[Pièges - Toilettes de Mimi] Romance in the Chamber of Secrets

- Romaaaance in the Chamber of Secrets !

Perséphone s'approcha du lavabo des toilettes en chantonnant et remonta ses manches pour se laver les mains. Mimi semblait être de sortie ce qui n'était pas pour lui déplaire. La dernière fois, elle avait dû subir tout un monologue sur la manière dont Josh Bennet, le capitaine de Serdaigle, ne la regardait jamais. En même temps, si Séphy avait croisé Josh dans les toilettes pour filles du deuxième étage, elle se serait très sérieusement posé des questions. Et l'aurait collé sans hésiter. Tout en continuant de chantonner un vieux tube des Bizarr's Sisters, elle jeta un coup d’œil au miroir et fouilla dans son sac pour retrouver sa brosse à cheveux. Elle faisait sa ronde habituelle mais s'était arrêtée aux toilettes. Et après tout, le château semblait plus que calme aujourd'hui, elle pouvait bien s'accorder une petite pause.

- Oh, come to me for a romance in the Chamber of Secrets. I am waiting for youuu...

Elle retira son serre tête bleu et commenca à démêler ses cheveux tout en chantonnant l'air qui lui restait en tête depuis qu'elle l'avait entendu sur la RITM en se réveillant ce matin. Elle adressa un léger sourire à son reflet, redressa son badge de préfète et rangea sa brosse dans son sac avant de le basculer sur son épaule, prête à reprendre sa ronde. Elle était de bonne humeur, la journée était agréable... Que demander de plus ? Elle avait également terminé ses devoirs et pourrait se poser tranquillement dans la Salle Commune après sa ronde, avec un bon bouquin.

- Save me from the monster, save me from the evil spirit. Oh, oh, oh. Come to me, come for me. I'll be your romance, your romance in the Chamber of Secrets !

Un bruit sourd la fit sursauter et elle se retourna, scrutant chaque recoin des toilettes.

- Mimi ?

Rien ne lui répondit. Méfiante et légèrement angoissée, Perséphone haussa la voix. Elle avait l'impression de ne pas être seule. Il y avait peut-être une fille dans une des cabines. Soit rien de bien effrayant. Légèrement soulagée par cette hypothèse, elle soupira. Elle devenait vraiment paranoïaque. Elle se retourna de nouveau vers le miroir, récupéra la bague qu'elle avait posé sur le rebord de l'évier pendant qu'elle se lavait les mains et commençait à s'éloigner quand un craquement sourd retentit derrière elle. Et elle ne l'avait pas imaginé, elle en était sûr. Lentement, elle fit basculer son sac devant elle et fouilla compulsivement dedans à la recherche de sa baguette magique. Le craquement s'intensifia. De plus en plus nerveuse, elle renversa carrément le contenu de son sac sur le sol. Deux livres, un parchemin, une bouteille d'encre qui s'en alla rouler un peu plus loin, un poudrier, une plume, deux clés et une pomme. Mais pas de baguette. Inspirant une grande gorgée d'air, elle se releva lentement et se retourna.

Il n'y avait personne. Seulement une enfilade de cabines et l'évier dont elle venait. Mais il y avait ce craquement, qui résonnait dans toute la pièce. Lentement, elle s'approcha jusqu'à l'ensemble d'évier, le coeur battant à toute allure. Du bout des doigts, elle effleura une vasque.

- Si c'est une blague, je ne trouve pas ça drôle ! lança-t-elle d'une voix qu'elle voulait assurée. Je suis préfète !

Elle jeta des coups d’œil autour d'elle. C'était peut-être la plomberie. Et s'il y avait quelqu'un dans les cabines, il allait la prendre pour une folle. Lançant un dernier regard méfiant à la vasque, elle se rapprocha de son sac et entreprit de de ramasser toutes ses affaires. Elle avait son poudrier en main quand un énorme fracas retentit. L'objet alla s'écraser sur le sol, dans un mélange de porcelaine, de verre et de poudre rose. Perséphone se retourna brusquement et ne put retenir un cri strident. Tous les éviers étaient en mouvement, dans un horrible grondement. La structure du meuble s'écartait et dévoilait peu à peu un trou béant qui s'ouvrait sur les profondeurs du sol.

Quelque chose était en train de s'ouvrir et elle avait un très mauvais pressentiment.

Fredonnant entre ses dents, Théo se baladait dans les couloirs. Il était d'une humeur particulièrement joyeuse aujourd'hui, mais était tout seul et ressentait le besoin de se trouver un peu de compagnie. Après avoir travaillé un moment dans la salle commune, il avait compris qu'il n'arriverait pas à se concentrer sur son travail et avait donc décidé de partir à la recherche de Samaël. Le Poufsouffle lui avait dit qu'il partait pour retrouver un groupe d'amis, petit groupe qui comprenait notamment Olivia et Juliet. Si l'idée de se confronter à Baker et Gray ne l'enchantait guère, Théo espérait que les deux garçons seraient suffisamment bien élevés pour ne pas protester contre sa présence, et comme il s'entendait bien avec les trois autres, il devrait parvenir à s'incruster sans trop de problèmes.

Voilà un comportement qui ne ressemblait guère au septième année, mais force était de constater que Théo allait bien mieux depuis qu'il n'était plus complètement seul dans son coin. Certes, ses relations avec Artémis et Cécilya laissaient à désirer mais, contre toute attente, il était parvenu à remplir un tant soit peu le vide laissé par les deux adolescentes. Curieux de savoir ce que pouvait bien fabriquer plusieurs bisounours lorsqu'ils se réunissaient dans le simple but de "traîner entre amis", Théo était pressé de les retrouver pour observer cet étrange phénomène...

Il se dirigeait donc en direction du parc, où il espérait les trouver, quand un cri strident retentit. Comme les quelques personnes présentes, Théo s'arrêta net et tourna la tête vers les toilettes des filles, d'où provenait maintenant un étrange grondement. Sans réfléchir, le jeune homme s'élança en direction des toilettes et courut jusqu'au centre de la pièce, où se trouvait une jeune fille de Serdaigle qu'il ne reconnut pas. Sous leurs yeux ébahis, les lavabos tournaient et s'écartaient pour laisser apparaître un trou sombre et large qui disparaissait dans les profondeurs de l'école... Lorsque le mouvement s'interrompit, Théo resta quelques instants pétrifié, tentant d'analyser cet étrange phénomène. Enfin, il s'approcha un peu du trou pour regarder dedans, ne voyant que l'obscurité.

Sortant sa baguette magique, Théo se retourna et observa autour de lui. Il constata que quelqu'un avait fermé la porte des toilettes, soustrayant le trou béant à la vue des curieux. D'autres personnes les avaient néanmoins rejoint, la Serdaigle et lui, mais personne qu'il ne connaisse vraiment.

"Etrange", murmura Théo en reportant son attention sur le trou. Peut-être que la jeune fille - qui était préfète, vu son badge - avait actionné l'ouverture d'un passage secret sans le faire exprès ? C'était bizarre de mettre l'entrée d'un passage souterrain dans des toilettes pour fille, mais pourquoi pas. Les architectes sorciers avaient parfois de drôles d'idées. C'est alors que l'évidence le frappa, le laissant pantois, stupéfait.

"Dites-moi si je me trompe, mais on ne serait pas dans les toilettes de Mimi Geignarde ? Les toilettes pour filles du second étage ?"

Il n'avait pas besoin de confirmation, de toute façon, il avait forcément raison. Un sentiment d'excitation l'envahit et il jeta un regard exalté vers l'ouverture. L'ouverture de la Chambre des Secrets ! Théo allait pouvoir mettre les pieds dans cet endroit légendaire ! C'était étrange, néanmoins. Il était sûr et certain qu'il n'y avait qu'un seul moyen d'ouvrir ce passage... Théo tourna un regard exalté vers la Serdaigle qui avait crié, et posa les deux mains sur ses épaules tout en la dévisageant. Ce n'était pas son genre de se permettre ce type de familiarités, mais c'était un moment historique !

"Dis-moi...excuse-moi, quel est ton nom ? Tu ne parlerais pas Fourchelang, par hasard ?"

Deux fille et deux garçons dans les toilettes de mimi Geignarde. C'est ce que trouva Aaron en accourrant après avoir entendu un cri dans cette direction. Perplexe, le Serdaigle se demandait ce que cet étrange quatuor faisait là. Il reconnaissait évidemment Ahren Keller - qui n'avait pas entendu parler de lui, surtout dans la salle commune des Serdaigles - et Perséphone Harrington, une préfète de sa maison. Le septième année de Poufsouffle lui disait quelque chose, il partageait quelques cours avec lui. Il s'appelait Nott, mais le prénom échappait à Aaron. Quant à la seconde fille, il s'agissait de Sasha Benson, la petite Serpentard futée de son équipe de rugby. Apparemment, les deux garçons l'avaient précédé de peu dans la pièce. Ayant terminé de fixer les quatre protagonistes, son regard tomba sur le trou béant qui emplissait le milieu de la pièce.

"C'est quoi ce truc?"

En effet, si Aaron avait lu l'histoire de Poudlard et celle de la chambre des secrets en première année, ces souvenirs étaient bien loins. De plus, en tant que né moldu, il n'était pas très attaché à l'histoire sorcière. Les haut faits et geste de Harry Potter, que certains connaissaient mieux que Wikipédia, relevaient pour lui du livre pour enfant délirant. Après sept années, il avait encore du mal à admettre que cela été réel et avait effectivement pu se passer en vrai. Que des arraignées géantes existent, passait encore (même s'il se serait bien passé de les rencontrer), mais un serpent qui vous tuait d'un regard? N'importe quoi. Il ne fit donc pas le lien avec le gouffre qui se trouvait devant lui, espérant simplement qu'on lui donne une réponse claire et satisfaisante, pour continuer son chemin. A l'origine, il devait rejoindre Swann dans la Grande Salle pour une sortie en amoureux après le petit déjeuner, histoire d'apaiser les quelques tensions qui régnaient dans leur couple dernièrement.

Nott avait posé une question étrange à propos de Fourche... quelque chose, auquel Keller répondit qu'il n'y avait aucun risque puisque Perséphone était née-moldue. Aaron allait poser une question lorsqu'un claquement sec se fit entendre. Sursautant, il se retourna et vit que la porte s'était fermée. Le Serdaigle s'approcha pour la rouvrir, mais constata qu'elle résistait, comme si elle avait été verrouillée.

"Alohomora" dit-il fermement en pointant sa baguette sur la porte.

Mais rien ne se passa. Il répéta la formule, au cas où il aurait raté ce Sortilège simplissime, mais à nouveau, rien. Décidant de tenter quelque chose d'un peu plus avancé, il jeta un Charme anti-serrure magique. Toutes les portes des toilettes s'ouvrirent d'un coup en un claquement sec, puis se refermèrent aussi violemment. Perplexe, Aaron regarda sa baguette. Il se débrouillait honorablement en Sortilèges, même si sa matière de prédilection restait la DCFM. Alors, pourquoi ses sorts ne produisaient aucun effet?

"Qu'est-ce que c'est que ce bazar?" demanda-t-il en se retournant vers ses camarades d'infortunes, espérant que l'un d'eux ait fait une mauvaise blague.

A son cri, de nombreuses personne avaient accourues et Perséphone regretta d'avoir perdu le contrôle d'elle-même à ce point. Elle était préfète, elle se devait de montrer l'exemple et d'incarner une figure d'autorité et elle criait comme une fillette. Se maudissant elle-même, elle inspira un grand coup, redressa sa cravate ainsi que son insigne de préfète. Elle releva le menton et analysa la situation de manière rationnelle. Théo Nott, Poufsouffle, septième année bis, bon élève, pas de problèmes, jamais signalé dans les réunions de préfet. Elle hocha la tête, ravi qu'il ne s'attarde pas sur son cri.

- Si, si, c'est bien ici. Mais Mimi doit être de sortie, je ne l'ai pas vue dans le coin...

Elle fut quelque peu surprise de se voir secouer comme un prunier par quelqu'un qu'elle ne connaissait pas mais ne se formalisa pas, trop étonnée par la question de Nott. Son esprit carburant à toute allure, elle jeta un coup d'oeil aux lavabos, à Nott de nouveau puis autour d'eux. Les toilettes de Mimi Geignarde... Et voilà qu'on lui demandait si elle parlait Fourchelang. Il la prenait sérieusement pour une héritière de Serpentard ? Outrée - la dernière fois que la Chambre des Secrets avait été ouverte, il y avait eut des victimes, heureusement, pas de morts - elle fronça les sourcils. Elle avait évidemment entendu parler des faits d'armes d'Harry Potter et de l'histoire de la Chambre des Secrets. Mais c'était une affaire réglée depuis longtemps et en cinq ans, elle n'avait jamais pensé à cela quand elle y allait. Laissant ses yeux s'égarer vers l'ouverture béante, elle ressentit un vertige. Ainsi, c'était là, la Chambre des Secrets s'ouvrait sous ses pieds. Avec un squelette de Basilic en dessous. Une légère nausée l'envahit et elle reporta son attention sur Nott.

- Perséphone Harrington, préfète de Serdaigle. Et non, évidemment, je ne...

Elle fut coupée par une voix qu'elle connaissait bien et elle remarqua l'arrivée d'Ahren qui fit justement remarquer qu'elle était née-moldue et donc pas une charmante mais psychopathe descendante de Salazar. Elle ressentit néanmoins une certaine satisfaction en entendant qu'il avait employé "née-moldue" et pas "Sang-de-Bourbe". Il y avait un certain progrès, avouons-le. Elle lui sourit légèrement en retour et se dégagea doucement des mains de Nott sur ses épaules. Et décidément, tout le monde s'était donné rendez-vous au deuxième étage. Elle vit arriver Aaron Finnigan, un garçon de sa maison en septième année et une petite Serpentard dont les traits lui rappelaient quelque chose. Son petit sourire suffisant lui rafraichit la mémoire. C'était Miss-Fausses-Larmes, qui avait si bien joué la comédie dans la Grande Salle auprès de Killian Gray. Évidemment, elle savait qu'Ahren était loin d'être un ange et que son comportement y était pour beaucoup dans cette altercation. Mais elle avait bien repéré le petit manège de la gamine, même si elle ne pouvait rien faire remarquer sans preuves. De plus, elle était préfète et devait se montrer équitable envers tous les élèves. Même si elle ne supportait pas cette petite. Elle vit avec angoisse Finnigan se retrouver impuissant face à la porte d'entrée et ressentit un noeud d'angoisse. Ils étaient coincés devant la gueule béante de la Chambre des Secrets sans pouvoir sortir de là. Et elle ne pouvait même pas essayer elle-même un sort vu qu'elle n'avait visiblement pas sa baguette magique sur elle. Fantastique. La Chambre des Secrets était ouverte, elle était née-moldue et n'avait pas de baguette magique. Enfin, ce n'est pas comme si on pouvait faire quelque chose contre un Basilic avec une baguette magique. Elle leva les yeux au ciel en entendant le petit exposé de Miss Serpentard et claqua la langue, agacée en voyant son regard vers Ahren. Quelle petite peste. Réprimant l'envie de la remettre en place, Perséphone se contenta de l'ignorer royalement.

