dans le grand vestibule. La main droite prise par Avalon, la main gauche par Vivianne, et le torse occupé par Alma qui s’accrochait à lui tel un petit koala, Roy lança :

« Tout le monde est prêt ?
-On va faire le saut rigolo ?
-Exactement alors accroche-toi fort, cariña » recommanda t-il à sa fille qui serra un peu plus ses bras autour de son cou.  

Il n’y avait bien qu’une enfant de deux ans pour trouver amusantes les sensations liées au transplanage ; Roy, lui, dut prendre quelques secondes pour retrouver son sens de l’équilibre une fois que ses pieds touchèrent le sol d’une ruelle inoccupée. Avant qu’Avalon ne puisse reconnaître les alentours, il se tourna vers elle.

« Alors, pour aller jusqu’au bout de la surprise, je vais te bander les yeux. Si, si, fais pas la moue, allez. C’est pas loin » assura t-il avec un grand sourire. Il dut poser Alma au sol pour pouvoir sortir le bandeau soigneusement plié dans une poche intérieure de son manteau. « Tu veux bien tenir la main d’Alma pendant que je guide Avalon, Viv’ ? »

Une fois les yeux d’Avalon bandés, Roy prit un bref instant pour envoyer un message à son acolyte chargé de préparer leur arrivée. Puis ils marchèrent pendant quelques minutes dans les rues de Leeds, d’un pas lent, pour qu’Avalon puisse aisément les suivre. Très vite, des indices qui sollicitaient d’autres sens apparurent ; une musique grésillante dans des hauts parleurs qui se rapprochaient d’eux, une odeur de sucre et les petits cris surexcités d’Alma qui ne tenait plus en place :

« Le manèz’ ! C’est le manèz’ ! »

Roy s’arrêta face à l’iconique phare qui marquait l’entrée de la foire traditionnelle de Leeds, autour de laquelle se regroupaient une bonne partie de leurs proches. Ils attendirent que le bandeau devant des yeux d’Avalon tombe pour s’exclamer en choeur, coordonnés par Galaad :

« JOYEUX ANNIVERSAIRE ! »


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Chroniques d'une parentalité en construction [scènettes de la famille Avaloy] Icon_minitimeDim 30 Juil 2023 - 23:52
Lorsque ses pieds touchèrent le sol, Avalon ouvrit les yeux dans l’espoir d’apercevoir un décor familier qui pourrait résoudre le mystère entretenu par son mari depuis plusieurs semaines. Malheureusement, la ruelle dans laquelle ils se tenaient ne se distinguait en rien d’une autre et Roy lui masqua la vue en se positionnant sciemment face à elle.

« Me bander les yeux ? » répéta Avalon en haussant les sourcils, dubitative. Elle céda face à son insistance et se tourna pour qu’il noue le tissu à l’arrière de sa tête.
« Comme ça tu as la surprise jusqu’au bout ! lança Vivianne, à sa droite.
-J’ai pas besoin de mes yeux pour deviner où on va. » fanfaronna-elle en saisissant la main de Roy. Vivianne s’esclaffa.
« Tu vas jamais trouver. » la nargua-t-elle alors qu’ils commençaient à avancer.
-C’est un défi ? releva Avalon avec un petit sourire. « Alors, voyons voir. » Elle fit mine de se concentrer. « Déjà, on va sûrement passer la journée à l’extérieur.
-Comment tu sais ça ?
-La façon dont Roy a habillé Alma. Ensuite, on va sûrement retrouver Galaad – donc probablement d’autres personnes aussi. Et ça, je le sais parce que Gal est le plus mauvais menteur de cette planète.
-Ça c’est vrai, se moqua gentiment Vivianne.
-Et alors, où est-ce qu’on peut être… » Avalon tendit l’oreille. « Dans une ville mais pas à Londres, pas assez de bruit. Et… Pas au bord de la mer, on entend pas assez les mouettes. On entend quelque chose, là, non ? C’est de la musique ? On dirait… »

Une mélodie qu’elle connaissait sans savoir d’où elle la connaissait. Avalon fronça légèrement les sourcils, perdue dans des souvenirs lointains qu’elle ne parvenait plus à convoquer. L’odeur sucrée qui lui parvint la fit frémir légèrement. L’exclamation d’Alma confirma l’hypothèse qui émergeait dans son esprit. Elle attendit cependant patiemment que Roy détache le bandeau qui couvrait ses yeux, convaincue de se retrouver devant une fête foraine ou un parc d’attraction.

Mais absolument pas prête à se retrouver devant la fête foraine.

Lorsque son regard se posa sur le phare rouge et blanc, ses yeux s’écarquillèrent dans une expression de pure surprise. Avalon lâcha la main de Roy et recula d’un pas, prise d’un rire nerveux. Elle se couvrit la bouche alors que ses yeux passaient d’un détail à l’autre. L’entrée majestueuse de la foire, la grande roue, l’ancien carrousel, les différents manèges et stands.

« C’est impossible. » lança-t-elle en secouant la tête, incrédule. Face au regard entendu de Roy, elle eut un nouveau rire. « C’est exactement la même ? » Son sourire fut une réponse suffisante. « Mais comment… ? »

Avalon avait la sensation de se tenir face à des souvenirs, qui devenaient de plus en plus précis au fur et à mesure qu’elle s’imprégnait des lieux, des bruits et des odeurs. Elle était venue ici un nombre incalculable de fois quand elle était petite. La foire traditionnelle de Leeds s’y tenait tous les ans pendant trois semaines ; Avalon avait donc décrété à ce moment-là que le mois de juillet était son mois préféré de toute l’année. Lorsqu’ils vivaient encore partiellement chez leurs grands-parents, Néro, Galaad et elle avaient passé des heures et des heures ici. Chaque penny qu’ils possédaient y était dépensé dans des manèges, dans des barbapapas ou au stand de tir à la carabine. Quand Avalon avait eu dix ans, la foire avait quitté son traditionnel emplacement estival pour s’installer ailleurs, dans une ville mieux équipée pour accueillir les forains.

Il était impossible qu’elle soit de retour à Leeds, en plein milieu du mois d’avril, vingt ans plus tard.

Et pourtant.

« C’est toi qui… ? » demanda Avalon en tournant la tête vers Roy. « Mon Dieu mais… » Elle rit à nouveau. « T’es complètement fou. C’est… » Elle s’appuya contre lui, les yeux rivés sur le phare. « C’est tellement incroyable. »

Plusieurs visages familiers l’observaient en souriant. Ses grands-parents qui se tenaient à côté des parents de Roy. Jason et Moïra, récemment mariés. Irina, un soda déjà logé dans sa main gauche. Adrian, appuyé contre une barrière. Néro, une main posée sur l’épaule de sa fille Aimee. Elio, perché sur les épaules de Toni. Célice et Yseut. Morgane et Garlan, les doigts déjà couverts du sucre du cornet de churros que la première tenait. Galaad et sa compagne, Alisha, qui tenait leur fils Ajay dans les bras. Des amis, des proches, qui riaient et l’interpellaient.

« Elle arrive plus à faire des phrases complètes. » commenta Morgane avec son habituelle verve. « C’est sujet-verbe-complément, Av ! lança-t-elle d’une voix forte, s’attirant des rires autour d’elle.
-Laisse-la, elle digère, répondit Galaad, les bras croisés sur sa poitrine, le regard posé sur sa jumelle.
-Tu crois qu’elle digère le fait que t’aies réussi à garder un aussi gros secret pendant aussi longtemps ? fit mine de s’étonner Célice.
-Alors ça, c’est clair que c’est une vraie surprise pour tout le monde… » se moqua Alisha.

Avalon esquissa un sourire mais ne put saisir cette perche – pourtant facile – pour taquiner son frère.

« C’est complètement fou… » répéta-t-elle en tournant son regard vers Roy. Son émotion était perceptible dans son immense sourire et elle se pencha vers lui pour l’embrasser, ignorant brièvement les regards qui se posaient sur eux.


Avalon Calder

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Roy Calder
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Chroniques d'une parentalité en construction [scènettes de la famille Avaloy] Icon_minitimeLun 31 Juil 2023 - 23:17
Trois mois plus tôt, à l’occasion de Noël qu’ils avaient passé chez la grand-mère d’Avalon, de vieux albums de famille étaient ressortis des cartons. Roy avait eu le plaisir de découvrir des clichés inédits d’Avalon et toute sa fratrie au plus jeune âge et ils s’étaient amusés à commenter la ressemblance avec Alma. Cette dernière, qui ne comprenait pas encore très bien les subtilités du temps et de la généalogie, désignait chaque petit bébé sur les photos en pensant qu’il s’agissait d’elle-même.

Un lieu en particulier revenait souvent à travers les années, comme si les enfants Davies avaient grandi avec, si bien que Roy avait fini par poser quelques questions. Il n’avait pas manqué la lueur de tendresse et de nostalgie dans le regard de sa femme, alors qu’elle évoquait ce qu’elle considérait comme « la meilleure fête foraine ». Ses souvenirs l’avaient tant marquée qu’elle avait été capable de replacer chacune des photographies dans leur contexte ; la fois où elle avait battu Néro à la carabine ou celle où Galaad avait pleuré toute la soirée après avoir percé par inadvertance le sac qui contenait un poisson rouge durement gagné. La foire de Leeds n’existait plus, avait-elle expliqué avec regret, alors que Roy proposait qu’ils y emmènent Alma l’été prochain.

Roy avait gardé en mémoire ce moment qui avait réveillé une complicité particulière entre les frères et soeurs Davies ; même Néro avait partagé de vieux souvenirs avec un sourire aux lèvres. Quelques jours plus tard, après mûre réflexion, il envoyait un message à Galaad pour lui demander de lui décrire avec précision l’aspect de la foire et les stands qui s’y trouvaient. Les souvenirs plus précis de la grand-mère d’Avalon l’avait aidé à se faire une reconstitution mentale fidèle des lieux. Elle lui avait également donné le contact d’une personne à la mairie de Leeds en charge de la culture et l’événementiel. Roy avait du passer plusieurs coups de fil pour parvenir à remonter jusqu’à l’identité des forains que la ville avait un jour accueillis.

Un à un, il les avait contactés pour les convaincre de venir performer sur une journée, pour un événement privé, tout en menant des négociations avec la mairie de Leeds pour obtenir la location d’un terrain vague. Partant du principe qu’il n’y avait rien qu’il ne pouvait pas offrir à la femme de sa vie, Roy s’y était attelé avec persévérance et culot.

Évidemment, ce n’était pas tant ses talents que quelques bons chèques généreux qui lui avaient permis d’organiser en quelques mois la foire des souvenirs d’enfance d’Avalon. Des chèques qu’il avait signés sans aucun regret ; rien ne valait l’expression qu’elle affichait désormais qu’elle se retrouvait face à sa surprise d’anniversaire.

Surprendre Avalon Davies n’avait rien d’évident : son flair d’ancienne Auror déjouait la plupart des tentatives. Mais cette fois-ci, Roy savait qu’il avait en main une carte maîtresse, puisque personne ne pouvait imaginer un tel cadeau. Il avait vu les regards éberlués de Célice et Galaad puis leur enthousiasme, la première fois qu’il leur avait révélé son projet, et tous étaient d’accord sur un point : il n’y avait aucun moyen pour qu’Avalon prédise un tel événement. D’ailleurs, eux-mêmes ne croyaient pas tout à fait que cela soit même possible, ce qui avait tout à fait titillé l’instinct compétiteur de Roy.

Il fut donc aussi satisfait qu’attendri de voir sa femme se trouver si stupéfaite qu’elle en perdait ses mots.

« Oui, c’est moi. Avec l’aide de ta famille » ajouta t-il pour faire bonne mesure. Émue, Avalon riait tout en articulant des phrases incomplètes, ce qui lui décrocha un rire à son tour. « Wow, c’est la première fois que je réussis à te surprendre autant, non ? J’adore. C’est bon j’ai vécu mon moment, là. Elle n’a rien vu venir ! » s’exclama t-il à l’adresse de ses complices. « Ça te plaît ? »

Il l’accueillit dans ses bras alors qu’elle s’appuyait contre lui, un regard rêveur tourné vers le phare. Même les boutades de ses frères et soeurs ne parvinrent pas à lui redonner sa répartie habituelle. A la place, elle se tourna vers Roy avec une émotion lisible dans le regard.

