Attrape-moi si tu peux [PV William]

5 septembre 2006

Dans les yeux de Donald McWilde brillait la lueur d'excitation qui n'annonçait nulle autre chose que l'excitation à l'idée qu'il avait derrière sa tête. Il essuya ses doigts poisseux sur son short, tira la langue à une grande asperge qui le regardait avec dégoût et s'élança d'un pas décidé vers son prochain objectif : les vestiaires de Quidditch. Donald avait toujours été fasciné par ce sanctuaire de sueur et de transpiration, domaine des joueurs de ce sport dans lequel le petit brun se prétendait excellent mais qui n'y jouait en réalité pas mieux qu'un pou. C'est pourquoi il jalousait grandement ceux qui en étaient aptes ; il aurait tant aimé devenir comme eux. Hélas, on ne changeait pas si facilement, et il en était réduit à volatiliser leurs affaires, comme il en avait eu l'idée quelques minutes plus tôt. Où était la logique, me direz vous ? Pas dans le cerveau de Donald en tout cas.

Or, lorsque le Gryffondor eut atteint le mur de derrière des vestiaires, il sentit son nez couler. Donald fouilla dans ses poches immenses mais entre une allumette (gare, gare ! En sa possession, ce genre d'objet pouvait se révéler dangereux), une cartouche d'encre, un morceau de ficelle usagé et un biscuit entamé tout mou, aucun mouchoir ne répondait à l'appel. Haussant les épaules, le troisième année essuya son proéminent appendice nasal avec sa manche et se concentra sur son but : entrer dans les vestiaires. Le petit garçon s'offrit un sourire machiavélique dévoilant ses longues dents en se félicitant de sa perfidie digne d'un Serpentard. Une petite fenêtre étroite et ouverte ornait le mur de pierres, haute et juste assez large pour laisser passer un enfant. Si Donald avait pris le temps de réfléchir une minute, il aurait pu effectuer un sortilège sur la porte de l'autre côté, et il n'aurait pas eu besoin de s'agripper aux saillies de la pierre, se hisser sur le rebord de l'ouverture et se glisser à l'intérieur comme un singe. Mais Donald ne prenait jamais le temps de réfléchir.

Néanmoins, il gaspilla quelques secondes précieuses à admirer les habits éparpillés départ et d'autre de la pièce. Sa raison le désengourdit : *Coin-Coin est dans la place ! Le temps passe goutte à goutte. Hâte-toi !* Il obéit en entreprit la tâche de récolter tous les vêtements, avant que les joueurs qui s'entrainaient dans le stade ne rentrent prendre leur douche. Donald ricana en les imaginant couverts de sueur, furieux qu'on leur ait volé leurs habits. C'était vraiment une mauvaise blague, mais il n'aimait rien tant que ça. Enfin si, peut-être la batterie. Et manger du chocolat aussi.

Alerté par des pas, Donald s'escrima à pousser son ballot de vêtements dehors, puis le rejoignit. Une fois à l'air libre, une question qui ne s'était pas manifestée jusque-là lui tarauda l'esprit : où allait-il cacher tout ça ? Plusieurs perspectives alléchantes s'offraient à lui. Le lac ? Trop d'élèves l'entouraient en ces derniers jours de chaleur. Sous un banc quelconque ? Trop visible. En haut d'un arbre ? Peu pratique. Dans son dortoir ? Pfff, et pourquoi pas aller se dénoncer tout de suite ! Sous le lit de Tom Fields, le souffre douleur qui avale des couleuvres sans protester ? Ce serait tout de même mesquin. Ou alors...

La présence d'un individu derrière sa petite personne fit violemment sursauter Donald. Il ne restait plus qu'à prendre un air naturel – avec une pile de vêtements à côté, quoi de plus simple. Qu'allait-il pouvoir dire ? Qu'il faisait aérer ses tenues pour éviter la moisissure ? Cette idée ridicule plut à Donald qui se félicita une fois de plus pour sa présence d'esprit (faut le dire vite). Le Gryffondor se retourna et sous le coup de la surprise, fut prit d'une quinte de toux suicidaire. Enfin, il arrêta de postillonner sur l'individu en question.