- Que ces crochets valent une fortune n'est pas vraiment la question. Ce qui est important de savoir, c'est pourquoi elle s'est ouverte là maintenant et pourquoi nous ne pouvons pas sortir de ces toilettes.

Jetant un coup d'oeil autour d'eux, elle constata qu'il n'y avait aucune autre issue. Agacée, elle soupira.

- Je n'ai pas ma baguette magique. L'idéal serait d'envoyer un Patronus ou d'attendre le retour de Mimi. Vous pouvez vous en occuper ? lança-t-elle aux septième année.

Croisant les bras sur sa poitrine, elle haussa les épaules.

- Je ne sais pas ce qui s'est passé. J'étais juste là, pendant ma ronde, je me tenais devant le miroir - et je ne parle pas Fourchelang - puis cela a commencé à faire du bruit et ça s'est ouvert.

De toute manière, les professeurs allaient bien se rendre compte de leur absence ou même leurs camarades et on les chercherait. Et puis, ils ne risquaient rien, non ? Le Basilic était mort depuis longtemps après tout. N'est-ce pas ?

- Nous sommes en sécurité, décréta-t-elle. Personne ici n'est...

Elle se tourna brusquement vers Ahren.

- Ahren, dis-moi que tu n'as pas de Salazar Serpentard dans ton arbre généalogique.

Réalisant que Nott était aussi Sang-Pur - et venait en plus d'une famille de Mangemorts - elle se sentit soudainement mal. Fronçant les sourcils, elle se tourna vers Nott.

- Et que toi non plus, s'il te plaît Nott. Et vous deux ? lança-t-elle. Dites-moi que vous n'êtes pas trop de Sang-Pur ?

S'il y avait vraiment un héritier ici, elle craignait soudain pour sa sécurité.

L'excitation de Théo retomba comme un ballon de baudruche quand un petit première année, qu'il reconnut comme étant le petit frère d'Ulrich, lui affirma que cette fille de Serdaigle était une née-moldue.

"Oh", murmura Théo d'un ton déçu, "mais alors..."

Alors qui ? Se détournant de Perséphone, Théo dévisagea chacune des personnes présentes. Outre Perséphone et Ahren Keller se trouvaient là Aaron Finnigan et une fillette de Serpentard qu'il ne reconnut pas. Aucun d'entre eux ne pouvait avoir ouvert ce passage de toute façon, puisque Théo était arrivé en premier à l'entente du cri de la préfète... Peut-être qu'il avait tort, qu'il s'agissait là d'un passage ordinaire ? Non, il n'y avait aucune chance pour que deux ouvertures secrètes existent simultanément dans de vulgaires toilettes pour filles... La Chambre des Secrets avait dû s'ouvrir toute seule, ce qui ne s'était jamais produit en un millénaire d'existence de l'école. Les sourcils froncés, Théo observa Aaron qui tentait en vain d'ouvrir la porte des toilettes, avant de s'interroger sur la situation. Théo trouvait lui aussi que tout ça était bien étrange, mais le plus bizarre résidait encore dans le fait qu'il soit le seul à avoir identifié le passage.

De façon surprenante, ce fut la petite anonyme de Serpentard qui avança l'explication, sur un ton qui eut le don d'agacer ses camarades. Théo ne manqua pas le claquement de langue de Perséphone, lui-même ayant tiqué sur le " C'était un basilique, heureusement il a été tué par Harry Potter, sinon nous serions tous morts à l'heure qu'il est". Il en déduit que la petite Serpentard était aussi une sang-de-bourbe, et songea qu'il allait être dur de les convaincre de sauter dans ce passage... Bah ! Il pourrait bien y aller tout seul, il n'avait pas besoin de mioches à surveiller de toute façon ! Quoi qu'il en soit, il était hors de question qu'il laisse passer une occasion pareille, et s'il voulait y entrer ce n'était pas pour récolter des crochets de basilic mais bien pour...se recueillir, d'une certaine façon.

Désireux de se débarrasser des sangs-de-bourbe pour pouvoir aller explorer tranquillement, Théo approuva d'un signe de tête la suggestion de Perséphone. Il tira sa baguette magique, se concentra sur un évènement heureux - en l'occurrence, sa réconciliation avec Samaël - et lança la formule.

"Spero Patronum", murmura-t-il.

Comme d'ordinaire, un gros loup argenté jaillit de sa baguette et se planta devant son maître.

"Va dire au professeur Adamson que nous sommes coincés dans les toilettes de Mimi Geignarde, et que la Chambre des Secrets a été ouverte."

Voilà qui devrait mettre un peu d'animation en salle des professeurs, songea Théo en souriant intérieurement. Le loup grogna en signe d'assentiment et bondit en direction de la porte, mais il se heurta au panneau de bois comme s'il était fait de chair et non de fumée. Les sourcils froncés, Théo observa son patronus qui bondit en hurlant dans la pièce, se heurtant à chaque mur, emprisonné comme eux. Puis, ne pouvant accomplir sa mission, le patronus s'évanouit dans les airs. Perplexe, Théo reporta son attention sur ses camarades, son enthousiasme commençant lentement à se muer en inquiétude.

"Bon. Je crois qu'on a définitivement un problème de magie dans cette pièce..."

Perséphone expliqua alors ce qu'elle était en train de faire lorsque le passage s'était ouvert, à savoir pas grand chose, puis commença à délirer sur l'arbre généalogique d'Ahren et lui. Le jeune homme tiqua sur sa dernière phrase, et posa sur la préfète un regard condescendant.

"Trop de sang-pur ? Comment peut-on être trop de sang-pur, explique-moi ?"

Il se rapprocha de Perséphone et vrilla son regard bleuté dans celui de la préfète, tout en levant distinctement sa baguette.

"Et si j'étais un héritier de Serpentard, que ferais-tu ? Coincée dans ces toilettes sans possibilité d'en sortir ? Et si la Chambre n'avait pas encore délivré tous ses secrets...?"

Un léger silence suivit ses paroles, suite à quoi Théo éclata de rire avant d'abaisser sa baguette. Ces nés-moldus ne doutaient de rien, franchement. Il avait un peu de mal à les comprendre. S'il avait été propulsé dans un monde dont il ne connaissait rien, dans une école qui venait de connaître une guerre terrible, il se serait dépêché d'apprendre tout ce qu'il avait à savoir sur l'histoire de ce monde et de cette école.

"Je te fais marcher, bien sûr que non, personne ici ne descend de la lignée de Serpentard... Plonger le nez dans un bouquin d'histoire ne vous ferait pas de mal, je pensais qu'un Keller saurait reconnaître ce passage. La dernière édition de L'Histoire de Poudlard est très bien, à ce sujet."

Jetant un regard hésitant à son camarade de septième année, Théo ajouta :

"Tu es Aaron Finnigan, c'est ça ?"

C'était la première année où ils avaient des cours en commun et Théo n'avait pas appris tous les noms. Celui-ci l'avait cependant interpellé et il l'avait retenu, même s'il n'avait jamais adressé la parole à Aaron.

"Je pensais que tu étais relié à Seamus Finnigan... Si c'est le cas, il pourrait sûrement te raconter comment son camarade de dortoir Harry Potter a ouvert la Chambre et tué le basilic. Une histoire passionnante, avec le journal de Tom Jedusor, autrement dit Lord Voldemort..."

Le regard de Théo se perdit dans le vague quelques instants, alors qu'il regrettait pour la énième fois de ne pas être né dix ans plus tôt. Il était arrivé après la bataille... Reprenant ses esprits, Théo se tourna à nouveau vers Perséphone et ajouta :

"Enfin bref, tout ça pour dire qu'il n'y a nul besoin de descendre de Serpentard pour ouvrir la chambre. Les Fourchelang sont très rares mais ils ne sont pas tous des héritiers de Serpentard... Les enfants de Potter pourraient bien hériter de ce don, qui sait !"

Il haussa les épaules et se pencha à nouveau vers l'ouverture, une lueur d'excitation brillant au fond de ses yeux.

"Puisqu'on est coincés ici, autant aller voir ! C'est un endroit de légendes qui s'ouvre à nous... Tant de personnes l'ont cherché et si peu de personnes l'ont trouvé, c'est vraiment une chance extraordinaire... Et puis on ne risque rien, le basilic est mort. Alors qu'ici, on risque que Mimi vienne gémir dans nos oreilles."

Enfin, peut-être pas, puisque son patronus n'avait pas pu sortir, il était envisageable que le fantôme ne puisse entrer... Se redressant, Théo observa ses camarades pour obtenir leur verdict.

A peine Aaron avait-il terminé sa phrase, demandant une explication, que la petite Sasha Benson répondit. Elle parla vite et bien, démontrant encore une fois sa vivacité d'esprit - et probablement une tendance à être lèche-botte - et sa culture générale en matière de sorcellerie. C'était donc la Chambre des Secrets... Aaron jeta un oeil sceptique au trou, se rappelant vaguement avoir lu quelque chose là-dessus. Mais, si l'on en croyait les livres d'histoire de la magie récents, il s'était passé tellement d'évènements incroyables ces vingt dernières années que la Chambre des Secrets lui semblait être un évènement mineur.

Perséphone proposa alors qu'on envoie un patronus prévenir les professeurs. Aaron laissa quelqu'un d'autre s'en charger, sa baguette étant visiblement hors d'usage. Mais Nott ne rencontra pas plus de succès, puisque son patronus fut bloqué contre la porte. Comme le septième année le fit remarquer, ils avaient un problème magique.

"Super" grommela Aaron "nous sommes dans un château cent pour cent magique et nous n'avons plus de magie."

Ca revenait à être privé d'électricité en plein coeur de Trafalgar Square. Pas très réjouissant. Perséphone s'inquiéta alors de savoir s'ils étaient trop de Sang-Pur, ce à quoi Nott et Keller réagirent immédiatement. Devant un tel comportement, le Serdaigle ne pu s'empêcher de lever les yeux au ciel. Bon sang, il avait fallu qu'il se retrouve coincé avec deux idiots rétrogrades. Si cela ne le surprenait pas de la part d'Ahren, il avait espéré que quelqu'un de plus âgé aurait un peu réfléchi à la question. Ces idées bizarres sur le Sang lui échappaient complètement. Il avait bien compris que c'était la version sorcière du racisme, mais cela lui semblait encore plus ridicule que craindre la couleur de peau des autres. Après tout, ça ne se voyait même pas, le sang. Et il était certain de pouvoir avoir le dessus que mini-Keller même sans baguette magique. Celui-ci entonna d'ailleurs son refrain habituel sur Salazar qui se retounerait dans sa tombe, blablabla...

"Oh, s'il te plait Keller, change de disque, tu nous sors le même refrain tous les soirs. Innove un peu!"

Nott lui demanda ensuite s'il était bien Aaron Finnigan. "Oui, pourquoi?" demanda-t-il un peu perplexe. Ah, pour ça. Visiblement, les Sang-Pur avaient tous une passion pour l'histoire glorieuse du monde magique, et une incapacité chronique à aller vers l'avenir.

"Seamus est mon cousin, oui. Mais il a étrangement des occupations plus intéressantes que de radoter sur de l'histoire anciennes. Enfin, chacun ses passions, si tu veux te noyer dans les arbres généalogiques, c'est ton choix. Le monde avancera quand même."

Parce qu'ils commençaient sérieusement à l'énerver, ces fichus conservateurs. Ne pas connaître la Chambre des Secrets apparaissait comme un crime de lèse-majesté, alors que franchement, qu'est-ce qu'un cadavre de serpent géant avait de fascinant? Sans compter qu'ils devraient plutôt vouloir oublier que leur idole Voldemort s'était fait écraser par un gamin de douze ans, et que cette chambre en était le symbole. Mais ils ne semblaient plus à un paradoxe près, puisque Nott proposa d'aller voir.

"Brillante idée, oui, sautons dans un trou dont personne ne connait l'emplacement. Histoire que nous restions coincés en bas jusqu'à ce que la porte des toilettes s'ouvre, que les lavabos se referment et que personne ne nous trouve. Oh, sans oublier que remonter sans magie, ça relève de la simplicité même."

Bon Dieu, non seulement les Sang-Pur radotaient, mais ils n'avaient pas non plus de cerveau. Aaron allait demander de l'aide à Perséphone, qui semblait plus rationnelle, quand il eu la confirmation de sa pensée précédente, puisqu'Ahren Keller sauta. Dans le trou. Aaron resta un instant bouche bée, ne croyant pas ce qu'il venait de voir, puis se précipita en jurant au bord du précipice.

"Mais il est complètement stupide, ce gamin! Insupportable, et stupide!"

Essayant d'ignorer que le mot stupide lui rappelait un épisode douloureux du mois précédent, le Serdaigle se retourna vers les trois autres, résigné.

"Bon, je suppose qu'on n'a pas le choix et qu'il faut le suivre? Virtanen nous étranglerait si on laissait mourir l'un de ses élèves..."

Il ignorait bien sûr que le professeur de Runes était sûrement plus près de lui décerner la palme du mérite, sinon, il ne se serait pas donné autant de peine et aurait attendu tranquillement que la porte s'ouvre et qu'Ahren reste bloqué à l'intérieur pour toujours (le tout accompagné d'un rire diabolique de méchant de film moldu). Mais, comme Aaron ne savait pas tout cela, il saisit sa baguette pour se donner du courage.

"Il faut peut-être que l'un de nous reste en haut pour aller avertir les professeurs si jamais la porte se rouvre. Sasha, je crois que c'est plus prudent que tu ne descendes pas."

Puis, considérant la situation réglée, il sauta à son tour. La chute ne fut pas agréable, mais moins dure que ce à quoi il s'était attendu. Le gouffre se transformait rapidement en un tobbogan de pierre humide et long, très long. Parfois, on apercevait d'autres ouvertures, plus petites, qui semblaient mener autre part. Après ce qui lui sembla un temps interminable, Aaron atterrit lourdement sur le sol. Sa chute fut heureusement amortie par une petite forme hautement exaspérante. Le Serdaigle se releva prestemment et tira Ahren hors de la piste d'atterrissage, sans même s'excuser. Il aurait voulu lui hurler dessus, mais avait fini par comprendre que le petit s'en moquerait éperduement. A vrai dire, il tenait plus du Serpentard que du Serdaigle, à ne se préoccuper que d'arriver à ses fins.

"Si on arrive à sortir d'ici, Keller, je te tue" murmura-t-il tout de même d'une voix sourde.

En attendant que les deux autres arrivent, Aaron eu le réflexe de murmurer "Lumos", mais rien ne se passa. Super. Ils étaient dans le noir total, sans aucune possibilité d'avoir un peu de lumière. Brillant.