« C’est complètement fou… répéta-t-elle.
-Cet endroit est complètement fou ou je suis complètement fou ? » l’interrogea Roy avec amusement. Elle lui répondit d’un baiser volé qu’il accueillit avec tendresse -ainsi qu’une relative pudeur, puisque toute leur famille se trouvait dans les parages. Les mots qu’il chuchota ensuite restèrent dans leur bulle intime : « Je suis content que ça te plaise, mon amour. Comme on a pas pu marquer le coup de tes trente ans… Je me suis dit qu’il était toujours temps de le faire pour tes trente-deux. »

Puis leur petite bulle d'amour rencontra l’énorme carcasse de Toni qui flanqua un coup dans le dos de Roy pour signaler sa présence.

« Bon allez, laisse-nous un peu ta femme deux secondes, qu’on lui fête son anniversaire de façon digne. » Il affichait un air très sérieux face à Avalon, comme s’il s’apprêtait à conclure une importante affaire. « Av’. Derrière la grande roue, y a une maison de l’horreur. Chiche ? »

Toutefois, son intervention fut bientôt suivie d'une autre fusée concurrente, beaucoup plus petite mais toute aussi énergique, qui atterrit entre les jambes d'Avalon, un grand sourire surexcité collé sur le visage.

« Maman, maman, MAMAN ! » s'exclama Alma en levant sa tête bien haut pour capter le regard de sa mère. « Ess'on peut aller faire la pesse aux nanards ? »


Roy Calder

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Chroniques d'une parentalité en construction [scènettes de la famille Avaloy] Icon_minitimeMer 2 Aoû 2023 - 22:58
« Cet endroit est complètement fou ou je suis complètement fou ?
-Les deux. » répondit Avalon en riant avant de pencher vers son mari pour l’embrasser fugacement.

Les quelques mots qu’il lui chuchota ensuite lui tirèrent un sourire tendre. Il n’y avait bien que Roy pour être suffisamment attentionné – et suffisamment riche – pour faire venir à Leeds une foire de son enfance afin de célébrer ses trente ans, deux ans après la date officielle. Avalon avait fêté son trentième anniversaire à l’hôpital, quelques semaines après la naissance prématurée d’Alma. Elle avait soufflé trois bougies plantées sur un éclair au chocolat que Roy lui avait offert et ils avaient passé la journée ensemble, dans cette chambre d’hôpital dont ils commençaient à connaître tous les contours. Ils s’étaient promis de profiter des beaux jours pour donner une grande fête.

Quelques jours plus tard, Alma avait été enlevée et leur vie avait été bouleversée, réduite à la peur omniprésente et à l’angoisse lancinante. Quand les beaux jours étaient arrivés, ils étaient trop occupés à survivre pour avoir envie de célébrer quoique ce soit. Puis les mois étaient passés et Avalon avait oublié cette promesse, comme s’il s’agissait d’une parole d’un ancien temps.

Une promesse qui était réactualisée, embellie, magnifiée aujourd’hui.

Et qui signait un doux retour à la normale.

Avalon savourait cette sensation lorsque Toni se manifesta bruyamment, de sa carrure imposante et de sa voix tonitruante. Elle le dévisagea en souriant, les sourcils légèrement haussés.

« Le premier qui sursaute perd ? » proposa-t-elle avec un regard de défi – car les années avaient beau s’écouler lentement, certaines choses ne changeaient jamais vraiment. « Et celui qui perd…
-Maman, maman, MAMAN ! »

Les yeux d’Avalon chutèrent vers la source de cet appel. Collée contre ses jambes, la tête levée, Alma paraissait surexcitée. Sa question arracha à Avalon un rire conquis et elle se pencha pour soulever sa fille et l’installer contre sa hanche.

« Bien sûr mon bébé. lui assura-t-elle en embrassant sa joue. Mais avant ça, on va dire bonjour à tout le monde, d’accord ? Tiens, tu as vu que ton parrain était là ? » s’enquit-elle en se tournant légèrement pour qu’Alma puisse apercevoir Toni.

Elle passa un long moment à saluer ses proches, embrasser ses frères et ses sœurs, câliner ses neveux et nièces, rire avec ses amis. Si tous étaient heureux d’être là, il y avait un éclat particulier dans les yeux des quatre ainés Davies. Un mélange de nostalgie et de fascination à se retrouver exactement là où ils s’étaient tenus vingt ans plus tôt. Ils n’avaient que des souvenirs sur le bord des lèvres, qu’ils partageaient avec les autres en riant.

« Et donc, achevait d’ailleurs Galaad, on décide d’envoyer Célice récupérer un peu des pièces de la quête.
-Pendant la messe ? s’esclaffa Irina, qui tenait la main d’Alma.
-Oui, on pensait que personne ne ferait attention à elle, comme elle était petite. Puis on voulait pas tout prendre, juste quelques pennys !
-Et alors ?
-Alors elle a pris la moitié du panier, expliqua Néro en secouant la tête. Ça faisait un bruit monstre dès qu’elle faisait un pas.
-Abuela a compris ce qu’elle avait fait et Célice s’est mise à pleurer en disant qu’on l’avait obligé.
-Quoi ? se défendit la principale concernée. C’est vrai, j’étais beaucoup plus petite que vous, évidemment que je faisais ce que vous me disiez de faire.
-Après ça, Abuela nous a puni pendant trois semaines…
-Elle était furieuse, se souvint Avalon en riant.
-En même temps, vous aviez essayé de voler l’argent de Jésus ! commenta Morgane.
-Ah bah t’inquiète pas, on a largement remboursé Jésus. Avec intérêts même. Abuela nous a fait travailler dans le jardin d’Abuelo pour gagner de l’argent et on devait tout reverser à l’église. »

Un rire général s’éleva de cette petite assemblée. Lorsque l’énergie retomba un peu, le regard d’Avalon chercha la petite silhouette de sa fille. Elle se tenait sagement à côté de sa tante, malgré une certaine impatience qui se décelait aisément dans la façon qu’elle avait de se balancer un peu d’avant en arrière. Une expression tendre passe que le visage d’Avalon.

« On va faire la pêche aux canards, cariňa ? » fit-elle en tendant la main vers Alma.

Un grand sourire s’afficha sur le visage de sa fille et elle se propulsa vers l’avant.

« Ouiiiii. Avec papa aussi !
-Evidemment. Tu crois qu’on va attraper combien de canards ?
-Euuuh… Six !
-Seulement six ? fit mine de s’étonner Avalon.
-Non, quatre ! répondit Alma, qui n’avait pas encore tout à fait compris l’ordre des nombres
-Moi je pense qu’on va avoir… Au moins vingt canards.
-Vingt ??
-Mais oui. Papa et maman sont des champions de la pêche aux canards !
-Moi aussi je suis des champions ! » décida Alma qui marchait avec énergie en direction du stand.




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Tout se passait pour le mieux. Les grands parents d’Avalon semblaient ravis de retrouver ce cadre familier où ils avaient passé de belles journées avec leurs petits-enfants. La fratrie Davies n’avait jamais paru si complice dans cet environnement, même Néro se déridait pour participer aux blagues de ses frères et soeurs. Victor Calder accompagnait Alma dans les manèges -les seuls qu’il voulait bien faire- tout en s’obstinant à laisser une pièce au vendeur à chaque fois, alors même que l’ensemble des attractions étaient offertes pour la journée par Roy. Alma s’amusait comme une petite folle et avait décidé de monter toutes les dix minutes sur le cheval rose du manège central, sa monture de la journée. Elle riait aux éclats et sautillait partout, ravie d’être le centre d’attention de toute la famille ; tout le monde voulait l’emmener quelque part ou lui offrir une sucrerie, si bien que ses parents durent tempérer quelques ardeurs des tontons et tatas pour préserver son estomac.

Quant à Avalon, elle rayonnait. Elle avait sauté au cou de son mari en découvrant un nouveau stand juste derrière la grande roue, qui vendait exclusivement des éclairs au chocolat et à d’autres saveurs plus originales. Roy laissait régulièrement glisser son regard sur elle, avec un doux sentiment de tendresse et de satisfaction à la voir si heureuse de sa surprise d’anniversaire. Il savourait d’autant plus sa joie visible qu’il savait qu’une autre surprise l’attendait bientôt. Galaad vint le chercher à ce propos, à un moment où Avalon était occupée à affronter Toni au stand de tir.

« Quand est-ce que tu veux l’emmener dans la grande roue ? »

Célice, qui était l’autre complice de sa surprise, les observait du coin de l’oeil un peu plus loin, occupée à installer Elio et Alma sur deux balançoires. C’était sûrement elle qui avait envoyé Galaad s’enquérir des plans de Roy.

« En fin de journée, je pense.
-Ok, on s’occupera d’Alma en attendant. »

Ils durent s’interrompre en voyant Avalon revenir vers eux, ravie d’avoir remporté sa compétition face à Toni qui affirmait à qui voulait bien l’entendre qu’il l’avait laissée gagner pour son anniversaire. Amusée par la scène, Viviane s’approcha d’eux, avec un éclair à la pistache à la main.

« Ça coule un peu sur ton menton » lui signala Roy en lui tendant un mouchoir.

Tout en essuyant les traces de crème, Vivianne se montra curieuse :

« Au fait, pourquoi tu offres un éclair au chocolat à Avalon à chaque anniversaire ? »

A cette question, Roy se rendit compte qu’il n’avait jamais expliqué cette tradition à la jeune fille, alors même qu’il l’avait scrupuleusement appliqué à travers les années : le 18 mars au matin, un éclair au chocolat trônait au milieu du bar de la cuisine, pour accompagner le petit-déjeuner d’Avalon. Il échangea un bref regard amusé avec sa femme avant de revenir vers Vivianne :

« Parce que je suis hyper sympa aujourd’hui, je vais la laisser te raconter cette histoire, même si elle la raconte toujours en déformant tout. »


Roy Calder

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Chroniques d'une parentalité en construction [scènettes de la famille Avaloy] Icon_minitimeJeu 10 Aoû 2023 - 12:39
Avalon n’aurait pas pu imaginer une meilleure façon de célébrer son anniversaire. Tout ce qu’elle découvrait l’emplissait d’une joie qui rayonnait sur son visage : le stand de tir à la carabine qui était exactement le même que dans ses souvenirs, la grande-roue qui tournait paresseusement, l’odeur de beignets, de pommes d’amour et d’éclairs au chocolat. Les expressions ravies qu’elle croisait autour d’elle ne faisaient qu’amplifier son allégresse ; ce moment avait tout d’un moment suspendu, de ceux qui restent dans les mémoires pendant plusieurs années.

« Encore un canard ! s’exclama-t-elle en voyant la petite canne à pêche d’Alma se coincer dans l’anneau d’un canard en plastique.
-Enco’ un nanard ! répéta Alma avec un immense sourire.
-Quelle championne. » commenta Avalon en se penchant vers sa fille pour l’embrasser sur le crâne. « Mais quelle championne ! » répéta-t-elle en riant et en lui déposant des baisers sonores sur les joues, ce qui lui tira une exclamation enjouée.

Interpellé par les cris enfantins, Victor Calder s’approcha, curieux d’assister aux prouesses de sa petite-fille. Parce que Toni l’appelait pour qu’elle l’accompagne dans la maison hantée, Avalon finit par confier sa fille à son beau-père, non sans un regard inquiet pour elle qui n’échappa pas à son meilleur ami. « Tout va bien. » lui souffla-t-il en passant un bras autour de ses épaules. « Tout le monde veille sur elle. »

Toni avait raison ; Alma était couvée par ses grands-parents, ses oncles, ses tantes, son parrain et sa marraine qui, eux non plus, ne la lâchaient jamais vraiment du regard. Tout irait bien, se répéta Avalon en s’engouffrant dans la maison de l’horreur, accompagnée par Toni et Galaad.

Et tout se passa à merveille.