« Désolé, » fit Donald avec un faux petit air contrit. Il espérait surtout que son interlocuteur n'avait pas vu son larcin. L'espoir fait vivre, donc Donald vivrait longtemps.

William prenait petit à petit ses marques dans l'école. Depuis la répartition, les choses étaient calmes. Aucun élève n'avait encore jugé bon de le tester pour voir quelles étaient les limites du concierge. Pour l'instant tout se passait pour le mieux.

Il avait donc décidé d'aller faire un tour dans le parc pour voir si tout était correct. Une équipe de Quidditch s'entrainait sur le terrain, un groupe de première année discutait sous un arbre. D'ailleurs, Will avait été surpris, les premières années étaient vraiment minuscules cette année. Un autre groupe, de cinq ou sixième année, il n'était pas certain, rigolait à côté d'un bosquet.

Le jeune concierge continua donc son inspection quand un mouvement près des vestiaires de Quidditch attira son attention. Il avait cru voir une ombre, il alla donc se positionner à quelques mètres de la porte des vestiaires et attendit.

L'attente ne dura pas très longtemps, il vit un jeune garçon ressortir avec un tas de vêtements dans les bras. Il semblait hésiter quand à la marche à suivre car il posa le tas à terre et resta immobile. William profita de cette immobilisme pour ce rapprocher du jeune garçon.

Il se retourna soudainement et fut pris d'une quinte de toux à faire revenir Severus Rogue d'entre les morts. Le garnement n'eut pas l'idée de mettre sa main devant la bouche et Will fut recouvert de postillon. Il se retint de réprimander vertement le gamin quand celui si s'excusa.

"Aucun problème, mon garçon. Mais la prochaine fois met la main devant la bouche." William fit une pause et son regard se posa sur l'écusson cousu sur l'uniforme du jeune homme. Un Gryffondor. Décidément, ils étaient toujours dans les coups tordus ceux-là.

"Mais ce n'est pas pour ça que je viens te voir. Je peux savoir ce que tu comptes faire avec ce tas de vêtements ? Il me semble qu'il ne t'appartient pas, je me trompe ?"

Le concierge fixa fixement le gamin dans l'attente de sa réponse quand il se rendit compte qu'il ne lui avait pas demandé ni son nom ni son prénom. Erreur qu'il s'empressa de réparer, ça pourrait lui être utile par la suite.

"J'aimerais savoir ton nom et ton prénom aussi. Si ce n'est pas trop te demander."

Il continuerait de fixer le garçon jusqu'à ce qu'il ait ses réponses et il n'allait pas le lâcher.

La première réaction de Donald face au nouveau venu fut un ébahissement le plus total. Bien qu'il l'ait vu au Banquet, le Gryffondor ne se doutait pas que -contrairement au précédent - le nouveau concierge avait l'air d'être un jeune homme parfaitement équilibré. Devant l'attitude calme et posée de William Silvester, Donald se demanda comment il avait pu échouer au poste de concierge. Pas que ce soit un poste inférieur, mais disons... subalterne. Avec un peu de volonté et la paisible intelligence qui semblait reposer au fond des ses yeux scrutateurs, Donald était persuadé qu'il aurait pu atteindre un bien meilleur poste. Enfin, il ignorait tout de ce Silvester. Peut-être que quelque chose de grave avait détruit sa vie. Mais ça, donald n'en avait rien à faire.

Une étincelle d'excitation s'alluma dans ses yeux noirs. Le petit garçon venait de parier avec lui même que rôder ce nouveau concierge serait un challenge digne de son extraordinaire personnalité. Il se doutait que le faire sortir de ses gonds allait être d'autant plus difficile, mais le défi plaisait au rouge et or. Quelles étaient donc les limites de ce William Silvester ? C'était à lui de le découvrir. Un sourire carnassier dévoilant ses longues dents mal rangées se découvrit sur son visage. Cette année, il y allait y avoir du sport.

