Le deal à ne pas rater :
Bon plan achat en duo : 2ème robot cuiseur Moulinex Companion ...
600 €
Voir le deal

Louisiana peaches [Roy ; Joséphine Lavespère ; Isobel]

Isobel Lavespère
Isobel LavespèreChargée de communication
Messages : 1166
Profil Académie Waverly
Louisiana peaches [Roy ; Joséphine Lavespère ; Isobel] Icon_minitimeDim 28 Juin 2020 - 19:56
Spoiler:

27 janvier 2011

La soirée était encore jeune mais l'obscurité était déjà tombée sur le Royaume-Uni. Il pleuvait dru, les gouttes venaient bruyamment s’écraser contre les larges baies vitrées de l’appartement. Isobel était installée sur la méridienne de l’immense canapé du salon, son visage illuminé par la lumière crue de l’écran de son Pear. Un peu distraitement, elle regardait des sites de meubles, à la recherche d’un nouveau tapis pour la chambre d’amis. Quelques cartons égrainaient encore leur nouveau foyer, signe que leur emménagement était tout récent. Elle se sentait encore un peu fourbue du week-end dernier, où ils avaient déballé au maximum leurs affaires avant d’enchainer avec leur semaine de travail. Abel et elle avaient décidé voilà quelques mois de vivre tous les deux mais ils avaient mis un peu de temps à trouver l’endroit idéal - ou plutôt, à accorder leurs violons sur ce qu’ils désiraient. Ils avaient eu un coup de coeur pour ce très grand appartement de Mayfair et ses trois chambres. Elle avait encore l’impression de s’y perdre le matin.

Ses yeux furent attirés par un grand tapis beige, qui semblait épais, et elle se pencha vers Abel, qui était installé un peu plus loin sur le canapé. Elle s’appuya paresseusement contre lui, lui désignant son Pear.

- Regarde, souffla-t-elle, ça serait bien pour l’autre chambre, ça irait bien avec le lit qu’on a choisi, non ?

Mais leur conversation fut tuée dans l’oeuf lorsque le petit appareil se mit à sonner joyeusement, affichant le prénom de sa cousine Joséphine. Isobel fronça les sourcils, un peu surprise de cet appel, un mauvais pressentiment au creux du ventre. Sa cousine ne l’appelait jamais. Est-ce qu’il y avait eu un problème ? Avec leur grand-père ? Elle se redressa, la main d’Abel se posant au creux de son dos dans le même temps. Elle décrocha et une image un peu brouillée de Jo se présenta à eux.

- Tout va bien ?
- Bah oui ! Ah bah bonjour Abel ! Joséphine eut un sourire, comme si elle avait assisté à quelque chose de compromettant. Je vous dérange ?
- Non, pourquoi est-ce que tu appelles ?

Joséphine secoua la tête.

- Bah j’peux téléphoner quand même... Et, devant le vague silence d’Isobel, s’empressa d’ajouter. Je voudrais que tu viennes me chercher à l’AIRPUS parce que je ne sais pas où tu habites ?

Isobel eut un instant d’arrêt. Elle tourna la tête vers Abel, comme pour vérifier qu’elle avait bien entendu.

-  Comment ça ?
- L’AIRPUS de Londres ! Je suis arrivée tout à l’heure et j’voulais te faire la surprise de frapper chez toi mais je ne sais pas où tu vis !
- ... Tu es à Londres ? Pas à la Nouvelle-Orléans ?
- Non ! Je suis en vacances, héhé, je suis venue ici en vacances !

Nouveau silence d’Isy.

-Bah du coup tu viens me chercher ?

Un coup de tonnerre ébranla dans le même temps le ciel de Londres, sonnant le glas de cette soirée tranquille...


« I never knew you were the someone waiting for me »
Métamorphomage
MétamorphomageMoldu
Messages : 2378
Profil Académie Waverly
Louisiana peaches [Roy ; Joséphine Lavespère ; Isobel] Icon_minitimeDim 28 Juin 2020 - 22:38
28 janvier 2011

Louisiana peaches [Roy ; Joséphine Lavespère ; Isobel] 20062809430264872
Joséphine Lavespère, 32 ans, cousine d’Isobel

Joséphine avait passé une excellente journée. Elle s’était réveillée le matin dans un grand lit confortable, dans un appartement silencieux. Sa cousine et Abel étaient partis au travail, la laissant seule pour la journée (ce dont elle ne se plaignait pas.) Elle était restée allongée un long moment dans les draps chauds, savourant l’absence de bruit. Pas de petite voix qui répétait « Maman » sur tous les tons, jusqu’à ce qu’elle se lève. Pas de course dans l’appartement pour être à l’heure à l’école. Pas de déjeuner à préparer, pas de courses à faire. Elle était en vacances. Elle avait décidé cela sur un coup de tête - comme beaucoup de choses dans sa vie - après avoir passé une mauvaise semaine. Elle avait besoin d’un break, mais n’avait pas énormément de sous, certainement pas les moyens de se payer une semaine à Cancún en pension complète, en tout cas. Il y avait ce Portoloin en promotion pour l’Angleterre et elle avait sa cousine là-bas... Alors hop. Elle avait confié sa cadette, Iris, à son père (sans trop lui demander son avis, il l’avait quittée il y a cinq ans, il pouvait bien lui rendre ce service) et elle avait laissé les clés de l’appartement à sa grande, Alice, trop ravie de passer une semaine tranquille elle-aussi.

Elle avait fait sa valise en emmenant un peu n’importe quoi, avait annoncé à tout le monde qu’elle s’en allait prendre l’air et avait débarqué à Londres sous la pluie. Elle avait - comme par hasard - « oublié » de prévenir sa cousine de son arrivée mais hé, comme cela, elle n’avait pas le choix de l’héberger. Elle se doutait bien que Isobel ne serait pas ravie d’être ainsi envahie mais c’était le principe de la famille : être collé avec des gens sans avoir trop le choix, et avec le sourire en plus, s’il vous plaît. Ce que Jo n’avait pas prévu, c’est que sa cousine ait emménagé avec son petit-copain, le fils d’Adeline Laveau. C’était un peu moins confortable de vivre avec Abel mais après tout, elle pouvait faire des compromis. Isobel n’avait qu’à les tenir au courant de ce qui se passait dans sa vie, cela lui apprendrait à être si secrète.

Elle avait trainé toute la matinée dans le grand appartement, lambinant sur le grand canapé, lisant des magasines. Elle avait pris un bain puis avait fouiné dans l’indécent dressing de sa cousine, sortant les belles robes et les jolies étoffes. Elle avait essayé une dizaine de paires de chaussures et avait marché avec dans tout l’appartement, regrettant de ne pas pouvoir sortir sur la large terrasse à cause de la pluie. Vers treize heures, elle avait mangé ce qui’l y avait dans le frigo, regardant des programmes à la télé, amusée par l’accent anglais. Lorsque la pluie s’était calmée, elle était un peu sortie dans le quartier, ravie de découvrir qu’elle pouvait aller à pied voir les célèbres monuments de la ville. Elle s’était prise en photo devant Buckingham Palace et l’avait envoyée à ses cousins, pour qu’ils montrent les images à ses filles. Elle avait voulu leur acheter des petits cadeaux mais n’avait pas encore fait de change, elle n’avait que des dollars. Elle emprunterait sûrement des livres à sa cousine, comme elle n’avait jamais acheté de cadeaux d’anniversaires à ses deux filles... Cela allait compenser ! Dépourvue d’argent, elle était donc rentrée chez Isobel, en se perdant deux fois, et avait pris un café pour se réchauffer, confortablement installée dans la cuisine.

Vers dix-huit heures trente, la porte de l’appartement s’était ouverte et Joséphine avait cavalé jusqu’à Isobel, emmitouflée dans son manteau et son écharpe. Elle se sentait joyeuse, ravie de voir vraiment ses vacances commencer avec quelqu’un qui connaissait la ville.

- T’as passé une bonne journée ? s’enquit-elle (car elle était polie.)

Tout en se déchaussant, Isy hocha la tête.

- Un peu fatiguant. Et toi, qu’est-ce que tu as fait ? Tu ne t’es pas trop ennuyée ?
- Non ça va, mais j’ai hâte de sortir ce soir !
- Ah, tu sors ?

Joséphine secoua la tête.

- On sort ! Je veux découvrir Londres de nuit !

Isobel ouvrit la bouche pour répondre puis sembla se raviser. Elle fit coulisser la porte du placard de l’entrée pour la refermer et se dirigea vers la cuisine, sa cousine sur les talons.

- On peut faire ça vendredi soir, si tu veux, là je suis vraiment fatiguée et j’ai une réunion à huit heures demain matin...
- Mais moi je suis en vacances, je ne veux pas rester enfermée toute la semaine !
- Mais moi je ne suis pas en vacances, Jo, fit remarquer Isy en ouvrant la porte du réfrigérateur pour attraper une bouteille d’eau en verre. Si tu m’avais prévenue... Elle laissa sa phrase en suspens, en référence à la morale qu’elle lui avait fait hier, sur le thème « On ne peut pas débarquer comme cela chez les gens sans les prévenir, ce n’est vraiment pas poli. »
- On peut sortir boire juste un verre, répliqua Joséphine. Nous ne sommes pas obligées de rentrer trop tard ! Ce soir un verre, demain un restaurant, vendredi, boite de nuit.

Isobel fit la moue.

- Je sais que tu es plus vieille que moi mais il faut tout de même s’amuser, dans la vie, signala Jo avec mesquinerie.

Sa cousine soupira, tout en se servant un verre d’eau.

- Si on sort boire un verre, tu me lâches la grappe ?
- Je l’envisagerai, au moins !

*****

C’est une Joséphine toute apprêtée et ravie qui se remontait les marches qui menaient aux Folies Sorcières, apparemment un endroit en vue du pays. Elle portait une robe noire d’Isobel, trop serrée au niveau de la poitrine. Apparemment, les tenues et chaussures qu’elle avait choisi d’emporter ne correspondaient pas au standing du lieu. Elle, elle était bien en short en jean pourtant mais... Elle ne trouvait pas ça désagréable d’être juchée sur une paire de chaussures trop chères dans une robe en soie, au contraire, elle avait largement apprécié son reflet dans le miroir. À ses côtés, Isobel semblait un tout petit moins enthousiaste. Jo n’y prêtait pas attention. Elle avait tout le temps de passer sa soirée dans son canapé à faire elle-ne-savait-quoi, elle, elle voulait s’amuser !

Le lieu était plein de dorures et de monde et Joséphine avait un grand sourire. Elle glissa son bras sous celui de sa cousine, qui finit par lui retourner un sourire, un peu plus détendue. Isobel la guida jusqu’à une salle, avec un imposant bar. Les deux jeunes femmes se glissèrent dans la foule, jusqu’à pouvoir passer commande. Quelques minutes plus tard, elles étaient installées sur une banquette, deux cocktails à la main. Jo eut un soupir de bien-être.

- Voilààà. Là, je suis en vacances.
- Il y a des bars à la Nouvelle-Orléans, signala Isobel, tout en parcourant la foule du regard.
- Ouiii mais pas des pareils. Ce n’est pas pareil.

Sa cousine lui fit alors signe qu’elle revenait et se glissa en dehors de la banquette. Elle se dirigea d’un pas assuré vers quelqu’un qui était de dos, posant sa main sur son épaule. Elle fut de retour quelques secondes plus tard, en compagnie d’un homme à qui Joséphine adressa un sourire rayonnant.

- Roy, ma cousine Jo, Joséphine, mon ami Roy. Joséphine a débarqué hier à Londres, elle est en vacances.
- Et je vais en profiter !
Avatar:
Roy Calder
Roy CalderPropriétaire d'un haras
Messages : 2891
Profil Académie Waverly
Louisiana peaches [Roy ; Joséphine Lavespère ; Isobel] Icon_minitimeDim 12 Juil 2020 - 1:07
Les soirées s’enchaînaient et se ressemblaient sous le regard tantôt morne, tantôt anxieux de Roy qui voyait défiler ses clients soir après soir, dans une infernale boucle. Il lui semblait que sa vie allait à cent à l’heure, qu’il en était le spectateur, plus que l’acteur, dépassé qu’il était par ses pensées, ses doutes, sa douleur. Il n’y avait aucun bouton pause nulle part, il était pris dans un engrenage qu’il avait lui-même créé et il avançait coûte que coûte, parce que faire machine arrière serait plus difficile encore. Roy n’était de toute manière pas homme à revenir sur ses pas alors il avançait et s’efforçait de détricoter sa situation. L’heure de sa confrontation avec Norvel se rapprochait jour après jour, en peaufiner les détails était la seule chose qui le gardait actif et l’empêchait de ne pas sombrer.

Si Roy était tant obsédé par ce plan, c’était parce qu’il avait désespérément besoin d’une victoire. Pas seulement pour son gang, pour retrouver la confiance de ses hommes qui prenaient des coups et commençaient à s’agiter. C’était aussi pour lui, parce qu’il avait renoncé à une relation qui avait été son pilier, cette dernière année, qu’il sentait désormais un énorme vide en lui et qu’à défaut de pouvoir le remplir, Roy avait au moins besoin de s’assurer qu’il n’avait pas fait ce sacrifice inutilement. Il voulait une victoire, pour se rappeler que cette vie de dangers et d’adrénaline en valait la peine.

Il voulait une victoire, parce que rien ne marchait correctement, ces derniers temps. Il se sentait aux prises de ses angoisses, enchaînait des conquêtes d’un soir sans saveur, abusait de la monalisa, ce qui lui faisait du bien sur le coup, mais à long terme, le rendait plus nerveux et irrité encore. Avec ses amis, son attitude était instable : un soir, il prenait la mouche pour un rien, le lendemain, il recherchait ardemment leur compagnie pour se changer les idées.

Ce soir, Roy avait plutôt envie de compagnie, aussi fut-il agréablement surpris de découvrir que la main qui s’était posée sur son épaule appartenait à Isobel. Habituellement, elle venait plutôt en fin de semaine, et ces derniers temps, moins souvent encore – à son grand regret- car elle était en plein déménagement dans Londres avec son compagnon. Il n’avait à priori aucune raison de rencontrer Isobel en pleine semaine, et pourtant elle le saluait, avec un cocktail à la main.

« Hey, qu’est-ce qui t’amène ici ? C’est la fête au Ministère ou quoi ? » la salua t-il à son tour.

Un pot de départ en semaine, cela pouvait arriver. Mais Isobel ne semblait pas accompagnée de ses collègues. Elle était bel et bien venue avec quelqu’un, comme Roy le vit assez vite, une jeune femme plantureuse qu’il ne connaissait pas et qu’il était pourtant persuadé d’avoir déjà vue quelque part. A l’instant où Isobel fit les présentations, l’évidence apparut à Roy.