Perséphone regarda avec frustration le Patronus du Poufsouffle rester coincé. Agacée, elle le fusilla du regard comme si cela pouvait changer quelque chose à leur situation. Elle ne contrôlait rien et n'aimait décidément pas cela du tout. La situation était angoissante et dérangeante et cela n'avait rien à voir avec le fait qu'ils étaient coincés tout près de la Chambre des Secrets ouvertes. De plus, elle eut l'impression de prendre une douche froide quand Ahren lança "impur". Elle ne s'était jamais attendue à des miracles de sa part, pas en si peu de temps, mais elle avait tout de même pensé qu'il la respecterait un minimum, après leur conversation et l'épisode de la Grande Salle. Mais elle s'était leurrée, visiblement, bercée d'illusion. Agacée, elle lui jeta un regard noir et retint la réplique cinglante qui lui brûlait les lèvres, tandis que ce petit ingrat évitait son regard. C'était peut-être idiot, mais Séphy aimait remettre les gens dans le droit chemin et avoir l'impression qu'elle les avait aidé. C'était pour cela qu'elle avait insisté auprès de Valentyne pour le devoir. Et qu'elle avait parlé à Ahren, qu'elle l'avait conseillé. Elle aimait se sentir utile. Mais visiblement, avec le dernier, elle avait perdu son temps. Amère, elle lui jeta un dernier regard condescendant et se détourna.
Il fallait qu'ils sortent, autant se concentrer sur cela plutôt que sur la déception qu'elle ressentait à l'égard d'Ahren Keller. Peut-être qu'ils pourraient forcer la porte ? Que ce soit la serrure ou les gonds. Ils n'allaient tout de même pas rester ici ! Elle s'apprêtait à soumettre cette hypothèse quand Théo Nott s'approcha d'elle, la baguette levée et persiflant des menaces. Sans se démonter, Séphy vrilla son regard dans le sien en relevant le menton. Ils étaient beaux les Sangs-Purs s'ils se mettaient à attaquer des gens sans baguette ! Fait qu'elle regrettait amèrement, d'ailleurs ! Elle était une bonne baguette, elle pourrait se défendre s'il le fallait et protéger les deux petits. Ahren n'avait absolument rien à craindre, normalement, mais la petite Benson ne semblait pas de Sang-Pur au vu des remarques qu'elle subissait. Elle espérait aussi qu'Aaron intervienne si les choses tournaient mal. Tandis que Théo se plantait devant elle, elle calcultait les possibilités de remonter son genou assez vite pour frapper assez fort et ainsi rendre ce goujat prétentieux eunuque. Ce serait un grand service rendu à l'école, qu'un héritier de Serpentard ne puisse plus se reproduire ! Parce qu'elle était peut-être sans baguette mais elle n'avait pas l'intention de se laisser faire. Quand cet abruti éclata finalement de rire en affirmant qu'il plaisantait, elle le fusilla du regard en croisant les bras sur sa poitrine. Quel idiot ! Quatre ans d'âge mental ! Et cela se disait Sang-Pur, noble et aristocratique !

- Je pense que le moment est mal choisi pour ce genre de futilités, persifla-t-elle, glaciale.

Les Sang-Purs se donnaient des grands airs, à Poudlard, mais même si elle était née-moldue, elle restait de la même classe qu'eux ! Voire même supérieure ! Les gens que fréquentait sa famille n'auraient jamais agi avec un tel mauvais goût. Elle avait elle aussi reçu une éducation irréprochable et était du même rang qu'eux. Alors qu'ils ne viennent pas parader devant elle avec leurs petits airs supérieurs ! Bien sûr, elle ne reniait pas ses origines, loin de là. Mais regardait tout de même parfois avec envie les jeunes filles des grandes familles, un peu envieuse. Elle aussi aurait bien aimé recevoir une éducation magique dès le début et porter un grand nom chargé d'histoire. Le sien, Harrington, l'était. Mais pas ici, pas dans ce monde. Malheureusement. Elle en était là de ses pensées quand la voix de Nott, proposant d'aller faire un petit tour dans la Chambre retentit. Abasourdie - et atterrée, aussi, il fallait le préciser - elle se tourna vers lui brusquement, faisant voler ses longues boucles brunes. Mais il avait complètement perdu la tête, ce garçon ?

- Mais Seigneur, je peux savoir à quoi tu penses ? C'est la Chambre des Secrets ! Et si je veux bien lui reconnaitre un potentiel intéressant, dirons-nous, descendre dedans serait la chose la plus stupide au monde !

Les Serdaigle étaient censés être curieux, oui. Mais là, elle était plutôt effrayée. Évidemment, elle n'allait pas le montrer, il ne faudrait pas faire paniquer les deux petits mais la présence de la Chambre, si près, l'angoissait et lui donnait le vertige. Et puis, on ne savait pas ce qu'il y avait dedans ! Certes, Harry Potter était censé s'être débarrassé du monstre. Mais il était censé s'être débarrassé de Voldemort la première fois aussi. Et puis... Elle connaissait l'histoire la Chambre des Secrets, évidemment, pour avoir dévoré l'histoire de Poudlard. Mais elle en avait eut aussi le récit par son ami Justin qui avait été pétrifié par le monstre parce qu'il était né-moldu. A la pensée de Justin, son cœur accéléra un peu et elle eut l'impression que ses joues rosissaient légèrement. Elle allait devoir lui raconter toute cette aventure en détail, dès qu'ils seraient sortis. Car Perséphone avait la ferme intention de sortir saine et sauve. Et elle n'était décidément pas assez Gryffondor pour commettre la bêtise d'aller se balader dans la Chambre des Secrets en étant une fille de moldus.

- Et puis je suis préfète, je te rappelle ! Je dois veiller sur ces deux-là ! ajouta-t-elle en désignant les deux première année. De plus, il y a quand même des petits embêtements techniques à ta petite expédition. Comment y descendre et surtout, comment remonter ?

Sans compter les éventuels pièges laissés par Serpentard pour assurer la sécurité de la pièce secrète, un éventuel Basilic et autres joyeusetés, bien évidemment. Quand elle croisa le regard d'Ahren et qu'elle vit son sourire mauvais, elle eut aussitôt un mauvais pressentiment. Elle fit un pas vers lui, dans l'espoir de le saisir par le col avant qu'il ne fasse quoi que ce soit de...

- Keller !

Elle plaqua ses mains sur sa bouche quand il sauta dans l'ouverture de la Chambre des Secrets et se précipita près de la bouche béante. Mais le garçon avait déjà disparu. Le coeur battant à toute allure, elle essaya de distinguer quelque chose dans les ténèbres mais c'était une cause perdue. Partagée entre trois émotions, elle se tenait là, sans savoir quoi faire. Elle hésitait entre paniquer, persuadée qu'il allait soit s'écraser en bas ou se faire manger par un serpent géant, s'énerver, vu que si elle l'attrapait encore en vie, elle le tuerait de ses propres mains et culpabiliser étant donné que c'était un élève de sa maison qui venait de se jeter dans une fosse à monstres sous sa surveillance et sa responsabilité. Mais qu'est-ce qu'elle pouvait faire ? Si elle avait eut sa baguette, elle aurait pu essayer des sorts ou quelque chose ! Mais là, elle se sentait tellement démunie ! Elle n'oserait jamais descendre et puis si c'était pour se fracasser le crâne plus bas ou se faire tuer, c'était inutile. Paniquée, elle jeta un regard désespéré à Aaron. Ce n'était pas le genre de situations qu'elle savait gérer, elle n'en n'avait pas l'habitude, elle ne savait pas comment agir, elle ne contrôlait rien. Elle était une bonne préfète, elle le savait, elle faisait tout son travail consciencieusement mais "sauver vos camarades" n'était pas au programme de la formation ! Oh, Seigneur. Les mains tremblantes, elle pressa dans ses doigts la croix qu'elle portait au cou. C'était une attitude qu'elle perdait au fur et à mesure qu'elle s'éloignait du monde moldu, mais dès qu'elle était sans repères, le naturel revenait au galop. Avisant Aaron qui s'approchait, elle secoua la tête, incapable de réagir correctement.

- Tu... Tu ne vas pas y aller aussi ! Oh mon Dieu, Aaron, c'est dangereux !

Même si elle était d'accord sur le fait qu'on ne pouvait pas laisser Ahren mourir comme cela, ou même mourir tout court, elle n'était pas d'accord sur la solution. Il fallait qu'elle reprenne ses esprits et trouve un moyen de prévenir les professeurs. Eux, ils sauraient quoi faire et agiraient ! Il fallait absolument se référer aux professeurs, c'était la seule solution raisonnée et raisonnable. Descendre eux aussi n'était pas quelque chose d'envisageable, ils se mettaient tous en danger aussi et s'ils mourraient, tout cela serait inutile. Mais Aaron ne sembla pas prendre en compte ce genre de considérations vu qu'il plongea lui aussi dans la Chambre, tandis que Perséphone resserrait ses doigts autour de sa croix, désœuvrée et incapable de reprendre ses esprits. Tandis que Théo s’apprêtait lui aussi à descendre, elle inspira profondément pour se calmer. Calme, elle devait rester calme. On ne pouvait pas réfléchir en étant paniqué. Elle devait laisser ses émotions de coté pour avoir un jugement froid et posé. Fermant les yeux quelques secondes, elle murmura une prière, sa croix toujours emmêlée dans ses doigts avant d'expirer un bon coup. Calme, raisonnée et posée. Aaron avait raison sur un point, ils devaient secourir Ahren. Il était sous sa responsabilité, elle devait s'occuper de lui et le protéger contre tout danger qui pouvait survenir. Elle n'avait pas de baguette, certes. Mais Nott et Aaron, si. Elle allait descendre pour Ahren, pour faire son devoir de préfète et d'élève plus âgée. Elle devait rester calme et posée et tout se passerait bien. Le monstre de la Chambre était mort depuis longtemps, Harry Potter s'en était occupé. Elle était venue plusieurs fois dans ces toilettes sans problèmes et comme Sasha Benson l'avait souligné, elles seraient mortes si le monstre avait été en vie vu qu'il serait sorti de la Chambre dès l'ouverture. En bas, il devait y avoir le cadavre - bien décomposé, donc seulement les ossements - d'un Basilic. Pas d'autre danger. Sasha allait rester là pour prévenir un professeur, qui viendraient à leur secours dès que possible. En attendant, il fallait rester auprès de l'élève en difficulté. Comme elle l'avait appris. Voilà, on revenait dans des choses qu'elle maitrisait. Elle ouvrit soudainement les yeux et se tourna vers Sasha.

- Reste-là et attends les professeurs. Si la porte s'ouvre, courre les prévenir. Tout se passera bien, assura Séphy, autant pour elle que pour Sasha.

Voilà, tout se passera bien, il n'y avait pas de raisons d'en douter. S'approchant du gouffre, Perséphone serra sa croix une dernière fois avant de laisser tomber. Son cœur sembla chuter de dix étages et elle laissa échapper un petit cri, effrayée. Elle se retrouva rapidement sur un long toboggan, glissant à toute allure les yeux fermés. Elle n'avait jamais aimé les choses de ce genre, même à la piscine. Elle attérit brusquement sur les genoux, sur un tas de petits cailloux... d'os. Paniquée, elle se releva brusquement, en époussetant ses vêtements, dégoûtée. Elle était dans le noir total mais elle distinguait la présence des autres à ses cotés. En se relevant, elle avait percuté quelqu'un de petit taille et elle posa rapidement ses deux mains sur les épaules d'Ahren, soulagée de le savoir en bonne santé et qu'il ne s'était pas brisé la nuque en atterrissant.

- Dieu soit loué ! murmura-t-elle. Tu n'as rien, j'espère ?

Tant pis pour ce qu'il avait dit tout à l'heure, tout son agacement s'était envolé, remplacé par son soulagement. Elle passa rapidement une main légère sur ses joues et sur son menton pour vérifier qu'il n'avait pas de plaies graves et fut heureuse de constater que ce n'était pas le cas. Elle lui adressa un sourire, qu'il ne vit sûrement pas dans le noir, et pressa ses épaules, véritablement soulagée.

- Tout semble en place. Mais sache que je te punirai quand même pour ce que tu viens de faire, Ahren. Ne compte pas y échapper ! annonça Séphy, son assurance de préfète recouvrée en partie.

Toujours une main posée sur l'épaule d'Ahren, elle se retourna vers ce qui semblait être la position des autres.

- Et vous, rien de cassé ?

Elle sursauta quand un bruit de sifflement suivi d'un léger fracas dans les os retentit, vite rassurée par la voix de Sasha Benson. Elle fronça néanmoins les sourcils, contrariée par cette arrivée.

- Nous t'avions pourtant demandé de rester en haut ! Qui va prévenir les professeurs de notre présence ici, maintenant ?!

Si l'ouverture se refermait, personne ne les trouveraient jamais. Ils seraient condamnés à errer jusqu'à la mort, mangeant les cadavres des défunts pour survivre. Oh, Seigneur. Comme cette équipe de football, ou de sport, elle ne savait plus trop, qui s'était écrasée dans la montagne et qui... Frissonnante et prise d'un léger haut-le-coeur, Perséphone inspira profondément pour rester calme. Il n'y avait pas de raison que le passage se referme, même s'il s'était ouvert de manière aléatoire. En fait, il y avait toutes les raisons pour que le passage se referme mais elle se refusait à penser à cela. Ils trouveraient bien un moyen de sortir. Il suffisait de réfléchir. Le Basilic ne restait pas enfermé dans la Chambre, il se baladait dans l'école. Et si un serpent géant était sorti, ils pourraient sortir aussi. Elle savait que le monstre se déplaçait grâce aux canalisations. Il leur suffirait d'en trouver une et d'y faire du bruit, pour attirer l'attention de quelqu'un et guider les enseignants jusqu'à eux. Voilà, c'est ce qu'ils feraient. Il n'y avait pas de raisons de s'inquiéter. En attendant... Les baguettes ne fonctionnaient visiblement pas et ils étaient coincés dans le noir. Dommage qu'ils n'aient pas de torches, ou d'allumettes ou un... Prise d'une illumination, Perséphone se mit à fouiller frénétiquement dans sa poche. Durant sa ronde, avant de s'arrêter aux toilettes, elle avait confisqué un paquet de tabac moldu et un briquet à un élève de Gryffondor. Elle laissa échapper un "oui !" de victoire quand ses doigts se refermèrent sur le petit objet qu'elle extirpa de sa poche. Elle dût s'y prendre à deux reprises, mais une minuscule flamme surgit bientôt, éclairant quelque peu autour d'elle et lui échauffant les doigts. Un large sourire naquit sur son visage et elle lança un coup d’œil narquois à Nott.

- Que ferait-on sans les moldus ?

A l'aide du briquet, on pouvait constater qu'un long couloir s'étendait devant eux. Menant on-ne-savait-où à on-ne-savait-quoi.

- Alors on fait quoi maintenant ?

Comment souvent, Théo était entouré de personnes proprement exaspérantes. A commencer par Finnigan, qui considérait que quelque chose qui s'était déroulé de leur vivant relevait de l'histoire ancienne. Il y avait également Perséphone, miss préfète parfaite que Théo trouvait un peu trop coincée à son goût - ce qui en disait long, venant de lui - et qui avait des jurons étranges... Quel était ce Seigneur auquel elle faisait référence ? Quant au seul autre sang-pur de leur petit groupe, Ahren, il semblait beaucoup moins bien éduqué que son frère puisqu'il n'hésitait pas à proférer les propos les plus provoquants possible, se mettant bien évidemment les autres à dos. La petite Sasha ne se faisait d'ailleurs pas priver pour répondre à ses piques...