Lorsqu’elle revint vers Roy un peu plus tard, un immense sourire étirait ses lèvres. Un sourire qui avait tout d’une victoire sur cette angoisse qui la tenaillait depuis deux ans maintenant.

« Quoi ? » s’exclama Avalon suite à la remarque de son mari. « Pas du tout. Je suis toujours très mesurée dans mes récits. » souligna-t-elle avec un sourire en coin.

Vivianne eut un rire mais préféra relancer sa sœur plutôt que de la contredire :

« Et alors ? Pourquoi vous faîtes ça ?
-Pourquoi ils font quoi ? demanda Irina qui s’était approchée d’eux.
-Pourquoi Roy m’offre tous les ans un éclair au chocolat pour mon anniversaire. Il y a un peu plus de trois ans, juste avant mes vingt-neuf ans, Roy et moi on s’est vraiment engu… disputés.
-A propos de quoi ? demanda Vivianne, curieuse.
-Mh, un truc à propos de mon boulot. » répondit Avalon avec un geste vague de la main. « Mais j’étais vraiment très en colère. Surtout que j’avais raison sur toute la ligne et que, vous vous en doutez, soupira-t-elle avec un regard pour Irina, il ne voulait pas du tout l’admettre.
-Ça ressemble bien à mon frère, approuva Irina avec un sourire en coin.
-Et donc, quelques jours plus tard, c’est mon anniversaire et Toni m’a organisé une soirée plus ou moins surprise. Et devinez qui arrive comme une fleur ?
-Roy ? devina Vivianne, qui cachait mal son amusement.
-Exactement ! Et c’est la première fois qu’on se voit depuis notre dispute, alors c’est forcément un peu bizarre. Et là, il me met une boîte entre les mains. Mon cadeau d’anniversaire, donc. Et c’était un éclair au chocolat. Un seul éclair au chocolat ! » soupira dramatiquement Avalon. « Alors qu’il aurait au moins pu m’offrir la boulangerie entière, pour réparer ses bêtises.
-Les mecs les plus riches sont toujours les plus radins, commenta Irina avec un rire.
-Mais c’est romantique ! » s’offusqua Vivianne. « C’est ton dessert préféré, l’éclair au chocolat.
-Après, j’aime aussi beaucoup les voyages à Bali. » rétorqua Avalon avec un air faussement innocent.
-N’importe quoi, rit sa petite sœur. C’était romantique.
-Mais on n’était pas encore ensemble, à ce moment-là.
-Bah, réagit Vivianne en haussant les épaules. Peut-être qu’il était amoureux de toi mais qu’il le savait pas encore.
-Alors ça, j’en suis persuadée. » approuva Avalon avec un regard tendre pour son époux.


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Chroniques d'une parentalité en construction [scènettes de la famille Avaloy] Icon_minitimeJeu 10 Aoû 2023 - 20:32
Roy leva très vite les yeux au ciel dès le début de l’histoire qu’Avalon racontait évidemment à son avantage.

« Comment ça, je voulais pas du tout l’admettre ? Alors que je me suis excusé platement après ! »

Dans un discours qu’il connaissait désormais par coeur, Avalon souligna la modestie de son cadeau d’excuses. Ravi de voir Vivianne le défendre, Roy rebondit :

« Exactement, merci ! Je voulais un cadeau qui ait du sens, moi, ça n’avait rien à avoir avec l’argent. Pas ma faute si tes goûts en pâtisserie sont modestes » décréta t-il en haussant les épaules. La dernière taquinerie de sa femme lui tira un bref sourire qu’il masqua en détournant la tête. « Hum… Je ne parlerai qu’en présence de mon avocat. »

Il y avait une légèreté sans ombre dans le coeur de Roy, qu’il n’avait pas éprouvée aussi intensément depuis longtemps. C’était comme si rien ne pouvait les atteindre dans l’espace protégé de cette foire, où leur famille se retrouvait et s’amusait ensemble. Les rires et les effluves de sucre emplirent l’atmosphère pendant quelques heures encore. En voyant Alma traîner un peu des pattes et réclamer leurs bras, comme si elle commençait à se fatiguer, Roy sut que l’heure était venue pour sa dernière surprise.

Le soleil déclinait doucement à l’horizon, jetant de longues ombres et des traînées de lumière chaude derrière les manèges. Roy tenait sa fille contre lui quand il s’approcha d’Avalon pour l’interpeler.

« On va y faire un tour avant de rentrer ? » proposa t-il avec un sourire.

D’un geste du menton, il désigna la grande roue derrière elle. Alors qu’ils se mettaient en route, Roy adressa un signe discret vers Galaad pour qu’il les rejoigne. Ils arrivaient au pied dans la grande roue quand il essaya de décoller Alma de ses bras.

« Tu vas voir tonton, cariña ? Je fais juste un manège avec maman et après on revient.
-Nan pas tonton, protesta la petite fille en s’accrochant à son père comme un koala à son arbre.
-Mais c’est pas un manège pour les petites filles ça, regarde, ça monte très haut, ça fait peur. Tu veux pas laisser maman et papa faire un manège en amoureux ?
-Naaaan, veux pas ! »

Signe que la fatigue commençait à jouer avec ses humeurs, Alma se mit à pleurnicher un peu. Roy échangea un regard entendu avec Avalon, en se proposant pour gérer la petite crise passagère :

« Je fais un tour avec elle, je reviens. »

Quelques minutes plus tard, après une petite marche, quelques baisers sur la joue et deux ou trois mots chuchotés à son oreille comme un secret, Alma accepta de regagner le sol sur le chemin du retour. Elle attrapa sagement la main de son oncle et Roy attendit qu’ils s’éloignent avant de glisser à Avalon :

« C’est bien ta fille, hein. Elle a rien voulu entendre jusqu’à ce que je lui promette de l’emmener manger une glace demain. »


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Chroniques d'une parentalité en construction [scènettes de la famille Avaloy] Icon_minitimeVen 11 Aoû 2023 - 18:11
Tout semblait facile, aujourd’hui. Il n’y avait d’ombre derrière leurs mots ni l’éclat familier de la peur dans leurs regards. La vie semblait avoir gagné en simplicité, comme si elle se résumait brusquement à cette joie qu’ils partageaient avec leurs proches et que rien ne pouvait entacher. Avalon savoura ces moments d’insouciance, bien trop rares dans son quotidien depuis deux ans. Si elle n’était plus constamment en hypervigilance comme elle l’avait pu être dans les premiers mois après le drame qu’ils avaient vécu, elle sentait toutefois qu’une part d’elle n’était jamais entièrement sereine. Ce n’était pas massif, ce n’était pas forcément invalidant, mais c’était toujours présent. Alors cette journée avait la saveur particulièrement de l’apaisement.

Elle touchait malheureusement à sa fin ; le soleil déclinait doucement et éclairait la ville d’une lueur orangée. Lorsque Roy s’approcha d’elle, Avalon sortait d’une cuisante défaite contre Néro et fut donc ravie de ne pas s’attarder trop longtemps auprès de son frère aîné, bien trop heureux de sa victoire. Elle caressa doucement le dos d’Alma en suivant le regard de son époux et esquissa un sourire :

« Je te suis. »

Ils se mirent en marche vers la grande attraction qui surplombait la fête foraine mais, lorsque vint le moment de confier Alma aux bons soins de son oncle, elle refusa de quitter les bras de son père. Roy entreprit alors de marcher quelques minutes avec elle, sous le regard tendre d’Avalon qui observa son mari souffler quelques mots à l’oreille de leur fille. Cette dernière finit par accepter de regagner le sol et attrapa sagement la main que son oncle lui tendait.

« Tu veux dire qu’elle a mes excellents talents en négociation ? » demanda Avalon en haussant les sourcils, faisant mine de ne pas comprendre que Roy faisait davantage référence à sa gourmandise. « Je sais, j’en suis très fière. »

Ils échangèrent un sourire amusé en s’asseyant sur la banquette de la grande roue. Curieusement, cette dernière était vide alors que l’attraction avait été prise d’assaut toute la journée. Ils patientèrent quelques instants avant qu’elle ne s’ébranle doucement et se mette à tourner.

« Quand j’étais petite, raconta-t-elle à Roy en posant ses mains sur la rambarde en fer, c’était mon attraction préférée. Quand on arrivait tout en haut, j’avais l’impression de dominer le monde. » Maintenant qu’elle était adulte, la taille de la grande roue lui paraissait beaucoup moins impressionnante mais elle conservait ces souvenirs de grandeur. Se tournant légèrement pour observer son mari, elle poursuivit : « C’est fou ce que tu as fait, aujourd’hui. J’ai l’impression d’avoir voyagé dans le temps… » Elle entrelaça ses doigts aux siens. « C’était vraiment la plus belle surprise que tu pouvais me faire. » souffla-t-elle en se penchant vers lui pour l’embrasser, profitant de ce moment d’intimité pour se laisser aller à des élans de tendresse. « Merci mon amour. »


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Chroniques d'une parentalité en construction [scènettes de la famille Avaloy] Icon_minitimeSam 12 Aoû 2023 - 20:11
« Les talents en négociation, c’est plutôt mes gènes, madame » répliqua t-il tout en anticipant : « Et pas la peine de me répondre que tu as appris à négocier avec des terroristes, tu faisais pas ça tous les jours non plus. »

En passant devant le forain qui contrôlait les entrées de la grande roue, Roy lui adressa un discret signe de tête. Il l’avait chargé de faire en sorte de leur libérer le manège quand il y viendrait avec Avalon. Il le vit tourner la pancarte pour indiquer que l’attraction était fermée, juste après qu’ils soient entrés dans la cabine. Quelques minutes plus tard, la roue se mit à tourner avec lenteur pendant que les regards des deux époux se perdaient vers le sol qui commençait à s’éloigner d’eux.

Roy souriait pendant qu’Avalon lui racontait ce qu’il savait déjà ; pendant qu’il préparait cette surprise, il avait demandé à Galaad et Célice quelle attraction Avalon préférait dans cette foire de son enfance. Ils n’avaient pas hésité une seconde à répondre la grande roue : « la seule qu’elle enchaînait plusieurs fois de suite jusqu’à ne plus avoir aucun penny » avaient-ils évoqué avec amusement. Roy eut l’impression d’être aux premières loges de cet émerveillement d’enfance qui habitait les traits d’Avalon alors qu’elle regardait les alentours à travers les vitres. Il la contempla avec tendresse sans rien dire, plutôt que de se préoccuper du paysage extérieur.

Le moment était parfait pour faire preuve d’affection et de romantisme, dans cette cabine baignée de la lumière du soleil couchant. Avalon sembla le penser aussi, car elle s’approcha de lui pour le remercier. Roy sourit contre ses lèvres, ses yeux caressant les siens.

« Je suis content que ça te plaise. »

Ils n’avaient pas tant de moments juste à eux deux, depuis la naissance d’Alma, alors ils avaient appris à savourer pleinement ceux qu’ils parvenaient à s’offrir. Blottis l’un contre l’autre, ils s’amusèrent de voir les silhouettes de leurs proches devenir progressivement de petits points, puis leurs regards remontèrent jusque la ligne d’horizon traversée d’un fil lumineux qui rasait la silhouette des immeubles de la ville. Alors qu’ils approchaient lentement du sommet de la roue, Roy se sentit envahi d’un sentiment de plénitude et les mots d’Avalon résonnèrent en lui. A cet instant, ce n’était pas le monde qu’il avait la sensation de dominer mais plutôt autre chose. Quand il trouva les mots pour exprimer l’émotion intime qui le saisissait, il les partagea avec sa femme :

« Je sais pas si je me sens puissant dans cette position ou juste… léger. Comme si rien ne pouvait nous atteindre. »

C’était ses peurs et ses angoisses que Roy avait l’impression de pouvoir tenir à distance du haut de cette roue. La légèreté était un luxe qu’il éprouvait trop rarement depuis la naissance d’Alma. Les moments où il retrouvait cette insouciance, où il pouvait se laisser aller à simplement profiter du moment présent sans craindre qu’il ne s’envole, lui procuraient un profond sentiment de reconnaissance. Il le savoura en échangeant un sourire avec Avalon. Son regard glissa le long de ses joues dorées par l’éclat du soleil couchant, se perdit dans ses yeux bruns pétillants de joie.