« Ah. Voilà pourquoi le visage m’est familier. Je ne sais pas si je t’ai déjà vue sur des photos ou si c’est juste parce que vous avez clairement des gènes en commun toutes les deux, mais ça fait sens, commenta t-il avec un bref sourire en coin, en les rejoignant sur une des banquettes. Enchanté, Roy Calder, je suis le gérant des lieux. »

Il avait perçu une légère note de contrariété dans le ton d’Isobel sur le mot « vacances » et esquissa un coup d’œil dans sa direction. Il connaissait assez sa meilleure amie pour deviner qu’elle ne devait pas être très ravie d’accueillir sa cousine qui avait « débarqué » la veille, alors qu’elle était en plein dans sa semaine de travail. Joséphine, elle, semblait rayonnante, en revanche, et prête à profiter de sa soirée. En hôte bien élevé, Roy fit un signe à un des serveurs pour qu’il lui apporte un verre et quelques tapas pour les deux Lavespère qu’il ne put s’empêcher de détailler quelques secondes, simultanément. Elles avaient vraiment un air de famille, c’était impressionnant. Les mêmes yeux sombres en amande, le même nez retroussé, la même peau hâlée. En tout cas, rencontrer une nouvelle personne était plutôt le genre de distraction que Roy attendait ce soir et le fait qu’elle soit la cousine d’Isobel le rendait particulièrement curieux :

« Alors, c’est la première fois que tu viens à Londres, Joséphine ? Combien de temps tu restes ici ? »


Roy Calder

Walking on the sunny side

KoalaVolant
Métamorphomage
MétamorphomageMoldu
Messages : 2378
Profil Académie Waverly
Louisiana peaches [Roy ; Joséphine Lavespère ; Isobel] Icon_minitimeMar 14 Juil 2020 - 19:51
Louisiana peaches [Roy ; Joséphine Lavespère ; Isobel] 20062809430264872
Joséphine Lavespère, 32 ans, cousine d’Isobel

Joséphine fut agréablement surprise de voir sa cousine revenir accompagnée d’une figure plutôt charmante. Un bel homme, fringuant, bien habillé, qui dégageait une aura de confiance qui lui plaisait. Elle se redressa, bomba légèrement le torse et lui sourit. Lorsqu’il mentionna d’une voix chaude qu’il l’avait peut-être déjà vue sur des photos, elle haussa les sourcils. Isobel s’amusait à montrer des photographies d’elle en Angleterre ? Il y avait effectivement la possibilité qu’elles se ressemblent simplement, avec sa cousine, ce qui était un peu le cas, mais l’idée des photos était plus tentante. Elle tendit sa main à Roy, un peu flattée d’être présentée au gérant de ce grand établissement. Ça, c’était très chic.

- Enchantée, Jo, du coup, glissa-t-elle. C’est un bel endroit ! ajouta-t-elle en promenant ses yeux très sombres autour d’elle, impressionnée par les dorures au plafond.

Roy se glissa à côté d’elle et Joséphine se rapprocha d’Isobel, qui se décala un peu plus. Sans faire de remarque sur le sujet - Madame n’aimait pas qu’on la colle, visiblement - Joséphine observa avec plaisir le gérant faire signe à un serveur qui s’empressa d’obéir et de leur rapporter quelques tapas. Marius, leur cousin, gérait le Rousseau’s, le bar familial qui donnait sur le Chaudron, mais si elle se mettait à exiger des choses comme ça, leur jeune serveuse, Ambre, allait lui sûrement lui faire un doigt d’honneur. Ici, ce n’était pas le même standing. Ravie d’être le centre de l’attention, Joséphine se pencha un peu par dessus la table pour répondre à Roy, remettant ses cheveux noirs derrière son épaule.

- C’est même la première fois que je viens en Europe ! J’avais besoin d’air, je voulais sortir de la Louisiane, Isobel a accepté de m’héberger et... tadaaa !

Elle sentit Isy secouer la tête à ses côtés.

- Tu as débarqué sans m’en parler, et tu m’as appelée, je n’allais pas te laisser dehors...

Joséphine fit un signe de la main.

- Trop généreuse. Enfin, breeeeef, reprit-elle avec un grand sourire, je suis là pour deux semaines et j’ai vraiment envie de m’amuser. Ça tombe bien, ici, ça a l’air très amusant...
Roy Calder
Roy CalderPropriétaire d'un haras
Messages : 2891
Profil Académie Waverly
Louisiana peaches [Roy ; Joséphine Lavespère ; Isobel] Icon_minitimeMar 14 Juil 2020 - 20:51
Avec son voyage à la Nouvelle Orléans qu’il avait fait l’été dernier en compagnie d’Isobel, Roy avait eu l’occasion de faire connaissance avec plusieurs Lavespère, mais pas cette jeune femme, lui semblait-il. Il en était même sûr, car Joséphine était le genre de femme qu’on remarquait très vite. Elle parlait avec assurance, elle avait un joli minois et surtout une poitrine particulièrement généreuse qu’il aurait certainement notée s’il l’avait croisée là-bas. Les femmes Lavespère étaient décidément dotées d’un beau patrimoine génétique mais Roy s’en garda de faire la remarque, préférant observer la dynamique entre les deux cousines. Elles devaient avoir le même âge, ou presque, supposa t-il en les regardant. Il connaissait assez Isobel pour percevoir la légère exaspération dans son ton, quand elle s’adressa à sa cousine. Elle s’était donc sentie obligée d’accueillir Joséphine et la faire sortir pour qu’elle puisse découvrir le pays, ce qui expliquait sa présence inhabituelle dans son cabaret, en pleine semaine.

Roy, qui cherchait justement de quoi se distraire, y vit une occasion de leur faire passer une bonne soirée à tous les trois. Il décida alors de faire en sorte de redonner le sourire à sa meilleure amie et de faire découvrir à Joséphine son établissement qui semblait l’intriguer. Avec une aisance due à l’habitude, Roy en vendit les qualités :

« Je ne sais pas si Isobel a eu le temps de tout te montrer mais oui, on offre toutes sortes de divertissements ici. Là, c’est la partie bar avec le casino à l’arrière. Quand tu traverses le hall, la pièce en face abrite le cabaret, avec plusieurs représentations : beaucoup de spectacles de danse, on a toute une équipe de danseuses professionnelles, mais aussi du théâtre, des orchestres… Le tout dans un lieu d’exception, puisque cet établissement était historiquement un cabaret qui a connu ses premières heures de gloire et a fait rayonner Bristol pendant les années folles. Il est petit à petit tombé en désuétude quand les premiers propriétaires des lieux sont décédés, jusqu’à ce qu’une de leurs héritières décide de le remettre sur pied… Mon associée, du coup, expliqua t-il, Mildred Magpie. Ca ne m’étonne pas qu’Isobel t’ait amenée ici car c’est son endroit préféré du pays, n’est-ce-pas, fanfaronna t-il en jetant un coup d’œil à son amie. Même si elle passe son temps à me bassiner sur le fait que les casinos de Las Vegas sont meilleurs… Alors que franchement, c’est quand même moins classe qu’ici » répliqua t-il avec son habituel sourire narquois.  


Roy Calder

Walking on the sunny side

KoalaVolant
Métamorphomage
MétamorphomageMoldu
Messages : 2378
Profil Académie Waverly
Louisiana peaches [Roy ; Joséphine Lavespère ; Isobel] Icon_minitimeMar 14 Juil 2020 - 22:04
Louisiana peaches [Roy ; Joséphine Lavespère ; Isobel] 20062809430264872
Joséphine Lavespère, 32 ans, cousine d’Isobel

Joséphine tourna son regard vers Isobel lorsque Roy la mentionna, suggérant qu’elle lui avait peut-être montré le reste de l’établissement. Sa cousine sirotait son cocktail à la paille et elle fit non de la tête.

- Nous venons juste d’arriver, comme je bosse demain matin, je me disais qu’on ne resterait pas trop tard.

Elle eut un haussement de sourcils à l’égard de son ami, comme pour lui faire passer un message. Mais Joséphine n’avait pas tellement envie de l’entendre : peut-être que Isobel n’était pas très sorties et divertissements, peut-être que elle et Abel aimaient faire des choses pénibles comme aller dans au musée du tire-bouchon ou autre activité mais elle avait bien l’intention de dévergonder un peu la sage Isobel Lavespère. Les Folies Sorcières portaient bien leur nom et étaient remplies d’activités plus divertissantes les unes que les autres. Le casino, notamment, attirait pas mal Joséphine. Rien ne sonnait plus vacances que de jouer au casino ! Cela avait un côté un peu glamour qui lui plaisait beaucoup. Évidemment, elle pouvait y jouer à la maison aussi, le casino du Harrah's était gigantesque mais elle le connaissat par coeur, cela n’avait plus le même charme. Quant au casino flottant qui remontait le Mississippi, elle n’y mettait jamais les pieds : tout le monde savait que c’était un attrape-touristes. Ici, elle avait envie de voir le Cabaret, voir si cela différait vraiment de chez elle et découvrir la manière de faire la fête à l’anglaise !

- Je serai bien curieuse de voir le casino, minauda Joséphine et elle eut l’impression de sentir Isobel s’agacer. Surtout avec le patron !

Visiblement, ce n’était pas sa cousine qui allait lui faire le grand tour, même si elle connaissait bien les lieux. La remarque de Roy tira un sourire en coin à Isy qui haussa les épaules.

- Ils sont peut-être moins « classes » mais ils sont mille fois plus impressionnants, je sais que tu le sais, j’ai vu ta tête quand nous sommes allés au Venitian.

Un éclair de compréhension frappa Joséphine.

- Aaah mais c’est toi l’ami d’Isy Louise qui est venu cet été, qui est passé au Carré ! J’ai entendu parler de toi... Je n’étais pas là, j’étais en vacances avec mes filles en Floride mais j’ai vraiment entendu parler de toi...
- Tout le monde parle, au Carré, atténua Isobel. Ça les occupe.
Roy Calder
Roy CalderPropriétaire d'un haras
Messages : 2891
Profil Académie Waverly
Louisiana peaches [Roy ; Joséphine Lavespère ; Isobel] Icon_minitimeMar 14 Juil 2020 - 22:58
Isobel n’avait pas très envie d’être ici, en tout cas pas en compagnie de sa cousine, comprit Roy à sa réponse accompagnée d’un regard équivoque. Elle avait accepté de prendre un verre par politesse certainement, mais n’avait pas envie de s’éterniser. Roy ne put s’empêcher de la taquiner un peu, en attrapant le cocktail que le serveur venait de déposer devant lui :

« Ah, c’est signe de la vieillesse qui approche, ça, Isy. Je t’ai connue plus fêtarde en semaine, dis-moi. »

Lui, il avait bien envie de profiter plus longtemps de la présence de sa meilleure amie, qu’il voyait bien moins souvent ces derniers temps, à son grand regret et parfois même, un peu agacement : Isobel semblait filer le parfait amour avec son archimage, avec qui elle avait récemment emménagé. Avec le déménagement, elle avait moins le temps, disait-elle, ce que Roy pouvait comprendre, mais une part de lui ne pouvait s’empêcher de penser que ça commençait par cette excuse, puis qu’il y en aurait d’autres : la fatigue du travail, les choses à faire à la maison, Abel qui ne voulait pas sortir ou était malade, et même qui savait, des enfants à coucher un jour ? Isobel semblait bien partie pour une longue vie de couple stable qui l’obligeait à séparer son temps entre son partenaire et ses amis, chose qu’elle n’avait jamais faite jusque là et que Roy appréhendait un peu, au fond, surtout maintenant qu’il se sentait si désespérément seul…

Il n’avait donc pas très envie de se séparer trop vite de sa compagnie et était assez curieux de découvrir celle de Joséphine. Un sourire fendit ses lèvres face à la requête qu’elle fit.

« On pourra faire un tour… rapide, promit-il en échangeant un bref regard avec Isobel. Parce que l’édifice est impressionnant, reconnut t-il au sujet du Vénétian, mais c’est pas le nombre d’étages qui fait la qualité de l’établissement, madame. »

« C’est pas la taille qui compte » aurait-il pu dire, s’il n’avait pas banni cette expression de son vocabulaire. Le commentaire de Joséphine attira son attention et le surprit autant qu’elle l’amusa. Face à l’insistance qui mit la jeune femme dans sa phrase, Roy se devait de rebondir, curieux de savoir ce qu’elle avait entendu :

« Oui, c’était moi, je pense que c’est là-bas que j’ai dû apercevoir des photos de toi, d’ailleurs. Alors tu as entendu parler de moi, vraiment ? Et qu’est-ce qu’on a dit sur moi ? Du bien, j’espère ? »


Roy Calder

Walking on the sunny side

KoalaVolant
Métamorphomage
MétamorphomageMoldu
Messages : 2378
Profil Académie Waverly
Louisiana peaches [Roy ; Joséphine Lavespère ; Isobel] Icon_minitimeMar 14 Juil 2020 - 23:27
Louisiana peaches [Roy ; Joséphine Lavespère ; Isobel] 20062809430264872
Joséphine Lavespère, 32 ans, cousine d’Isobel

Joséphine eut un rire sonore lorsque Roy lança à Isobel qu’elle semblait vieillir à ne pas vouloir faire la fête en semaine. Elle ouvrir grand les bras, comme pour faire une démonstration.

- C’est exactement ce que je lui ai dit ! Elle était plus marrante à l’adolescence...

Elle avait en tête toute une liste de frasques commises par sa cousine, un peu rapportée par le ouï-dire. Elle n’avaient pas grand-chose de différence, deux ans et demi, mais à l’adolescence, cela faisait beaucoup. Lorsque Isobel avait quinze ans, elle fréquentait des personnes de son âge, comme leur cousine Michelle, ou plus âgées, comme Abel et Alexandre Laveau. Elle n’avait pas envie de traîner avec sa petite cousine Joséphine et elle s’était retrouvée exclue de cette petite bande qu’elle admirait un peu trop. Elle avait tendance à coller à leurs baskets mais était sans cesse repoussée. Alors, pour compenser, elle écoutait tout ce qu’on disait sur le sujet et, à l’époque, il y avait beaucoup à dire sur la fille pas très bien élevée de la tante Sophie un peu folle. Vingt ans étaient passés, ou presque, et sa cousine Isobel semblait bien loin du souvenir qu’elle en gardait. Elle aurait par exemple pu attendre que Isy s’énerve, comme elle le faisait à quinze ans dès qu’on émettait la moindre critique, mais elle n’en fit rien, se contentant de hausser un sourcil, le regard un peu moqueur.

- Que voulez-vous, certains ici ont de vrais métiers et doivent se lever le matin.

Un peu vexée, Joséphine fronça les sourcils.

- J’ai un vrai métier, j’en ai même deux, c’est pas la peine de crâner parce que tu bosses dans un bureau... Et Roy, reprit-elle comme si elle défendait un ami de longue date, a un vrai métier aussi, il a cet endroit ! Descends un peu plus ton verre, ça va te rendre aimable.

Elle la gavait un peu, avec ses grands airs. Ce n’était pas parce que Madame avait des chaussures très chères et un grand appartement à Londres maintenant qu’elle pouvait se croire mieux que tout le monde, elles venaient du même endroit. Bêcheuse, va. Vexée comme un pou, Joséphine se détourna ostensiblement de Isobel pour s’intéresser uniquement à Roy, qui était bien plus agréable ce soir.

- Tu te sens attaquée toute seule, Joséphine, répliqua sèchement Isobel. Tu es en vacances, c’est tout ce que j’ai dit. Descends un peu de ton complexe d’infériorité, ça va te rendre aimable.

Un silence gênant s’établit quelques secondes à table. Jo avait envie de répliquer quelque chose mais elle était polie, elle, et n’allait pas régler ses comptes devant l’ami d’Isobel. Par contre, à la maison, elle allait lui en foutre du complexe d’infériorité. Qu’est-ce qu’elle voulait dire par là, d’abord ?