Le jeune homme lui répéta une de ces phrases classiques que les grandes personnes usent à tout escient : "Met la main devant ta bouche". Donald l'avait entendue... 984 fois, depuis qu'il avait commencé à les compter. "Lave-toi les dents"et "On ne parle pas la bouche pleine" arrivaient en deuxième et troisième place. Donc, il ne daigna pas répondre au concierge - juste un léger hochement de tête, si infime qu'il pouvait laisser au concierge le bénéfice du doute. L'interrogatoire continua, et malheureusement pour le rejeton McWilde, la question fatidique lui fut posée. Que comptait-il faire avec ce tas de vêtements ? Donald fut tenté d'utiliser le sarcasme, mais il s'arrêta à temps - ce n'était sûrement pas une bonne alternative, surtout s'il voulait mettre à l'épreuve Silvester.

« Mr Silvester, c'est bien ça ? Je suis ravi de faire votre connaissance ! J'aimerais vous faire la conversation, mais voyez vous, je suis contraint de prendre congé... »

Première phase : observer attentivement la réaction du camp ennemi. Seule celle-ci lui permettrait d'en savoir plus sur les méthodes de son potentiel adversaire.

« Mon nom est Tom Fields, enchanté ! »

Bien entendu, l’esprit brillant de Donald McWilde avait pensé à ne pas révéler son vrai nom ! Tom Fields était un petit Gryffondor de deuxième année que Donald aimait bien "taquiner", et qui n'avait rien à voir avec cette affaire ; mais si le concierge (décidément, ce mot sonnait péjoratif) venait à se plaindre aux autorités hiérarchiques (à savoir l'antiquité McGonagall, la sombre Adamson ou l'extravagante Hellsoft) de l'impertinence et autres frasques de l'innocent Tom Fields, Donald aurait un instant de répit pour mettre en place un repli stratégique. Si le concierge le croyait. Et logiquement, il n'avait aucune raison de ne pas le croire.

Le gamin hocha distraitement la tête quand William lui conseilla de mettre sa main devant la bouche la prochaine fois qu'il cracherait ses poumons. Le jeune concierge demanda alors au gamin où il allait avec ce tas de vêtements mais le gosse détourna la question.

Le gamin affirmait s'appeler Tom Fields, Will nota donc le nom dans un coin de sa mémoire. Tom semblait donc avoir autre chose à faire que répondre à ses questions. William haussa un sourcil d'étonnement. Le gosse n'avait pas froid aux yeux.

"Mr Fields, je crains que vous n'ayez pas le choix. Je ne vous ai pas demandé si vous vouliez me faire la conversation. Je vous ai demandé où vous alliez avec ce tas de vêtements. Alors, j'attends !"

William regarda le jeune garçon et attendit encore une fois mais cette fois, il voulait une vrai réponse. Il allait attendre tout le temps qu'il faudrait. De toute façon, Will était sûr que les vêtements n'avaient rien à faire hors du vestiaire donc une fois que le garnement lui aurait donné une réponse potable, il allait l'obliger à remettre ses vêtements là où il les avaient pris. Ensuite, il allait le garder à l’œil. Ce gosse ne paraissait pas net. Il avait l'air de bien se moquer de lui parce qu'il n'était qu'un concierge. Mais concierge ça lui convenait parfaitement, il n'avait pas envie de s'embêter à essayer d'être prof. Il y avait trop de boulot. Il fallait préparer les cours, corriger les devoirs. Bien sûr, les élèves avaient plus de respect pour un professeur que pour un petit concierge. Surtout qu'il était relativement jeune.

Charlie n'avait pas forcément eu tord quand il l'avait pris pour un gamin. Quand il regardait les septièmes et les septièmes bis, il se disait qu'il n'arriverait jamais à se faire craindre et respecter. Mais la solution n'était peut-être pas là avec eux. Peut-être devait-il d'abord essayer d'apprendre à les connaître et à leur montrer qu'il les respectait. Leur prouver qu'il n'était pas comme Rusard et en ayant de bonnes bases à leur tour eux seraient peut-être cool avec lui.