Bref, Théo se sentait en milieu hostile, et réaliser cela le conduisit à adopter une attitude plus réservée. Son allié naturel, Ahren, n'était pas à la hauteur de la tâche, braquant les nés-moldus là où son aîné prenait soin de ne pas attiser leur colère. Enfin, le petit Serdaigle agit néanmoins en son sens, puisqu'il sauta dans le trou menant à la Chambre sans se poser de questions. L'ombre d'un sourire survola le visage de Théo tandis que les autres se catastrophaient. Eh bien, voilà qui avait le mérite de couper court aux discussions. Ils n'avaient plus le choix maintenant, l'un d'entre eux était en bas et il était logique que les autres suivent. Laisser Ahren seul dans la Chambre des Secrets relèverait probablement de l'impossible pour la préfète, Aaron suivrait probablement la majorité et Sasha refuserait de rester seul. Parfait, car si Théo aurait préféré être seul pour visiter cet endroit de légende, il était probablement plus sûr de ne pas y aller seul. En cas de problème, la disparition de cinq élèves serait plus vite remarquée...

"Eh bien, on ne va pas le laisser seul", commenta simplement Théo.

Sans faire attention aux autres, il s'approcha du trou et s'y laissa glisser. Il se sentit tomber dans les entrailles de Poudlard via un long toboggan en pierre, avant d'atterrir dans un bruit sinistre. Des os, constata Théo en attrapant un crâne de rat entre ses doigts. Le jeune homme se redressa promptement avant que quelqu'un d'autre ne débouche dans la salle, épousseta son uniforme et regarda autour de lui. L'endroit était sombre et sinistre, songea-t-il en retenant un bond d'excitation. C'était vrai, il était vraiment sur le point d'entrer dans la Chambre des Secrets ! Les récits qu'il avait lu et entendu sur cet endroit lui revenaient en mémoire, son sourire s'agrandissait.

Cette histoire était à la fois grandiose et terrible. L'idée en elle-même était géniale - une pièce secrète, restée cachée pendant un millénaire, qui abritait la créature fantastique de Salazar Serpentard, prête à mener à bien ses desseins... Mais les desseins en question étaient évidemment horribles, Théo en avait conscience. C'était une chose de vouloir une séparation stricte et nette entre le monde supérieur des sorciers et celui, bien moins attractif et moins puissant, des moldus. Théo comprenait tout à fait que Serpentard ait voulu réserver l'éducation magique aux personnes les plus dignes de la recevoir, c'est-à-dire ceux qui avaient su conserver leur magie aussi pure et intacte que possible... Mais c'était autre chose que de vouloir débarrasser l'école de ses éléments indésirables en les exterminant. Plus de mille ans après la fondation de Poudlard, force était de constater que Salazar Serpentard avait échoué dans sa tâche, et Théo considérait que cet échec relevait nettement des méthodes employées. Serpentard, ses descendants idéologiques et leurs disciples avaient utilisé des méthodes tellement condamnables que leur idéal, à l'origine très bon, avait été entaché et dévoyé. Théo n'était pas en faveur du meurtre ou de la torture, du moins il ne se sentait pas capable de l'employer et il devait avouer qu'il avait parfois honte lorsqu'il imaginait ce que son père avait pu faire, même s'il ne lui en avait jamais fait le reproche. Quant à la magie noire, elle devait être employée avec parcimonie et discernement. Bref, Théo aimait croire que l'on pouvait tout à fait oeuvrer pour de grandes causes en restant en accord avec sa conscience. Voilà pourquoi il s'intéressait tant à l'histoire ancienne et aux vieilles généalogies, comme le lui reprochait Finnigan. Il voulait comprendre d'où il venait, dans quelle tradition il s'inscrivait et ce que cela impliquait. Il voulait tirer les erreurs du passé et agir avec intelligence. Bref, il ne voulait pas répéter des idées provoquantes qu'il ne comprenait pas comme Ahren le faisait tel un vulgaire perroquet, pour le simple plaisir d'attirer l'attention...

Visiter la Chambre des Secrets, outre l'aspect touristique de la chose, faisait partie de cette quête idéologique qui marquait un pan de la vie de Théo. Puisqu'il en avait l'opportunité, il n'allait pas se priver... Sans s'attarder sur ses pensées, Théo attendit que ses yeux s'habituent à l'obscurité et se dirigea vers Keller, dont il percevait vaguement la petite silhouette. Le jeune homme serra brièvement son épaule puis s'écarta.

"Ca va gamin ?", s'enquit-il rapidement. "Bon, les autres ne devraient pas tarder..."

Comme prévu, Perséphone et Sasha vinrent les rejoindre, visiblement peu rassurées. Bien évidemment, la préfète ne put s'empêcher d'enguirlander Ahren, avant de leur demander s'ils avaient quelque chose de cassé.

"Tout va bien", se contenta-t-il de répondre.

La jeune fille activa ensuite un curieux objet qui fit apparaître une minuscule flamme, provoquant l'indicible fierté de sa propriétaire. Théo leva les yeux au ciel, de plus en plus agacé par cette demoiselle qui se permettait des réflexions alors qu'il n'avait pas dit un mot contre les moldus depuis le début de leur petite aventure. Qu'elle garde cela pour Ahren ! Théo, visiblement le plus intelligent de tous, avait bien compris qu'il ne servait à rien de polémiquer en telle compagnie. Les cinq camarades ne parviendraient jamais à rien sur ce terrain là, si ce n'est à provoquer une dispute... Mais Théo ne put s'empêcher de répondre par quelques piques. Si l'on cherche un Nott, on finit par le trouver, d'autant plus lorsqu'il est dans son élément : crânes de rat, obscurité et cadavre de basilic...

"Sans les moldus, nous serions toujours dans l'obscurité", répondit Théo, dont l'amusement était nettement perceptible.

Perséphone se demanda alors ce qu'ils allaient faire, et Théo répliqua au quart-de-tour :

"Je ne sais pas, mon cerveau n'a pas de sang moldu pour l'irriguer", répondit-il sur un ton faussement innocent, "sans votre ingéniosité je n'aurai pas l'idée tout seul d'aller dans ce couloir qui est la seule voie possible..."

Sans attendre la réponse cinglante qui viendrait probablement, Théo délaissa ses quatre irritants compagnons et s'avança à grands pas dans le couloir sombre.

A la grande surprise d'Aaron, Perséphone et Sasha surgirent du boyau après Théo, se justifiant toutes les deux de leur comportement, la première avec moins de morgue que la seconde. Il n'avait pas demandé à la Préfète de rester en arrière par tact, et ne voulant pas non plus passer pour un machiste, mais il n'avait jamais pensé que cette proprette de Harrington aurait le cran de les suivre dans les abysses de l'école. Lui-même n'était pas très rassuré, malgré l'absence apparente de danger. Cela lui rappelait l'épisode des accromentules. Il ne comprenait pas encore pourquoi il n'avait pas eu peur à l'époque, et encore moins quelle idée lui avait traversé la tête pour qu'il y aille de son plein gré, mais il aurait aimé maintenant faire preuve du même courage téméraire et complètement suicidaire qui l'avait habité à ce moment là. Vraiment, il ne comprenait pas comment Jeremy et Juliet avaient pu le suivre sans réfléchir, Gryffondor ou pas.

Heureusement, il avait autre chose à faire que de s'apitoyer sur son sort: la vie continuait même dans cet endroit morbide, puisque la conversation continua à couteaux tirés, comme s'ils étaient encore dans les toilettes. Cependant, comme le petit groupe se rassemblait après leur arrivée un peu brutale, le changement de lieu se fit sentir car personne ne prit l'initiative d'avancer. Ils étaient dans le noir complet... ah non, Perséphone avait un briquet, étrange. Mais l'objet ne les éclairerait pas bien longtemps, et tout ce que les quatre autres pensaient à faire, c'était à se chercher des noises. Aaron eu un claquement de langue agacé quand Nott fit de l'ironie à propos d'absence de sang moldu pour irriguer son cerveau, et grogna carrément quand Ahren s'en pris à Sasha.

"Keller, tu es vraiment mal placé pour faire des reproches, c'est à cause de toi, qu'on est tous dans ce trou." Et comme le morveux suggérait d'avancer, il le poussa en tête du groupe sans ménagement. "Allez, toi qui est si courageux et connaisseur, montre-nous le chemin."

Se défouler lui ôta la peur qui lui tordait l'estomac, et il suivi Keller qui avançait dans le couloir en face d'eux. Les autres ne tardèrent pas à les suivre, et Aaron ne chercha d'abord pas à engager la conversation, trop concentré qu'il était à essayer de voir où il mettait les pieds. Le sol craquait sous leurs pas, rendant l'atmosphère d'autant plus lugubre. Pour autant, Aaron constata que, contrairement à sa première impression, il n'avait pas peur. Il ne se sentait pas rassuré, ni en sécurité, mais il n'avait pas non plus l'envie de partir en courant et en hurlant de frousse. Il avait les sens aux aguets, prêt à réagir au moindre son anormal. Constatant à quel point il était tendu, il se força cependant à respirer profondément pour ne pas commettre d'impair, mais ne put s'empêcher de tenir sa baguette dans sa main malgré son inutilité. Le Serdaigle fut encore une fois surpris de l'habitude qu'il avait à toujours vouloir sa baguette sur lui, alors qu'il avait nié son don depuis son entrée à l'école. Il se demanda si Perséphone pensait comme lui et jeta un regard à la jeune fille qui marchait non loin de lui.

Aaron ne comprenait pas le geste que sa camarade de Serdaigle avait eu à l'égard de mini-Keller lorsqu'ils étaient descendu. D'ailleurs, leur comportement à tous les deux étaient bizarres. Keller semblait éviter de l'agresser, et elle le couvait presque. Pourtant, elle était née-moldue. Que Perséphone s'imagine sauver Ahren de ses idées nauséabondes par gentillesse passait encore, il fallait bien de naïfs optimistes pour faire le monde, mais que le gamin accepte l'attention de son aînée était plus intriguante. Qu'avait-elle bien pu dire ou faire pour provoquer ce comportement? Les professeurs lui offriraient Gringotts pour qu'Ahren soit aussi (hum) aimable avec eux.

Il allait le lui demander quand ils débouchèrent sur une énorme porte de pierre grande ouverte. Les imposants battants étaient ornés de deux énormes serpents, et Aaron n'eut pas besoin de regarder à l'intérieur pour savoir qu'ils venaient d'arriver à l'entrée de la "chambre" proprement dite. Essayant de se rappeler ce qu'il savait du lieu, c'était à dire fort peu de choses, il put cependant estimer que le Basilic était mort depuis près de quinze ans. Dans quel état de décomposition allaient-ils le trouver?

Fasciné malgré lui par l'imposant lieu qu'il voyait, Aaron franchi la porte le premier. Il déboucha dans une gigantesque grotte portée par des piliers tout aussi imposants représentant des serpents, illuminée par une lumière verdâtre. A mesure qu'ils avançaient vers le fond de la salle, Aaron remarqua l'énorme statue représentant sans doute Salazar Serpentard. Cette débauche de grandeur le mit mal à l'aise et, pour masquer la fascination que le lieu lui inspirait, il lança:

"Dommage qu'on ne puisse pas filmer ça. Votre Salazar avait visiblement quelque chose à compenser..." à l'adresse de Keller et de Nott. Après tout, il s'était fait expulser de sa propre école.

Une forme sombre gisait au pied de la statue. Une forme, oui, car on ne pouvait pas vraiment dire qu'il s'agissait d'autre chose. C'était un squelette longiline, donc la fin était noyée dans le bassin qui occupait le fond de la grotte. Par endroit, les os ne se joignaient plus, et s'il restaient quelques lambeau de chair, ils étaient désséchés et méconnaissables. Alors qu'il aurait dû être répugné par le cadavre, Aaron ne ressentit qu'une nouvelle fascination morbide. C'était gigantesque. C'était rarissime. C'était caché et lui, Aaron Finnigan, avait le privilège de contempler un spectacle de la sorte. Sifflant d'impressionnement, il fit quelques pas pour s'éloigner des autres, longeant le corps de l'animal.

"C'est gigantesque" souffla-t-il. "Quel dommage que ce truc ait été conçu pour tuer."

Il s'accroupit près d'un os d'une forme étrange, et toucha du bout de sa baguette une griffe étrange. Ne serait-ce pas les griffes qui contenaient le venin dont avait parlé Benson? N'ayant pas envie de faire part de sa découverte, il se releva comme s'il n'y avait rien d'intéressant et, toujours dans l'optique de chasser l'attirance que lui inspirait la chose, tenta de réveiller un peu l'ambiance si conviviale de leur groupe de scoutisme:

"Vous savez qu'il peut tuer aussi les sang-pur, votre machin, j'espère? Donc que vous n'êtes pas plus immunisés que moi. Que vous êtes exactement pareils, en fait."

Elle allait finir par lui coller une claque. Elle pourrait toujours mettre ça sur le compte de la tension pour s'échapper sans trop de dommages. Ou jouer les effarouchées et prétendre que cet abruti fini de Nott avait tenu des propos déplacés sur les moldus, ça passerait très bien. Mais elle allait finir par le claquer ou lui balancer un sortilège s'il continuait ainsi. Perséphone fusilla Théo du regard en retenant l'insulte qui lui brûlait les lèvres et qui mettrait sûrement fin à sa carrière de préfète.

- Merci, j'avais bien remarqué que tu n'avais pas le cerveau irrigué du tout, persifla-t-elle, mauvaise.

S'il n'y avait eu qu'elle, il aurait été hors de question d'avancer dans la Chambre. Non seulement ils ne savaient pas ce qu'il y avait à l'intérieur et étaient sans magie, mais en plus, ils prenaient le risque de se perdre. Et s'ils ne retrouvaient plus leur chemin et étaient condamnés à errer jusqu'à la mort dans l'antre de Salazar Serpentard ? Ils finiraient sûrement par s'entretuer pour survivre. Et elle était prête à parier que Nott serait le premier condamné. Un coup de pierre sur la tête, ça devrait suffire, il ne devait pas y avoir grand-chose à l'intérieur pour amortir le choc. Soupirant, elle suivit néanmoins les autres quand ils commencèrent à avancer, faisant attention à ne pas éteindre le briquet avec un mouvement brusque. Il fallait espérer qu'il reste suffisamment de gaz pour tenir un minimum, sinon, ils étaient bons pour avancer dans le noir. C'est dans ces moments-là qu'elle se rendait compte à quel point elle était dépendante de la magie, qui pouvait apporter tellement de chose. Même dans le monde moldu, elle se sentait mieux avec sa baguette à proximité et elle l'emmenait partout avec elle, en se disant qu'elle pourrait s'en servir en cas d'urgence, comme la loi l'autorisait. Elle inspira un grand coup pour chasser l'angoisse qui l'envahissait et porta sa main gauche à sa croix, machinalement. Elle n'avait jamais eu beaucoup de talents, quand on y réfléchissait bien. Du moins, pas de talents physiques. Elle était certes intelligente, mais incapable de se défendre comme une McGowan, par exemple. Elle savait argumenter, oui, mais s'il n'y avait pas de débat ou une personne qui écoutait, cela ne servait pas à grand-chose. Elle avait un peu de répartie mais sûrement pas assez de verve. En revanche, elle était tout de même une bonne baguette, avec de bonnes bases en duel et une créativité certaine dans ses sortilèges. Sauf que là, rien de tout cela ne lui servait. Et en plus, elle était en jupe, ce qui n'était franchement pas très pratique pour courir s'ils se faisaient poursuivre par... Quelque chose. Certes, le Basilic était censé avoir disparu, vaincu par Harry Potter lui-même - ce garçon soit loué - mais si Salazar avait voulu assurer ses arrières ? Après tout, les Serpentard étaient plutôt méfiant. Avec un peu de chance, lui offrir un Sang-Pur en sacrifice - Théo Nott à tout hasard - le calmerait ! Même si, évidemment, Séphy se doutait bien que le nouveau bébé de Serpentard serait plus avide de Nés-moldus qu'autre chose. Soit Sasha, vu comme Ahren la traitait, Aaron, qu'elle avait vu avec un Ipod une fois et elle-même. La priorité était clairement de protéger Sasha, la plus jeune. Et après... Elle courait vite, non ?