Sa cousine sembla vouloir reprendre les rennes de la conversation en revenant sur les casinos de Las Vegas, mais son ton était moins enjoué que précédemment.

- Certes, mais cela ne veut pas dire que les Folies peuvent rivaliser avec nos grands casinos américains. Cherche pas, tu es en minorité ce soir, ajouta-t-elle avec un bref regard pour Joséphine, comme pour apaiser les choses.

Pas vraiment décidée à saisir la perche d’Isy, Jo détourna volontairement son visage pour s’intéresser uniquement à Roy. Elle lui sourit - parce qu’elle était aimable et agréable à fréquenter, elle - et se pencha vers lui, le menton appuyé dans la main.

- Oui, j’ai entendu parler de toi, confirma-t-elle, tu as fait ton petit effet apparemment, tu as un profil intéressant. Et en plus, tu es bien plus agréable que celle-là donc cela apportait un peu de positif à sa venue, pour une fois, balança-t-elle, sans pouvoir s’en empêcher. Isobel avala littéralement de travers sa gorgée de cocktail, toussotant. En tout cas, tu as une aura intense, c’est... captivant.



Roy Calder
Roy CalderPropriétaire d'un haras
Messages : 2891
Profil Académie Waverly
Louisiana peaches [Roy ; Joséphine Lavespère ; Isobel] Icon_minitimeMer 15 Juil 2020 - 22:55
Roy avait trop souvent été spectateur –et surtout acteur- de scènes de discorde familiale pour ne pas la percevoir là où il y en avait. Des étincelles électriques commençaient à jaillir entre les deux cousines, qui se piquaient derrière des sous-entendus, voire des attaques frontales. Un peu surpris par la vivacité avec laquelle Joséphine rebondit pour se défendre sur son métier –un sujet sensible visiblement- il fut encore plus stupéfait par la manière avec laquelle Isobel prit la mouche et jeta un froid dans la conversation. Bonne ambiance, songea t-il, avec une légère envie de rire, toutefois. Les scènes de discorde dont il était témoin éveillaient le troll qui sommeillait en lui et avaient plus tendance à l’amuser qu’à le gêner. Tous ses amis pouvaient le dire à son sujet, il était le pire ami dans ce cas de figure, à attiser les flammes et compter les points plutôt que chercher à apaiser la situation. Toutefois, il n’était pas assez proche de Joséphine pour se permettre ce genre de familiarité, donc il se contenta de les regarder en masquant un léger sourire derrière son verre.

« Je vois qu’il y a quelques comptes à régler par ici… »

Ne vous gênez pas pour moi, semblait t-il son regard narquois mais Isobel eut la présence d’esprit de rebondir sur des sujets moins sensibles, et même chercher à ramener sa cousine de son côté.

« N’empêche que c’est mon casino que tu viens squatter régulièrement, Isy, alors je sais que tu l’aimes » répliqua t-il en haussant négligemment les épaules.

Plutôt que de soutenir sa cousine dans son patriotisme, Joséphine préféra alpaguer Roy et piquer sa curiosité sur ce qu’elle avait entendu à son sujet à la Nouvelle-Orléans. Roy avait beaucoup apprécié ce voyage, qui lui avait fait voir certains aspects de la vie d’Isobel qu’elle avait toujours tenus plus ou moins secrets, sur lesquels elle s’exprimait peu. Il avait vu une grande marque de confiance dans le fait qu’elle lui présente cette famille qu’elle avait reniée pendant des années et avec qui elle avait toujours des rapports compliqués, mais qu’elle aimait malgré tout à sa manière. Roy avait bien perçu sa tendresse se manifester envers certaines personnes, notamment son grand-père, un vieil homme sympathique qui les avait aimablement accueillis chez lui. Il avait perçu aussi cette piquante et intrigante rivalité entre les sorcières là-bas, et paradoxalement, cette unité dont elles faisaient preuve face aux étrangers et cette méfiance dans leurs regards. Pour la première fois de sa vie, Roy avait atterri dans un lieu où il trouvait les hommes plus ouverts et accueillants que les femmes. Et pourtant, quelque chose l’attirait fortement chez ces femmes, une chose sans doute assez similaire à ce qui l’avait attiré par le passé chez Isobel, une chose assez indéfinissable qui tenait au mystère dont elles se paraient, à cette assurance qu’elle dégageaient, cette force dans leurs mains traversées d’une magie obscure, ces yeux sombres et perçants, qui semblaient vous fouiller jusqu’au fond de votre âme.

C’était ce que dégageait aussi Joséphine face à lui, avec son franc-parler, son léger sourire, sa voix grave et ses yeux noirs qui le sondaient. Sans même y réfléchir, sans même noter que sa propre voix changeait un peu, Roy se laissa emporter par ses vieux réflexes en répondant, avec le même sourire en coin, en accrochant le regard de Joséphine :

« Un profil intéressant et une aura intense hein… Je ne sais pas si je dois me sentir flatté ou si je suis juste un rat de laboratoire divertissant à observer. »


Roy Calder

Walking on the sunny side

KoalaVolant
Isobel Lavespère
Isobel LavespèreChargée de communication
Messages : 1166
Profil Académie Waverly
Louisiana peaches [Roy ; Joséphine Lavespère ; Isobel] Icon_minitimeSam 18 Juil 2020 - 23:39
Isobel secoua la tête lorsque Roy suggéra que Joséphine et elle avaient quelques comptes à régler. Elle n’avait pas envie de s’étendre sur le sujet auprès de son ami, surtout qu’elle n’était pas très au clair avec elle-même. Dès que sa famille entrait en compte, elle était tendue. La présence de sa cousine la mettait dans un état de nerfs certain : elle était à l’affût du moindre dérapage possible. Elle n’avait pas vraiment confiance en Jo, elle ne savait pas ce qu’elle pouvait dire, elle ne savait pas ce qu’elle allait dire... Ici, en Angleterre, elle maîtrisait son image avec attention et elle n’avait pas envie que des détails inconvenants sur son enfance ou sa vie à la Nouvelle-Orléans ne ressorte. Surtout qu’elle avait l'impression que sa famille la voyait toujours comme elle était il y a dix-sept ans, une gamine pénible, pédante et perturbée. Il suffisait de voir la manière dont Joséphine lui avait sauté au cou parce qu’elle avait eu le malheur de dire qu’elle travaillait ! Sa cousine l’avait tout de suite pris comme une virulente critique à son égard, alors que c’était une plaisanterie. Elle réagissait comme si elle était encore cette adolescente qui passait sa vie à critiquer le coven et ses membres. Elle savait, en plus, que Jo se sentait attaquée dès qu’on mentionnait sa situation de vie (parce qu’elle était devenue mère très jeune, parce qu’elle avait mis du temps à trouver sa voie professionnelle...) et elle montait au créneau, comme si tout était une attaque personnelle.

Isobel ruminait ses pensées en sirotant son cocktail, peu détendue. Elle n’avait pas envie de s’embrouiller avec sa cousine, pourtant, mais elle n’arrivait pas à se calmer. À chaque fois c’était la même chose : elle était nerveuse, donc plus agressive, donc les choses se passaient mal. C’était comme si, dans le fond, elle revenait à ses réflexes d’adolescente quand elle était avec eux. Ils la voyaient encore comme la Isobel « d’avant », cela la rendait folle et elle se retrouvait donc à agir comme la Isy d’avant, celle qu’elle voulait justement fuir. Elle se sentait coincée dans ce cercle et c’était compliqué à gérer, surtout ici. À la Nouvelle-Orléans, elle n’avait pas grand-chose à perdre, mais ici, c’était son monde, sa nouvelle vie, sa vie d’adulte. Elle n’avait vraiment pas envie que des fantômes de son passé viennent salir son image ou bien que sa famille envahisse son espace. La présence de Joséphine ce soir, c’était déjà beaucoup pour elle, alors si en plus elle lui sautait à la gorge... Isy souffla du nez et essaya de se reconcentrer sur la conversation, dans l’espoir de sauver un peu la soirée.

- Je n’ai pas trop le choix, répliqua-t-elle donc à Roy, haussant les épaules. Tu voudrais que j’aille où ? Au Chaudron Baveur, peut-être ?

La conversation aurait pu reprendre un tournant agréable, si Joséphine n’avait pas sauté sur l’occasion pour lui envoyer encore une pique. Outrée, Isobel en avala sa gorgée de travers. Elle toussota à plusieurs reprises pour s’en remettre, dans l’indifférence la plus totale. Son regard très noir se posa sur sa cousine. Sympa, dis donc. Elle revenait voir sa famille, traversait l’Atlantique mais sa présence était visiblement désagréable. Le seul point positif de sa venue, c’était qu’elle amenait des gens, selon Joséphine... Mais quelle garce, songea-t-elle. Elle en avait du culot, quand même. Sa présence était désagréable mais par contre, quand elle débarquait chez elle sans prévenir, sans s’annoncer, là, il n’y avait pas de souci. Vivre dans son appartement pendant deux semaines, logée, nourrie, blanchie, pas de souci, par contre, la supporter au sein du Carré, c’était visiblement trop demander ! Elle mobilisa toutes ses forces pour ne pas répondre à Joséphine, qui ne lui accordait de toute manière plus aucune attention.

Sourcils froncés, Isy pouvait bien observer que Roy s’était penché légèrement vers sa cousine. Le ton de sa voix avait changé, son timbre s’était fait plus bas, plus grave. Il avait son petit sourire en coin qu’elle connaissait bien, car il lui avait fait le coup seize mille fois. Joséphine, elle, ne semblait pas indifférente à tout cela, son aura le criait pour elle. Elle s’était un peu penchée par dessus la table aussi, mettant comme par hasard une partie charnue de son anatomie en valeur. Et bien carrément. Ça se dragouillait sous ses yeux, maintenant. Roy avait un sacré culot quand même, pour se permettre de draguer Jo sous ses yeux. Elle n’était pas surprise, elle le connaissait par coeur, mais quand même. Outrée, un peu.

- Je n’ai pas encore décidé moi-même, souffla alors Joséphine, calant une mèche de cheveux derrière son oreille.

« Ne vous gênez pas pour moi », aurait alors pu dire Isobel, qui adorait être la cinquième roue du carrosse. Cela aurait eu au moins le mérite d’être direct. À la place, elle préféra lancer, innocemment :

- Oh, Jo, tu n’avais pas dit que tu appellerai Iris après sa journée d’école ? Il va être quinze heures à la Nouvelle-Orléans, là, le décalage horaire... Et de reprendre, à l’adresse de Roy. Joséphine est maman, deux filles. Iris est trop mignonne, tu verrais, toujours dans les pattes des adultes !

Connaissant Roy, il trouverait soudain tout cela moins séduisant.


« I never knew you were the someone waiting for me »
Roy Calder
Roy CalderPropriétaire d'un haras
Messages : 2891
Profil Académie Waverly
Louisiana peaches [Roy ; Joséphine Lavespère ; Isobel] Icon_minitimeLun 20 Juil 2020 - 22:04
« Le Chaudron Baveur ? s’offusqua Roy. Comme si cet endroit pouvait être comparable à une vieille taverne en ruines, putain, tu fais aucun effort, Isy. »

Il mettait bien trop d’argent dans la rénovation et la décoration de ce cabaret casino pour accepter une comparaison aussi vulgaire. De l’avis tout à fait objectif de Roy, il n’existait aucun établissement comparable à celui des Folies Sorcières dans le monde sorcier britannique et c’était bien pour ça qu’ils attiraient des clients de tout le royaume, jusqu’en Ecosse. Mais il ne s’évertua pas à l’expliquer à Isobel pour la dixième fois, car il connaissait bien sa mauvaise foi, radine de compliments, et surtout très chauvine. A l’entendre, rien n’était mieux que les Etats-Unis et pourtant, Roy constatait qu’elle se plaisait à rester en Angleterre depuis des années, même maintenant qu’elle avait retrouvé sa famille et qu’elle sortait avec son ami d’enfance originaire du même coin. Il savait qu’Isobel et son copain avaient acheté un appartement dans Londres, ce qui, aux yeux de Roy, signait un certain projet de vie : Isobel était bien partie pour rester sur le territoire britannique.

Quant à Joséphine, elle avait visiblement envie de changer d'environnement et parler du lieu qu’elle découvrait, mais surtout de son gérant qui se trouvait sous ses yeux. Le ton qu’elle prit, la manière dont elle se mit à sourire et à le regarder titillèrent un instinct bien entraîné chez Roy qui sentit qu’il avait tapé dans l’œil de Joséphine. Il en prenait seulement conscience et n’en était pas encore à l’étape de savoir ce qu’il souhaitait faire de cette situation. Mais quoi qu’il aurait pu décider, Isobel lui coupa l’herbe sous le pied en dévoilant une information que Roy n’aurait pas pu deviner à son propos.

« Ah » fut sa première réaction mentale, tandis que son regard détaillait de haut en bas Joséphine, qui ne ressemblait pas du tout à une maman de deux filles assez âgées pour aller à l’école. Elle était trop bien foutue pour cela, soufflait une voix pleine de clichés en lui. En tout cas, si Joséphine commençait à éveiller son intérêt, cette nouvelle information tiédit un peu son regard sur elle, car la même voix intérieure lui rappelait qu’il préférait les femmes libres comme l’air et pas celles qui avaient des enfants et un mari sur le dos, ou pire encore : le fantôme d’un mari qu’elles cherchaient désespérément à remplacer.

Bah, songea t-il avec détachement, en buvant une gorgée de son verre. C’était quand même agréable de faire la connaissance d’une autre Lavespère, alors il renchérit :

« Deux filles, vraiment ? Je comprends mieux ce besoin de prendre un peu d’air, taquina t-il gentiment. Alors, qu’est-ce que vous avez prévu de faire, toutes les deux, pour ces vacances improvisées ? »


Roy Calder

Walking on the sunny side

KoalaVolant
Métamorphomage
MétamorphomageMoldu
Messages : 2378
Profil Académie Waverly
Louisiana peaches [Roy ; Joséphine Lavespère ; Isobel] Icon_minitimeMar 21 Juil 2020 - 0:52
Louisiana peaches [Roy ; Joséphine Lavespère ; Isobel] 20062809430264872
Joséphine Lavespère, 32 ans, cousine d’Isobel

Joséphine n’avait pas vraiment la référence du Chaudron Baveur, qui devait être un bar. En tout cas, Roy avait l’air contrarié que Isobel y compare son établissement. Cette dernière se contenta d’avoir un sourire en coin, haussant les épaules. Désireuse de ne plus se sentir exclue et d’être intégrée dans la conversation entre les deux amis, Jo se pencha un peu vers Roy, dégainant son plus beau sourire. Pour être tout à fait franche, elle trouvait Roy plutôt séduisant, il était son type d’homme. Les cheveux et les yeux sombres, le teint foncé, pas trop grand mais avec des muscles qui se dessinaient sous sa chemise noire. L’idée d’une petite amourette de vacances était plutôt tentante. Loin des États-Unis, sans personne pour l’observer, elle avait des envies de liberté. Elle était séparée du père de sa fille cadette depuis cinq ans, avait eu quelques histoires entre temps, qui n’avaient rien donné, alors rien ne la retenait. Elle s’était faite toute belle ce soir, elle se sentait jolie dans la robe empruntée à sa cousine, elle était un peu euphorique, entre son verre, le décalage horaire et ce nouveau lieu qu’elle découvrait. Elle sentait qu’elle pouvait peut-être arriver à quelque chose avec Roy.