Il sentit alors que le moment était parfait pour sa dernière surprise.

Il glissa sa main dans sa poche, l’espace d’une seconde. Parce qu’il avait préparé ce moment, et parce qu’il avait une âme profondément romantique derrière ses grands airs, les mots lui vinrent avec fluidité :

« Si j’ai organisé tout ça pour ton anniversaire, c’est parce que je voulais qu’on célèbre aussi tout ce qu’on a réussi à faire ces deux dernières années. On est sortis de l’enfer et on a réussi à rebondir ensemble là où plein de gens auraient fini par se séparer. Et on s’est fait tellement de souci pour Alma et pour Viv’, alors c’est juste le meilleur sentiment au monde de les voir heureuses avec nous. » Il reprit dans sa main celle d’Avalon alors que ses yeux la caressaient avec tendresse. « Je sais qu’on cherche encore ce qu’on veut faire de notre vie depuis qu’on a tout plaqué mais… Le truc dont je suis certain, c’est ce que je veux la passer avec toi et notre famille. Tu es la femme de ma vie, Av', et c'est fou parce que je le sais depuis le début mais je crois que ça m'émerveille toujours de voir que ça bouge pas d'un poil avec les années. » Dans la paume d’Avalon, il laissa la jolie bague qu’il avait récupérée dans sa poche. Alors qu’elle la découvrait, il fit une plaisanterie : « Bon, c’est pas une demande en mariage, vu que tu m’as volé l’honneur il y a deux ans, mais… Tu peux prendre ça comme un renouvellement de mes voeux. » Un grand sourire irradiait sur le visage de Roy, un sourire qui trahissait sa joie et une pointe d’insolence. « Veux-tu m’épouser une deuxième fois en bonne et due forme dans une église et avec une gigantesque fête indécente ? Parce qu’on s’était promis de le faire et je trouve qu’on l’a quand même bien mérité. »  


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Chroniques d'une parentalité en construction [scènettes de la famille Avaloy] Icon_minitimeJeu 24 Aoû 2023 - 19:13
La remarque de Roy tira à Avalon un sourire pensif. Elle garda le silence quelques instants, les yeux rivés sur le sol qui s’éloignait. Avec les années, la peur s’était tarie. Elle n’avait pas disparu – Avalon conservait ce pincement quelque part au creux de son ventre, comme le rappel perpétuel de ce qui aurait pu advenir – mais elle n’y pensait plus tous les jours. Les premiers mois, elle ne pouvait pas regarder Alma sans convoquer le souvenir de cet immense vide qui s’était ouvert en elle lorsqu’elle avait disparu. Roy et elle avaient été longtemps réticents à la confier, même pour quelques heures, ne supportant pas l’idée de la savoir loin d’eux. Ce n’était même pas qu’ils ne voulaient pas ; c’était qu’ils ne pouvaient pas. En cela, la thérapie leur avait été d’une grande aide et, petit à petit, ils avaient réussi à apaiser l’angoisse sourde qui les saisissait toujours. Récemment, Alma avait passé sa première soirée loin d’eux ; Avalon et Roy l’avaient confié aux bons soins de ses grands-parents, le temps d’un dîner animé en compagnie de leurs plus proches amis pour fêter les trente-cinq ans de Roy. Ils mentiraient en affirmant qu’ils avaient été tranquilles pendant cette soirée et qu’aucune inquiétude ne leur avait traversé l’esprit ; mais ils l’avaient fait. Et ce qui semblait anodin pour tant d’autres leur laissait le goût d’une immense victoire.

Une victoire qu’ils savouraient ici, à quelques dizaines de mètres du sol, les doigts entrelacés.

« C’est parce que c’est la même chose, au fond. » répondit Avalon à Roy qui avait souligné ce sentiment saisissant de légèreté. « On est puissants parce qu’on se sent légers et… insouciants, un peu. »

Elle lui offrit un sourire puis quelques mots d’amour pour le remercier d’avoir su créer ce moment si rare, où tout semblait hors du temps et hors d’atteinte. Elle n’aurait jamais pu rêver d’un plus bel anniversaire, où elle avait autant l’impression de retomber en enfance que de faire un bond dans l’avenir. Qu’elle était bien, ici. Qu’elle était bien, dans cette vie qu’elle partageait avec Roy et leur fille. Son regard pétillant témoignait non seulement de sa reconnaissance mais aussi de l’amour qui gonflait son cœur. Tout était parfait, songea-t-elle fugacement, juste avant que son mari ne reprenne la parole.

Son discours lui tira d’abord une tendre expression alors qu’il revenait sur les raisons qui avaient motivé cette surprise. Célébrer leurs réussites et leurs victoires était un beau symbole, presque une revanche sur ce jour où ils avaient failli tout perdre. Failli. Tout résidait dans l’emploi de ce plus-que-parfait. Ils avaient failli tout perdre mais ils se remettaient doucement et avançaient jour après jour vers un futur qui était peut-être incertain sur beaucoup d’aspects mais qui avait le mérite de pouvoir les accueillir tous les trois. Un sourire étira les lèvres d’Avalon lorsque Roy fit écho à ses pensées avec une déclaration d’amour. Elle s’apprêtait à le taquiner lorsqu’il déposa au creux de sa paume un petit bijou vers lequel elle baissa les yeux.

« Qu’est-ce que… ? » Ses sourcils se froncèrent légèrement en découvrant la jolie bague, légèrement rosée. Lorsqu’elle retrouva le regard de Roy, ses yeux brillaient. « Est-ce que t’es en train de… » « Me redemander en mariage » allait-elle dire avant qu’il ne la contredise d’une plaisanterie. Mais il ne la contredisait pas vraiment, réalisa-t-elle avec stupeur en se redressant un peu. Il lui demandait bien de l’épouser à nouveau. A l’église, cette fois-ci. Avec tout ce qu’ils n’avaient pas pu faire la première fois : la grande cérémonie religieuse, la robe blanche, l’immense réception. Avalon eut un rire incrédule et un peu ému. Lorsqu’ils s’étaient mariés, quelques jours avant la naissance d’Alma, ils s’étaient promis de faire une cérémonie plus traditionnelle plus tard. Ils avaient adoré leur mariage intimiste mais l’idée de rassembler tous leurs proches et leurs amis pour une grande fête était très plaisante. Ils en avaient un peu parlé lorsqu’Avalon était encore hospitalisée avec Alma, comme d’un joli projet qui verrait le jour dans un futur plus ou moins proche. Après l’enlèvement, ils n’avaient plus jamais évoqué l’idée. Pas le moment, pas le sujet.

Alors cette bague dans le creux de sa main représentait bien plus qu’un simple renouvellement de vœux. C’était une promesse qu’on honorait enfin, un signe que la vie avait repris le dessus.

« Bien sûr que je vais t’épouser une deuxième fois. » déclara Avalon avec un large sourire. Elle se pencha vers Roy, le visage frappé d’une émotion lumineuse. « Je vais t’épouser une deuxième fois parce que, mon Dieu, qu’est-ce que je suis heureuse d’avoir la chance de pouvoir passer ma vie avec toi. » Elle posa sa main libre sur sa joue. Elle riait et parlait et parlait en riant. « Alors je veux bien te le redire dans une immense église puis faire une immense fête avec tout ce qu’on n’avait pas pu faire la première fois. Le lieu indécent, la robe blanche, tout ça… » Avalon se pencha vers lui pour l’embrasser, profitant de l’intimité de l’attraction pour oublier la retenue dont ils faisaient preuve devant leurs proches. Lorsqu’elle s’écarta légèrement, elle n’avait pas perdu son sourire. Celui-ci se fit un peu plus malicieux lorsqu’elle lança : « Par contre, ça ne change pas du tout le fait que c’est moi qui t’ai demandé en mariage la première et que c’est ce qu’on racontera à nos enfants. » Elle baissa les yeux, laissant un rire s’échapper alors qu’elle regardait ses mains. Son annulaire gauche était déjà occupé par sa bague de fiançailles et son alliance. « Je vais la mettre à droite. » décida-t-elle. Elle retrouva le regard de Roy pour lui demander avec une pointe d’humour : « Tu veux l’honneur de me passer la bague au doigt pour la... troisième fois ? »


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Chroniques d'une parentalité en construction [scènettes de la famille Avaloy] Icon_minitimeLun 1 Jan 2024 - 2:12
16 décembre 2014, Blackwood, Pays de Galles.

« Et le traiteur ? s’enquit Elena en déambulant lentement dans les allées du marché de Noël. Vous vous êtes décidés, finalement ? »

Huit mois après avoir décidé de se marier une seconde fois – à l’église, cette fois-ci – Roy et Avalon s’affairaient à préparer cette deuxième fête qui aurait lieu au mois de mai. Leur premier mariage avait été intimiste et organisé en quelques jours à peine alors ils n’avaient pas eu à se confronter à tous ces préparatifs chronophages. Ils avaient fait une petite cérémonie sur les hauteurs de Bristol avant de faire un dîner avec leurs proches dans le jardin des parents de Roy. Avalon conservait de doux souvenirs de cette célébration et n’était pas certaine que le grand mariage à venir pourrait rivaliser avec la charge émotionnelle du premier. Il serait, en revanche, grandiose. Ils avaient loué un magnifique château pour l’occasion, avec un parc verdoyant qui s’étendait à perte de vue. Ils étaient secondés pour la décoration et avaient fait valider un mois plus tôt les planches finales. Il ne restait plus que l’épineuse question du traiteur.

« On ne va pas partir sur celui qui est en partenariat avec le lieu, finalement.
-Ah oui ? » s’étonna Elena.

Avalon, qui avait glissé un bras sous celui de son mari, échangea un regard avec lui.

« Disons que la dernière dégustation ne s’est pas très bien passée. » Ils avaient eu le malheur de demander au chef cuisinier s’il était envisageable d’inclure d’autres spécialités dans le menu, notamment pour les entrées et les desserts. L’homme, davantage habitué aux compliments sur sa cuisine, avait rapidement pris la mouche et le ton était monté assez vite. « On pense faire appel à quelqu’un d’autre, on doit rencontrer une entreprise en janvier.
-Ça va vous coûter cher de faire venir une entreprise extérieure, non ?
-Bah, intervint Irina avec un sourire moqueur. Ce n’est que leur deuxième mariage, après tout.
-Attends de voir notre renouvellement de vœux, dans dix ans. » rebondit Avalon avec un petit rire.

Ils ne comptaient pas vraiment l’argent qu’ils mettaient dans l’organisation de cette journée, bien décidés à la rendre inoubliable. Ils avaient toutefois décidé de faire une pause dans les préparatifs pour se concentrer sur les fêtes de Noël qui approchaient à grands pas. Les rues étaient toutes illuminées et les maisons décorées par de grands sapins verts. Alma, qui aurait trois ans en février, comprenait désormais la signification de cette fête et était surexcitée depuis le début du mois. Elle avait très consciencieusement fait sa liste au Père-Noël (en disant à son père, qui écrivait pour elle, de bien rajouter « s’il-te-plaît » et « merci » à la fin de la lettre.) C’était pour elle qu’ils étaient tous venus se promener au marché de Noël de Blackwood, la ville la plus proche de la maison des parents de Roy. Jason et Moïra s’étaient brièvement éloignés pour acheter un petit objet d’artisanat. Quant à Victor Calder, il avait été avec Alma chercher les churros qu’elle réclamait depuis qu’ils étaient arrivés.

Elena, Irina, Avalon et Roy s’approchèrent du stand devant lequel il se tenait. Il réceptionnait un cornet de churros et saluait la vendeuse de son habituel ton bourru.

Instinctivement, comme un geste qu’elle avait tant et maintes fois répété, Avalon chercha Alma des yeux.

Victor sembla faire pareil. Ses sourcils se froncèrent et il se retourna comme pour regarder la file d’attente qu’il venait de quitter.

Un poids tomba dans l’estomac d’Avalon. Quand sa voix s’éleva, il y avait une inquiétude évidente et les accents d’une peur terrible.