Enfin, il avait le droit d'espérer. En attendant Tom devait-être sa priorité. Il sentait qu'il n'avait pas fini d'en entendre parler de celui là.

Bien. Apparemment, ce William Silvester était plutôt souple mais quand on se moquait de lui, il ne laissait pas passer ; donc, il faisait le concierge parfait. Donald allait donc devoir se surpasser, et pour l'instant, son seul plan pour échapper au concierge était la fuite. Certes, l'année ne commençait pas sous de bons auspices s'il fuyait dès le premier jour, mais on pouvait envisager plusieurs bons côtés à la chose : il pourrait ainsi mesurer les limites physiques du jeune homme.

Au vu de l'air impératif de Silvester, Donald sut que la joute verbale était perdue d'avance. Comme il ne pouvait pas lui expliquer ce qu'il faisait avec ces vêtements, il ne pouvait que se défiler. Il haussa ses sourcils trop fournis, plissa son imposant appendice nasal, se gratta une de ses oreilles décollées et lança sardoniquement :

« A plus Willy ! »

Donald ignorait encore ce que cette familiarité insolente lui coûterait, mais il était persuadé qu'elle lui en ferait pâtir. Ne se laissant aucun instant de répit, Donald détala comme un lapin. Il ne regarda même pas si Silvester le suivait. Soit il essayerait de le stopper avec un sortilège, mais le temps qu'il dégaine sa baguette Donald serait déjà loin (et il fallait prendre en compte une bonne visée et un risque possible d'atteindre un autre élève), soit il se lancerait à sa poursuite, et ce serait le plus rigolo. Le Gryffondor pourrait ainsi évaluer l'étendue de ses capacités physiques. Certes le concierge avait de plus grandes jambes et ne semblait pas trop mal constitué, Donald avait de longues années d'expérience devant lui, et malgré son ventre rebondi, ses jambes aux genoux noueux, calleux et sales pratiquaient la course avec brio.

Sous les regards étonnés ou blasés des élèves se baladant dans le parc, Donald courait de toutes ses forces ; le vent sifflait à ses oreilles, il ne sentait plus ses jambes et ses poumons agonisaient. Il comprit qu'il était obligé de faire une pause. Le mioche se rendit compte qu'il avait traversé une partie importante du parc ; derrière lui, le Terrain de Quidditch, devant lui, la cabane d'Hagrid. Ni une ni deux, il se dissimula derrière la maisonnette, priant pour qu'on ne le surprenne pas ou que Silvester ait abandonné la course. Dans le cas contraire, il lui faudrait à nouveau courir.

Le jeune garçon semblait réfléchir à ce qu'il pouvait bien dire à William. Le concierge attendais donc patiemment que Tom se décide à ouvrir la bouche est à former des sons qui créerait des mots qui formerait des phrases. Le gamin haussa alors les sourcils, remua son nez d'une façon étrange et se gratta une oreille avant de lancer insolemment :

" A plus Willy !"

Will resta un instant complètement ébahie devant l'insolence du gamin. Il le vit alors partir en courant dans le parc. Le jeune homme songea un instant à l'arrêter avec un sort mais le temps qu'il attrape sa baguette, qu'il vise et lance le sort le gamin serait déjà loin et hors de portée.

Le jeune homme soupira, il allait devoir courir aussi. Il sortit néanmoins sa baguette au cas où il pourrait s'en servir. Il chassa Cocaïne de son épaule pour ne pas la secouer lors de sa course et courut derrière le Gryffondor qui détalait comme un lapin.

William avait l'avantage des grandes jambes mais il n'avait plus courut depuis au moins cinq ans. Il manquait un peu d'entrainement mais il retrouva bien vite toute sa vitesse. Son souffle s'adapta à son allure. Il était heureux, il n'avait pas perdu son endurance de ses courses poursuites nocturnes avec Rusard.