Enfin... Si Isobel ne lui cassait pas son coup. La mention de ses filles lui tira un regard outré. Est-ce qu’elle l’avait fait exprès ou est-ce que cela venait juste de lui revenir à l’esprit ? Elle avait effectivement dit avant de sortir qu’il faudrait qu’elle appelle ses filles, pour discuter avec elles de leurs journées respectives. Elle était peut-être en vacances, mais elle n’était pas une mère indigne, quand même. Malgré cela, elle n’avait pas forcément l’intention de parler de ses enfants à l’homme avec qui elle espérait fricoter. Elle savait que cela avait tendance à les faire fuir, comme s’ils allaient devenir papas en un quart de seconde s’ils la fréquentaient. Elle le savait, dès qu’il y avait des responsabilités, les mecs aimaient bien établir un record de vitesse dans la fuite. Agacée, elle eut l’impression de sentir Roy se refroidir lorsqu’elle passa brièvement son aura en revue. Super, merci Isobel... Elle l’avait fait exprès, ce n’était pas possible... Elle lui jeta en tout cas un regard sombre, articulant en français, silencieusement, à son égard :

- Tais-toi.

Isobel fit mine d’être surprise, haussant les épaules. Joséphine secoua la tête puis rejeta ses long cheveux noirs derrière son épaule. Ok, elle pouvait rattraper le coup. D’abord, ne pas trop s’attarder sur ses filles, histoire de ne pas trop plomber l’ambiance de séduction qui commençait à s’installer avec que Isobel ne gâche tout.

- Je les élève seule, répondit-elle simplement. Autant comprendre : pas de mari, pas de fiancé, libre comme l’air.

Elle avait eu Alice lorsqu’elle était encore adolescente, avec son premier amour. Il semblait merveilleux à l’époque, beaucoup moins avec le recul... C’était un pauvre type qui s’était barré à la première difficulté. Heureusement, sa mère avait été là pour elle, le reste du coven aussi, et Alice avait grandi bien entourée. Il y a six ans, elle avait rencontré le père d’Iris, ils avaient eu une vraie histoire, le genre d’histoire dont elle avait rêvé. Malheureusement, cela ne s’était pas terminé comme dans ses espoirs... Au moins, il était resté s’occuper de sa fille et Iris était ravie de passer un peu de temps avec son papa toutes les semaines. Quoiqu’il en soit, tout cela ne concernait pas son envie de s’amuser ce soir, en Angleterre, loin de tout cela, et elle avait bien envie de le faire comprendre. Décidée à ne pas lâcher la main sur la conversation, Joséphine sourit.

- Et bieeeeeen, Isobel travaille mais moi je suis cent pour cent libre et j’ai vraiment envie de m’amuser. Wink wink. Alors vendredi, on va sûrement aller en boîte mais peut-être que samedi, nous pourrions revenir ici, pourquoi pas au cabaret ? Ça doit être quelque chose, non ? Et puis voir le casino... Même si ça, tu pourrais me le faire visiter ce soir.

Elle appuya son menton sur sa main.

- Je suis sûre qu’il est plein de surprises...
- Ça reste un casino, Jo... marmonna l’émetteur à mauvaises ondes à ses côtés.

  
Roy Calder
Roy CalderPropriétaire d'un haras
Messages : 2891
Profil Académie Waverly
Louisiana peaches [Roy ; Joséphine Lavespère ; Isobel] Icon_minitimeMer 22 Juil 2020 - 22:36
La précision de Joséphine, simple, directe, ne pouvait pas être totalement hasardeuse. Elle aurait pu dire des choses à propos de cette enfant qu’Isobel évoquait, aller passer cet appel qu’elle avait promis de faire, mais elle n’en fit rien. Elle n’avait pas envie de parler de ses filles, tout en jugeant utile de préciser qu’elle les élevait seule. Roy savait décoder ce type d’information, donné sur ce ton, avec ce regard posé sur lui : Joséphine aurait pu déclarer « je suis célibataire », ça n’aurait pas été plus clair.

Il eut tout le loisir de confirmer qu’elle avait un style assez direct quand il s’agissait de flirter, face à la manière dont elle explicita ses projets de vacances. « Cent pour cent libre », « j’ai vraiment envie de m’amuser ». Eh bien… Sur ce point, elle était plutôt différente d’Isobel, songea Roy avec un certain amusement, en se rappelant à quel point il avait dû redoubler de patience et d’imagination pour la faire tomber dans ses bras, à une époque. Isobel aimait être courtisée et faire courir les hommes derrière elle. Joséphine, elle, ne semblait pas s’embarrasser de trop de formes. En même temps, elle avait quelques atouts qui rendaient plutôt inutile la prise de parole. Avec une poitrine aussi généreuse, Roy imaginait sans mal qu’elle avait juste à ouvrir quelques boutons de sa chemise pour attirer n’importe quel homme…

Faisait-il partie de ce lot ? Absolument. Actuellement, Roy était même en train de se demander si ces seins étaient vrais, et d’après son appréciation visuelle de leur forme et leur tenue, il avait plutôt tendance à penser que oui. Incroyable. Ça ne pouvait pas tenir dans une seule main, ça, si ? Peut-être qu’il était un tout petit peu en train de se projeter dans la situation où il pouvait poser ses deux mains sur cette poitrine voluptueuse, il voulait bien le reconnaître. Pas à haute voix face à Isobel qui semblait clairement agacée par sa cousine, mais il se l’admettait à lui-même. Il remonta son regard jusqu’au visage de Joséphine, qui attendait visiblement sa réponse. Il avisa d’un coup d’œil le visage d’Isobel et constata que cette électricité entre elles deux était toujours aussi présente.

Bien. Si cela ne tenait qu’à lui, il aurait déjà offert son bras à Joséphine pour l’emmener faire un tour du casino, car c’était exactement le genre de compagnie et de distraction dans lesquelles il voulait bien s’oublier ce soir. Mais sa meilleure amie n’avait pas l’air si partante face à la proposition de sa cousine. D’un autre côté, c’était elle qui l’avait amenée ici, pourquoi l'avoir fait si ce n’était pas pour lui faire voir du pays ? Roy voulait bien s’occuper de distraire Joséphine et faire une petite visite du casino serait plus agréable que de les voir se chamailler et se lancer des piques. Clairement plus agréable pour lui, en tout cas.

Sans réfléchir davantage, il lança en se levant de son siège :

« Pas n’importe quel casino, le meilleur casino de ce pays, répliqua t-il en parfaite subjectivité à l’adresse d’Isobel. Ça mérite de faire un tour, et puis hé, ça fait longtemps que t’as pas dépensé aux jeux, plutôt que d’inscrire tes consommations sur ma note, ajouta t-il avec un sourire railleur à son égard. Allez, ça va nous dégourdir les jambes. » Il tendit une main pas tout à fait innocente à Joséphine, pour l’aider à se lever, en ajoutant : « Et tu es bienvenue au cabaret, quand tu veux. On peut y faire un tour aussi, plus tard. »

Après tout, ils avaient toute la soirée devant eux… Avec son aisance habituelle, Roy prit la tête de la marche pour présenter les lieux. D’un geste du bras, il désigna le comptoir à quelques mètres d’eux où s’affairaient deux barman :

« Tout d’abord, le bar avec lequel tu as déjà fait connaissance. J’ai cru comprendre que le bourbon était votre boisson fétiche à la Nouvelle-Orléans, celui que nous servons est approuvé par ta cousine elle-même, dit-il avec un sourire en coin à l’adresse d’Isobel. Mais nous avons également une très belle collection de vins français et de whisky irlandais qui nous viennent de producteurs renommés. Les sièges du comptoir sont d’époque, restaurés quand nous avons réouvert l’établissement. Nous avons essayé de restaurer le maximum de choses, entre le mobilier, les fresques, les frises décoratives, pour ne pas perdre le charme de l’ancien, tout en donnant un coup de neuf... Certains tableaux ici sont de véritables œuvres d’art qui valent cher sur le marché, car Ingrid Magpie, la propriétaire originelle des lieux, était une grande collectionneuse. »

Ils se frayèrent un passage parmi les tables où étaient assis de nombreux clients, jusqu’à arriver sur une zone un peu plus dégagée où se répartissaient les différentes tables de jeu, sous les lustres chargés de dorures qui diffusaient une lumière chaude sur les visages tantôt concentrés, tantôt souriants des clients. Un bref instant, Roy admira l’effet conjoint de la lumière et des tentures rouges sur la peau mate de Joséphine, qui observait les lieux de son regard luisant. Quand leurs yeux se croisèrent, Roy lui sourit.

« Plutôt jeux de cartes, jeux de hasard ou jeu d’adresse ? Tu as trois tables de Poker du diable au centre, des machines à Gallions le long de ces deux murs, un billard magique, un Boulard qui marche tellement bien qu’on en a mis un deuxième, juste ici sur ta droite. La table du fond est réservée à des jeux de dés. Ah tiens, je crois que vous n’avez pas ce jeu dans vos casinos en Amérique, c’est populaire plutôt en Europe, mais ça ressemble à la roulette, déclara t-il en passant près d’une table entourée d’une dizaine de personnes. C’est une Trotteuse, tu mises sur des cases, en espérant que l’espèce de petit vif d’or tombe à l’intérieur de l’une d’elles, quand le croupier fait tourner la roulette. Evidemment, le vif est capricieux alors il a tendance à sautiller d’une case à l’autre… Isobel te dira le contraire mais elle est nulle au Boulard. Par contre, elle a une chance insolente sur la Trotteuse, admit-il pour rendre honneur à son amie, c’est un scandale. »

Autre chose qui était un scandale ? Le cul que lui faisait cette robe que Joséphine portait et qui semblait lui aussi naturel. Mais quand le regard de Roy remonta, ce fut celui d’Isobel qu’il croisa et il eut comme un bref haussement d’épaules désolé. Oups ?


Roy Calder

Walking on the sunny side

KoalaVolant
Isobel Lavespère
Isobel LavespèreChargée de communication
Messages : 1166
Profil Académie Waverly
Louisiana peaches [Roy ; Joséphine Lavespère ; Isobel] Icon_minitimeMar 4 Aoû 2020 - 23:42
Louisiana peaches [Roy ; Joséphine Lavespère ; Isobel] 20062809430264872
Joséphine Lavespère, 32 ans, cousine d’Isobel

Joséphine avait l’impression que Roy n’était pas complètement indifférent à son charme. Elle sentait des petits regards sur elle, sur son décolleté, surtout - il fallait savoir mettre en avant ses atouts après tout - et elle trouvait cela très appréciable. Ils allaient peut-être arriver à quelque chose... En tout cas, si Isobel leur lâchait un peu la grappe. Elle sentait que sa cousine envoyait quelques mauvaises ondes. Il fallait vraiment qu’elle se décoince, celle-là ! En tout cas, il lui semblait que Roy et elle étaient sur la même longueur d’ondes : il se leva pour lui faire visiter le casino, sans s’arrêter sur la mauvaise foi de son amie. Au contraire, il lui envoya une petite pique sur sa manie de consommer sur sa note, ce qui fit hausser les épaules d’Isobel.

- Je croyais que cela te faisait plaisir, de voir que je viens boire chez toi.

Heureusement pour Jo, Roy détourna bien vite son attention de sa cousine pour lui tendre la main, afin de l’aider à se lever. Mais galant, en plus ! Ravie comme tout, elle lui tendit la main et se leva, en essayant d’être le plus gracieuse possible, en écho au geste de son cavalier du soir. Bienvenue au cabaret lorsqu’elle le souhaitait... Si ça, ce n’était pas une invitation, elle ne savait plus comment elle s’appelait. Le pas guilleret, Joséphine commença à le suivre, Isobel à ses cotés. Elle voyait bien que sa cousine n’était pas ravie mais elle n’allait pas la laisser gâcher sa soirée. Pour elle, c’était peut-être barbant car elle venait souvent, mais quand on le découvrait pour la première fois, c’était sacrément impressionnant comme établissement. Tout n’était que dorures, beaux meubles et gens bien habillés. Les hauts-plafonds, les tableaux, les tapis rouges... Il y avait des moyens derrière les Folies Sorcières, tout sentait l’argent. Roy n’était pas qu’un simple gérant de bar, dis donc...

Elle l’écouta avec attention discourir sur le bar, notant que le bourbon était de qualité - selon Isy - même si ce n’était pas sa boisson fétiche, c’était celle de son père (et de son grand-père.) Elle était plutôt rosé, si on lui demandait son avis. Elle en prendrait peut-être un verre, si Roy l’accompagnait... En revanche, elle était beaucoup moins intéressée par la restauration des antiquités. Les sièges, les tableaux, d’accord, super, mais ce n’était pas le plus intéressant dans ce lieu, elle en était certaine. Néanmoins, bien poliment, elle hochait la tête, souriait et arborait son plus joli minois à l’égard du propriétaire, qui parlait avec passion de son établissement.

L’arrivée dans le casino réveilla son intérêt. Ça, elle aimait bien. Elle avait bien envie de faire quelques parties, surtout si Roy lui offrait (elle n’avait pas grand-chose à mettre dedans sinon, son Portoloin pour Londres lui avait déjà coûté la moitié de la peau des fesses.) Lorsqu’il lui demanda son jeu préféré, elle aurait bien répondu « Strip Poker » mais n’en n’avait pas eu l’occasion, dommage. En tout cas, il y avait des activités à foison, de quoi passer une bonne soirée. Il y avait même des machines qu’ils n’avaient pas aux USA, ce qui était plutôt surprenant quand on connaissait les casinos magiques de Las Vegas, qui étaient plus qu’immenses : ils étaient gargantuesques. Ils s’approchèrent de la Trotteuse, où une petite balle dorée sautait de cases en cases, sous les regards anxieux des participants. Oh, ça devait être drôle et apparemment, Isobel y roulait sa bille, peut-être qu’elles pourraient en faire une partie ensemble !

- Je ne suis pas mauvaise au Boulard, répliqua-t-elle d’ailleurs. Je réserve mes capacités à d’autres, comme la Trotteuse, justement, minauda-t-elle.

Heureusement que Jo savait que sa cousine était une bille en divination, sinon elle aurait pu l’accuser de tricher (pour s’amuser, évidemment, mais si Isobel aurait fortement pris la mouche.) Puisque sa cousine était trop susceptible, elle préféra donc discuter une nouvelle fois avec Roy, toute souriante.

- Moi je dirais plutôt que ce qui est un scandale, c’est de posséder tout cela et de ne pas y jouer... Une petite partie avec moi ? proposa-t-elle. De ce que tu veux, je te laisse mener la danse !


***** Louisiana peaches [Roy ; Joséphine Lavespère ; Isobel] 3181402168  Louisiana peaches [Roy ; Joséphine Lavespère ; Isobel] 3181402168  Louisiana peaches [Roy ; Joséphine Lavespère ; Isobel] 3181402168 *****

Isobel avait un peu ruminé pendant la visite des Folies, restant étonnement silencieuse. Elle était agacée de ce qui se tramait sous ses yeux. Elle voyait bien que Roy dragouillait sa cousine, elle le connaissait parfaitement quand il faisait le charmeur, il lui avait sorti le même numéro pendant des années. Joséphine n’était pas en reste, elle flirtait comme une adolescente en rut. Aucune gêne, ces deux-là. Elle avait véritablement envie de leur secouer la main devant le visage pour signaler sa présence. Elle n’avait emmenée Jo ici pour qu’elle se permette de draguer son meilleur ami sous ses yeux, c’était comme... comme débarquer dans une soirée et mettre les pieds sur la table. Quant à Roy, il avait des centaines de femmes à disposition dans son établissement, donc s’il pouvait éviter d’aller draguer sa cousine, elle apprécierait... Surtout qu’aucun des deux n’était discret.