Ils finirent par arriver dans une grande salle à la lumière verdâtre. Une énorme statue de Serpentard trônait au fond, plus qu'imposante, magistrale. D'immenses piliers soutenaient la voute dont on ne voyait presque pas le haut. C'était encore plus grand que la Grande Salle et clairement décoré à l'image de sa chère maison. Elle avait aperçu l'apparence de la Salle Commune des Serpentard une fois, en attendant le préfet de sixième année devant l'entrée et elle avait été impressionnée. C'était un grand espace teinté de lumière verdâtre, étant donné qu'il était sous le lac - comme lui avait expliqué son camarade après coup - et richement meublé. Elle adorait la Salle Commune de Serdaigle, évidemment, ses bleus chatoyants, son plafond étoilé, le buste de Rowena, les fauteils moelleux et la vue magnifique sur les montages environnantes et le lac mais la Salle Commune des Serpentard dégageait une sorte d'aura de mystère impressionnante. Tout comme cette salle. Perséphone éteignit son briquet pour garder du gaz, la lumière de la salle étant largement suffisante, et ne put s'empêcher de regarder autour d'elle, plus qu’impressionnée. Voire fascinée. Malgré tout l'anxiété qu'elle ressentait, elle ne pouvait s'empêcher de se sentir aussi un peu euphorique. Ils étaient parmi les rares personnes qui avaient la chance de découvrir un tel endroit. Des générations et des générations de sorciers avaient cherché cette salle, en vain. Lord Voldemort, Harry Potter, Ron et Ginny Weasley ainsi qu'eux même étaient les seuls à avoir pénétré dans cet endroit. Des Serdaigle se seraient damnés pour rentrer ici. C'était une expérience formidable, unique, comme visiter une des sept merveilles du monde. Elle regretta immédiatement de ne pas avoir de quoi immortaliser l'instant. Visiblement, c'était un réflexe assez moldu car Aaron Finnigan fit la remarque qu'il était dommage de ne pas pouvoir filmer tout ça. Elle rit à sa pique contre Ahren et Nott et lui lança un regard amusé.

- Joliment envoyé, souffla-t-elle.

Elle était sur le point de renchérir quand ses yeux se posèrent sur le cadavre du basilic. Son cœur manqua un battement et elle stoppa net. Dans ses lectures, elle avait appris qu'il faisait plus de quinze mètres de long. Mais le lire et le voir, c'était plus que différent. Il ne restait plus que des os et quelques morceaux de chair en putréfaction. C'était à la fois dégoûtant et passionnant, un peu quand elle regardait la chaîne animalière dans le salon parce qu'elle ne trouvait pas le sommeil à cause de la chaleur en été. Néanmoins, poussée par un intérêt tout à fait scientifique, elle s'approcha précautionneusement de la tête du basilic et effleura son crâne du bout des doigts. C'était une espèce si rare, c'était criminel de la laisser pourrir ici sans qu'on puisse l'étudier. Et sans baguette, elle ne pouvait pas lancer un Reducto aux os pour en ramener des échantillons afin que des naturalistes magiques puisse les étudier. La Chambre s'était ouverte par hasard, cela n'arrivera sûrement pas deux fois, c'était une occasion exceptionnelle. Et elle ne pouvait pas passer à coté. Elle n'en n'avait pas le droit, c'était une insulte à la science, à la connaissance, à Rowena Serdaigle elle même. Sans réfléchir plus longtemps, elle retira son badge de préfète de sa cape, l'épingla sur son pull et retira sa cape. A travers le tissu, elle posa la main sur l'un des crochets du basilic - éviter de mourir dans d'affreuses souffrances parce qu'elle s'était piquée avec l'arrangerait bien - et tira de toutes ses forces, jusqu'à qu'il se décroche. Il céda brutalement et elle se retrouva assise sur les fesses dans une flaque d'eau, sa jupe trempée. Fantastique. Heureusement qu'elle faisait ça pour la science. Elle entoura soigneusement le crochet dans sa cape et récupéra au passage quelques petits os, dont une côte, qui n'étaient plus fixés au squelette. Une fois qu'elle eut terminé sa petite récolte, elle se tourna vers les autres.

- Je ne m'amuse pas à profaner des cadavres tous les jours, je vous rassure. C'est juste que... C'est une occasion exceptionnelle pour le monde des naturalistes magiques ! Il est si rare de tomber sur des espèces de ce genre. Et puis, le professeur Adamson pourra se servir du venin pour ses potions. C'est pas quelque chose que l'on trouve chez l'Apothicaire du Chemin de Traverse.

Elle cala son petit baluchon sous son bras, essayant d'occulter qu'elle se baladait avec des ossements.

- Oh, et pour rebondir sur ce que disait Aaron, il a été prouvé que les enfants nés-moldus avaient tous des sorciers dans leur arbre généalogique. A ce jour, personne n'a pu déterminer clairement s'il y avait un "gêne moldu" dominant et un "gêne sorcier récessif", mais c'est ma théorie. Ça, et le fait qu'il y ait plusieurs gênes de la magie, mais c'est une autre question qui se penche notamment sur les Cracmol et les Sang-Mêlés. Mais pour faire simple, le gêne sorcier serait récessif. Donc, quand deux parents moldus seraient porteurs de ce gêne, qui vient d'un de leurs ancêtres, l'enfant serait sorcier. Donc, tous les nés-moldus sont en réalité des descendants de sorciers. Néanmoins, le gêne est en deux exemplaire, ce qui explique qu'il y ait autant de différences de générations.

Elle ne pu empêcher un sourire narquois naître sur ses lèvres.

- Les théories du sang, ça ne vaut rien. De plus, les mariages consanguins - étant donné que toutes les familles sorcières sont parentes - sont très mauvaises pour la génétique. Messieurs, j'ai le bonheur de vous annoncer que vos familles ont été sauvées par les femmes adultères qui ne se préoccupaient pas du statut du sang !

Elle se retint de préciser qu'on apprenait cela à l'école moldue. Elle n'allait tout de même pas les enfoncer encore, non ?

Théo pénétra dans la Chambre des Secrets silencieusement, presque religieusement. L'endroit était démesuré et inquiétant, voire sordide lorsque l'on avisait l'immense carcasse du serpent géant... Théo sentit son pouls s'accélérer alors qu'il foulait le sol glissant de cet endroit légendaire, un mélange d'excitation et d'appréhension l'envahissant, mais une appréhension jubilatoire, comme lorsque Samaël et lui se racontaient des histoires qui font peur à Halloween, pendant leurs premières années. La voix horripilante d'Aaron vint troubler ce moment particulier, dans l'unique but de venir l'énerver, qui plus est. Enfin, Ahren et lui, mais Théo n'était pas vraiment ravi d'être assimilé à Ahren Keller... Fronçant instantanément les sourcils devant le "votre Salazar" de son camarade, il tourna vers le Serdaigle un regard noir.

"Je suis un Poufsouffle, au cas où tu n'aurais pas remarqué", lâcha-t-il d'un ton cinglant, retenant une insulte d'extrême justesse. "Mon Helga, si elle avait eu une chambre secrète, serait probablement bien différente de celle-là... A en juger par notre salle commune, qui est probablement la pièce la plus agréable et chaleureuse de Poudlard, je doute qu'elle ait eu quelque chose à compenser."

L'attention du petit groupe se porta tout naturellement sur le cadavre du basilic, et une sorte de fascination morbide s'empara de Théo. C'était un véritablement monstre, une bête gigantesque et meurtrière qui avait vécu caché ici si longtemps... Jusqu'à ce que l'épée de Gryffondor, portée par Harry Potter, n'en vienne à bout. Maintenant qu'il avait le squelette devant les yeux, Théo avait vraiment du mal à croire que la créature ait pu se balader dans Poudlard sans être vue. Les canalisations de Poudlard ne pouvaient pas être aussi grosses...si ? A nouveau, il était plongé dans sa contemplation et ses pensées, et à nouveau Aaron vint l'en tirer avec une nouvelle provocation. Théo claqua sa langue contre son palais avec agacement et gronda :

"Tu commences à m'agacer, Finnigan. Tu m'expliques en quoi ce monstre tueur est relié avec moi ? Je..."

Mais avant qu'il n'ait pu achever sa phrase, Perséphone tomba les fesses en arrière, en plein dans une flaque d'eau, un crochet de basilic en mains. Oubliant momentanément ses griefs contre Aaron face à ce curieux spectacle, Théo posa un regard étonné sur la Serdaigle, qui s'expliqua aussitôt. L'estime du Poufsouffle pour sa camarade remonta légèrement devant son idée.

"Bonne idée", commenta-t-il en hochant la tête.

Il écouta avec attention ses propos sur le gêne sorcier, un peu mal à l'aise. Bien sûr, ses propos avaient du sens, mais il avait également déjà lu des articles qui contredisaient ses belles théories et dont il s'était empressé d'accepter les conclusions, bien sûr. Mais il était prêt à reconnaître que la pureté du sang était peut-être un peu surestimée, dans la mesure où les bienfaits de la diversité génétique étaient déjà reconnus dans le monde moldu, même si cela ne concernait pas spécifiquement le gêne sorcier. Néanmoins, l'idée de réduire la magie à un simple phénomène scientifique était profondément dérangeante pour le Poufsouffle, car la magie ne se trouvait pas seulement parmi les hommes, elle était partout, dans la nature, dans le monde, parmi les créatures et végétaux tout comme parmi les hommes... Ce n'était pas une histoire de gêne, pas seulement, même s'il voulait bien reconnaître une prédestination génétique au fait d'être sensible à la magie. De toute façon, il n'était pas pro-pureté du sang en soit, pas autant que pouvaient l'être les plus extrémistes de la noblesse sorcière... En revanche, il était pro-secret magique, pour le fait de garder une séparation stricte entre les deux mondes et notamment au niveau technologique. C'était très différent : il voulait préserver son mode de vie, et non sa pureté du sang... Même s'il aimait autant épouser une sang-pur, ou une sang-pas-trop-moldue, tant qu'à faire. Mais il n'allait certainement pas le reconnaître devant eux.

"On va mettre les choses au point tout de suite", lâcha-t-il en englobant ses quatre camarades du regard. "Vos provocations à deux noises, ça suffit. Je n'ai strictement rien dit contre les moldus, et je n'ai rien fais non plus pour vous énerver, ou alors c'était de l'humour, même si de mauvais goût, je vous l'accorde... Alors vos petites piques si subtiles vous les gardez pour Ahren. Parce que là s'il y a quelqu'un qui fait de la discrimination ce n'est pas moi, que je sache, c'est vous. C'est pas parce que je m'appelle Nott que j'ai envie de lâcher un serpent géant sur tous les moldus que je croise. Je ne suis pas Salazar Serpentard, ni Voldemort, ni même mon père. Ça va, vous allez réussir à faire la différence ? Je suis de sang-pur, oui, mais je suis quand même prêt à réfléchir à ce type d'arguments qu'avance Perséphone. A vrai dire, je trouve ce que tu as dis intéressant, même si je reste septique. Ces théories sur la génétique sorcière restent controversées, et j'ai lu tout et son contraire à ce sujet... Science et magie sont difficiles à concilier et malheureusement il y a une fâcheuse tendance à créer des théories scientifiques pour servir des idéologiques..."

*Comme tu le fais*, songea-t-il.

"Alors non, en effet, je n'ai pas envie que le secret magique soit brisé, pour des raisons qui me regardent. Mais ce n'est pas pour autant que j'approuve les idéaux des mangemorts. Et j'en ai plus qu'assez qu'on l'insinue. Ma famille a souffert de la guerre et je n'ai pas attendu d'être enfermé avec une bande de gamins idéalistes pour réfléchir et me forger ma propre opinion sur tout ça. Merci de ranger vos préjugés au placard, OK ? Quand la chambre a été ouverte, j'ai cherché un Fourchelang, ce qui était logique, et non un sang-pur, moi..."

Théo s'arrêta de parler et regarda autour de lui, le souffle court, tandis que les remords l'envahissaient. Qu'est-ce qui lui avait pris de perdre ainsi son calme ? Il avait l'habitude d'entendre ce genre de remarques, pourtant, c'était monnaie courante lors de ses premières années à Poudlard, quand les souvenirs de la guerre étaient encore frais et douloureux. Il avait cru être immunisé à ce genre de choses, se contentant de bloquer ses émotions et de ne pas se laisser atteindre par la bêtise des gens, mais...mais voilà, les choses avaient fini par s'améliorer, les gens s'étaient habitués à avoir des Nott parmi eux, tout comme des O'Connor, des Keller, des Lestrange, et puis il était l'un des plus vieux de l'école donc probablement un peu plus impressionnant que lorsqu'il avait onze ans. Alors il avait baissé sa garde et cru que les préjugés à son encontre allaient disparaître avec le temps. Quelle naïveté, digne d'un Poufsouffle, vraiment... Le fait d'avoir Ahren Keller parmi leur groupe n'avait probablement pas aidé, il fallait bien le reconnaître.

Eh bien, quelles que soient ses raisons, il n'aurait pas du perdre son calme. Il n'avait aucune chance de convaincre des gens aussi obtus qu'il était autre chose qu'un mangemort en puissance, après tout. L'était-il ? Théo avait beaucoup d'incertitudes en lui, quant à ses opinions, ses valeurs, ses allégeances. Il était certain qu'il s'intéressait à la magie noire, qu'il avait un certain nombre d'a priori sur la façon dont un sorcier bien éduqué devait se comporter, et qu'il ne tenait pas à avoir le moindre lien avec le monde moldu. Oui, mais tout cela, son éducation, ses doutes et ses réflexions, il les gardait pour lui, bien au chaud dans sa tête, sans empêcher personne de penser différemment ni de vivre sa vie comme il l'entendait. Et il savait au moins cela : il ne se pensait pas capable de tuer, et il était très heureux de ne pas avoir la Marque des Ténèbres sur le bras. Il ne pouvait pas être si mauvais que ça, et cette bande de bien-pensants ne détenait pas la vérité absolue non plus. Qu'il était facile pour eux de juger, eux qui n'avaient pas eu à subir les conséquences de la guerre ! Enfin, il fallait qu'il reprenne une attitude détachée. Au fond, s'il se fichait d'Aaron et encore plus de Sasha, il avait envie de convaincre Perséphone, qui avait l'air d'avoir un cerveau pour réfléchir. Au moins un peu. Et s'il ne pouvait pas la convaincre, au moins n'avait-il rien contre le fait de continuer à débattre avec elle, qui semblait avoir un peu plus réfléchi à la question que Finnigan, Benson ou Keller.