Le jeune concierge courait tel un félin derrière sa proie, il allait bientôt le rattraper quand le garnement alla se cacher derrière la cabane d'Hagrid. Will freina abruptement et utilisa son cerveau. S'il suivait le gamin, ce dernier allait le voir et détaler encore une fois. Il agit donc finement et passa par l'autre côté de la maison.

Il se retrouva alors dans le dos de Tom et jouant l'effet de surprise, il posa sa main sur son épaule en serrant légèrement mais suffisamment pour empêcher le gosse de fuir.

"Et bien Mr Fields, je vous retrouve enfin. Vous pourrez vous vanter de m'avoir fait courir. Malheureusement pour vous, je n'ai pas eu ma réponse toute à l'heure et votre manque de respect vous coûtera une retenu avec moi demain soir. Vous m'aiderez à récurer les toilettes du deuxième étage. Maintenant vous allez m'expliquer ce que vous alliez faire avec ce tas de vêtements."

William allait bien évidemment avertir le Professeur Hellsoft du comportement du gamin mais il était néanmoins intrigué par ce qu'avait voulu faire le gamin avec les vêtements.

« AAAAAH ! » hurla Donald en sentant une main se poser sur son épaule.

*Mon coeur... Mon pauvre petit coeur... J'hyperventile...* se lamenta-t-il en se remémorant les conseils du médecin. Enfin, d'un médecin. La famille McWilde avait consulté une quantité de spécialistes impressionnante pour tenter de "guérir" leur rejeton. Le diagnostic était pourtant clair : syndrome aiguë de la bougeotte et maladie incurable du tapageur. Selon Donald (qui haïssait tous les docteurs, même qu'il en avait mordu plus d'un), le dernier médecin consulté était un fou ! Il se disait pyscho... pchychi... bref, un mot imprononçable. Il avait prescrit du repos, du calme et surtout peu de chocs. Comme si avec Coin-Coin, c'était possible !

Le concierge, c'était prévisible, lui prescrit une retenue. Même si Donald ne l'avouerait jamais, il admirait le jeune homme : peu d'adultes pouvaient se vanter de l'avoir attrapé. Malgré cela, le petit Gryffondor avait plus d'un tour dans son sac. La poigne solide de Silvester le retenait par le collet, mais un canard de son espèce ne se laissait pas décourager si facilement. Il sourit avec un peu trop d'assurance (on pouvait toujours espérer que son haleine de chacal asphyxierait le concierge) et répondit avec aplomb :

« C'est entendu pour la retenue ! (Comme s'il avait le choix) Mais vous avez dit que je vous "aiderais" à récurer les toilettes du deuxième étage... Alors ça veut dire que d'habitude, vous le faites tout seul ? Récurer les toilettes, c'est donc pour cela que vous êtes ici... Remarquez, à chacun ses objectifs... »

Ses dents jaunes se firent plus visibles. Il fallait avouer que cette remarque était assez blessante, mais Donald avait le don de tourner le couteau dans la plaie une fois qu'il avait trouvé la faiblesse de ses adversaires. Il reprit, plus sarcastique encore :

« Bon, j'admets votre supériorité étant donné l'inconfortabilité de ma position... pour l'instant. »