« Alma n’est pas avec toi ?
-Elle était là il y a deux minutes, je comprends pas… Elle n’est pas avec vous ? »



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Blackwood évoquait des souvenirs d’enfance à Roy. C’était la ville la plus proche de Cwmcarn, cette toute petite bourgade de la campagne galloise où vivaient ses parents. Pour lui et ses frères et soeur, aller à Blackwood signifiait à une époque partir s’amuser dans des foires et faire des boutiques. En trente ans, le marché de Noël de la ville n’avait guère changé. Il se tenait toujours sur une grande place et accueillait des dizaines de stands, organisés en allées autour d’un grand sapin illuminé.

Même si c’était loin d’être le marché le plus impressionnant que Roy ait pu fréquenter dans sa vie, c’était celui qui avait une saveur de son enfance. Et il aimait pouvoir le partager avec sa fille Alma, qui s’émerveillait de tout ce qui avait trait à Noël.

Les enfants grandissaient tellement vite, et cette période de l’année était un bon moment pour le mesurer. L’année dernière, Alma ne comprenait pas vraiment pourquoi elle obtenait des cadeaux dont elle se désintéressait rapidement après les avoir déballés. Cette fois-ci, elle connaissait cet imaginaire du père Noël qui venait déposer des cadeaux, elle avait fait sa première liste de voeux et elle attendait avec impatience de fameux soir du réveillon, en comptant les jours avec ses parents sur le calendrier affiché dans la cuisine.

Alors que les festivités de Noël avaient longtemps rimé avec des traditions un peu lourdes, de plus en plus oppressantes pour Roy qui, après ses vingt ans, n’était plus assez en bons termes avec sa famille pour réellement apprécier ce moment, il commençait à retrouver grâce à Alma quelque chose de cette magie ambiante. Il retrouvait cette joie et cette douceur des fêtes passées en famille, autour de cadeaux et d’un bon repas, et il découvrait même le plaisir de les transmettre à sa fille.

Sous son écharpe en laine, les mains enfoncées dans les poches de son manteau, Roy souriait en voyant Alma s’extasier devant les guirlandes lumineuses, les sucettes en chocolat et les jolis objets sur les stands.

Il détourna brièvement son regard d’elle qui suivait son grand-père dans une autre allée, pour participer à cette conversation sur un autre sujet qui prenait beaucoup de place dans son quotidien.

« Vous connaissant, enfin surtout toi, Roy, je sens que ça va être grandiose, commenta Irina avec un sourire en coin.
-T’imagine même pas. Prépare-toi à vivre la plus grosse fête de ta vie.
-Ne soyez pas trop déraisonnables non plus, quand même, sermonna Elena.
-Si c’est pas pour notre mariage qu’on est déraisonnables, maman, quand est-ce qu’on peut l’être alors ? Et puis, je te connais, tu seras la première à t’éclater.
-C’est papa qui saura pas où se mettre » ricana Irina.

Ils rejoignaient justement Victor, occupé à acheter un cornet de churros pour lui et Alma… qui n’était pas dans les parages. Roy le remarqua en même temps qu’Avalon qui fut la première à s’inquiéter.

L’ascenseur émotionnel fut violent. En quelques secondes, un brusque sentiment de panique assaillit Roy, lui donnant presque le vertige. Il lâcha le bras de sa femme et regarda tout autour d’eux, le coeur battant.

Pas d’Alma en vue.

Roy retrouva le regard de son père qui semblait confus.

« Mais non, elle était pas avec nous, c’est toi qui l’a emmenée ici ! répliqua t-il d’un ton accusateur.
-Ne paniquons pas, intervint Irina. Elle n’est sûrement pas très loin… Elle a peut-être rejoint Jason, il est parti par là, non ? »

Roy s’élançait déjà dans cette direction, suivi d’Avalon. Il repéra rapidement son frère qui observait des jolies boîtes ouvragées en bois sur un autre stand, près de sa compagne. Il les interpela tous les deux en posant une main sur le bras de son frère :

« Vous avez vu Alma ?
-Euh… Jason échangea un regard interloqué avec Moira. Je crois pas, non, elle est pas avec vous ?
-Merde ! »

Roy attrapa le regard d’Avalon, tout aussi effaré que le sien. Autour d’eux, la foule grouillait. C’était une grande foire, où une enfant pouvait aisément se perdre… ou pire. L’estomac retourné, le coeur au bord des lèvres, Roy fouilla les alentours des yeux, sans voir autre chose que leurs parents et Irina s’approcher d’eux. Poussé par la colère et la panique, il s’en prit aussitôt à son père :

« Putain mais je t’ai vu l’emmener ! Comment t’as pu la perdre de vue ??
-Mais je ne sais pas ! se défendit t-il. J’ai lâché sa main à peine vingt secondes, le temps de…
-Pourquoi tu l’as lâchée, putain ?! S’écria t-il.
-Cálmate, lui intima sa mère en posant sa main sur son bras. On va se diviser pour aller la chercher, elle est forcément dans le coin.


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Chroniques d'une parentalité en construction [scènettes de la famille Avaloy] Icon_minitimeLun 1 Jan 2024 - 5:43
Alma avait disparu.

Pour la deuxième fois en moins de trois ans, cette phrase occupa tout l’espace de ses pensées. Alma avait disparu.

Elle n’était pas avec son grand-père, ni avec son oncle, ni dans les allées qu’Avalon balayait compulsivement des yeux. Elle n’était plus là.

Le cœur d’Avalon chuta brusquement et s’enfonça dans le sol.

Si son regard trahissait sa peur insoutenable, elle fut toutefois à court de mots pour l’exprimer. Roy, quant à lui, laissa échapper des exclamations agressives qui disaient tout de son effroi. Avalon les écouta sans les entendre.

Alma avait disparu et, pendant plusieurs minutes qui semblèrent interminables, elle eut l’impression de revivre cet arrachement si douloureux qu’elle avait ressenti devant son berceau vide. Elle avait le ventre noué et le cœur au bord des lèvres, oscillant entre une urgence qui agitait ses mains et une sidération qui figeait son visage dans une expression de terreur. A côté d’elle, Roy n’en menait pas plus large.

« Jason et Moïra, interpella Elena, vous remontez vers l’entrée principale. Victor et moi, on va aller voir la sécurité, on peut sûrement passer une annonce au micro. Irina…
-Je reste avec Roy et Avalon, décida-t-elle d’une voix inquiète. On va la chercher dans les allées.
-Et on se tient au courant, d’accord ? Elle s’est sûrement éloignée. »

Mais pour Avalon, Alma ne s’était pas seulement éloignée ; elle avait brusquement disparu, comme elle avait disparu quelques semaines après sa naissance. Et avec ce souvenir revinrent toutes les émotions les plus terribles ; la peur, la détresse, l’arrachement, l’effroi, la sidération. Avalon ne dut qu’à de vieux réflexes de s’élancer à la suite de Roy. Ils parcourent les allées, scrutant la foule avec un malaise perceptible.

Dans ces visages inconnus, il n’y avait que des figures ennemies et menaçantes.

« Alma ? Alma ? ALMA ? » appelait Avalon en fouillant chaque endroit, chaque recoin où sa fille n’était jamais.

A quelques mètres d’elle, elle entendait Irina arrêter des passants.

« Bonjour, est-ce que vous avez vu une petite fille de trois ans ? Les cheveux noirs, un manteau violet ? »

Et les gens disaient non, grimaçaient, souhaitaient bon courage.

Il aurait pu se passer des heures dans ce marché de Noël qui, brusquement, avait perdu tout son charme pour devenir un lieu hostile et inhospitalier. Il s’écoula peut-être même des heures ; Avalon n’aurait pu le dire car l’horloge de sa vie s’était brusquement arrêtée. Elle était blanche, la bouche tordue, le regard effaré. Son cœur se mit à battre à toute vitesse dans sa poitrine qui se compressa brusquement, comme si elle manquait d’air. Sa respiration s’accéléra.

Avalon avait passé suffisamment d’heures avec une psychologue pour savoir qu’elle était sujette aux attaques de panique, seul moyen que son corps trouvait pour exprimer l’insoutenable.

Elle posa une main sur sa poitrine, là où son cœur s’affolait comme s’il était sur le point de lâcher.

« Respire, Av, ça va aller… » entendit-elle d’Irina, au moment où ses yeux se posaient sur une file d’attente si dense qu’il était difficile de distinguer les visages.

Son regard attrapa une toute petite silhouette, masquée par les jambes des adultes.

La silhouette d’une toute petite fille qui attendait patiemment son tour pour observer de plus près les lutins qui construisaient des jouets.

Des cheveux noirs, un manteau violet et un profil qu’Avalon aurait reconnu entre mille.

« Roy ! Roy, là-bas ! Poussez-vous, pardon ! fit-elle en s’élançant vers le stand. Alma ! »


Avalon Calder

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Chroniques d'une parentalité en construction [scènettes de la famille Avaloy] Icon_minitimeLun 1 Jan 2024 - 7:23
Roy avait peur. Et comme à chaque fois que ce sentiment serrait son estomac, elle se manifestait sous la forme d’une colère manifeste.

Mais il n’avait pas le temps de continuer à crier sur son père pour faire sortir toutes ces émotions qui se bousculaient en lui. Alma avait disparu et une seconde passée à parler, c’était une seconde perdue à la chercher. Alma avait disparu et c’était à nouveau cette sensation d’être séparé d’une part de lui-même.

Comme trois ans plus tôt, dans cette chambre d’hôpital, près de son berceau vide.

Le parallèle était inévitable. Alors qu’ils avaient enfin commencé à tourner cette page, avec Avalon, alors qu’ils se sentaient mieux, en sécurité, heureux avec leur petite famille, Roy eut l’impression l’espace d’un bref instant que ces trois ans n’avaient pas existé. Il avait mal au ventre et au coeur, exactement comme lors de cette funeste journée qu’ils avaient passé tellement de temps à reconvoquer pour apaiser ce traumatisme.

Alma disparaissait à nouveau et c’était comme si ces nombreuses et longues séances de thérapie n’avaient pas existé.

Roy s’élança dans les allées les plus proches sans un regard en arrière. Il s’approcha de tous les enfants qu’il trouva du regard, il posa même son épaule sur une petite fille qu’il crut être celle qu’il cherchait. Il bouscula les passants sur son chemin, sans s’excuser. Il appela son bébé, avec un grain de panique dans la voix.

Alma ? Alma ? Alma ?

Il entendait Avalon faire de même, à quelques mètres de lui. Il était trop occupé à chercher sa fille dans tous les recoins de ces maudites allées bondées pour accorder un regard à sa femme mais il savait.

Il savait qu’elle était dans le même état que lui.

Ce fut sa voix qui le tira de ses recherches infructueuses. Elle l’appela d’une voix marquée par l’urgence et Roy fouilla du regard la direction qu’elle pointait, le coeur battant. Soudainement, il la vit. Sa petite fille, avec ses cheveux noirs et fins qui dépassaient de son bonnet blanc à pompon et son épais manteau violet qui descendait jusqu’à ses genoux.

Roy courut jusque elle, sur une portion de chemin relativement dégagée, ce qui lui permit d’arriver le premier devant Alma. Elle faisait la queue devant le traineau du père Noël, visiblement curieuse de voir les petites animations de lutins, sans se douter une seule seconde du cataclysme que sa brève disparition avait causé chez ses parents.

Roy se jeta devant elle et saisit ses épaules des deux mains, en se baissant à sa hauteur.

« Alma, mon Dieu, mais qu’est-ce qui t’a pris de partir comme ça ?! » s’exclama t-il.

Son premier réflexe fut de la serrer dans ses bras, pour combler le creux que sa brève absence avait causé chez lui. Elle était là, saine et sauve. Ils avaient évité le pire. Mais cette vague de soulagement ne suffit pas à éteindre sa peur logée au fond de son estomac.

Et comme toujours chez Roy, elle s’exprima par de la colère.