Théo franchit la distance qui le séparait de sa camarade et la jaugea du regard un instant.

"Pour ton information, je n'aurais aucun problème à épouser une née-moldue", murmura-t-il avec un petit sourire en coin. "Du moment qu'elle a un cerveau qui fonctionne et un minimum d'éducation... D'ailleurs, les moldus aussi ont leur noblesse, non ?"

Aaron se faisait un plaisir de provoquer les deux Sang-Pur de leur groupe depuis le début. Il savait qu'Ahren était juste insupportable et, perdu du côté obscur de la Force, ne pourrait jamais être sauvé. Il ne connaissait pas Nott, mais celui-ci ne semblait pas mieux. Ses petites blagues douteuses sur l'héritier de Serpentard lorsqu'ils étaient encore dans les toilettes, sa fascination pour cet endroit glauque, tout indiquait qu'il était fermement ancré dans les mêmes croyances que Keller. Aaron savait que débattre avec des gens comme ça était vain. Il s'était déjà frotté à leur équivalent dans le monde moldu - vous savez, ces croyants presque fanatiques anti mariage gay, par exemple - et le cerveau de telles personnes semblait hors d'usage. A chaque fois, cela l'exaspérait. En bon Serdaigle, il aimait comprendre et débattre, et malgré sa propension à camper sur ses positions, il était tout à fait prêt à comprendre qu'on ne pensait pas comme lui, si seulement on avait des arguments. Mais à chaque fois, ce qu'on lui opposait était creux.

Malgré sa frustration à chacune de ces discussions, il n'abandonnait pas. Peut-être Nott avait-il un cerveau capable de défendre rationnellement ses positions, et Aaron voulait vraiment entendre ses positions. Mais la tension qui habitait leur communauté d'explorateurs en milieu hostile ne lui permettait pas d'engager une conversation sereine autour d'une Bierraubeurre, aussi utilisait-il la provocation non seulement comme moyen de se venger (de quoi? oh, d'être coincé dans un endroit glauque, de sa mauvaise humeur, surement), mais aussi pour provoquer autre chose que les répliques ô combien inutiles de Keller junior. Et la technique, très contestable, commençait à porter ses fruits. En effet, Nott se défendit d'être un Serpentard, soulignant son appartenance à la maison Poufsouffle.

Aaron n'avait jamais connu la violente opposition entre Gryffondor et Serpentard. Il en avait entendu parler, avait vu comme Seamus se méfiait d'une certaine Pansy Parkinson, ancienne Serpentard. Mais il ne l'avait jamais vécu lui-même. Dans son idée, il s'agissait plutôt de tensions passagères dûes à des bandes rivales. Il n'avait pas été élevé avec l'idée que la maison vous représentait et que le fondateur devait être un modèle. Il sentait bien que c'était un état d'esprit omniprésent dans l'école, mais il ne s'était jamais vraiment identifié à Rowena Serdaigle. En même temps, il ne savait pas grand-chose d'elle, et n'avait jamais cherché à en savoir plus. Aaron n'était donc absolument pas convaincu par l'argument de Théo qui consistait à dire qu'étant à Poufsouffle, il n'avait rien à voir avec Salazar. Car, pour ce qu'il en savait, Helga Poufsouffle n'avait jamais défendu de théories sur le sang.

"Depuis quand être à Poufsouffle signifie que l'on n'a rien à voir avec Serpentard?"

Après tout, on était réparti en fonction de son caractère, pas de ses croyances, n'est-ce pas? Nott n'était peut-être pas assez ambitieux pour Serpentard, c'était tout. Car, ce qu'Aaron voyait, c'était des gens sympathiques et des crétins dans chaque maison. Des nés-moldus, des adorateurs du Sang-Pur et des extraterrestres répartis sans distinction. La preuve, Darren avait longtemps été un néo-Mangemort, qui avait évolué. Swann était une personne absolument charmante. Ca n'était pas à Aaron qu'on allait dire que les Serpentard étaient d'horribles personnes infréquentables. Au contraire, Ahren était l'incarnation même du conservateur rétrograde, et pourtant, il avait été envoyé à Serdaigle. Théo Nott, dans le même genre, était à Poufsouffle, qui était aussi la maison de gens sympathiques comme Nora Weaver. Et Gryffondor comptait un lot impressionnant d'imbéciles pour quelques personnes dotées de neurones comme Jeremy ou Juliet.

Après avoir admiré le cadavre, Aaron lança une énième pique, et Théo ne fut pas le seul à réagir. La petite Sasha fit remarquer que le basilic tuait également des poulets. Aaron eu un sourire devant l'humour de la petite fille, qui s'agrandit lorsqu'elle souligna subtilement que Keller et Nott avaient des idées qui fleuraient bon le Moyen-âge. Celui-ci n'apprécia d'ailleurs pas le sous-entendu puisque, en honnête personne, il lui fit par de son agacement, au grand plaisir d'Aaron qui ne manquait pas d'envie d'en découdre. Hélas, Perséphone tomba à la renverse dans une flaque d'eau, coupant court à la discussion.

Aaron se retourna pour voir que sa camarade de maison n'avait pas autant de scrupules que lui à se servir sur le corps du Basilic pour prélever un crochet venimeux. Elle se justifia, disant que cela ravirait le professeur Adamson. Il étouffa un grognement sceptique, car Perséphone était exactement le genre de personne à faire ça sincèrement. Elle n'avait pas volé sa réputation de sainte-nitouche. En même temps, se demanda Aaron, que ferait-elle d'un crochet de Basilic? C'était quelque chose de léthal dont des gens de leur âge n'aurait pas beaucoup l'usage.

Il allait approuver ce qu'elle disait, mais Nott le devança. L'esprit de contradiction du Serdaigle retint donc ses mots, refusant catégoriquement d'être d'accord sur quoi que ce soit avec le garçon. Perséphone choisit, à son grand plaisir, de réagir sur ce qu'il venait de dire à propos de l'égalité sorciers-moldus, sortant tout un argumentaire basé sur les gênes. Aaron n'aima pas ce qu'elle disait. Bien sûr, il croyait en la science plus qu'en la magie, et comme elle, pensait fermement que la réponse se trouvait dans leur ADN. Le problème, c'était qu'on pouvait faire dire aux gènes tous et n'importe quoi. Les nazis eux-mêmes avaient réussi à tourner la génétique en leur avantage, les Sang-Pur pouvait bien faire de même. Le racisme s'adaptait toujours et trouvait systématiquement de nouveaux prétexte. Il y avait deux gènes? Aaron pariait que dans quelques décennies, les Sang-Pur argueraient que seuls ceux ayant les deux gènes, avec telle combinaison de récession ou de dominante, étaient aptes à utiliser la magie, que l'absence de trace d'un gène "moldu" dans leur ADN les rendait supérieur, blablabla. Tant qu'on n'avait pas eu de moyen de prouver définitivement que les gènes étaient identiques chez les Purs comme chez les nés-moldus, Aaron se garderait bien d'utiliser ces théories, trop facilement malléables à son goût.

En revanche, la dernière pique sur les femmes adultères le fit beaucoup rire, et il se s'en cacha pas, jusqu'à ce que Théo, choqué par les propos de Perséphone, sorte définitivement de sa réserve. Aaron était ravi. Enfin une conversation constructive, lui qui ne réclamait que cela depuis le début. Echanger avec des gens comme Keller n'avait aucun intérêt, le gamin était buté et arrogant.

"Parce que là s'il y a quelqu'un qui fait de la discrimination ce n'est pas moi, que je sache, c'est vous. C'est pas parce que je m'appelle Nott que j'ai envie de lâcher un serpent géant sur tous les moldus que je croise. Je ne suis pas Salazar Serpentard, ni Voldemort, ni même mon père. Ça va, vous allez réussir à faire la différence ?"

Ben voyons, de la discrimination, lui? Pas du tout. Ce n'était pas sa faute si Théo avait prétendu être l'héritier de Serpentard, s'il avait estimé qu'être le cousin d'un sorcier faisait de vous un expert en histoire magique - comme s'il croyait qu'on devait forcément être passionné par son monde à lui, parce qu'il était supérieur - s'il considérait qu'il était "passionnant" de parler de Voldemort, et... Aaron essaya de se souvenir de ce que le Poufsouffle avait pu dire d'autre mais rien ne lui vint. Cependant, cela ne le convainquit qu'à moitié. On pouvait être raciste sans être complètement bête - c'était rare, mais ça arrivait. Nott avait peut-être simplement compris qu'il était en milieu hostile et avait préféré se taire plutôt que d'agir aussi stupidement qu'Ahren, qui continuait ses appels au meurtre.

"A vrai dire, je trouve ce que tu as dis intéressant, même si je reste septique. Ces théories sur la génétique sorcière restent controversées, et j'ai lu tout et son contraire à ce sujet... Science et magie sont difficiles à concilier et malheureusement il y a une fâcheuse tendance à créer des théories scientifiques pour servir des idéologiques..."

Ah non, ça n'allait pas du tout, Théo était d'accord avec lui, là. Non, non. Il voulait un vrai débat avec quelqu'un qui ne changeait pas de position, pas entendre quelqu'un qui était déjà si près d'être convaincu, ça perdait de son enjeu. Et puis, pourquoi Théo parlait-il de secret magique, Aaron n'avait jamais contesté cette nécessité. Si on le supprimait, ce serait le chaos. Cependant, lentement, il commençait à croire que Théo était de bonne foi.

"Ma famille a souffert de la guerre et je n'ai pas attendu d'être enfermé avec une bande de gamins idéalistes pour réfléchir et me forger ma propre opinion sur tout ça. Merci de ranger vos préjugés au placard, OK ?"

Aaron se pris cette phrase comme un coup de poing dans l'estomac. Il n'avait jamais vraiment envisagé qu'il pourrait se trouver un jour à la place des bourreaux. Depuis qu'il était entré dans le monde magique, il s'était toujours trouvé être une victime. Victime de l'obligation d'aller à Poudlard, victime de l'ignorance et du désintérêt des autres pour son origine, victime du racisme, victime de l'incompréhension... Il n'avait jamais pensé qu'il n'y avait pas que ses pairs qui pouvaient aussi être incompris. Il n'avait jamais vraiment réfléchi à ce que cela impliquait d'être un fils de Mangemort, de ceux qui avaient tués des proches et des parents des autres. Ils étaient chacun à l'opposé de la sphère sociale, les interactions avaient été réduites. Il lui fallait aussi admettre que, malgré son scepticisme, il était rentré dans le moule sans se poser de question. Il avait intégré que Sang-Pur = méchant, et n'avait pas questionné plus avant cette équation, trop occupé qu'il était à détester son monde d'adoption.

Même en devenant ami avec Darren, il n'y avait pas pensé. Parce qu'à ses yeux, Darren n'était pas discriminé à cause de son ascendance, mais à cause de son épouvantable caractère. Ils n'étaient pas devenus amis parce que le Serpentard avait changé d'avis, mais parce que... tiens, il ne saurait jamais vraiment expliquer pourquoi. Il y avait eu une porte ouverte, à un moment, et il s'était engouffré dedans sans trop réfléchir. Et lentement, Darren commençait à évoluer.

Merlin, il était ami avec O'Connor et celui-ci changeait, alors pourquoi ne pouvait-il pas admettre que Théo Nott, qui n'était pas connu pour être aussi borné, avait fait son bout de chemin dans son coin? Réalisant sa bêtise, mais refusant de l'admettre devant tout le monde, Aaron décida de donner une seconde chance au jeune Nott, car c'était bien lui qui s'était comporté comme un imbécile pour le coup.

Mais ce qui acheva de convaincre Aaron, ce furent les paroles venimeuses d'Ahren à l'adresse de Théo. Le Serdaigle n'était pas prêt à voir en Ahren qu'un autre Darren qui changerait lui aussi. Il ne voyait qu'un morveux agressif et n'avait pas envie de réfléchir à son cas. La facilité avec laquelle le gamin se retournait contre Théo était ahurissante.

"T'es convaincant, Nott." admit Aaron avec un sourire. "Désolé pour l'amalgame avec Keller, tu ne mérites pas ça."

Il vers Théo et lui tendit une main amicale.

"J'arrive bien à m'entendre avec Darren, et tu réfléchis plus que lui, donc... "

Aaron pria mentalement Darren de l'excuser pour ces paroles assassines, mais néanmoins pas complètement fausses. Désireux d'enterrer la hache de guerre, il se tourna même vers Perséphone pour lui faire part de son avis. Il ne voulait pas se la mettre à dos, mais juste souligner son point de vue.

"Je suis d'accord avec Nott à propos de la génétique, c'est trop dangereux comme argument... pour l'instant, tant que rien n'a été prouvé irréfutablement. C'est bien là le problème."

Sasha effleurait la colonne vertébrale du basilique du bout des doigts, obligée de se mettre sur la pointe des pieds pour l'atteindre. Elle fit quelques pas en faisant glisser son doigts sur les vertèbres de la créature et faillit perdre l'équilibre en entendant un bruit d'éclaboussure derrière elle. La fillette se retourna vivement pour apercevoir Perspéhone Harrigton, les fesses dans une flaque d'eau et un crochet de basilique entre les mains. La Serdaigle se justifia en expliquant que les crochets étaient très intéressants pour les naturalistes, et qu'Adamson pourrait s'en servir pour ses potions. Sasha hocha la tête, c'était une bonne idée, comme le souligna le grand Poufsouffle. La préfète se releva et se lança dans un discours sur la génétique comme facteur explicatif de la magie qui éveilla l'intérêt de Sasha.

Ce que disait la Serdaigle avait vraiment du sens, ça méritait d'être creusé. La petite Serpentard se promit de se pencher sur la question, un jour, même si elle n'y connaissait pas grand chose en biologie. C'était une théorie intéressante, mais il y avait des incohérence, notamment les enfants de couples mixtes. Perséphone parlait de gène récessif et Sasha avait appris en CM2 que c'était le gène qui devaient être présents en double pour 'fonctionner". Or si c'était le cas, alors les enfants qui, comme elle, était issu d'un mariage mixte, ne pourrait pas être sorcier puisqu'il ne porterait le gène magique qu'en un seul exemplaire. La fillette n'était toutefois pas certaine de ce qu'elle avançait puisque la maitresse avait abrégé la leçon en leur disant qu'ils verraient ça au collège.

"C'est intéressant comme théorie, lança-t-elle simplement. C'est dommage qu'on enseigne pas la biologie à Poudlard, j'aimerais bien qu'on travaille là dessus. Et ça ne ferait pas de mal à certains de se pencher sur les bienfaits des croisements génétiques."

Elle termina sa phrase en jetant un regard en direction d'Ahren. Ce ne fut cependant pas lui qui réagit à la provocation puisque le grand Poufsouffle s'emporta en les accusant de discrimination, de le considérer comme un pro-sang-pur parce qu'il s'appelait Nott. Sasha hocha les épaules, elle ne savait pas même pas son nom de famille un instant plus tôt alors ce n'était certainement pas elle qui allait le ranger dans la catégorie néo-mangemort. Il paraissait réellement blessé par les préjugés dont il était victime et Sasha se demanda un instant si Ahren souffrait du même traitement. C'était peut-être parce que lui aussi était persécuté à cause de son nom qu'il agissait comme un crétin. Le Serdaigle répondit aussitôt à sa question en accusant Nott, puisque c'était son nom, de déshonorer sa famille et d'avilir son sang juste parce qu'il avait assuré qu'il n'avait rien contre l'idée d'épouser une sang-mélée ou une née-moldue. Non, Ahren n'était pas une victime qui se protégeait derrière une façade arrogante, c'était bien un crétin.