Alors qu'il prononçait ces mots, ils se libéra d'une forte secousse de la grande main qui le retenait et s'élança... vers la forêt interdite. Un échappatoire, il lui fallait un échappatoire... Donald savait bien qu'il ne pourrait pas fuir éternellement, mais il préférait retarder encore son exécution. Apercevant un immense arbre un peu en retrait de la lisière de la forêt, il n'hésita pas une seconde. Encore un défi palpitant à relever ! Une poussée d'adrénaline s'insinua dans chacun des muscles (ou des bourrelets) de Donald, et il posa ses mains dodues sur le tronc rugueux. Ce contact le fit frissonner de plaisir (certains auraient plus imaginé cette phrase avec un être humain plutôt qu'un conifère, mais pas Donald) et s'agrippant au bois comme un singe, il monta les premier mètres qui le séparaient de la branche la plus basse. A partir de cet instant, l’ascension fut facilitée. Les diverses expériences passées du casse-cou lui assuraient un savoir-faire sans égal ; il avait l'agilité d'un oustiti. Grimper à un arbre de cette envergure lui donnait une impression de puissance et de domination. Pour un peu, il aurait étendu les bras et crié : "Je suis le maître du monde !" mais s'il avait lâché ses prises, il se serait cassé la figure. Alors il se contentait, branche après branche, de s'enivrer de ce sentiment grisant qui s'emparait de lui. La hauteur vertigineuse, les feuilles encore vertes, la brise lui caressant le visage...

Il avait failli oublier ses résolutions ; se maîtrisant, il entendit soudain un petit coassement de frayeur... et vit que son crapaud, dont la poche de son maître n'était décidément pas un domicile sûr, tombait en chute libre à travers l'épais feuillage, blottissant dans ses petites pattes un chewing-gum usagé. Oubliant que son cri pourrait le trahir, Donald, se plaquant les mains sur ses oreilles décollées, hurla :

« STARR ! »

Le Gryffondor entendit un bruit sourd. Soit le crapaud était sauvé par une branche, soit il s'était écrasé au sol, soit William Silvester dirigé par son cri l'avait reçu sur le crâne. Il imaginait déjà, gravé dans le marbre : "Ci-gît Starr, mort pour son maître, ami à jamais dans son coeur..."

Le gamin hurla de frayeur quand William posa sa main sur son épaule. Il ne faisait quand même pas si peur que ça, il ne fallait pas exagérer. Il annonça alors au petit Tom qu'il allait écoper d'une retenue ce qui ne sembla pas le surprendre. Il assura qu'il était d'accord pour la retenue. Comme s'il avait le choix. Il croyait au Père-Noël ou quoi ?

Le gosse se montra alors blessant en laissant entendre que son boulot finalement ne consistait qu'à récurer les toilettes. Cela montrait à quel point les élèves ignorait tout du fonctionnement du château. Logiquement tout ce qui était nettoyage des salles et des sanitaires était géré par les elfes de maison. Les retenues de ce genre permettaient donc en plus de punir l'élève, d'alléger le travail des elfes. Cependant William lui devait veiller à ce que les élèves ne fassent pas n'importe quoi dans le château, à ce qu'il ne salissent pas tout, ni ne saccagent tout. Tâche bien difficile car Poudlard était bien grand. Mais son rôle de gendarme lui plaisait pour l'instant et l'équipe enseignante était relativement agréable.

Ça le changeait du Chaudron Baveur et il était heureux d'être de retour à Poudlard. Même si le gamin en face de lui était pénible et inconvenant. Will se demandait parfois comment certains parents éduquaient leurs enfants vu la façon dont ils se comportaient.

Il allait ramener le garnement au château avec lui quand il réussit à s'échapper. Il vit le petit Tom partir en direction de la forêt interdite et grimper à un arbre. Il entendit alors le gamin hurler.

"STARR !"

William vit alors Cocaïne lui voler au dessus de la tête et partir en direction de l'arbre qui avait crié. La chouette attrapa quelque chose au vole et le donna au jeune homme. Il s'agissait d'un crapaud affreux. Ce devait être l'animal du petit vu qu'il avait crié son nom. Il aurait bien crié au gamin qu'il avait sa bestiole et que s'il voulait la récupérer il fallait descendre de l'arbre mais ça n'aurait pas été drôle.

Il sortit donc sa baguette de sa poche et fit léviter le gosse jusqu'à lui. Un élève volant, Will se retint d'éclater de rire. La situation était tellement comique.

Malheureusement pour lui, le petit avait à peine touché le sol qu'il détalait comme un lapin. William soupira et lui courut après, arrivé à sa hauteur, il prit de l'élan et tel le meilleur rugbyman, plaqua le minuscule gamin au sol. Au moins là, il n'allait plus fuir.