« Il faut pas partir sans prévenir ! » la gronda t-il, en reculant pour la regarder. « JAMAIS, tu m’entends ? » Ses deux yeux noirs, surmontés de ses sourcils froncés, fixaient ceux de sa fille. Il ne se rendit pas compte qu’il serrait un peu trop fort ses épaules. « Il faut nous prévenir, maman ou moi ! Après on se fait du souci ! Tu recommences plus ça, hein !! »


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Chroniques d'une parentalité en construction [scènettes de la famille Avaloy] Icon_minitimeLun 1 Jan 2024 - 10:01
Chroniques d'une parentalité en construction [scènettes de la famille Avaloy] 76519f88e87768f2398146172cacc010
Alma Calder, bientôt trois ans, vivait sa meilleure vie.

Noël, c’était formidable. C’était plein de jolies lumières qui clignotaient et Alma adorait ça. A la maison, son papa et sa maman avaient planté un très grand arbre dans le salon et dedans, il y avait des lumières et des boules avec des belles couleurs. Et tout en haut, il y avait une grande étoile qui brillait. Et puis, à Noël, il y avait des cadeaux. Ça, Alma ne l’avait compris que cette année mais, maintenant, elle était très impatiente de savoir ce que le Père-Noël allait lui fabriquer. Elle avait écrit une lettre, bien sûr, pour lui dire ce qui lui ferait plaisir. C’était son papa qui avait écrit mais elle avait fait un dessin sur l’autre côté pour être gentille. Aussi, il y avait une histoire avec Jésus mais Alma ne savait pas trop qui c’était, ni ce qu’il faisait avec le Père-Noël. Abuela avait essayé de lui expliquer en lui montrant des petits personnages dans une maison mais elle avait préféré jouer avec comme des petites poupées. Il y avait un papa, une maman et un bébé, comme dans sa maison à elle. Sauf que, pendant les vacances de Noël, il y avait aussi sa sœur Teresa alors elle avait rajouté un autre bonhomme pour faire un deuxième bébé.

Et donc Noël, c’était chouette. Et Alma était très contente car aujourd’hui, ils se promenaient dans le village du Père-Noël. Le vrai, parce qu’il était là avec ses lutins. Elle l’avait vu quand elle attendait avec Abuelo pour les gâteaux. Il était là, dans son grand manteau rouge et elle avait trouvé ça drôlement impressionnant. Mais il avait une tête gentille, avec une grande barbe et des petites lunettes. Il parlait fort et riait beaucoup, alors Alma avait été captivée et, sans même y penser, elle s’était éloignée. Elle s’était glissée parmi les jambes des grandes personnes pour voir le Père-Noël et là, elle avait vu ses lutins. Ils étaient très drôles car ils avaient des petits chapeaux verts et des tenues rouges et blanches. Et puis, ils chantaient tous en construisant des jouets alors Alma était restée pour écouter les chansons ; elle adorait la musique. Elle n’avait pas conscience de s’être éloignée beaucoup d’Abuelo ou d’être restée longtemps loin de ses parents ; elle était simplement contente de pouvoir bientôt dire bonjour au Père-Noël.

Alors elle ne comprit pas du tout quand son papa arriva devant elle en criant très fort. Elle fut un peu confuse parce qu’il criait mais, comme il lui faisait un câlin, il n’avait pas l’air fâché alors elle voulut lui montrer les lutins pour qu’il puisse voir à quel point ils étaient gentils et drôles.

Mais elle n’eut pas le temps de lui montrer quoique ce soit car son papa se remit à crier. Et cette fois, il cria plus fort. Comme il était très proche de son visage, elle vit ses yeux tout noirs devenir très fâchés et elle eut très peur, encore plus que quand elle faisait des cauchemars la nuit et qu’elle devait traverser le couloir qui faisait peur pour aller réveiller sa maman et son papa. Là, elle avait peur parce que son papa avait l’air très fâché et qu’il la grondait très fort et qu’elle ne savait pas pourquoi et qu’elle était triste qu’il ne soit pas content et qu’il crie. Et puis il serrait très fort ses épaules et ça lui faisait mal alors son visage se froissa de toutes ces émotions et elle fondit brusquement en larmes.

De gros, gros, gros sanglots, ceux qui font sauter le ventre et la gorge. Alma pleura et pleura encore, incapable de formuler le moindre mot. Elle pleurait si fort qu’elle n’entendit pas sa maman arriver et qu’elle ne la vit pas s’agenouiller auprès d’elle non plus.

« Oh mon Dieu Alma, qu’est-ce qui se passe ? Tu es blessée ? »

Mais Alma ne pouvait pas lui dire qu’elle n’était pas blessée et que si elle pleurait si fort, c’était parce que c’était son ventre qui lui faisait très mal parce qu’elle avait de la peur et de la tristesse dedans. Alors elle continua de sangloter en disant des mots qui n’avaient pas beaucoup de sens.

« ‘Utins… Abuelo… Noël… Papaaaaa. » pleura-t-elle dans des hoquets désordonnés.

Sa maman tourna la tête vers son papa et elle fit la conversation des yeux avec lui car ils se parlèrent sans rien dire. Puis elle soupira et l’attira contre elle mais Alma pleurait toujours, inconsolable.

« C’est fini, Almalita. C’est fini… » chuchota-t-elle à son oreille. « C’est fini, tout va bien… »
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Chroniques d'une parentalité en construction [scènettes de la famille Avaloy] Icon_minitimeLun 1 Jan 2024 - 21:48
Sous le regard ombrageux de Roy, Alma le prit de court en éclatant brusquement en sanglots. Elle pleura tant qu’elle fut incapable d’articuler un mot jusqu’à ce que sa mère n’arrive et s’inquiète. Roy échangea un regard avec Avalon, où flottait un mélange de frustration et de culpabilité. « Je m’en occupe » sembla lui dire silencieusement sa femme. Il lâcha Alma pour la laisser aller vers sa mère et se releva, en se tenant à une relative distance.

Son coup d’éclat venait de faire peur à sa fille, c’était évident. D’abord, il songea que ce n’était pas si mal, parce qu’il fallait qu’elle comprenne les dangers qu’elle courait en s’éloignant des adultes sans prévenir de cette manière. Il l’avait grondée pour son propre bien, c’était nécessaire et maintenant elle ne recommencerait plus, se répéta t-il.

Mais elle semblait si inconsolable, malgré les câlins et les baisers de sa mère, qu’inévitablement, le coeur de Roy se serra à la voir aussi bouleversée. C’était la première fois qu’il criait si fort sur elle. Non pas qu’il en avait fait un principe d’éducation conscient et immuable ; c’était simplement qu’Alma était une petite fille si sage, si obéissante et attentive, qu’il n’avait tout simplement jamais eu besoin de la disputer de cette manière.

Il n’était pas sûr d’apprécier l’expérience.

Irina arriva vers eux, un peu essoufflée, suivie des autres membres de la famille qu’elle avait prévenus. Bientôt, il y eut toute une ribambelle de personnes inquiètes autour d’Alma, pour s’enquérir de comment elle allait et pour la sermonner -plus gentiment- à leur tour. Irina profita de ce moment pour s’approcher de Roy, qu’elle sentait encore tendu et elle était la seule personne de cette assemblée à réellement mesurer ce que réveillait cet incident chez lui.

« Ça va, chouchou ? lui demanda t-elle en posant une main sur son bras.
-Ouais, ouais… Plus de peur que de mal. »

Elle lui offrit un sourire désolé et un regard compatissant.

Cette soirée au marché de Noël s’écourta plus rapidement que prévu. Après cet incident, Roy n’avait plus du tout la tête à se promener et il proposa à Avalon de rentrer. Il en voulait encore à son père d’avoir perdu de vue Alma et il était trop tendu pour s’excuser de son coup d’éclat disproportionné. Ils atterrirent en transplanage d’escorte devant leur maison à Oxford et remontèrent l’allée dans un lourd silence.

Au début, Roy n’accorda pas un regard à Alma qu’il entendait traîner des pieds et renifler derrière lui. Il lui accorda la parole seulement pour lui rappeler de mettre ses chaussures dans le meuble de l’entrée, puis s’échappa vers le grand salon, celui qu’ils occupaient quand ils avaient du monde à la maison. Là où il était certain d’être tranquille quelques minutes, le temps de faire redescendre ses émotions.

Une bonne demi-heure s’était écoulée quand il revint dans le salon familial, ouvert sur la cuisine, où Avalon s’affairait à réchauffer un plat pour leur dîner. Alma n’était pas là, constata t-il en promenant son regard dans la pièce.

« Elle est dans sa chambre » l’informa sa femme. Elle semblait aussi tracassée et mal en point que lui mais elle n’en dit rien. Il y avait une lueur d’inquiétude dans son regard quand elle se tourna vers lui. « Tu devrais aller la voir… »

Roy hocha la tête avec une grimace. C’était précisément pour aller parler à sa fille sans le faire sous le coup de l’émotion qu’il s’était accordé ce petit temps de répit. Ce moment de réflexion avait réveillé sa culpabilité qui prenait désormais plus de place. Elle fut plus forte encore quand, quelques minutes plus tard, il poussa la porte de la chambre d’Alma et la trouva assise par terre, à jouer d’un geste morne avec des petites licornes en plastique. Cette fois-ci, Roy prit une voix plus douce pour lui parler :

« Je peux entrer, cariña ? »

Sans rien dire, Alma hocha la tête et Roy s’avança vers elle. Son coeur se serra quand il s’aperçut qu’elle n’osait plus croiser son regard et gardait la tête baissée, le visage triste. Il s’assit en tailleur à côté d’elle, sans rien dire non plus.

C’était décidément beaucoup plus facile de parler sous le coup de la colère que de trouver des mots pour s’excuser.

Il posa sur elle sa main assez grande pour couvrir presque toute la largeur du petit dos d’Alma, dans un geste doux, qu’il espérait réconfortant.

« Désolé de t’avoir crié dessus tout à l’heure » dit-il en cherchant son regard. « C’est parce que j’ai eu peur, tu sais. Dans les endroits comme ça où il y a plein de monde, il peut arriver plein d’accidents… Surtout pour des enfants. C’est pour ça qu’il faut toujours rester près d’un adulte qui peut te voir. »


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Chroniques d'une parentalité en construction [scènettes de la famille Avaloy] Icon_minitimeLun 1 Jan 2024 - 22:53
Chroniques d'une parentalité en construction [scènettes de la famille Avaloy] 76519f88e87768f2398146172cacc010
Alma Calder, bientôt trois ans, n'a pas conscience que son père revit seulement son propre traumatisme à travers elle.

Alma n’aimait pas du tout être grondée. Elle faisait d’ailleurs bien attention à ne pas l’être, elle écoutait toujours les consignes et elle était sage alors on ne la grondait pas souvent. Une fois, quand elle avait traversé la route toute seule, sa maman l’avait beaucoup disputé mais juste après elle l’avait pris dans ses bras et elle lui avait fait des bisous alors Alma n’avait pas pleuré trop longtemps et, maintenant, elle tenait toujours la main d’un adulte quand il fallait traverser la route.

Alors forcément, les bisous et les câlins de sa maman lui faisaient du bien et Alma finit par se calmer mais il y avait encore un gros poids dans son ventre qui ne voulait pas partir. Parce que si sa maman lui faisait des câlins, son papa, lui, ne lui avait rien dit depuis qu’il s’était fâché très fort et ça lui faisait beaucoup de tristesse dans la gorge. Elle reniflait un peu pour lui montrer qu’elle avait du chagrin et pour avoir de l’attention mais il ne voulait pas la regarder alors elle se mit à pleurer un peu plus – pour de vrai, cette fois – parce qu’elle n’aimait pas du tout qu’on soit fâchée contre elle et encore moins son papa. Mais il ne s’arrêta pas et lui indiqua simplement de laisser ses chaussures dans le meuble de l’entrée avant de partir dans la maison.

Il y avait beaucoup d’émotions dans son petit corps. De la tristesse dans sa gorge et dans son ventre et puis de la peur aussi parce qu’elle se disait que son papa allait être fâché pour toujours car il ne l’avait jamais grondé avant aujourd’hui et que du coup, elle ne savait pas si c’était de la colère qui restait pour la vie ou pas. Et puis, elle se sentait un peu en colère elle aussi, parce qu’il y avait beaucoup de sentiments difficiles et qu’elle n’avait pas de mots pour les dire alors ça tourbillonnait en elle et ça faisait de la colère. Mais pas la colère qui fait crier, plutôt la colère dans le silence.