"Ne t'en fais pas Keller, tu n'auras pas à faire ce genre de concessions puisque aucune fille saine d'esprit ne voudras jamais t'épouser."

Elle ponctua sa phrase d'un sourire mauvais avant de reporter son attention sur les trois grands, qui semblaient toujours en plein débats. Aaron s'excusa auprès de Nott pour l'amalgame avec Ahren, assurant qu'il ne méritait pas ça, ce qui fit sourire la fillette. Le Serdaigle poursuivit en se rangeant au coté du Poufsouffle, qui considérait que la génétique était un argument dangereux, qu'on pouvait lui faire dire tout et son contraire. Raison de plus pour enseigner cette matière à l'école, il y avait peut-être un futur généticien parmi eux.

"Peut-être que Perséphone sera celle qui le trouvera, cet argument irréfutable, lança-t-elle. Après tout, la préfète semblait avoir vraiment réfléchi à la question. En attendant, je vous propose de continuer à débattre tout en cherchant un moyen de sortir. Je ne pense pas qu'on puisse remonter par là où nous sommes arrivés, mais il y a peut-être d'autres tunnels..."

Oui parce que c'était bien beau tout ces débats sur la pureté du sang, mais on pouvait très bien avoir ce genre de conversation autours d'une table à la bibliothèque, et non pas coincés dans la chambre ses secrets. Elle était beaucoup trop jeune pour mourir ici, elle avait encore plein de choses à accomplir. Et s'ils se retrouvaient condamner à moisir ici, et s'ils en venaient à devoir s'entre-tuer pour survivre, elle et Ahren seraient probablement les premières victimes, alors autant sortir au plus vite.

C'est Justin qui lui avait expliqué les différentes maisons de Poudlard, lorsqu'il l'avait accompagnée sur le Chemin de Traverse pour la première fois, l'été de ses onze ans. Toutes leurs caractéristiques, leurs fiertés, les sorciers illustres qui en étaient issus... Lui, il avait été à Poufsouffle. Et même si ce n'était pas la maison qui l'attirait le plus - elle avait un faible pour Serpentard et Serdaigle - elle espérait être répartie à Poufsouffle, pour faire plaisir à Justin. Le Choixpeau en avait décidé autrement, en ayant un très léger penchant pour Gryffondor l'espace d'un instant, et Perséphone n'avait jamais regretté sa Répartition, bien trop attachée à sa maison et ses valeurs. Honnêtement, elle avait vu son acceptation à Serdaigle comme une reconnaissance de son intelligence, même si elle se gardait bien de le dire à voix haute. Elle avait l'impression qu'on était beaucoup plus reconnu en étant à Serdaigle, plus facilement pris au sérieux. Surtout en étant une fille. Elle ne pouvait pas être une potiche, de par sa Répartition, dans l'esprit collectif. Et elle était plutôt contente de cela. Elle s'épanouissait à Serdaigle, plus que dans n'importe quelle maison, entourée de gens qui partageaient souvent sa passion de la connaissance. Elle était une Serdaigle jusqu'au bout des ongles et en était fière. Mais des fois, elle se demandait pourquoi elle n'avait fini à Poufsouffle, comme elle en avait envie quatre ans plus tôt. Elle était une travailleuse acharnée et s'estimait plutôt loyale. Elle avait une bonne dose de patience, elle le voyait quand elle faisait face à des élèves récalcitrants et s'était toujours estimée plutôt gentille. Jusqu'à aujourd'hui, jusqu'à ce moment précis. Quand Théo s'emporta, elle recula d'un pas, instinctivement et sans comprendre. Elle ne connaissait pas Théo Nott mais jusqu'ici, il lui avait semblé être quelqu'un de calme, pas très prompt à s'emporter. Aussi fut-elle surprise de le voir ainsi démarrer au quart de tour. Ses mots lui firent l'effet d'une douche froide et une vague de culpabilité l'envahit aussitôt, lui procurant un léger vertige. Elle ne s'était pas rendu compte de l'acharnement dont ils faisaient preuve à l'égard de leur camarade depuis le début de cette histoire, elle avait juste eu l'impression de répondre à ses piques et ses commentaires, sans remarquer quelque chose de particulier. C'est vrai que ses remarques sur la pureté du sang avaient été en grande partie destinées à Théo et peu à Ahren, tout simplement parce qu'Ahren, c'était particulier. Elle ne savait pas vraiment pourquoi, il tenait un discours plus extrémiste pourtant mais il lui avait semblé plus logique de se tourner vers Théo, sans doute parce qu'elle le prenait au sérieux et donc prenait plus ses remarques en compte.

- Je... tenta-t-elle de protester dans un vain effort de justification.

Mais Théo ne lui en laissa pas le temps, reprenant ses griefs. C'était sûrement le résultat de l'effet de groupe qui l'avait poussé dans ses retranchements. N'avait-elle pas elle-même applaudi une pique d'Aaron, sans penser le moins du monde que cela pourrait froisser quelqu'un ? Le pire étant qu'elle était d'accord avec Théo sur certains points. Elle aussi tenait à préserver le Secret plus que tout, comme tous les sorciers normaux. Certes, elle avait lu le bref article concernant les groupes terroristes qui désiraient briser le secret aux États-Unis. Mais elle était persuadée qu'ils n'arriveraient pas à leurs fins. Le Secret Magique était en place depuis plus de trois cent ans et rien n'était parvenu à le faire tomber jusque là. C'était une institution qui se devait d'être. Certes, la chasse aux sorcières et les bûchers étaient passés de mode. Mais la découverte d'un nouveau monde attirerait forcément des gens avec des mauvaises intentions. Et les moldus finiraient par découvrir que les sorciers avaient la possibilité de lancer des Imperiums, de contrôler des esprits ou d'effacer des mémoires. Chose qu'aucun moldu ne savait faire. Et cela leur ferait peur, ils chercheraient d'abord à réglementer, à classifier les sorciers pour les reconnaître dans la rue, pour les éviter. Puis il y aurait des sanctions, des restrictions. Ils ne pourraient plus se servir de leur baguette en public, sur un moldu ou l'avoir avec eux dans la rue. On enfermerait les sorciers délinquants, qui effrayent. Puis les mouvements extrémistes réussiraient à installer une peur définitive dans le cœur des populations et on traquerait les sorciers, ces dangers pour la société. Et ce serait la guerre. C'était effrayant comme scénario mais elle était persuadée que ce genre de choses pouvaient arriver si le Secret était rompu. Aucune personne saine d'esprit ne voudrait en arriver à de tels extrémités. Et puis, de toute manière, les deux mondes étaient bien mieux séparés. Elle devait être l'une des seules sorcières nées-moldus à défendre ce genre d'opinion, mais elle ne s'en cachait pas. La culture sorcière était déjà assez vaste sans que l'on ressente le besoin de la renforcer avec des choses moldues. De plus, la culture moldue risquait de prendre le pas sur la sorcière. L'usage des téléphones détruirait les Patronus Messagers et les Cheminées pour parler, les vêtements moldus empiétaient déjà sur les tenues traditionnelles sorcières... Il fallait sauvegarder absolument les traditions magiques et ne pas laisser la culture s'altérer. Si elle voulait des choses moldues, elle allait dans le monde moldu. Les deux mondes étaient très bien séparés et vivaient très bien l'un sans l'autre. Oui, parfois, elle le reconnaissait elle-même, c'était difficile d'être ainsi partagée entre les deux monde, jamais vraiment sorcière et jamais moldue. Mais il fallait faire des efforts et s'intégrer dans le monde magique. Les sorciers nés-moldus étaient des sorciers avant tout et même si elle reniait pas son éducation et ses origines qui lui apportaient des choses qui échappaient aux sang-pur, la place d'une sorcière était dans le monde magique, un point c'est tout. Tout cela, elle aurait voulu le dire, le défendre, argumenter, son jeu préféré. Mais Théo ne lui en laissa pas le temps et vint se planter devant elle, un léger sourire au coin des lèvres. Elle piqua un léger fard devant l'insinuation qu'elle sembla remarquer mais releva le menton, soutenant le regard de Théo.

- Une noblesse en voie de disparition, oui, mais existante.

Rajouterait-elle qu'elle en faisait partie ? Les Harrington était une vieille famille de la petite noblesse anglaise, rentiers de quelques terres et ayant quelques ancêtres qui avaient su se démarquer à la Cour du temps des Tudor. Ils n'avaient plus aucun prestige aujourd'hui mais exposaient encore leurs armes et leurs armoiries dans leur vieux domaine, afin de rappeler leur ascendance. Son père avait un titre de Lord, dont hériterait son frère cadet Henry plus tard. Elle avait reçu une éducation qui correspondait à son niveau social et avait fréquenté des gens comme elle durant toute son enfance, sans se rendre compte qu'ils n'étaient qu'une minorité par rapport au reste de la population anglaise. Et elle avait toujours été contente de cela, sa mère racontant toujours qu'ils avaient eu de vraies princesses dans leurs familles. Et pour beaucoup de petites filles, être une princesse était l'ambition suprême. Combien de ses amies, elles aussi issues de la noblesse, avaient rêvé de rentrer dans la famille royale d'Angleterre ? Elle mentirait en disant que cela n'avait pas été son cas. Mais tout cela avait perdu de son importance lorsqu'elle était arrivée dans le monde magique où le nom Harrington n'avait rien d'illustre par rapport aux noms des familles de Sang-Pur, si anciennes et si aristocratiques pour certaines. Et si elle avait été fière d'être une Harrington pendant onze ans, elle s'était ensuite souvent surprise à rêver d'être une Harris, une Bones, une Greengrass, une McMillan ou une Warlock. Peut-être pour ressentir l'histoire dissimulée derrière ses noms ou parce que cela imposait toujours un certain respect, respect qu'elle avait perdu en entrant dans le monde magique, en quittant la zone de confiance que lui offrait les Harrington. Alors sans qu'elle puisse s'arrêter, un sourire en coin naquit sur ses lèvres et elle croisa les bras sur sa poitrine.

- Et je vous prierai d'ailleurs, Monsieur Nott, de me donner du Lady Harrington en vous adressant à moi, désormais, souffla-t-elle.

Elle sourit avant de reculer légèrement, amusée. Évidemment qu'elle plaisantait, personne ne l’appelait jamais ainsi, sauf dans quelques réceptions estivales où elle accompagnait ses parents. Mais elle était satisfaite de l'avoir dit, sans trop savoir pourquoi. Peut-être parce que malgré tout, être Lady Harrington deux mois sur douze lui procurait toujours une certaine fierté. Peut-être pour montrer qu'elle valait autant que les autres filles de l’aristocratie sorcière, le sang en moins. Elles avaient reçu exactement la même éducation après tout. Elle s'apprêtait à relancer le sujet de la biologie quand la voix d'Ahren interrompit, hargneux. Sa phrase lui avait mis un coup au cœur. Elle avait vraiment cru que leur conversation avait changé quelque chose, vraiment. Qu'est-ce qu'elle était naïve. Et elle s'en voulait. Et si cela avait été quelqu'un d'autre, elle n'aurait jamais laissé passer cela. Elle ne voyait pourquoi Ahren - qui ne faisait même pas d'efforts - pourraient s'en sortir sans dommage. Alors elle se retourna vers lui, hautaine.

- Ne parle donc pas de choses que tu ne connais pas Ahren. L'amour peut pousser à faire beaucoup de chose. Évidemment, c'est un concept que tu ne maîtrises pas encore, du haut de tes onze ans. Grandis un peu, mûris un peu, achète toi un cerveau et on en reparle, d'accord ?

Elle avait été glaciale. Elle posa un regard condescendant sur Ahren et se détourna lentement, toujours aussi furieuse. Elle avait été bien trop naïve. On ne l'y reprendrait plus. Que Keller se débrouille seul ! Il resterait détesté de toute l'école et jamais personne ne l'écouterait, trop occupé à lui en vouloir. Elle inspira pour se calmer et écoute Aaron qui avait pris la parole pour s'excuser auprès de Théo, ce qui lui permit de se rendre compte qu'elle ne l'avait toujours pas fait. Elle fit un pas dans sa direction et lui adressa un sourire désolé.

- Je suis toute aussi désolée qu'Aaron, nous n'aurions pas dû nous conduire de la sorte. Sans vouloir me décharger de quoi que ce soit, je n'ai pas pensé que tout cela puisse te blesser. Je te présente mes plus plates excuses, Théo, et j'espère que nous pourrons retrouver des rapports cordiaux si nos chemins venaient à se croiser.

Après tout, ils partageaient même des idées en commun. Il serait dommage de ne pas trouver un certain terrain d'entente alors que leurs opinions pouvaient se rejoindre, ce qui pouvait sûrement donner des discussions intéressantes.

- Je sais bien que la génétique peut être quelque chose de dangereux. Mais j'aime à penser que c'est une première étape pour montrer qu'il n'y a pas de différence - magiquement parlant - entre les enfants nés de moldus et ceux nés de sorciers. Après tout, c'est quelque chose qui est constaté au quotidien : nos origines n'influent pas nos talents magiques ou notre puissance. J'aimerai vraiment qu'on arrive à prouver cette égalité, pour que la société se développe sur des bases saines. Nous sommes tous des sorciers après tout, pourquoi ce besoin de classification ?

Elle adressa un sourire à la petite Benson quand celle-ci prit la parole, ravie du compliment implicite qu'il y avait dans sa phrase. Oui, elle espérait vraiment faire une découverte de ce genre, c'était ce qui la poussait à s'orienter vers de la recherche, chose qui attirait souvent peu les élèves de Poudlard. Le Département des Mystères lui offrait cette possibilité et elle avait la ferme intention de la saisir. Mais malgré cela, ce ne fut pas tant le compliment qui la marqua dans la phrase de Sasha, mais le mot tunnel. Des tunnels... Elle avait lu plusieurs fois la dernière édition de l'Histoire de Poudlard, qui contenait l'histoire du Basilic. Les ambitions de Serpentard, Tom Jedusor et cette pauvre fille assassinée, le monstre dans l'école en 1992, Harry Potter... Elle savait tout cela. Et elle se rappelait également très bien du paragraphe qui traitait des déplacements du Basilic. La question s'était longtemps posée et avait fini par être résolue. Le Basilic se déplaçait grâce aux canalisations, ce qui lui permettait d'aller dans toute l'école et d'attaquer des élèves dans les couloirs. Et si un monstre aussi gros que le Basilic pouvait passer par les canalisations, alors eux aussi.

- Je sais comment nous pouvons sortir d'ici, déclara-t-elle brusquement. De 1992 à 1993, le Basilic était actif dans l'école et avait fait plusieurs victimes. Et comme personne n'avait vu de serpent géant se déplacer du coté du couloir de métamorphose, cela signifiait qu'il avait un autre moyen que les chemins habituels. Il se déplaçait par les canalisations ! Et s'il pouvait le faire, alors nous aussi ! affirma-t-elle, son débit s’accélérant au fil de son explication.