Il le saisit par le bras pour le relever et le tint bien fermement. Il n'allait pas se laisser avoir deux fois.

"Et bien Mr Fields, je crois que vous allez avoir quelques petits soucis. J'ai l'honneur de vous annoncer que vous allez laver chaque pièces de ce château jusqu'à ce qu'il brille comme un sous neuf. Les elfes de maison ont tellement de travail. Vous allez soulager un peu leurs peines. Et pour être sur que le travail est bien fait je vais vous surveiller étroitement."

William laissa un sourire fleurir sur ses lèvres. Il allait lui faire passer son envie de se foutre de lui à ce sale môme.

Donald gémissait lentement tandis qu'une vision atroce monopolisait ses pensées. Il se remémora les instants uniques qu'il avait passés avec son crapaud ; depuis le jour où il l'avait tenu dans ses mains potelées, à la boutique du Chemin de Traverse, à leurs parties de Cache-Cache et jeux de Cow-boy et d'Indien endiablés. Tout à ses lamentations, il se rendit compte que ses mains glissaient sur l'écorce. Affolé, il se vit flotter dans les airs.

*Douce Morgane... Je vole !*

A quoi était dû ce phénomène étrange ? Donald émit mentalement la supposition que ses grandes oreilles en soient pour quelque chose, comme Jumbo, mais déchanta vite quand il aperçut William Silvester, la baguette brandie vers lui. Apparemment, il maîtrisait plutôt bien le Sortilège de Lévitation. Le petit Gryffondor sentit ses oreilles - qui malgré leur taille, n'avaient hélas pas les mêmes pouvoirs que celles de Jumbo - prendre la couleur de sa cravate. Il croisa les bras et gonfla ses joues d'un air boudeur - prenant pour ainsi dire une attitude pour le moins enfantine.

Une fois les pieds au sol, le garçon vit en un éclair son animal de compagnie, bien vivant, dans les mains du concierge. Il faillit se jeter dans ses bras mais se retint en remarquant que le jeune homme contemplait son ami de toujours avec un dégoût bien visible. Ulcéré, Donald tira la langue à son aîné. Certes il avait sauvé Starr, mais pourquoi tant de répulsion pour les pustules ? Pourquoi cette discrimination constante envers ces batraciens ? Tout en s'enfuyant, il hurla au concierge :

« Au lieu de comparer mon crapaud au derrière d'un chat, faites votre boulot Mr Silvester ! »

Ses pieds martelaient l'herbe grasse quand il sentit quelque chose lui encercler les jambes. En effet, les bras du concierge descendaient vers les chevilles de Donald pour aboutir à un placage parfait : l'inévitable n'avait pas été évité. Le Gryffondor s'écrasa un sol comme une fiente de pigeon et ne bougea plus. Il laissa échapper une plainte rauque et tenant son bras. La feinte aurait pu rester réaliste si Donald avait résisté à la forte envie d'y ajouter un peu de théâtralité, envie qu'il ne put réprimer. Il geint, faisant envoler toute la crédibilité de la scène :

« Aaaah ! Mon bras... Je souffre... »

Bien entendu, il pouffa de rire entre les brins d'herbe. Silvester le releva et commença un petit discours moralisateur que Donald n'écouta pas. Il était coincé, la poigne du jeune homme était trop forte pour la moindre tentative d'esquive. La tentation l'emporta une fois de plus et il répondit d'une voix railleuse :

« J'ignorais que vous pratiquiez le rugby. Vous devriez monter un club avec Aaron Finnigan et A... »

Il s'arrêta soudain car une préoccupation lui revenait à l'esprit. Il essuya son menton plein de poussière et ordonna :

« Rendez-moi mon crapaud ! »

Le concierge plaqua le garnement au sol, ce dernier se mit alors à gémir comme un nouveau-né en tenant son bras. Le jeune homme leva les yeux au ciel, le gosse faisait de la comédie ça se voyait comme le nez au milieu de la figure. Le gamin poussa alors un cri beaucoup moins crédible qui fit soupirer le concierge et éclater de rire le sale môme.