Ce silence, Alma finit par s’enfermer dedans. Elle alla jusqu’à sa chambre et s’installa sur le sol. Normalement, elle était toujours très enthousiaste de s’amuser avec ses jouets, surtout les licornes parce qu’elles étaient belles, avec pleins de jolies couleurs. Ce qu’elle aimait vraiment, c’était quand son papa et sa maman jouaient avec elle et qu’ils faisaient les voix ; elle rigolait toujours beaucoup et ça faisait des guilis de la joie dans son estomac. Mais là, il n’y avait personne pour faire les voix et elle n’avait même pas très envie de jouer.

Quand son papa entra dans sa chambre, Alma sentit la tristesse gonfler encore et prendre plus de place que la colère. Il s’installa à côté d’elle mais elle n’avait pas envie de le regarder parce qu’elle ne voulait pas qu’il refasse les yeux fâchés qui faisaient peur, alors elle garda son regard rivé sur les petites licornes dans ses mains. Mais il n’y eut pas d’yeux fâchés ni de grosse voix ; au contraire, son papa parla sur un ton tout bas en posant sa main dans son dos, comme il faisait parfois pour la réconforter. Il dit des mots d’excuses et expliqua des choses sur les accidents qui pouvaient arriver dans les endroits avec du monde. Alma leva les yeux vers lui et, d’un coup, les larmes roulèrent à nouveau sur ses joues.

« Mais moi, moi, moi, je voulais dire bonjou’ au Père-Noël et après, et après tu t’es très fâssé et je veux pas tu sois fâssé et que tu veux plus me faire des câlins… » pleura-t-elle, le menton tremblant.
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Chroniques d'une parentalité en construction [scènettes de la famille Avaloy] Icon_minitimeMar 2 Jan 2024 - 0:19
Parmi les proches d’Avalon et Roy, tout le monde avait son avis sur la question de savoir à qui Alma ressemblait le plus, entre ses deux parents. Les uns disaient qu’elle avait le même regard et les mêmes cheveux que son père. Les autres disaient qu’elle avait le sourire de sa mère. Quand il regardait Alma, Roy voyait les traits de son visage à lui mais il voyait aussi l’expressivité si caractéristique d’Avalon. Alma souriait d’une manière qui éclairait tout son visage, elle avait ce petit pli entre ses sourcils froncés, une lumière dans les yeux quand elle était joyeuse, une moue particulière avec sa bouche pour exprimer son mécontentement.

Exactement comme Avalon.

Tout comme il adorait ces détails chez sa femme, Roy les chérissait chez sa fille aussi. Face à cette petite moue de tristesse sincère sur le visage d’Alma, il sentit son coeur se charger d’amour et s’alourdir de culpabilité à la fois. Elle était si bouleversée qu’elle buta sur ses mots, avec sa toute petite voix adorable, ses grands yeux brillants de larmes et son menton tremblant. Il n’en fallait guère davantage pour faire tomber toutes les barrières de son père, qui l’attira dans les bras.

« Oh, mon bébé… »

Étrange pouvoir qu’avaient les enfants de fendre le coeur de leurs parents tout en étant terriblement attendrissants.

Roy passa ses deux bras autour du petit corps de sa fille et posa sa tête contre ses cheveux, pour répondre à ce besoin d’être câlinée qu’elle exprimait. Il avait été en colère tout à l’heure, contre son père, contre Alma, contre le monde entier. Maintenant, il se sentait bête et coupable. Il savait très bien que sa réaction avait été disproportionnée et il savait aussi très bien d’où cela venait.

Un vieux monstre endormi en lui, maîtrisé et contenu par les années et par le travail qu’il avait fait sur lui-même, mais toujours présent.

Roy savait que ce traumatisme ne disparaîtrait jamais, qu’il faisait en quelque sorte partie de lui et de la manière dont il construisait sa paternité. Il ne pensait pas en revanche qu’il pouvait se réactiver si vite et si fort. Troublé et pensif, il déposa quelques baisers dans les cheveux d’Alma, en cherchant ses mots. Comment expliquer quelque chose d’aussi complexe à sa petite fille qui semblait si atteinte par sa réaction ?

Elle n’avait pas besoin de tout savoir, songea t-il. Ce qui apparaissait assez clairement dans ses mots, c’était qu’elle avait eu surtout peur qu’il lui en veuille durablement, au point de ne plus vouloir la prendre dans ses bras. Peut-être qu’au fond, elle avait surtout besoin d’être rassurée.

Mais parce qu’il ne voulait pas non plus qu’elle prenne à la légère ce qui s’était passé, il commença par expliquer :

« C’est vrai, j’étais fâché tout à l’heure parce que tu t’es mise en danger. C’est comme quand on te dit de nous prendre la main et de bien regarder avant de traverser la route. » Il recula la tête pour pouvoir regarder Alma. Il y avait toujours des larmes sur ses joues rondes, que Roy essuya avec son pouce. « Mais tu sais, peu importe si je suis fâché, je voudrai toujours te faire des câlins. » Il lui sourit légèrement et ajouta quelque chose qui devrait, à coup sûr, la consoler : « Parce que t’es toujours ma princesse, d’accord ? » Roy savait qu’Alma était dans une période très princesse et prince charmant, et qu’elle aimait qu’il l’appelle de cette manière. « Ma petite princesse préférée » assura t-il en pinçant affectueusement sa joue.


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Chroniques d'une parentalité en construction [scènettes de la famille Avaloy] Icon_minitimeMar 2 Jan 2024 - 1:24
Chroniques d'une parentalité en construction [scènettes de la famille Avaloy] 76519f88e87768f2398146172cacc010
Alma Calder, bientôt trois ans, n'a pas conscience que son père revit seulement son propre traumatisme à travers elle.

Alma se laissa entraîner contre son papa et écrasa ses joues rebondies contre le tissu de sa chemise. Elle pleura encore un peu contre lui parce que les émotions prenaient beaucoup de place dans son corps et qu’elle avait besoin de les évacuer quelque part. Mais les bras de son papa autour d’elle la faisaient se sentir mieux, comme s’il arrivait à prendre tout son chagrin. Ça, c’était le super-pouvoir des parents ; ils savaient comment prendre toutes les mauvaises choses pour que la vie soit facile et chouette. Son papa, lui, était très fort à ça. Il était très fort tout court, même.

Et là, c’était exactement ce dont Alma avait besoin : son papa très fort, qui prenait tout son malheur pour que son ventre arrête de lui faire mal. Elle resta longtemps collée à lui, jusqu’à ce que les sanglots arrêtent de faire mal à sa gorge. Elle leva les yeux vers lorsqu’il se recula et l’écouta très attentivement. Il parlait tout doucement, maintenant, avec la voix comme un secret et elle aima beaucoup ça, beaucoup plus que quand il avait crié tout à l’heure. Il lui expliqua qu’il s’était fâché parce qu’elle s’était mise en danger, comme quand elle avait traversé la route un jour. Alma hésita à lui dire que cette fois-ci, il n’y avait pas de route mais qu’elle avait quand même regardé au cas-où mais son papa continua en affirmant qu’il voudrait toujours bien lui faire des câlins. Elle l’observa avec beaucoup d’émotions dans les yeux, puis pouffa quand il lui attrapa la joue.

Elle aimait beaucoup quand il lui disait qu’elle était une princesse. Les princesses étaient très jolies, comme sa maman, et elles se mariaient avec des princes très gentils, comme son papa. Alors en ce moment, Alma avait envie de devenir comme sa maman pour se marier avec son papa un jour.

Mais pour ça, il ne fallait pas que son papa soit fâché contre elle.

Il n’avait plus l’air trop fâché, réalisa-t-elle en observant son visage de très proche. Il souriait et il avait les yeux tout doux.

« Voui… » répondit-elle en reniflant. « Pa… Pardon j’ai pas fait essprès de partir… »

Elle échoua à nouveau dans ses bras et s’y lova. Son papa disait plein de jolis mots dans ses oreilles et son ventre était moins douloureux, maintenant. Mais une pensée inquiète la traversa et elle demanda, sans se détacher de cette étreinte :

« Et papa essque c’est pas sage et après le père-noël aussi il va être fâssé ? »

Car tout de même.

Les enfants aussi avaient leurs inquiétudes.

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Roy sut qu’il avait touché juste car un petit sourire se glissa sur les lèvres d’Alma. Elle se blottit contre lui en lui demandant pardon et il raffermit leur étreinte pour la rassurer. Il embrassa ses cheveux, avec un autre surnom d’amour parmi tous ceux qu’il aimait lui donner :

« C’est rien, p’tit coeur. »

Alma n’était pas encore tout à fait tranquille car elle l’interrogea à nouveau. À plusieurs reprises, Roy avait noté comme elle les écoutait attentivement, Avalon et lui. Elle accordait beaucoup de crédit à leurs mots et en l’occurrence, elle avait très bien retenu ce qu’ils avaient pu lui raconter sur le Père Noël. Roy lui prédisait un avenir de bonne élève à l’école, car déjà à trois ans, elle se montrait très consciencieuse, ce qui la différenciait grandement de ses parents au même âge.

Parfois, avec un brin d’émerveillement, Avalon et Roy se demandaient comment ils avaient pu enfanter une petite fille aussi modèle.

« T’en fais pas, je suis sûr que le père Noël est pas fâché. C’est lui que tu voulais voir, tout à l’heure non ? Alors il peut pas t’en vouloir » conclut Roy, en tapotant affectueusement son dos. Alma sembla définitivement rassuré cette fois-ci, ce qui le poussa à proposer : « Allez, on rejoint maman pour dîner ? Tu dois avoir faim avec toutes ces émotions… »

L’incident semblait déjà oublié car Alma se laissa entraîner avec des étoiles dans les yeux. Elle fut même ravie d’être portée dans les bras de son père, qui ne voulait pas se résoudre à la lâcher si vite. Roy, lui, se pardonnait moins vite que sa fille ne venait de le faire et il y avait encore un peu de cette culpabilité dans le regard qu’il échangea avec Avalon, quand il la retrouva dans la cuisine.

Il savait déjà qu’une longue discussion les attendrait ce soir, quand Alma serait couchée.

***

21 février 2015, Oxford

« Trois, quat’e, cinq, six… et euh…
-Et sept !
-Sept, répéta Alma avec un grand sourire. Encore sept jours ! »
-Eh oui, sept jours, donc ça veut dire pile une semaine. Ça veut dire que vendredi prochain, c’es ton…
-N’anniversaire ! » s’écria t-elle, ravie.

Amusé par l’enthousiasme de sa fille, Roy déposa un baiser sur sa joue rebondie et raya une journée avec le feutre qui leur servait à écrire sur le calendrier affiché sur le frigo. Il installa Alma sur une des chaises hautes devant le bar où un bol de porridge chaud l’attendait. Après avoir noué son bavoir autour de son cou pour qu’elle puisse manger seule, il rejoignit Avalon derrière le bar, pour récupérer une tasse. Derrière eux, Alma bavassait sur son sujet préféré du moment :

« Eh bah moi, j’ai trop trop envie que ça soit mon anniversaire !
-Ah oui ? Ça, c’est parce que t’es pressée d’avoir des cadeaux, la taquina son père.
-Oui, oui, moi je veux plein de cadeaux ! affirma t-elle en hochant vigoureusement la tête.
-Tu veux quoi comme cadeau, par exemple ? »

Avalon et lui avaient déjà repéré de jolies choses mais toute indication était bonne à prendre. Roy était en train de verser du café brûlant dans sa tasse quand Alma annonça, avec la bouche à moitié pleine de porridge :

« Moi che veux un p’tit frère ou une p’tite sheur ! »

Le filet de café dévia légèrement de sa trajectoire et brûla le pouce de Roy qui reposa la tasse sur le plan de travail, pris par surprise. Il échangea un regard déconcerté avec Avalon. Il s’attendait à beaucoup de choses, car Alma avait beaucoup d’imagination, surtout quand il s’agissait de demander des cadeaux -et ensuite, il fallait lui expliquer que c’était interdit de ramener une licorne chez soi. C’était en revanche la première fois qu’elle réclamait un petit frère ou une petite soeur à ses parents. Roy chercha à comprendre d’où sortait cette demande inattendue en rebondissant :

« Ah bon ? Et pourquoi ? »


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Chroniques d'une parentalité en construction [scènettes de la famille Avaloy] Icon_minitimeMar 2 Jan 2024 - 6:23
Il était impossible d’oublier que le troisième anniversaire d’Alma approchait à grands pas ; depuis quelques jours, elle ne parlait que de ça et manifestait un enthousiasme attendrissant. Un peu comme pour Noël, c’était la première année où elle comprenait réellement le sens de cette fête. Elle avait d’ailleurs été très stupéfaite quand ses parents lui avaient expliqué que son anniversaire avait lieu tous les ans, à la même date et que, par conséquent, il y aurait une fête à chaque fois pour célébrer le jour où elle était née. Avalon n’était pas certaine qu’elle avait saisi toutes les subtilités de cette conversation mais, en revanche, elle avait très bien compris le principe des cadeaux et en parlait avec beaucoup d’excitation. Avalon et Roy l’écoutaient toujours avec beaucoup de tendresse, troublés de constater à quel point leur bébé avait grandi.