D’ailleurs, elle intercepta un regard parfaitement indécent de Roy, qui reluquait ouvertement le fessier de sa cousine. Leurs yeux se croisèrent et son meilleur ami haussa les épaules, comme une adolescent pris sur le fait mais même pas désolé. Les sourcils d’Isy se froncèrent et elle souffla un très sec « Arrête ça. » Ce n’était pas vraiment facile de discuter avec Jo juste à côté. Cette dernière s’était d’ailleurs retournée vers Roy pour lui proposer une partie tous les deux. Ah bah super, fallait le dire si elle était encombrante. Un peu piquée, Isobel attrapa le poignet de Roy.

- Je peux te parler deux secondes ?

Elle vit bien que Joséphine ouvrait la bouche mais sans laisser trop le choix à son ami, elle l’entraîna quelques mètres plus loin.

- S’il te plaît Roy, commença-t-elle directement, arrête avec Joséphine. On a une relation suffisamment compliquée comme ça, je n’ai pas envie que tu lui tournes autour...
 


« I never knew you were the someone waiting for me »
Roy Calder
Roy CalderPropriétaire d'un haras
Messages : 2891
Profil Académie Waverly
Louisiana peaches [Roy ; Joséphine Lavespère ; Isobel] Icon_minitimeMer 16 Sep 2020 - 21:32
La certitude d’une attirance réciproque était une agréable sensation que Roy recherchait un peu désespérément ces derniers temps, comme si ces quelques doses d’adrénaline allaient lui permettre de combler un manque dont il ne parlait pas. Un manque qui le travaillait à chaque moment où il était seul ou insuffisamment distrait. Occuper son esprit, occuper son corps, frénétiquement, pour mieux le tromper et oublier sa peine lancinante. C’était la seule solution qu’il avait trouvée, la seule qu’il connaissait, la seule qu’il acceptait. Ne pas regarder en arrière, avancer, enchaîner, le temps, les femmes, vite. Oublier. Oublier dans les jeux, oublier dans l’alcool, dans les rires, dans les flirts, la mandragore, le sexe, oublier. Oublier, vite.

Joséphine pouvait porter ce nom, oublier. Elle avait l’air déjà charmée et ne semblait pas attendre quoi que ce soit d’autre que de s’amuser. Une proie facile, du moins avant qu’Isobel ne s’érige comme un obstacle. Roy pouvait déjà deviner ce qui se passait derrière le regard réprobateur qu’elle lui adressa et la manière dont elle tira son bras d’un coup sec pour le mener à l’écart. Il avait senti entre les deux cousines une espèce de rivalité, ou d’animosité, il ne savait pas trop de quoi il s’agissait exactement mais il ne fut pas très surpris de l’entendre lui demander d’arrêter son petit jeu. Intrigué, mais pas surpris.

« Compliquée ? » répéta t-il. « C’est-à-dire ? »

Que se passait-il entre les deux Lavespère, pour qu’Isobel soit aussi piquée de le voir flirter avec ? Cela ne lui ressemblait pas vraiment : elle n’avait jamais cherché à le retenir de se rapprocher de qui que ce soit, pas même à l’époque où ils étaient amants tous les deux. Le fait qu’Isobel, soudainement, entrave sa liberté dans ce domaine était un élément assez inhabituel pour retenir l’attention de Roy. Mais comme souvent, elle fut peu prolixe dans ses explications :

« Compliquée, c’est tout, c’est ma famille, on a un passif… Je préfère que tu ne t’impliques pas avec elle, c’est tout… »

Pendant quelques secondes, Roy se contenta de regarder son amie, les sourcils froncés, comme si cela allait lui permettre de mieux lire à l’intérieur de cette petite tête si bien cadenassée quand il s’agissait de parler de sa famille. Mais elle ne laissait pas transparaître grand-chose et ne détailla pas davantage ses propos. Pourtant, il pensait qu’ils avaient progressé là-dessus, puisqu’elle l’avait invité à venir avec elle aux Etats-Unis l’été dernier et qu’elle avait accepté de passer quelques jours à la Nouvelle-Orléans durant leur périple. C’était la première fois que Roy approchait d’aussi près ce passé sur lequel Isobel était si secrète, il avait découvert des choses, compris quelques dynamiques entre elle et les membres de cette famille dont elle parlait si peu.

Mais cette fois, il retrouvait à nouveau cette Isobel fermée, méfiante, un peu distante même, une attitude qui piqua le mafieux à un endroit, sans qu’il n’identifie exactement pourquoi. Sa réponse fut plutôt laconique :

« Ok. Si tu y tiens. »

Même s’il n’en comprenait pas vraiment les contours, Isobel venait de tracer une limite que Roy avait assez de décence pour respecter, pour le reste de la soirée.


******


Les pensées de Roy vagabondaient sans grande logique, aussi vaporeuses et insaisissables que la brume parfumée qui caressait ses sens. Il aurait presque pu se laisser glisser dans le petit nuage de mousse et de bien-être à la surface de son bain et s’y endormir s’il n’y avait pas un flot continu de paroles résonnant contre les parois carrelées de la pièce, comme un rappel du fait qu’il n’était pas seul ici. Il l’avait totalement cherché, il l’avait voulu, il ne pouvait pas s’en plaindre, il y avait largement trouvé son compte.

Mais bon sang, si Isobel avait commencé par lui annoncer que Joséphine Lavespère était un inarrêtable moulin à paroles vaines, il aurait certainement mieux considéré le fait de respecter sa demande.

Ce n’était pas que Roy avait fondamentalement voulu aller à l’encontre de la requête d’Isobel, quelques jours plus tôt, quand il avait rencontré sa cousine à son casino et qu’elle avait mis aussitôt fin à leur petit flirt. Mais quand Joséphine était revenue le voir un autre soir, seule cette fois, Roy avait commencé à se dire que finalement, ce n’était peut-être pas si grave. Qu’Isobel ne serait pas si fâchée si elle n’était pas forcée d’assister à la scène. Que c’était certainement un peu d’ego mal placé de sa part, qui n’avait pas aimé voir son ancien amant tourner autour de sa cousine, comme si elle devait rester la seule Lavespère à susciter son intérêt. Qu’au fond, elle ne pouvait rien lui interdire, c’était sa liberté de flirter avec qui il voulait, une liberté qu’il n’avait pas très envie de remettre cela en question, surtout si elle ne lui donnait aucune explication pour justifier sa position. Qu’elle, elle était bien heureuse avec son Abel parfait adoré, lui il ne pouvait pas en dire autant, il était plutôt plus bas que terre en ce moment, alors pourquoi devait-il refuser de prendre un peu de bon temps avec une femme qui lui plaisait, si cela lui permettait d’avoir l’impression de sortir un peu la tête de l’eau, même un court instant ?

Voici comment, à force de justifications nombreuses, aidées de quelques oeillades appuyées et arguments bien placés sur le corps de Joséphine, il s’était retrouvé à l’accueillir chez lui, à plusieurs reprises, dans à peu près tous les recoins qu’ils avaient jugé bon d’agrémenter de leurs ébats. Mais ce n’était pas que son entrejambe que Roy donnait à la jeune femme, c’était aussi beaucoup son oreille, qui commençait à exceller dans l’art de sélectionner ce qu’il y avait d’intéressant dans ce qu’elle avait à dire et se fermer au reste.

Exemple typique actuellement : pas intéressant. Roy bougea légèrement contre les creux modelés de la paroi du jacuzzi, à la recherche d’un peu plus de confort, tandis qu’il lançait d’un ton égal :

« Ah ouais, carrément ? »

Bonne phrase passe-partout, ça. Il était à peu près certain qu'elle passerait bien à n’importe quel passage du discours de Joséphine dont il percevait le ton qui s’offusquait de plus en plus, alors qu’elle lui racontait il ne savait quel affront qu’avait commis il ne savait quelle sorcière Lavespère -ou Laveau, il ne savait plus faire la différence- de son bled sud-américain.



Roy Calder

Walking on the sunny side

KoalaVolant
Métamorphomage
MétamorphomageMoldu
Messages : 2378
Profil Académie Waverly
Louisiana peaches [Roy ; Joséphine Lavespère ; Isobel] Icon_minitimeMer 16 Sep 2020 - 23:40
Louisiana peaches [Roy ; Joséphine Lavespère ; Isobel] Tumblr_ovhrn4wwB21styf9co1_500
Joséphine Lavespère, 32 ans, cousine d’Isobel

Cela faisait du bien de rencontrer un mec qui écoutait. Cela faisait quelques jours que Roy et Joséphine se fréquentaient, ce qui avait rendu ses vacances bien plus agréables. À chaque fois, elle avait l’impression qu’elle pouvait s’ouvrir à lui sans qu’il ne s’enfuie (comme la plupart le faisait.) Elle pouvait discuter simplement avec lui, lorsqu’ils ne se livraient pas à d’autres activités un peu plus agréables... Les choses ne s’étaient pas faites immédiatement. Lorsqu’ils s’étaient rencontrés, elle lui avait envoyé tous les signaux possibles mais ils n’avaient pas conclu. Sûrement à cause des mauvaises ondes d’Isobel : Joséphine avait bien senti qu’elle n’était pas ravie de cette histoire (mais c’est sûrement parce qu’elle était rabat-joie et avec un mec frigide au lit, alors elle ne supportait pas l’idée que les autres s’amusent dans son dos. Sa cousine avait toujours été un peu envieuse.) Alors quelques jours après leur rencontre, Joséphine était revenue aux Folies Sorcières. C’était le jeudi soir, elle avait dit à Isy Louise qu’elle avait envie d’aller en danser en boite, tout en sachant que cette dernière ne l’accompagnerait pas (soi-disant parce qu’elle travaillait tôt le lendemain matin. En réalité, parce qu’elle était sûrement devenue une couch potato depuis qu’elle avait un mec dans sa vie). Jo était revenue dans l’établissement de Roy, armée de son plus joli sourire et de la robe la plus courte qu’elle avait pu trouver dans le dressing de sa cousine. Cela n’avait pas pris très longtemps pour qu’ils finissent chez lui.

Depuis, elle avait la chance de pouvoir continuer sa découverte touristique du Royaume-Uni (plus particulièrement de Londres) en journée, tout en découvrant autre chose le reste du temps. Elle se doutait bien qu’Isobel avait découvert le pot-aux-roses, elle n’était pas stupide, mais elle n’avait rien dit. Elle se contentait de lui envoyer des regards sombres quand elle la croisait et avait savamment refusé toutes ses propositions de sortie avec quelques piques. Elle avait également verrouillé l’accès à son dressing avec un sortilège, d’ailleurs. La dernière fois que Joséphine avait voulu aller s’y servir, la poignée avait tenté de la mordre. C’était très immature si on lui demandait son avis. Néanmoins, Joséphine n’avait pas l’intention de faire le premier pas envers sa cousine : si elle avait un reproche à lui faire, elle n’avait qu’à parler et cesser de bouder. Elle n’avait après tout rien fait de mal et si Isobel voulait gâcher l’opportunité de se rapprocher que leur donnait ce voyage... Et bien tant pis pour elle. Jo n’avait pas l’intention de rester enfermée tout son séjour ou de dire non à Roy. Elle n’allait pas devenir nonne pour que sa cousine ne soit pas jalouse. Ce n’était pas sa faute si elle arrivait à avoir ce que Isobel n’avait sûrement pu jamais approcher.

Elle profitait d’ailleurs du jacuzzi de la grande villa de Roy, qu’elle avait explorée - et exploitée - avec attention ces derniers jours. Confortablement installée dans l’eau chaude, elle en profitait pour raconter à son amant de vacances la dernière altercation qu’elle avait eue avec Charlotte Laveau, une sorcière du coven d’en face qui avait eu une attitude très clairement désagréable avec elle. Elle avait vu les regards qu’elle lui jetait dans le Chaudron le soir, avant de dire des choses sur elle. Donc évidemment, Jo était allée lui demander si elle avait un problème ou si c’était juste sa tronche naturelle ? Et voilà que Charlotte était montée sur ses grands chevaux, immédiatement soutenue par ses cousines qui étaient autour ? Le ton était monté jusqu’à ce que les prêtresses interviennent pour dire que cela suffisait et qu’elles avaient longuement passé l’âge. Joséphine était encore outrée en en parlant et faisait des grands gestes qui éclaboussaient un peu Roy.

- Et donc j’ai été obligée de prendre sur moi parce que je ne pouvais pas envoyer les prêtresses sur les roses, mais tu vois Charlotte continuait de me donner du sale regard.

Roy s’en offusqua et Jo hocha la tête avec vigueur.

- Ouais, carrément, elle a du culot. Mais ils sont tous comme ça dans sa famille, ils se baladent avec cet air comme si le quartier leur appartenait. Elle leva les yeux au ciel. Enfin, tu vois ce que je veux dire, tu en connais un !

Elle imaginait bien que sa cousine avait présenté son Laveau à son ami.
Roy Calder
Roy CalderPropriétaire d'un haras
Messages : 2891
Profil Académie Waverly
Louisiana peaches [Roy ; Joséphine Lavespère ; Isobel] Icon_minitimeLun 28 Sep 2020 - 23:06
Ces sombres histoires de rivalité entre sorcières du coven, Roy en avait entendu quelques unes de la part d’Isobel, qui lui avait parcimonieusement conté quelques récits quand il s’était rendu à la Nouvelle-Orléans avec elle, l’été dernier. En comparaison, Joséphine lui en avait raconté deux fois plus, alors qu’ils se connaissaient seulement depuis quelques jours. Forcément, cela interrogeait Roy sur les raisons pour lesquelles Isobel était tellement secrète sur sa famille, même avec lui, la personne qui était sensé être son ami le plus proche. S’il écoutait la voix qui râlait au fond de lui, il pourrait même admettre qu’il trouvait cela un peu vexant.

Mais pour le moment, c’était Joséphine qu’il avait en face de lui, Joséphine qui avait le bon goût d’allonger son corps délicieux dans son jacuzzi et le moins bon goût de ne pas savoir sélectionner ses histoires. Roy sentit qu’elle l’interpelait à sa dernière phrase, ce qui le réveilla de son demi-sommeil :

« Hum ? »

Charlotte, Charlotte. Elle parlait d'une Charlotte. Pas une Lavespère, elle, lui semblait-il. Il n’avait pas entendu Isobel parler d’une Charlotte. Sans doute une Laveau ? Roy raccrocha les wagons tant bien que mal, en ramassant machinalement la mousse devant lui, à la surface de l’eau :

« Ah. Abel Laveau ? Ouais. Enfin, je peux pas vraiment dire que je le connais mais… »

Mais il avait l’air de rendre Isobel très heureuse, ce qui était la seule qualité que Roy lui connaissait. Non pas qu’il n’en trouvait pas d’autre, mais il n’avait pas vraiment d’occasion d’en découvrir. Puisqu’il incarnait le rôle de l’ex-amant mafieux, il n’avait jamais été en odeur de sainteté pour Laveau, avec qui il n’avait donc jamais eu de véritable discussion depuis qu’il faisait partie de la vie d’Isobel. Roy, homme jaloux et possessif, pouvait bien comprendre quel genre de mécanisme à l’oeuvre empêchait Abel de bien vouloir faire sa connaissance et aurait sûrement réagit de la même manière. Mais de son côté, il en tirait surtout une certaine amertume, puisque cette ligne infranchissable qu’Isobel traçait entre les deux hommes de sa vie donnait surtout l’impression à Roy de ne plus du tout pouvoir accéder à une grande partie de la vie de sa meilleure amie.