S'il ne se retenait pas, il aurait giflé l’impertinent. Il avait sauvé son affreuse bestiole, supporté son haleine de chacal et ses réflexions désobligeantes. Il lui avait couru après et maintenant, il appliquait ses réflexes de joueur de rugby. S'il avait su ce que le poste de concierge impliquait, il ne se serait peut-être pas présenté.

Le jeune homme se reprit alors mentalement, ce gamin n'allait pas le faire douter de ses choix. Il était très bien au château et il n'allait pas jeter l'éponge si vite. En plus, la situation pour dire vrai l'amusait au plus haut point.

Le gamin lui dit alors qu'il ignorait qu'il pratiquait le rugby et qu'il devrait monter un club avec un certain garçon et une autre personne dont le concierge ne saurait jamais le nom puisque le garnement ne finit pas sa phrase. Le jeune homme se dit que c'était normal que le gosse ne sache pas qu'il pratiquait le rugby puisqu'il n'avait pas étalé sa vie. Mais l'idée de monter un club de rugby à l'école lui plaisait, il faudrait qu'il en parle.

La gamin lui ordonna alors de lui rendre son crapaud, le ton employé ne plus pas du tout au concierge.

"Jeune homme, je vous rendrais votre crapaud quand j'en aurais décidé. Et changez de ton avec moi s'il vous plaît, je ne suis pas un de vos camarade de classe. Pour l'instant nous allons rentrer au château et je vous rendrais votre animal dans mon bureau."

Tenant toujours fermement le jeune garçon, il commença lentement à traverser le parc.

Donald savait qu'il avait perdu, comme quand son frère se montrait tyrannique à chaque départ de vacances et que Coin-Coin hurlait : "Oh non, c'est toujours moi qui porte les valoches !" Mais il se remémora un proverbe que son oncle Ed disait souvent : "La bataille est perdue, mais pas la guerre !" Donald se ragaillardit. Il ne devait pas se lamenter sur le passé mais analyser les causes de son échec. Décidément, il y avait une faille dans son plan infaillible. Car non, il n'était pas censé se faire attraper si vite ! Donald avait sous-estimé les capacités de son ennemi. Enfin un adversaire à sa hauteur ! Enfin une guerre qui s'annonçait plus rude que les précédentes !

Oublieux de sa situation actuelle, Donald se rattrapa bien vite. Il devait à tout prix empêcher le concierge 1) de prévenir sa directrice de maison et 2) de garder son crapaud. Pour le deuxième point, Silvester avait certifié qu'il le lui rendrait dans son bureau, et il avait l'air d'un homme de parole alors Donald décida de lui faire confiance. Pour le premier point, le jeune homme en avait proféré la menace. Le Gryffondor décida donc qu'il lui fallait sortir le grand jeu, sinon...

« Non... Mais après ? Rassurez-moi, vous n'allez pas avertir Hellsoft de cette stupide querelle, non ? Si vous le faites, je pousse des cris suraigus et je prétends que vous avez porté la main sur moi ! »

Apparemment, le concierge n'écoutait même pas ses menaces, il se contentait de le traîner lentement à travers le parc. Donald ajouta tout de même, par sécurité, avec un sourire de fauve :

« Non, je n'ai pas de preuve. Mais vous non plus... »

Le petit Gryffondor retint à temps un rire démoniaque. Il venait de se rendre compte qu'il ferait mieux de ne pas se faire remarquer. Il se laissa donc emmener vers sa première punition, et sûrement pas la dernière. Quoi qu'il en soit, il avait un nouveau défi à relever ! Cette année ne serait pas de tout repos. Il lança un regard rempli d'excitation son nouvel ennemi.

*Damned, foi de Coin-Coin, on va bien s'amuser !*