« Putain mais vous êtes pas sortables en fait » protesta Roy face à Jayce et Toni qui se chamaillaient pour être plus proches de sa fille, qu’il enveloppait de ses deux bras dans une posture protectrice. « Calmez-vous, ça fait genre trois heures qu’elle connaît ce monde, commencez pas à lui casser les oreilles, déjà ! »

Il adorait ses amis mais qu’est-ce qu’ils étaient bruyants parfois ! La petite bulle de tranquillité dans laquelle il était avec Avalon quelques minutes plus tôt n’était plus qu’un souvenir, face à ces énergumènes. Mais leur enthousiasme faisait plaisir à voir et gonflait le coeur de Roy de joie et de fierté.

« Exactement » rebondit-il pour approuver les propos d’Avalon. « Si c’est pas pour dire qu’elle est merveilleuse, vous pouvez vous t… »

Taire était le mot que Toni ne le laissa pas prononcer en parlant trop vite et pourtant ce conseil lui aurait été utile. Et le fait que Jayce prenne sa défense avec tout cet humour qu’il savait déployer n’empêcha pas Roy de tourner un regard outré sur Toni.

« T’es sérieux, toi ? » s’exclama t-il en lui donnant un coup de coude dans les côtes. « Pas finie, non mais. Je vais te finir, moi, tu vas voir. A la pelle, tu vas manger le sol.
-Oh wow, papa Roy montre les crocs » s’esclaffa Jayce. « T’as intérêt à peser tes mots maintenant, Toni !
-Mais quoi, j’ai rien dit !! »

Dans tout ce vacarme, la voix d’Avalon se détacha pour faire une proposition qui calma Toni. Son indignation laissa place à l’hésitation, tandis que son regard passait d’Avalon, à Alma, en passant par Roy.

« T’es sûre ? J’ai pas envie de… » Il grattait sa nuque, gêné. « De mal la tenir ou de lui faire mal, j’veux dire, elle a l’air… » Et pour une fois, il appliqua le conseil de Jayce en réfléchissant à ses mots. « Toute fragile. »

Roy secoua la tête et entreprit de défaire l’écharpe qui maintenait Alma contre son torse.

« C’est pas compliqué, t’inquiète. Va bien falloir que tu apprennes à la tenir, t’es son parrain, non ? »

Malgré le ton provocateur, Roy affichait un sourire en tendant sa fille vers Toni. Il avait accepté de bonne volonté le voeu d’Avalon de le nommer parrain -même s’il avait d’abord tenté de glisser le nom de Fergus qui avait l’avantage d’être déjà papa et plus responsable. Il avait accepté car malgré sa tendance à se chamailler très souvent avec Toni -ce qu’il faisait beaucoup moins avec Fergus et Jayce- Roy avait toute confiance en lui. Ils étaient comme chiens et chiens, tous les deux : toujours prêts à se bagarrer, mais faits d'une même nature, au fond.

Alors il déposa Alma au creux de ses bras sans craindre pour elle, avec la certitude qu’elle était entre de bonnes mains.

« Tu tiens sa tête dans ta paume et son corps le long de ton bras, comme ça… »

Toni appliquait les conseils de son ami avec beaucoup de précautions, beaucoup plus qu’il n’en avait jamais déployé. Il était un peu gauche, mais Alma ne pouvait qu’être bien soutenue dans des bras aussi enveloppants et forts. Toni garda ses yeux rivés sur le petit bébé pendant quelques instants avant de commencer à la bercer. Quand il releva la tête, il chercha le regard d’Avalon, un sourire large aux lèvres. Un sourire fier.

« Désolé, Av’, mais ma filleule est plus belle que toi. »