Et ce changement notable avait eu lieu dès le moment où elle s’était mise en couple avec Abel Laveau.

Cette fois-ci, la curiosité de Roy se réveilla et il songea que ce n’était pas si inutile d’avoir une autre Lavespère sous le coude, pour lui donner son point de vue sur cet homme qu’Isobel trouvait absolument parfait. Il fit donc le choix d’infléchir la conversation vers ce sujet que Joséphine avait lancé :

« Tu le connais bien, toi ? »



Roy Calder

Walking on the sunny side

KoalaVolant
Métamorphomage
MétamorphomageMoldu
Messages : 2378
Profil Académie Waverly
Louisiana peaches [Roy ; Joséphine Lavespère ; Isobel] Icon_minitimeMar 29 Sep 2020 - 0:49
Louisiana peaches [Roy ; Joséphine Lavespère ; Isobel] Tumblr_ovhrn4wwB21styf9co1_500
Joséphine Lavespère, 32 ans, cousine d’Isobel

Joséphine fut un peu surprise d’entendre dire que Roy ne connaissait pas tant que cela Abel. Elle aurait imaginé que si, vu qu’il était très proche d’Isobel... Peut-être qu’il ne sortait jamais, ce garçon, et restait juste enfermé chez lui à lire des livres. Il n’avait jamais été un grand rigolo. Toujours à l’affût pour raconter la vie des autres, Jo hocha la tête à plusieurs reprises lorsque Roy s’enquit de ses propres liens avec le petit-ami de sa cousine. Elle se redressa un peu dans le jacuzzi, le regard brillant. S’il y avait bien une chose dans la vie qu’elle aimait, c’était bien les ragots. Que ce soit au boulot, au Chaudron ou avec ses cousines, elle adorait pérorer sur tout ce qui se passait dans le Carré. C’était culturel, aimait-elle à dire, tout le monde était une commère à la Nouvelle-Orléans. Après tout, ils se connaissaient tous, étaient tous vaguement reliés et la grande majorité de leurs histoires avaient lieu dans un cercle plutôt fermé... C’était un terreau fertile pour les problèmes et elle aimait bien les problèmes. Des autres. (Même si elle avait conscience d’avoir été - et d’être - la cible de nombreux commérages entre son attitude parfois frivole et ses grossesses un peu précoces. Tant pis. Elle, elle savait ce qu’elle faisait et elle s’en sortait bien. Les autres pouvaient aller manger de la terre de cimetière.)

- Ouais enfin je le connais depuis des années, je peux pas dire « bien bien » parce qu’on a jamais été amis mais... Il était plutôt copain avec mes cousins et surtout Isobel donc bon, ça va.

Elle avait toujours couru un peu après cette petite bande plus âgée mais était tout le temps recalée, notamment par son frère Antoine qui n’avait pas envie de traîner avec sa petite soeur un peu collante. Ensuite, lorsqu’elle était devenue une jeune femme et que Isobel avait disparu (pour suivre sa propre destinée soi-disant telle une héroïne Disney un peu cheap), elle avait trouvé Abel Laveau plutôt intéressant. Il était mignon, grand et un peu distingué, ce qui la changeait des mecs qu’elle fréquentait habituellement et qui étaient plus... rustiques. Elle avait tenté plusieurs approches avec la subtilité qui la caractérisait, mais sans succès. Du coup, elle avait dit à toute la ville qu’il était sûrement gay (et elle le pensait d’ailleurs un peu.) Bon, visiblement, il ne l’était pas, juste monomaniaque de sa cousine. Dommage, à l’époque, elle les imaginait bien ensemble.

- C’est le fils d’une grande prêtresse Laveau, ils ont pas mal de propriétés sur toute la ville et du coup ont l’impression qu’ils ont plus de pouvoir sur les autres... Isobel et lui ont toujours été bizarrement collés, tu n’en voyais pas l’un sans l’autre. Quand elle a disparu, je te dis pas la tête qu’il faisait... Je suis sûre qu’il a fait une dépression, franchement, on le voyait beaucoup moins.
Roy Calder
Roy CalderPropriétaire d'un haras
Messages : 2891
Profil Académie Waverly
Louisiana peaches [Roy ; Joséphine Lavespère ; Isobel] Icon_minitimeDim 4 Oct 2020 - 17:23
Le regard de Joséphine sembla s’illuminer à la question que Roy lui posa, et il ne sut dire si c’était parce que l’idée de bavarder sur Abel Laveau en particulier la ravissait, ou si c’était l’idée de bavarder tout court. Il avait eu l’occasion de s’en rendre compte, Joséphine aimait beaucoup pérorer sur les petits défauts de telle et telle personne de son entourage -que Roy ne connaissait généralement pas, puisqu’elle ne s’était pas aventurée à critiquer Isobel jusque là- et peut-être qu’au fond, c’était un peu ce qu’il cherchait en lui demandant des informations sur Abel. Abel parfait Laveau. Abel, le nouvel homme de la vie d’Isobel. Abel, celui qui lui faisait oublier tout le reste.

Abel, l’homme dont Roy était un peu jaloux, au fond.

Non parce qu’il aurait voulu nouer le même type de proximité avec Isobel, les années qui étaient passées et leur bonne connaissance l’un de l’autre leur avaient bien montré qu’ils ne développaient rien d’autre que de l’amitié, qui avait teintée de désir à une époque. S’il avait fallu qu’ils développent des sentiments amoureux, il y a bien longtemps qu’ils l’auraient fait. Non, Roy était embêté parce qu’il avait l’impression qu’Abel accaparait la jeune femme et qu’il ne savait plus comment exister dans ce lien fusionnel. Malgré elle, peut-être, et sûrement pas uniquement à cause d’elle, ils s’éloignaient tous les deux. Elle était occupée à chérir et cultiver son couple avec un homme qui ne voulait pas entendre parler de Roy, ce qui la forçait à séparer son temps en deux et force était de constater qu’elle donnait des priorités. Quant à Roy, il s’enfermait globalement dans son coin, peinant à redresser la barre d’une déception amoureuse dont il ne pouvait s’ouvrir à personne.

Au fond, il était un peu jaloux d’Isobel aussi, qui semblait vivre un parfait bonheur, avec la parfaite personne. Le fait qu’Isobel n’évoque au sujet d’Abel que ses merveilleuses vacances et les incroyables cadeaux de son adorable petit-ami n’aidait pas vraiment Roy à apaiser cette contrariété intérieure.

Joséphine pouvait sans doute lui apporter un autre point de vue, plus objectif -ou moins émerveillé en tout cas- sur cet homme qui avait pris toute la place dans la vie d’Isobel. Il comprit à travers ses paroles que la rivalité entre les Laveau et les Lavespère existait également sur des rapports d’argent, qui leur conférait une position plus ou moins aisée dans la communauté qu’ils formaient. Effectivement, les quelques fois où il avait vu Abel, il lui était apparu plutôt grand prince, le genre d’homme qui avait grandi avec une cuillère d’argent dans la bouche. Il apprit également que cette relation fusionnelle qu’il voyait entre eux aujourd’hui avait existé par le passé, ce qui le fit réagir :

« Oh bah ils sont toujours collés l’un à l’autre, même maintenant… » Sa voix était relativement neutre, avec une légère tonalité amère si on prêtait attention. « Hum… Tu penses quoi de lui, toi ? C’est un type bien ? »


Roy Calder

Walking on the sunny side

KoalaVolant
Métamorphomage
MétamorphomageMoldu
Messages : 2378
Profil Académie Waverly
Louisiana peaches [Roy ; Joséphine Lavespère ; Isobel] Icon_minitimeDim 4 Oct 2020 - 22:31
Louisiana peaches [Roy ; Joséphine Lavespère ; Isobel] Tumblr_ovhrn4wwB21styf9co1_500
Joséphine Lavespère, 32 ans, cousine d’Isobel

Joséphine avait l’impression de sentir un peu d’amertume dans l’aura et la voix de Roy sans vraiment identifier pourquoi. Bah. Il était peut-être un peu dégoûté d’être célibataire alors qu’une de ses amies apparemment proches avait trouvé quelqu’un. C’était un sentiment plutôt familier pour elle. Toutes ses cousines semblaient trouver des maris sous le sabot d’un cheval tandis qu’elle... Bref, elle n’avait pas envie d’y penser pendant ses vacances de détente. Elle passait de très bons moments avec Roy alors elle allait s’en contenter pour le moment. En plus, il avait un jacuzzi et franchement, elle n’avait jamais rencontré d’hommes possédant un jacuzzi. C’était vraiment le niveau du dessus.  En plus, il lui demandait des ragots sur quelqu’un dans un jacuzzi, alors là... Vacances de rêve. Sa nouvelle question lui fit hausser les épaules.

- Franchement, je le trouve un peu chiant. Je suis sûre qu’ils s’ennuient tous les deux là. Isobel refuse de sortir avec moi soi-disant parce qu’elle travaille et ils restent juste tous les deux, chez eux... Elle leva les yeux au ciel, laissant volontairement de côté le fait que Isobel avait aussi refusé de sortir avec elle pendant le week-end, parce qu’elle était fâchée à cause de cette histoire avec Roy. Mais bon. Oui, c’est un type bien dans l’appellation générale du truc, quoi. Il est honnête, fidèle et tout le tralalala. Je peux pas dire qu’il est vraiment sympa hein mais avec elle il est sympa. Ma théorie c’est qu’ils sont relous tous les deux et qu’ils arrivent à un tel niveau de pénibilité, qu’ils s’annulent entre eux.

Elle avait conscience qu’elle n’était pas très sympathique avec sa cousine qui ne lui avait pas fait grand-chose ces derniers temps, à l’exception de quelques piques passives-agressives et quelques mauvais regards. Si elle avait dû se forcer à faire preuve d’un peu de bonne foi, elle aurait pu reconnaitre qu’Isobel - et Abel - l’hébergeaient depuis plus d’une semaine et qu’au début, avant l’histoire avec Roy, Isy était sortie avec elle pour lui faire un peu découvrir le pays. Mais elle avait du mal à s’en empêcher, Isobel l’agaçait régulièrement, sans qu’elle ne sache trop pourquoi. Un mélange de jalousie enfantine jamais réglée et de personnalités pas vraiment compatibles. Alors c’était sa cousine, évidemment, elles avaient le même sang alors Jo respectait cela. Mais des fois, elle avait juste envie de l’emmerder.

- Mais tu le ne connais pas, toi, Abel ? Pourtant Isobel c’est ta grande copine, non ? Elle a tellement honte de nous qu’elle ne te présente même pas son mec ?

Nous, les gens de la Nouvelle-Orléans, nous, les gens sur lesquels elle avait craché pour disparaître sans donner de nouvelles pendant seize ans avant de revenir de manière intéressée quand ses pouvoirs lui avaient posé problème. La famille, quoi.
Roy Calder
Roy CalderPropriétaire d'un haras
Messages : 2891
Profil Académie Waverly
Louisiana peaches [Roy ; Joséphine Lavespère ; Isobel] Icon_minitimeDim 11 Oct 2020 - 16:55
« Franchement, je le trouve un peu chiant. »

Ah, une phrase qui sonna plutôt comme une douce parole aux oreilles de Roy. Il préférait largement qu’on lui dépeigne ce portrait là d’Abel, plutôt celui d’un homme intelligent, attentif, doux et gentil comme ce qui ressortait des descriptions d’Isobel. Il eut malgré tout un bref sentiment de culpabilité car il savait qu’il aurait plutôt dû se réjouir du fait que son amie avait trouvé un homme qui lui convenait aussi bien et qui la rendait heureuse. C’était le cas, mais parfois sa jalousie égoïste reprenait le dessus et lui renvoyait sa propre solitude, aussi bien sur le plan amoureux que vis à vis d’Isobel qu’il avait l’impression de voir s’éloigner de lui un peu plus de jour en jour.

A entendre Joséphine, ils semblaient occuper leurs soirées à rester chez eux, ensemble, tel un vieux couple installé dans sa routine excluante, ce qui correspondait assez bien à l’idée que Roy s’en faisait et au ressenti qu’il en avait. Il garda toutefois ses pensées pour lui, bien conscient pour l’avoir vue à l’oeuvre que Joséphine avait la langue bien trop pendue, et un trop grand amour des ragots et que ce n’était donc pas la bonne personne à qui confier ce genre de pensées. Il n’avait pas non plus envie de mettre Isobel en porte-à-faux, surtout face à sa cousine qui semblait déjà avoir quelques griefs contre elle, vu le qualificatif de « pénible » qu’elle lui attribua. Volontairement, il ne rebondit pas sur ce point, en évoquant plutôt ce qui selon lui expliquait qu’ils s’entendent si bien :

« Ils sont amis et se connaissent depuis longtemps, de ce que j’ai compris. » Il se souvenait encore des lettres qu’il avait trouvées chez Isobel et qui révélaient un lien assez fort et de longue date avec Abel. « C’est une espèce d’amour d’enfance, non ? Ils ont toujours été aussi proches ? »

Il connaissait à peu près l’évolution de leur lien après qu’ils se soient retrouvés en Angleterre tous les deux, il avait vu leur méfiance et animosités réciproques se transformer en cet amour qu’ils partageaient aujourd’hui, après avoir réglé tous ces ressentiments liés à la fugue d’Isobel. En revanche, il connaissait très mal leur passé commun. Elle n’en parlait pas beaucoup, tout comme elle ne parlait pas trop de son passé de façon générale.

Joséphine semblait curieuse également des liens qui le reliaient à Abel et Isobel, ce qui fit hausser les épaules de Roy :

« Non, c’est juste que ça coince entre Abel et moi alors… Forcément ça met pas la grande ambiance. » Porté par le fil de ses pensées, il demanda à son tour, sans prévenir : « Et toi ? Tu es proche d’Isobel ? »

Il ne connaissait pas l’histoire entre les deux cousines, si ce n’était cet avertissement que son amie lui avait donné au casino l’autre jour, en insistant sur le fait que « c’était compliqué entre elles ». Il se doutait que leur relation avait dû être affectée le départ d’Isobel, et il était curieux de savoir ce que Joséphine aurait à en dire.