Parfois, Avalon avait l’impression qu’elle était née la veille.

Alma grandissait pourtant si vite. Ce n’était plus un bébé mais une petite fille douce et curieuse, qui posait mille questions à ses parents et buvait leurs réponses. Elle était sage et consciencieuse, soucieuse de bien faire. Entourée par des adultes, elle s’exprimait déjà bien, malgré les mots qu’elle mâchait parfois et qui s’emmêlaient dans sa bouche. Elle était câline, aussi, très attachée à ses parents qui la couvait d’un amour tendre. Elle ne manquait pas d’imagination.

Et parfois, elle était même particulièrement surprenante.

Occupée à agrémenter son café d’un sirop au chocolat, Avalon suspendit ses gestes, stupéfaite par cette demande qu’elle n’avait jamais faite auparavant.

« Pass’que ça a l’air bien. » répondit Alma à la question de son père. « Ma copine Maggie a une petite sœur et même que elle peut lui donner le biberon parfois.
-Alors c’est comme une poupée ? releva-t-elle en posant en refermant le sirop chocolaté.
-Mais naaaaan, fit la petite en secouant la tête, les poupées c’est pas pour de vrai ! Une petite sœur c’est pour de vrai ! »

Avalon tourna la tête vers son mari pour attraper son regard. Ils n’avaient encore jamais abordé cette question-là ensemble, trop occupés à maintenir cette stabilité si précieuse dans leur vie de famille pour imaginer la bouleverser à nouveau.

« Alors moi je veux une sœur. Ou un frère, ajouta Alma, qui n’était pas une enfant bien difficile.
-Tu as déjà une sœur, cariňa, fit remarquer Avalon pour gagner un peu de temps.
-C’est pas pareeeeeil. Tessa déjà elle est pas petite. Elle est presque grande comme moi mais un peu plus. Et puis, ajouta-t-elle avec une petite moue, elle est pas beaucoup là, elle a ses sœurs chez sa maman aussi alors moi je veux une petite sœur qui soit beaucoup là. »

Avalon tendit la main pour déposer une légère caresser sur la joue de sa fille. Cette dernière leva des yeux suppliants vers elle et son cœur se gonfla de cette familière tendresse qui la saisissait dès qu’elle posait les yeux sur Alma.

« Mais tu sais chérie, ton anniversaire c’est dans une semaine et il faut beaucoup de temps pour fabriquer un bébé. Alors je pense que ça ne va pas être possible…
-Mais on peut pas aller le chercher dans un magasin ? » s’étonna Alma en haussant ses petits sourcils.


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Chroniques d'une parentalité en construction [scènettes de la famille Avaloy] Icon_minitimeMer 3 Jan 2024 - 8:48
Assez tôt dans leur relation, Avalon et Roy avaient évoqué le sujet des enfants. Ils se retrouvaient dans une configuration particulière ; Avalon entamait des démarches de demande de tutelle pour sa soeur et Roy se préparait à la naissance de sa première fille, Teresa. Forcément, dans ce contexte, la question d’avoir ou non des enfants ensemble s’était vite posée à eux. Et ils avaient assez naturellement convenu qu’ils se projetaient bien dans une vie de famille, à plusieurs enfants.

Puis Avalon était tombée enceinte, de manière imprévue, beaucoup plus tôt qu’ils n’imaginaient le faire. Tout avait été compliqué à partir du moment où elle avait appris sa grossesse. Ils n’avaient d’abord pas été certains de vouloir garder le bébé. Ils avaient finalement pris la décision de le faire, sans prévoir que cela s’accompagnerait de disputes entre eux. Puis ils avaient failli perdre leur bébé. Quand, enfin, Avalon avait accouché, ils s’étaient fait beaucoup de souci pour leur fille née prématurément. Au moment où ils commençaient à sortir de cette boucle infernale, Alma avait été kidnappée par un vieil ennemi du couple, et leur monde s’était effondré.

Il y avait un avant et un après cet enlèvement. Ni Avalon, ni Roy n’étaient les mêmes personnes depuis. Parmi tous les changements drastiques qu’ils avaient mis en place dans leur vie après cet événement traumatisant, ils avaient vu aussi leurs désirs et leurs projections changer. Ils n’avaient plus parlé de refaire d’autres enfants ensemble, sauf au moment d’acheter leur maison à Oxford, bien trop grande pour un foyer de quatre personnes : ils avaient timidement évoqué le fait que, peut-être à l’avenir, d’autres enfants viendraient occuper ce grand espace.

Voilà où en était leur désir d’agrandir leur famille : un souhait lointain, toujours présent, mais pas assez fort pour s’inviter dans leur quotidien.

C’était ce sujet sensible et délicat qu’Alma venait secouer, avec sa petite voix légère et sa figure innocente. Pour elle, cela ne charriait rien d’autre que l’envie de faire comme ses copines et d’avoir ce qu’elles avaient, à l’instar du dernier jouet à la mode. Pour ses parents, en revanche, c’était le risque de bouleverser un équilibre familial fragile et durement acquis.

Là où Roy se trouva sensible aux arguments d’Alma, ce fut quand elle évoqua Teresa, sa soeur qui vivait aux États-Unis, loin d’eux. Il eut un pincement au coeur à l’entendre regretter qu’elle ne soit pas souvent là. Roy s’y rendait toujours deux fois dans le mois et il emmenait régulièrement Avalon et Alma avec lui, dans cette jolie maison qu’ils avaient achetée à la Nouvelle-Orléans, où ils pouvaient se retrouver en famille avec Teresa. Malgré ces efforts, ce n’était pas un quotidien qu’ils partageaient avec elle et c’était toujours une source de frustration pour Roy.

Il aurait aimé pouvoir vivre avec Teresa, comme il vivait avec Alma. Et il aurait voulu leur offrir cette chance de vivre comme toutes les petites soeurs, sous le même toit.

Alma venait de réveiller une corde sensible chez lui et il fut un peu désolé de la voir faire une moue, pendant que sa mère tentait de lui expliquer qu’elle ne pouvait pas avoir un petit frère ou une petite soeur pour son anniversaire. La question très innocente qu’elle posa le dérida un peu et il songea que c’était une bonne manière de faire diversion. Il en profita au passage pour pratiquer son activité préférée : la taquiner.

« Dans un magasin ? Et comment tu penses que ça se passe, alors, on y va et on demande à avoir un bébé ?
-Eh bah euh… Oui, un grand magasin et… Et on choisit un bébé !
-Et après on va à la caisse et on le paye ? s’enquit t-il, en masquant son sourire en coin derrière sa tasse de café.
-Bah oui !
-Oh et tu crois que ça coûte combien ? » poursuivit Roy, curieux de voir jusqu’où allait sa logique de petite enfant de trois ans.

Alma écarta les doigts de sa main pour compter, les sourcils froncés.

« Euh… » Elle ouvrit toute sa main en la montrant à son père. « Cinq !
-Cinq doigts ?
-Pfff, mais non papa, t’es bête, pouffa t-elle. Cinq gayions !
-Cinq gallions, seulement ! Wow, ça veut dire qu’un bébé, c’est à peine plus cher qu’une poupée ? » fit-il mine de s’étonner, en contournant le bar pour revenir vers elle. Il pinça sa joue. « Tu crois que tu vaux pas plus qu’une poupée alors que t’es le trésor de papa ? »


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Chroniques d'une parentalité en construction [scènettes de la famille Avaloy] Icon_minitimeJeu 4 Jan 2024 - 4:59
Avalon avait toujours imaginé qu’elle aurait plusieurs enfants. Peut-être trois ou quatre, se disait-elle il y a quelques années, lorsqu’elle réfléchissait à son futur hypothétique. Si sa propre fratrie avait longtemps été dysfonctionnelle, elle avait aussi trouvé beaucoup de soutien auprès de ses frères et de ses sœurs et désirait pouvoir donner à ses enfants la chance d’expérimenter ces liens qui pouvaient se révéler très beaux.

Puis elle était tombée enceinte et avait vécu une grossesse compliquée, ponctuée de doutes et de difficultés. La naissance prématurée d’Alma avait été suivie d’un mois d’hospitalisation qui ne lui avait pas permis d’apaiser ses angoisses avant qu’ils ne frôlent la catastrophe lorsqu’elle avait été enlevée dans son berceau, quelques minutes avant sa sortie. Quelque chose s’était brisé en elle ce jour-là et elle n’était plus la même femme depuis. Les longues et nombreuses séances de thérapie lui avaient permis d’appréhender douloureusement ce traumatisme mais Avalon savait qu’elle en serait marquée pour sa vie et que toutes ses ambitions avaient été bouleversées par cet évènement. Roy et elle avaient eu besoin de changer drastiquement de vie après ça, comme pour mettre le plus de distance possible entre eux et ce jour maudit.

Ils avaient lutté pendant des mois et même des années pour retrouver un semblant d’équilibre. Ils étaient heureux désormais et partageaient leur temps entre l’Angleterre et les Etats-Unis.

Mais Avalon redoutait parfois que cet équilibre se fissure à nouveau sur une épreuve trop grande.

Voilà le point sensible où Alma appuyait sans en avoir conscience.

Heureusement, à trois ans, sa capacité de concentration était encore suffisamment limitée pour qu’elle se laisse distraire par les questions de son père. Avalon les observa avec un sourire amusé et attendri sur les lèvres alors qu’Alma souriait joyeusement à son père qui venait de lui pincer affectueusement la joue. Puis elle s’impatienta, visiblement déterminée à ce qu’on lui réponde :

« Mais alors ça coûte combien un bébé ? Plus ?
-Ton papa t’embête, chérie, intervint Avalon. On ne peut pas acheter un bébé au magasin.
-Quoi ? Mais on les trouve où alors ?
-Eh bien, il faut les fabriquer, expliqua-t-elle en reposant sa tasse de café. Un bébé, ça se fabrique dans le ventre d’une maman. Toi, avant, tu étais dans mon ventre. » révéla-t-elle avec un sourire.

Alma se redressa, interloquée.

« Quoi ?? Tu m’as mangé ?! »

Prise de court, Avalon éclata de rire.

« Mais non ! Je… Je t’ai fabriqué dans mon ventre. Au début, tu étais toute, toute petite, comme ça. » montra-t-elle en écartant les doigts. « Et tu es restée pendant neuf mois dans mon ventre et tu as grandis, grandis, grandis… jusqu’à devenir grande comme ça. » expliqua-t-elle en mimant la taille d’un bébé. « Et ensuite tu es née ! »

Alma avait l’air tout à fait ébahie de cette nouvelle. Elle fronçait les sourcils, comme si elle cherchait à assimiler toutes ces informations.

« Alors c’est que les mamans qui fabriquent les bébés ? questionna-t-elle finalement. Dans leurs ventres ?
-C’est sûr qu’on fait la plus grande partie du travail, commenta Avalon avec un sourire railleur pour son mari. Mais c’est le papa et la maman qui fabriquent le bébé.
-Mais comment ? » insista Alma, qui pouvait se montrer redoutablement têtue lorsqu’elle avait une question en tête.



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