Ils allaient pouvoir sortir d'ici et cette idée la ravissait. Elle fit un tour sur elle-même pour avoir une vision globale de la Chambre et son regard se posa sur un trou rond dans le mur, dans lequel un peu d'eau stagnait. Elle s'y précipita, le bruit de ses chaussures résonnant dans la pièce immense. Le tuyau dégageait une odeur abominable qui soulevait le cœur et l'eau qui y stagnait était verdâtre et loin d'être propre. Elle ne voyait pas très loin à cause de l'obscurité qu'il y avait. S'engager là-dedans était loin d'être ragoûtant et elle regretta presque aussitôt son idée. Mais c'était le seul moyen, le bruit d'eau qui bouillonnait qu'elle percevait lui indiquer que c'était bien un tuyau de canalisation. L'idée de patauger dans l'eau des éviers et des toilettes était loin de l'enthousiasmer mais elle préférait cela à l'idée de mourir ici. Elle eut un léger haut de cœur à l'idée que quelqu'un puisse tirer une chasse d'eau alors qu'ils étaient à l'intérieur et était dégoûtée de savoir que la hauteur de l'eau allait forcément augmenter au fur et à mesure qu'ils s'engageait. Le tuyau était assez grand pour qu'ils soient debout dedans mais avoir de l'eau des toilettes jusqu'au genou était vraiment loin d'être sympathique. Soupirant, elle se tourna vers ses camarades.

- C'est absolument répugnant. Mais c'est c'est la seule solution.

Elle se hissa dans le tuyau, grimaçant quand ses genoux furent mouillés et ne tarda pas à se mettre debout, essuyant tant bien que ses mains sur sa jupe. Elle fit surgir une flamme du briquet pour voir où ils mettaient les pieds et se tourna vers ses camarades.

- Vous venez ?

Le sourire de Théo s'agrandit à la réponse de Perséphone. Elle avait du cran, cette fille, et n'était peut-être pas aussi agaçante qu'il avait pu le croire. Il suffisait qu'ils tentent de se parler avec un peu moins d'agressivité et de préjugés, et cela se passait déjà mieux. Bien entendu, Théo avait légèrement exagéré son ouverture d'esprit lors de ses dernières paroles, épouser une née-moldue n'était pas la première de ses priorités. Mais enfin, il ne passait pas son temps à éplucher l'arbre généalogique des personnes qui l'entouraient, même s'il finissait toujours par se renseigner discrètement. Ce n'était pas comme si son meilleur ami était de sang pur, après tout ! En revanche, et aussi étonnant que cela puisse paraître, le petit Keller avait l'air beaucoup plus intransigeant que lui sur la question, à en juger par sa réplique dégoûtée. Théo tiqua à la mention de son père, et sentit une once d'appréhension l'envahir. Ahren mettait le doigt sur quelque chose, probablement sans le savoir. Théo avait toujours eu tendance à idéaliser son père, et c'était un peu réciproque. Il était facile pour Théo de donner l'image du parfait fils sang-pur bien élevé, les quelques fois où il lui rendait visite en prison, alors que son père ne pouvait pas voir qu'il se relâchait parfois, que ce soit en actes ou en pensées. Mais nul doute que s'il venait à être libéré un jour, son père trouverait à redire sur son style de vie et ses fréquentations. C'était étrange, de grandir avec un père emprisonné. Il l'aimait énormément et avait l'impression de le connaître, mais en réalité cet homme lui était de plus en plus étranger avec les années qui passaient, au point de l'impressionner quelque peu. C'était un homme qui avait tué, après tout, un mangemort qui avait connu et servi le Seigneur des Ténèbres, qui avait combattu pendant la guerre... Aussi, Théo avait beau l'aimer, il n'était pas mécontent de l'aimer à distance, hors de sa portée. Même si cette pensée le faisait rougir de honte...

Heureusement, Sasha et Perséphone se chargèrent d'Ahren, tandis que Théo était trop atteint par ses paroles pour réagir, laissant tout de même échapper un éclat de rire à la réplique de Sasha. Il n'avait pas envie de perdre son temps et ses salives pour ce crétin de Keller, qui avait vraiment beaucoup trop de morgue et de haine pour un gamin de son âge. Théo avait été comme ça un temps, mais cela n'avait pas duré. Il avait vite compris qu'il faisait fausse route, et qu'il se préparait une vie misérable avec une telle attitude. Et ce n'était jamais qu'un an après la guerre... Qu'était-il arrivé à Ahren Keller pour qu'il agisse ainsi ? Théo était intrigué, mais le gamin avait une telle propension à le prendre de haut qu'il n'allait pas perdre son temps à tenter de le comprendre. Ce n'était jamais qu'une personne de plus qui le détestait, au fond, il commençait à avoir l'habitude.

"Tu as autant de réflexion qu'un Véracrasse, Keller", lâcha-t-il enfin, le regard méprisant. "Ton frère a dix fois plus de jugeote."

Ce qui vint ensuite pris totalement Théo de court. Aaron, la personne qu'il avait catégorisé comme inintéressant et stupide quelques instants plus tôt, était venu s'excuser et agissait d'une façon presque...amicale. Par Salazar ! Il avait été convainquant, en effet, et peut-être un peu trop, songea-t-il alors que Perséphone faisait de même. Merlin, il ne s'attendait pas à des excuses. Il avait juste voulu qu'on le laisse tranquille, voilà tout, et ne s'attendait pas à ce qu'on l'écoute, et encore moins à ce qu'on se laisse convaincre. Il fallait dire que d'habitude, face à ce type de discours, il laissait courir et se contentait de se retrancher derrière une distance hautaine. Mais cette fois, il avait explosé et tenté de défendre son point de vue, et cela avait payé. Bien que hautement surprenant, cet état de fait n'était pas désagréable. Théo avait presque l'impression d'avoir gagné le respect de ses deux camarades, et c'était réciproque, réalisa-t-il en observant son camarade de Serdaigle avec une considération nouvelle.

"Excuses acceptées", murmura-t-il simplement en se sentant un peu gêné par son coup d'éclat.

Heureusement, la conversation ne s'attarda pas sur lui puisque Sasha, Perséphone et Aaron rebondirent sur leurs considérations liées à la génétique - et Théo fut à nouveau étonné de voir Aaron abonder en son sens. La petite Serpentard, qui, en bonne représentante de sa maison, ne perdait pas le sens des priorités, leur rappela alors qu'il fallait trouver un moyen de sortir d'ici. Théo haussa les épaules avec indifférence, avant de reporter son attention sur la Chambre environnante. Certes, l'endroit n'était pas très accueillant - pour ne pas dire lugubre et sordide - mais il n'était pas menaçant non plus. Théo n'avait rien contre le fait d'attendre que les secours arrivent, ce qui allait fatalement arriver. Si cela n'avait tenu qu'à lui, il aurait attendu patiemment que les enseignants ne viennent à leur rescousse. Pari risqué, étant donné le caractère secret de la Chambre, mais enfin, la seule possibilité qu'il voyait pour sortir d'ici ne l'enchantait guère...

Hélas, Perséphone y pensa aussi et semblait plus motivée que lui. Maudissant d'avance la préfète pour ce qu'elle allait dire, il l'observa gambader jusqu'à un gros trou dans le mur, et se lança à sa suite d'une démarche traînante. L'odeur nauséabonde qui lui prit la gorge une fois arrivé devant le trou le conforta dans son envie d'attendre bien sagement au pied de la statut de Serpentard... Perséphone, faisant preuve d'un courage gryffondorien, se hissa dans l'embouchure et alluma à nouveau son machin moldu, dont la lueur illumina les eaux stagnantes.

"Charmant", commenta-t-il en fronçant le nez. "Sinon, on peut toujours attendre les secours, et si on a faim on mange Ahren... Non ? Bon. Veuillez m'excuser, Lady Harrington."

Une fois que Perséphone eut avancé un peu pour le laisser entrer, Théo se hissa à son tour dans le tuyau en se retenant une remarque de dégoût. Son bel uniforme bien propre ! Théo se redressa et essuya ses mains de son mieux, avant de reporter son attention sur les trois autres. Il espérait qu'ils n'allaient pas faire de difficultés, car il était hors de question qu'il se soit sali pour rien !

Tout était bien qui finissait bien, jugea Aaron. Après qu'il se soit excusé auprès de Théo, Sasha avait remballé Ahren avant de mettre son grain de sel et Perséphone s'était excusée. Il avait trouvé son petit numéro sur la noblesse un peu ridicule, mais ça expliquait son côté coincé et bourgeois que beaucoup lui reprochaient. Même nés-moldus, il semblait à Aaron que Perséphone et lui ne venaient pas du même monde. Il se fit la réflexion qu'il y avait beaucoup de mondes dans le monde, et que cela devenait légèrement trop compliqué.

Puisque tout le monde s'était réconcilié, l'heure était à la recherche de la sortie. Perséphone suggéra d'utiliser les canalisations, et Aaron grimaça mais se tu, puisqu'il n'avait aucune autre suggestion. Suivant le groupe qui s'engageait tant bien que mal dans le tuyau, il ne pu s'empêcher de râler.

"Je crois que j'aurai préféré resté coincé là-bas jusqu'à ce qu'on remarque notre absence. On aurait pu manger mini-Keller pour patienter."

Mais il suivi bon gré mal gré Perséphone, et ils pataugèrent une bonne demi-heure dans l'eau avant de déboucher à l'air libre. Aaron inspira à pleins poumons, ravi d'être débarrassé de l'odeur... et bloqua sa respiration aussitôt. Visiblement, les canalisations leurs collaient à la peau. Berk. Il espérait pouvoir prendre une douche rapidement.

"Bon, eh bien bravo pour l'idée, Harrington... J'espère juste qu'on ne croisera pas trop de monde jusqu'à la salle commune!"

Keller les quitta sans un mot, et Aaron ne chercha pas à le retenir. Il commença à marcher en direction du château, et remarqua que c'était le bazar dans le parc. Des sorciers en robes bleues - des Oubliators, il le savait - le traversaient et s'engouffraient dans les portes ouvertes du château.

"Qu'est-ce que c'est que ce bazar?"

Le Serdaigle se doutait que ça devait être lié au problème de magie qu'ils avaient rencontré dans les toilettes, mais qui avait vraisemblablement frappé tout le château.

"Autant pour passer inaperçu" grogna-t-il.

Ca n'était décidément pas son jour.

Sasha regretta rapidement d'avoir suggéré de chercher une sortie. La solution que proposait Perspéhone était loin de l'enchantée. Les canalisations, 'était ingénieux, mais parfaitement répugnant. Elle n'avait aucune envie de se retrouver dans les tuyaux par lesquels circulaient toutes les eaux usées du château. La fillette suivit néanmoins la préfète jusqu'à une grande ouverture dans le mur dont se dégageait une odeur qui devenaient de plus en plus forte à mesure qu'ils approchaient. Elle eut du mal à retenir un haut le cœur et se contenta de grimacer, c'était dégoutant. Elle qui voulait quitter cet endroit au plus vite quelques instants plus tôt aurait volontiers accepté la solution du grand Poufsouffle, qui consistait à attendre les secours, quitte à manger Ahren pour ne pas mourir de faim, même si Keller devait avoir un goût infecte. Perséphone ne prêta pas attention à cette suggestion et se hissa dans le tuyaux avant de l'éclairer avec son briquet, révélant des eaux verdâtres peu engageantes.

Elle observa le grand Poufsouffle et Ahren imiter la préfète et s’apprêtait à faire de même quand Keller trébucha, éclaboussant tout autours de lui. Elle se recula vivement, percutant Aaron au passage, mais reçu quelques gouttes en plein visage. Elle allait le tuer. Elle ne savait pas encore quand ni comment mais il le lui paierait cher, un jour. Elle finit par se hisser à son tour dans l'ouverture, aidée par Aaron qui lui fit la courte échelle et qu'elle remercia d'un sourire avant de lui tendre une main pour l'aider à son tour, bien qu'il n'en ait surement pas besoin. Elle aimait bien Aaron, elle était dans son équipe de Rugby et il était toujours gentil avec elle, même si elle ne marquait pas beaucoup de points. Elle était juste douée pour se faufiler entre les plus grand mais il suffisait que quelqu'un la rattrape et elle se faisait très vite maitrisée. Et puis, il était plus intéressants que les garçons de son année, qui connaissait tout juste le nom de leur ministre, c'était tous des gamins...Sauf Andrew bien sûr, lui il était cool. Elle se demandait si Aaron l'aimait bien aussi, s'il la trouvait intéressante ou s'il ne la considérait que comme une fillette de douze ans. Elle était une fillette de douze ans, elle le savait, mais elle s'espérait un peu plus dégourdie que certaines de ses camarades, et espérait qu'Aaron l'avait remarqué.

Ils pataugèrent dans les eaux usées pendant ce qui sembla durer une éternité et Sasha dut se retenir de ne pas supplier Aaron, ou même le grand Poufsouffle, de la prendre sur son dos. Elle se retenait simplement parce qu'elle ne voulait pas passer pour une pleurnicheuse mais ce n'était pas l'envie qui manquait. Car là où ses camarades les plus âgés étaient trempés jusqu'aux genoux, ou jusqu'à mi-cuisse, elle et Ahren étaient plongés dans l'eau nauséabonde jusqu'à la taille, et contrairement au Serdaigle elle portait une jupe, ce qui rendait le tout encore plus désagréable. Non seulement parce que l'eau des canalisations était en contact direct avec sa peau et qu'elle n'aimait pas ça du tout, mais en plus car sa jupe avait la bonne idée de remonter et elle devait se battre pour la maintenir un peu en place.

Ils finirent toutefois par retrouver l'air libre et Sasha retint un cri de joie. Que quelqu'un se mettre entre elle et la douche et elle ne donnait pas cher de sa peau. Alors qu'Aaron lança qu'il espérait ne croiser personne, la fillette pointa du doigt des sorciers en cape bleues qui s'agitaient dans le parc. Elle fouilla sa mémoire à la recherche de tout ce qu'elle avait lu sur les significations des couleurs des robes et se rappela avoir vu dans un ouvrage sur le ministère que c'était les Oubliators qui portaient ces robes bleues.

"Qu'est ce qu'ils font là ?" s'interrogea-t-elle à voix haute.

Ahren les quitta sans un mot et Sasha leva les yeux au ciel. Quelle impolitesse ! Ce n'était certainement pas en agissant de la sorte qu'il se ferait apprécié par ses camarades. Sasha, elle, espérait que les trois élèves plus âgés avaient une bonne image d'elle, ça pouvait toujours être utile. Aaron ne semblait pas plus avancé qu'elle sur la présence des Oubliators dans le parc et Sasha se promit de demander des informations à Swann dès qu'elle aurait pris une douche. C'était une bonne chose, qu'elle s'entende bien avec Swann, elles discutaient toutes les deux dans la salle commune de temps en temps et Sasha en profitait pour se renseigner sur tout le monde.

"Bonne chance pour essayer de passer inaperçu avec tout ce bazar ! lança-t-elle à ses trois compagnons d'infortune. Et bonne douche, ajouta-t-elle avec un sourire. A bientôt !"

[Fin pour Sasha]