Roy Calder

Walking on the sunny side

KoalaVolant
Métamorphomage
MétamorphomageMoldu
Messages : 2378
Profil Académie Waverly
Louisiana peaches [Roy ; Joséphine Lavespère ; Isobel] Icon_minitimeDim 11 Oct 2020 - 18:20
Louisiana peaches [Roy ; Joséphine Lavespère ; Isobel] Tumblr_ovhrn4wwB21styf9co1_500
Joséphine Lavespère, 32 ans, cousine d’Isobel

Joséphine trouvait cette nouvelle discussion très amusante. Elle s’était redressée dans le bain à remous, pour faire un peu plus face à Roy. Elle avait l’impression que cela faisait plaisir également à Roy de discuter de cela avec elle. Peut-être avait-il lui aussi le même tempérament un peu commère. Elle savait que c’était pécher d’être aussi mauvaise langue mais ce n’était pas le seul de la semaine, elle irait s’en repentir plus tard... En plus, elle était plutôt contente de trouver quelqu’un avec qui discuter de sa cousine, qui l’avait un peu agacée ces derniers temps. Roy devait en savoir des choses sur elle, vu qu’ils étaient amis, et elle serait bien curieuse de savoir quoi. En plus, il fallait le dire, Joséphine était bavarde. Elle adorait parler. Elle adorait qu’on l’écoute parler. Alors lorsque Roy la lança sur le sujet de la relation d’Abel et Isobel, elle en eut beaucoup à dire. Elle hocha vigoureusement la tête à ses questions et commença d’un ton docte, comme si elle était la grande experte de la question.

- Ils se connaissent depuis toujours, même ! Chez mon grand-père, il y a une photo d’eux, Abel a genre deux ans et Isobel... je ne sais pas, un mois, et on lui a mis dans les bras. Ma grand-mère et la mère d’Abel se connaissaient bien, elles discutaient souvent de euh... de choses, concernant nos familles. Elle ne savait pas à quel point Roy était au courant du fonctionnement du coven et elle ne voulait pas s’engager sur cette pente glissante. Bref, du coup, comme Adeline Laveau avait son fils et ma grand-mère s’occupait de Isobel depuis sa naissance, elles les avaient souvent avec elles, donc ils étaient tout le temps ensemble. Moi je n’étais pas encore née mais ça a continué longtemps après, ils étaient tout le temps fourrés ensemble après l’école, au parc de jeu. Ils étaient tout le temps dans la cabane verte - elle avait dit cela comme si Roy identifiait parfaitement la cabane verte qu’on trouvait au parc de jeu Cabrini du Carré Français dans les années 80 - et ils refusaient que les autres enfants viennent. Tout le monde disait qu’ils étaient amoureux et, quand on avait, je ne sais plus trop, cinq-six ans, Isobel avait dit qu’ils allaient se marier et je crois que Abel était d’accord.  Elle ne s’en rappelait plus vraiment, cela faisait partie des anecdotes de son grand-père. Ensuite quand on a grandi c’était insupportable, c’était une paire, ils étaient collés je te jure. Tu en avais un, tu en avais l’autre. Un cerbère à deux têtes ! Mais ils ne sortaient pas ensemble et quand tu disais le contraire, Isobel te balançait un sort parce qu’elle était sauvage à l’époque, je te jure. Plus trop maintenant, c’était presque dommage. Et puis il y a eu une période un peu bizarre au Carré... On a dû partir, mes cousines, moi, les autres filles de la famille, il y avait des... problèmes. On est parties quelques temps, Isobel aussi, à Bâton Rouge. Du coup là je sais plus trop... Ensuite, quand nous sommes revenues, Abel était parti à la fac et Isobel était devenue un peu bizarre. Je crois qu’elle pensait déjà à partir. Mais ils étaient encore amis, je crois, mais comme il était dans le nord, il ne revenait pas super souvent... Et ensuite elle s’est barrée. Après Abel, je trouve qu’on le voyait encore moins. Enfin on l’a tous cherchée à un moment et lui aussi beaucoup, il s’est vraiment démené pour la retrouver. Mais au bout d’un moment, on l’a moins vu... Puis on ne parlait plus trop d’Isobel alors voilà. C’était le passé.

Elle avait haussé les épaules. Elle se demandait ce que Roy savait de tout cela, si Isobel avait déjà assumé tout ce qu’elle avait fait. Au moins un peu, puisqu’il savait d’où elle venait et qu’ils avaient été présentés. Mais peut-être que Isobel avait enrobé les choses, elle semblait assez douée à cela. Un peu curieuse, elle fixa Roy. Ainsi, il ne s’entendait pas vraiment avec Abel... Pas tellement surprenant, songea-t-elle. Ils étaient très différents. Abel était sérieux et ennuyeux, Roy était amusant et un peu dangereux, elle le sentait dans son aura. Abel devait lire des journaux sur son canapé, tandis que Roy avait un splendide établissement de fête et de divertissement. Un peu surprise par sa question, Jo fronça les sourcils. Elle prit cette fois-ci un instant pour réfléchir.

- Je ne sais pas. Pas vraiment ? C’est compliqué. C’est ma cousine, donc c’est la famille, donc forcément on est un peu proches, enfin, on est obligées quoi. Mais de caractère pas trop. On s’entendait mieux avant, quand on était gamines... Mais elle était plus âgée que moi alors elle traînait plus avec Abel, du coup, ou mon frère Antoine... Mais depuis qu’elle est revenue, pas trop. Je sais pas trop. C’est compliqué, elle est sur la défensive alors qu’elle devrait l’écraser. Elle m’énerve, quoi.
Roy Calder
Roy CalderPropriétaire d'un haras
Messages : 2891
Profil Académie Waverly
Louisiana peaches [Roy ; Joséphine Lavespère ; Isobel] Icon_minitimeJeu 12 Nov 2020 - 19:18
« Ah oui, donc ce sont vraiment des amis d’enfance depuis toujours… » commenta Roy, entre deux phrases du long récit de Joséphine.

Il avait déjà saisi ce lien entre eux mais ignorait que cela remontait aussi loin. Finalement, Abel avait toujours fait partie de la vie d’Isobel, littéralement, à l’exception de ces années où elle avait fugué loin de la Nouvelle Orléans, en se coupant totalement de son entourage. Roy resta pensif sur ces aveux, il comprenait mieux cet espèce de lien indestructible qu’il sentait entre les deux amoureux, maintenant qu’ils s’étaient retrouvés. Ils retrouvaient une dynamique qui les avaient liés longtemps. « Une paire », « toujours collés ensemble », c’était à peu près l’impression qu’ils donnaient aujourd’hui aussi à Roy. Il se sentit un peu bizarre face à cette révélation, sans bien savoir si son malaise venait de cette frustration qu’il éprouvait à devoir en quelque sorte partager sa meilleure amie et la voir moins souvent qu’avant, ou si cela venait d’un sentiment de solitude plus profond, qui lui faisait envier ce lien de grand amour qu’elle entretenait avec l’homme qu’elle avait choisi.

L’histoire de Joséphine se termina sur cette période qui avait suivi le départ d’Isobel et dont Roy avait peu de détails : un sujet assez tabou, que son amie abordait peu. Il savait qu’Abel avait été très remonté contre elle, au point de lui faire peur et de la pousser à lui demander à lui de le menacer pour l’empêcher de l’approcher davantage. Les choses avaient bien changé depuis. Ils s’étaient rapprochés, pour finir par se mettre ensemble, environ un an après l’arrivée d’Abel en Angleterre. Roy ne connaissait pas exactement tous les tenants et les aboutissants de ce rapprochement, mais il savait que les deux avaient réglé les rancoeurs qu’ils partageaient.

Joséphine n’en saurait pas plus à ce sujet, en revanche, elle pourrait lui parler davantage des Lavespère et des liens qui les unissaient à Isobel, ce qui intéressait bien plus Roy. Il avait pu observer des liens, des tensions, quand il était allé à la Nouvelle Orléans l’été dernier, mais comme dans toute bonne famille, on ne lavait pas son linge sale en public. Il ne fut pas très surpris d’entendre Joséphine reconnaître son animosité envers Isobel -il l’avait sentie à leur soirée, aux Folies Sorcières. En revanche, il était curieux de mieux comprendre d’où elle venait :

« Elle t'énerve parce que tu lui en veux ? D’être partie, je veux dire » l’interrogea t-il. Il la contempla quelques secondes, cherchant à analyser ses réactions. « T’as jamais eu envie de partir, toi ? Ça a l’air un peu rude, votre environnement là-bas, pour les sorcières… Vous êtes toutes obligées d’y rester et vous plier aux règles, non ? »

Roy était plutôt soft en présentant les choses ainsi car vraiment de l’extérieur et avec les quelques informations qu’Isobel lui avait données, il ne savait pas comment qualifier autrement les covens vaudou que comme des sectes.


Roy Calder

Walking on the sunny side

KoalaVolant
Métamorphomage
MétamorphomageMoldu
Messages : 2378
Profil Académie Waverly
Louisiana peaches [Roy ; Joséphine Lavespère ; Isobel] Icon_minitimeMer 2 Déc 2020 - 1:30
Louisiana peaches [Roy ; Joséphine Lavespère ; Isobel] Tumblr_ovhrn4wwB21styf9co1_500
Joséphine Lavespère, 32 ans, cousine d’Isobel

- Ouais, confirma Joséphine au sujet d’Abel et Isobel. Et maintenant, ils semblent être retournés au stade « cerbère. »

Elle avait bien vu, elle logeait chez eux. Elle avait vu leurs conversations s’interrompre lorsqu’elle entrait dans la cuisine, ou bien les regards entendus que Isobel lançait parfois à Abel. Joséphine en était à chaque fois toute vexée. Peut-être qu’elle était également un peu jalouse, parce qu’elle aurait bien aimé avoir quelqu’un avec qui faire ça, à la maison. Elle n’avait pas véritablement envie de s’attarder sur ce sentiment, c’était toujours un peu blessant. Elle n’avait jamais eu de soucis à plaire, bien au contraire. Elle séduisait facilement et elle avait rencontré de nombreux hommes dans sa vie. Le souci, ce n’était pas de les trouver. C’était de les garder. Même si elle n’en parlait pas beaucoup, l’échec de la vie commune avec le père d’Iris avait été quelque chose de très douloureux. Ils avaient eu un bébé ensemble. C’était censé souder les gens, ça. C’était censé lier un couple ensemble. Elle avait espéré qu’ils puissent former une petite famille, ce qu’elle n’avait pas eu avec le père d’Alice, qui n’avait jamais vraiment assumé. Elle avait pensé qu’ils pourraient trouver leur rythme de famille recomposée, leur rythme de couple, de parents. Cela n’était jamais arrivé. Ils s’étaient vraiment séparés lorsque Iris n’avait que quatre mois. Alors certes, il avait continué de s’occuper de sa fille. Mais cela avait laissé un goût amer dans la bouche de Joséphine. Elle aussi, elle aurait voulu être celle avec qui on faisait sa vie, pas uniquement ses nuits.

Elle avait bien conscience que ce n’était pas dans les bras de Roy qu’elle allait trouver tout cela. Elle ne le voulait pas, d’ailleurs. Il était une adorable distraction, une amourette de vacances qui lui laisserait des souvenirs à enfiévrer ses joues. Une agréable parenthèse de luxure et de luxe, loin de la Nouvelle-Orléans, de ses lundis, de sa famille et de tout ce qui empoissait habituellement le quotidien.

Et pourtant, à des milliers de kilomètres de son quartier, elle se retrouvait à évoquer ces images familières. Elle était un peu surprise de sa curiosité, surprise qu’il n’ait pas déjà tous les éléments dont il s’enquérait. Après tout, il était le grand ami d’Isobel. On aurait pu croire que sa cousine avait déjà tout raconté d’eux, qu’elle avait dressé de son horrible famille maltraitante le pire des portraits, qu’elle offert à ses amis sa narration déculpabilisatrice, celle qui lui permettait sûrement de mieux dormir la nuit. Sa légère contrariété devait se lire sur son visage. Joséphine avait froncé ses sourcils fins, faisait la moue. Elle se retrouva un instant démunie face aux questions de Roy. Elle n’avait jamais eu à expliquer son ressentiment quant à Isobel. Sous les tonnelles du Chaudron, dans la cour ombragée qui les abritait, elle n’en n’avait jamais eu besoin. Ils se comprenaient. Ils se comprenaient d’un regard entendu, d’une expression complice. Après un long instant de réflexion, elle finit par hocher la tête.

- Oui. Elle t’as déjà raconté comment elle est partie ? Chez nous, le seizième anniversaire est le plus important, tu deviens une sorcière à part entière, une membre du coven à part entière. Il y a une grande cérémonie au temple où tu dois démontrer que tu maîtrises les différents domaines de notre art et où tu rends hommage aux ancêtres. Isobel, son anniversaire, c’est le trente-et-un décembre. Alors elle a fait sa cérémonie et le soir, bah y’avait une grande fête, parce qu’on fait toujours une grande fête pour les cérémonies de confirmation. En plus là c’était le Réveillon. Donc, tout se prépare au Chaudron et tout et Isobel, elle retourne chez sa mère pour se « préparer. » Et ensuite, elle n’est jamais réapparue. Jamais, insista Joséphine. Alors tout le monde était là, à trouver ça bizarre au bout d’un moment. Certains sont allés la chercher chez sa mère. Rien. Un peu dans le Carré. Rien. Personne ne savait rien. On a demandé à tout le monde, à Abel, à Michelle, rien, personne ne savait. Alors les gens ont commencé à s’inquiéter, tu vois. D’accord, c’est le Carré français, elle le connaît par coeur, mais c’est le soir du Réveillon, tu vois, y’a plein de touristes. Y’a plein de mecs qui sont déjà bourrés depuis dix heures du matin, des gens qui viennent de tout le pays pour s’éclater. Et c’est une ado de seize ans. Qui a juste disparu, ‘fin, ça fait peur quoi.

Joséphine avait un souvenir plutôt clair de cette soirée. Elle avait quatorze ans alors et elle avait obtenu l’autorisation exceptionnelle de suivre son grand-frère dans les pérégrinations du reste des jeunes, qui profitaient de la fête dans tout le quartier. Elle se rappelait encore de son excitation, elle trépignait. Elle voulait qu’on célèbre Isobel et hop, qu’on puisse aller s’amuser. Tout était prêt dans le Chaudron, les buffets du Réveillon et de l’anniversaire étaient prêts. La musique retentissait déjà, c’était la cohue, comme à chaque grand évènement. Mais l’ambiance avait commencé à se déliter peu à peu. Elle se souvenait parfaitement de l’inquiétude de son grand-père, qui avait téléphoné à tout le quartier. Ils avaient même appelé les membres de la famille qui vivaient dans le bayou et ne s’étaient pas déplacés. Elle se souvenait des prêtresses, qui, discrètement, l’avaient cherchée avec un pendule sans que cela ne donne quelque chose. Un très mauvais présage. Évidemment, ils avaient compris par la suite que Isobel cherchait simplement à dissimuler sa trace... Mais ce soir-là, cela aurait pu simplement dire qu’elle avait été assassinée et dissimulée dans le coffre d’un pick-up. Le nouvel an festif des jeunes s’était transformé en battue. On avait parcouru le quartier français sous toutes les coutures, au milieu des fêtards alcoolisés, de la foule agitée. Rien. Leur grand-père était livide d’inquiétude. Son prénom était sur toutes les lèvres.

- C’est le lendemain qu’on a découvert qu’elle n’avait pas vraiment disparu, qu’elle s’était barrée, en vrai. D’ailleurs, elle s’est barrée avec de l’argent volé à sa mère, mais également un grimoire du temple, un grimoire appartenant au coven. Elle est également partie avec quelques artefacts magiques, deux dagues. Qui nous appartient, qui appartient à la famille. Et elle, pendant qu’on lui installait son gâteau d’anniversaire, elle cambriolait le temple.  

Aux premières lueurs du jour, leur tante Isadora et sa mère, Caroline, avaient fouillé sa chambre pour découvrir qu’il y manquait de nombreuses affaires. Les photographies épinglées au mur avaient disparu, laissant une légère décoloration sur le papier-peint. Moins de vêtements. Plus de baguette magique. Les grimoires disparus. Elle venait tout simplement de les avoir. Cela avait été un coup de massue sur tout le coven. Pourquoi ? Qu’est-ce qui s’était passé pour qu’elle disparaisse comme cela ? Pour qu’elle les trahisse ainsi ? Isadora était entrée dans une colère noire.

- Ensuite, elle n’a plus jamais donné la moindre nouvelle. Elle s’est planquée, parce qu’on la cherchait, évidemment qu’on la cherchait. Elle se planquait de nos charmes de localisation. Elle n’a jamais écrit, jamais appelé, jamais dit « hé, je suis vivante. » Elle a disparu pendant seize ans. Elle n’a jamais dit à notre grand-père qu’elle allait bien. Elle s’en foutait de savoir la peine que cela lui faisait. Et ça lui a brisé le coeur ! ajouta Joséphine avec un éclat de colère. Il était si malheureux. Il a déclaré sa disparition à la police moldue. Ensuite, pendant des années, il est allé tous les vendredi au poste pour savoir s’ils avaient des nouvelles. Il avait fait des petites affiches. Il est allé jusqu’à Lafayette et Bâton Rouge pour en coller, au cas où elle se serait rapprochée d’un autre coven. Mais rien. Elle n’a jamais eu aucun mot de remords, de regrets, une pensée pour lui. Pour lui, ou pour sa mère, ou pour nos tantes, ou pour nous, ses cousines, d’ailleurs. Ou pour Abel, son grand meilleur ami. Elle s’était débarrassée de nous. Même quand l’ouragan Katrina a frappé la Nouvelle-Orléans, que la ville a été ravagée, que certains d’entre nous sont morts, elle n’a rien dit. Rien fait. Pas un mot. Le silence.

Quand ils avaient compris ce qui s’était véritablement passé, en 1993, une vague de colère avait parcouru le coven. Elle avait pris tout ce qu’elle pouvait prendre, leur enseignement, leur magie, leurs artefacts, elle avait communié avec eux lors de sa cérémonie des seize ans... Et s’était barrée comme une voleuse une fois tout cela en poche, sans un merci, sans un regard, sans une pensée pour ceux à qui elle manquait, pour leur grand-père de qui elle avait toujours été la petite favorite. Sans une pensée pour leurs morts, pour leurs pertes, lorsque l’ouragan avait éventré leur quartier et leurs familles.

- Et la cerise sur le gâteau, je te la fais en mille. Seize ans plus tard. Mademoiselle a des soucis avec sa magie, parce qu’elle pratique toute seule des sortilèges puissants. Alors vers qui se tourner ? Bah les bonnes poires qui l’ont éduquée, pardi. Elle est revenue, comme une fleur, avec Abel Laveau. « Coucou c’est moi. » Alors qu’est-ce qu’on pouvait faire ? La laisser comme ça, se faire consumer par sa magie ? On aurait dû, franchement. Mais non, les prêtresses l’ont aidée à reprendre le contrôle. Et la meilleure, c’est qu’elles l’ont laissée revenir dans le coven. Alors je ne veux pas juger les prêtresses, prévint Joséphine, comme si cela allait leur revenir aux oreilles. Mais elle nous a planté un couteau dans le dos et nous, on tend l’autre joue. Sans vraiment de pénitence.

Elle savait que cela n’avait pas été aussi simple que cela. Elle savait que le débat avait été houleux entre les prêtresses, certaines voulaient lui fermer la porte. Puisqu’elle avait voulu partir et bien, qu’elle aille au diable. Ils pouvaient excommunier, c’était une possibilité pour le coven. Mais Isobel avait des pouvoirs puissants, et des capacités précieuses. Des capacités utiles, pour le coven. Elle était une nécromancienne de talent et cette corde manquait à leur arc. De plus, elle était de leur sang et n’avait pas cherché à leur nuire frontalement, ce qui aurait mérité une punition. Elle avait été acceptée de nouveau, à une voix près. Mais l’acceptation des prêtresses n’était pas le pardon de la famille.

- Moi, j’aurai voulu qu’elle s’excuse. Qu’elle s’excuse publiquement. Qu’elle nous demande pardon, qu’elle demande pardon à toutes les personnes blessées et inquiétées par sa faute. Et qu’ensuite, elle fasse profil bas, pendant plusieurs années, qu’elle l’écrase. Mais non. Elle est toujours là, avec son arrogance, parce qu’elle ne se prend pas pour de la merde de rougarou, hein, Isobel. Ça m’énerve. Elle a fait de la peine à tout le monde, elle a mal agi, elle s’en sort trop bien, elle le mérite pas. Elle aurait dû souffrir plus.

Elle s’était un peu emportée dans son récit, comme si ces sentiments ne demandaient qu’à sortir. Elle eut un léger haussement d’épaules en guise d’excuses à Roy. Machinalement, elle promenait ses mains au dessus de l’eau du jacuzzi. Lentement, un tourbillon sembla se former entre ses doigts.

- Ouais, c’est pas toujours facile, d’accord mais... Non, j’ai jamais jamais eu envie de partir. C’est chez moi, là-bas. J’veux dire... Ok, y’a des règles mais y’a une raison. Déjà, on maîtrise des magies difficiles, s’il n’y avait pas de règles, ça serait le chaos. Et ensuite, rester en coven, ça sert à préserver l’héritage de nos ancêtres, ils se sont battus pour le conserver. Regarde, partout dans le monde, la magie tend à s’uniformiser. Vous pratiquez encore la magie druidique, vous ?   Elle n’attendit pas vraiment la réponse. Nous, on refuse de perdre notre héritage.

Le tourbillon d’eau ralentit doucement.

- Et ouais, c’est pénible des fois d’être toujours collé à ta famille. Des fois, j’aimerais bien être tranquille, ne pas tout le temps croiser des gens que je connais. J’aimerais bien pouvoir faire des trucs sans que tout le monde ne soit au courant le lendemain. Certains sont bien relous. Mais c’est la famille, aussi. C’est comme ça. On se serre les coudes. On essaye, c’est pas toujours facile parce que, bah y’a plein d’histoires, mais en tout cas, on se protège, personne nous cherche des noises, crois-moi. Moi, quand j’ai eu ma fille, la première, j’avais seize ans, j’étais une gamine et bah j’ai pu compter sur ma famille, même s’ils ont mal parlé dans mon dos, chuis sûre. De toute façon, on a pas trop le choix, la magie vaudou, ça se pratique en coven, c’est comme ça qu’on a de la puissance. Tu peux pas avoir le Niffleur et la bijouterie. Isobel, je sais pas ce qu’elle en pense, mais c’est comme si elle nous disait tout le temps qu’on était pas assez bien pour elle.
Roy Calder
Roy CalderPropriétaire d'un haras
Messages : 2891
Profil Académie Waverly
Louisiana peaches [Roy ; Joséphine Lavespère ; Isobel] Icon_minitimeVen 25 Déc 2020 - 0:18
Ce long récit que Joséphine entama, Isobel lui en avait déjà fait un similaire, environ deux ans plus tôt. Roy s’en souvenait très bien, elle avait frappé à sa porte un premier janvier au matin, la mine tendue, la voix rauque, les traits fatigués par bien autre chose qu’un réveillon arrosé. Il s’en souvenait parce que cette nuit là, après sept années passées dans une relation d’amis et d’amants à la fois, Isobel avait enfin levé le voile sur les secrets de son passé. Elle lui avait enfin expliqué d’où elle venait et d’où elle tirait cette magie occulte qu’elle exerçait dans le plus grand secret. C’était la première fois qu’elle avait prononcé le mot « coven » face à lui. Quelques mois plus tard, il rencontrait Sophie Lavespère au bar des Folies Sorcières et il découvrait une Isobel plus fragilisée que jamais par le retour brutal de sa famille dans sa vie. Ces temps difficiles pour elle leur avait permis de se rapprocher tous les deux : Roy lui avait offert son soutien, de toutes les manières possibles, par son écoute, par des services rendus, des services parfois discutables, comme cette nuit où il avait rendu une visite à Abel Laveau pour le menacer.  

Cette période lui paraissait très loin et très proche à la fois, parce qu’il pouvait encore se souvenir de quelques phrases qui l’avait marqué. Des mots qui l’avait surpris, choqué, glacé le sang. « J'ai trahi mon coven et c'est la chose la plus impardonnable à la Nouvelle-Orléans ». « Cela fait seize ans que j'ai enfoncé un couteau dans le dos des Lavespère, Roy. Ils me feraient payer chaque minute de ces seize années ».

Leur présent leur prouvait que finalement, ce retour vers sa famille n’avait pas été aussi tragique qu’elle avait pu l’imaginer de prime abord. Les Lavespère avaient fini par l’accepter de nouveau parmi eux, Roy savait qu’elle retournait à la Nouvelle Orléans de temps à autres, et il avait même eu le privilège de l’accompagner une fois.

Mais tout n’était pas pardonné pour autant. C’était ce que lui avait dit Isobel et c’était ce que démontraient également les paroles et l’attitude de Joséphine.

Roy l’observait autant qu’il l’écoutait parler. A l’inverse de sa cousine, cette femme était transparente dans ses expressions, il pouvait voir son agitation, son indignation, sa colère, alors qu’elle revenait en détails sur cette fameuse soirée où elle était partie. Les blessures causées par le départ brusque d’Isobel étaient encore présentes, c’était évident. Isobel était partie pour obtenir sa liberté, son droit le plus essentiel et le plus humain dont elle se sentait dépossédée. Mais ce faisant, elle avait trahi les siens.

Pour la première fois, Roy obtenait le récit d’une de ces personnes que sa meilleure amie avait du abandonner pour pouvoir vivre sa vie. Il se confrontait à ces émotions générées par les actes d’une personne proche de lui, et une part de lui s’en sentit heurté. Ce n’était pas facile de recevoir aussi directement la rancoeur profonde de quelqu’un d’autre, à l’égard d’une personne qu’on aimait énormément. Une loyauté primaire chez Roy lui donnait envie de prendre la défense de sa meilleure amie, et certainement qu’il l’aurait fait quelques années plus tôt, quand il était encore trop jeune et manquait de maturité dans ses relations.

Maintenant, il avait le recul suffisant pour ne pas avoir de raisonnement binaire et manichéen qui consistait à dire qu’il y avait des méchants et des gentils dans une situation conflictuelle. Il pouvait considérer la scène telle qu’elle était : Joséphine qui lui faisait part de son propre ressenti sur une situation conflictuelle, un ressenti tout aussi valable et légitime que celui que pouvait exprimer Isobel. Et même si son coeur penchait pour sa meilleure amie, qu’il aimait et connaissait depuis des années, dont il avait recueilli toutes les confidences, Roy restait malgré tout quelqu’un d’extérieur au conflit qui l’opposait à sa famille et dans cette qualité, il pouvait faire preuve d’objectivité. Il pouvait comprendre et compatir avec la colère, la peur, la déception, le chagrin que les mots de Joséphine décrivait pour parler d’elle et des membres de sa famille qui s’étaient sentis trahis.

Et toujours dans cette qualité d’observateur extérieur, il pouvait également plus facilement déceler ce qui était réellement à l’oeuvre dans ces tensions sous-jacentes et permanentes entre Isobel et le reste des Lavespère : un évident manque de communication. C’était flagrant. En la dépeignant comme une femme profondément ingrate, égoïste et insensible, Joséphine n’avait aucune idée de ce que ressentait réellement sa cousine, de la culpabilité qui l’avait saisie par moments, des responsabilités qu’elle se reconnaissait dans cette histoire et que Roy, lui, l’avait entendue exprimer. Inversement, il pouvait deviner que ce besoin de réparation que Joséphine exigeait et lâchait en s’emportant dans son discours, Isobel ne l’avait jamais entendu non plus. Elle n’avait jamais entendu sa cousine lui dire quelque chose d’aussi terrible que « Tu aurais dû souffrir plus ». Un voeu cruel, mais qui trahissait chez Joséphine la manière dont elle vivait cette situation : c’était elle et sa famille qui avaient souffert, pas Isobel.

Encore une preuve qu’à aucun moment, elles avaient réellement discuté des raisons de son départ et de ce qu’elle avait traversé pendant ces seize années de fugue.

Enfin, Joséphine conclut sur la manière dont elle se sentait de son côté, dans son coven. Roy y perçut une grande part de résignation docile -le fameux « c’est comme ça »- dans laquelle il ne se reconnaissait personnellement pas. Il se sentait bien plus proche du désir d’accomplissement personnel d’Isobel, plutôt que de ce discours qui consistait à accepter des règles établies par une autorité supérieure, mais il le garda pour lui.

« Isobel, je sais pas ce qu’elle en pense, mais c’est comme si elle nous disait tout le temps qu’on était pas assez bien pour elle. »

Parce que cette phrase fut suivie d’un silence, Roy comprit que son amante avait terminé de vider son sac et que c’était son tour de réagir. Il bougea légèrement dans sa place, dans la recherche d’une position plus confortable et de ses mots :

« C’est pas mon histoire. Alors je vais pas parler à sa place. Mais… » Il prit un temps d’arrêt, conscient de la délicatesse de ce moment et que le moindre mot de travers sur un sujet aussi sensible pouvait créer des dégâts. Or il n’avait aucune envie d’ajouter de l’huile sur le feu entre les Lavespère ou pire, s’attirer les foudres d’Isobel qui n’était déjà actuellement pas très avenante avec lui. « Elle se rend compte de beaucoup plus de choses que tu ne le penses, déclara t-il en plantant son regard dans celui de la jeune femme. Sur ce qu’elle vous a fait, je veux dire. » Il pouvait citer beaucoup d’exemples. Ce récit sur le vol du temple, par exemple, il n’avait même pas ému Roy, parce que Isobel le lui avait déjà raconté, en utilisant les mêmes mots. « C’était du vol, disons les choses clairement » avait-elle admis. « Je ne sais pas si tu as déjà parlé avec elle de tout ça -il avait sa petite idée à ce sujet- mais… Elle a jamais pris ça à la légère et elle en a souffert aussi de son côté. »

Il s’arrêta là, pour ne pas dévoiler ce qu’Isobel ne voulait peut-être pas que sa cousine sache sur ses états d’âmes. C’était leur relation à toutes les deux et leurs problèmes. A part ouvrir une porte pour laisser une chance à Isobel de redorer son blason et réparer cette relation abîmée, il ne pouvait pas faire grand-chose de plus.

Pour éviter de glisser trop loin dans un terrain où il n’avait pas forcément sa place, Roy déplaça légèrement le sujet vers des thèmes plus légers en s’approchant de Joséphine de quelques brasses, avec un sourire aux lèvres.

« N’empêche, tu parles de ton coven avec une espèce de fatalisme, genre, "c’est comme ça et faut s’y faire" mais… Y a des côtés positifs quand même ou pas ? Vas-y, fais-moi un peu rêver sur ce qu’on vous apprend à faire, là-bas. »

Un autre sujet sur lequel Isobel n’était pas très bavarde et dont il sentait que Joséphine, elle, serait plus encline à se vanter.


Roy Calder

Walking on the sunny side

KoalaVolant
Contenu sponsorisé
Profil Académie Waverly
Louisiana peaches [Roy ; Joséphine Lavespère ; Isobel] Icon_minitime