Can't help falling in love [Garlan & Ivar]

Est-ce qu’il est sûr ?

Oui, évidemment. Ivar connaît déjà cette réponse, même s’il ne la donne pas immédiatement. C’est presque terrifiant comme il est sûr de lui. Parce que s’il est certain de vouloir attendre Garlan, de lui donner une seconde chance malgré tous les derniers événements et tout ce qui est compliqué dans leur relation, ça veut dire qu’il est vraiment accroché à lui. Si même des mois de prison ne les séparent pas, ça signifie que leur histoire est bien plus sérieuse qu’ils ne veulent le dire.

Et ça, c’est merveilleux et effrayant à la fois.

« Oui, je suis sûr » affirme t-il en plongeant son regard dans celui de Garlan.

C’est d’autant plus effrayant qu’Ivar sait déjà que cette crise n’est pas la dernière qu’ils vont traverser ensemble. Il sait déjà que dans quelques mois, peut-être années, c’est lui qui va bouleverser le monde de Garlan, le choquer, le décevoir probablement, en lui révélant qu’il n’est pas la personne qu’il prétend être depuis le début. Ivar est très conscient qu’il avance sur un fil. Il sait que cette relation pourrait prendre fin du jour au lendemain, sans qu’il n’ait aucune prise là-dessus, car il n’a aucune idée de comment son petit ami pourrait réagir en apprenant qu’il est un sorcier. Certains dans sa situation trouvent ça fascinant et merveilleux. D’autres se sentent trompés, floués et profondément mal à l’aise, avec l’impression que leur partenaire est tout à coup devenu un inconnu, voire, une dangereuse personne.

À chaque fois qu’il y pense, Ivar a la nausée.

Alors si aujourd’hui, il pardonne cette erreur à Garlan, ce n’est pas seulement parce qu’il l’en estime digne. C’est aussi parce qu’il espère quand quand le moment sera venu, Garlan pourra lui accorder son pardon à lui aussi.

Ivar enferme ces pensées dans l'intimité de son coeur pour revenir au moment présent, celui où cette réconciliation tant attendue leur tire des sourires à tous les deux. Il s’écoule un silence où leurs regards se disent les mots que le secret les empêche de prononcer. En vérité, n’importe qui d’un peu attentif verrait l’amour transparaître entre ces deux jeunes hommes assis à cette table, mais ils continuent de maintenir cette illusion bancale, par habitude, par peur.

Il y a tellement de non-dits qui pèsent entre eux que quand Garlan lui demande de quoi écrire, Ivar pressent déjà ce qu’il veut faire. Le coeur battant, il l’observe feuilleter les pages puis inscrire quelques mots à la page du quatre novembre, date de sa remise en liberté. Son coeur bat plus fort encore au moment où il lit enfin ces deux petites phrases dont il sait déjà qu’il va les relire encore et encore jusqu’à la date inscrite au-dessus.

Ivar mord son sourire pour le contenir. Garlan ne lui dit pas souvent ces mots-là. Il le lui dit d’une autre manière, par les gestes, par toutes les attentions qu’il a pour lui. Toutes ces mille petites choses qu’Ivar a noté au fil des mois ; il demande toujours de quoi il a besoin, l’embrasse beaucoup, s’intéresse à ce qu’il aime, remplit ses placards avec ce qu’il préfère manger. Il fait l’effort de lui donner des petits surnoms d’amour lui aussi, depuis qu’Ivar lui en donne à profusion, parce qu’il est plus expansif par les mots, lui. Alors il sait que ces deux phrases sont loin d’être anodines pour Garlan et ça se voit dans son regard timide et ses joues rouges. Les yeux d’Ivar, eux, le couvent avec tendresse pour le remercier silencieusement.

Le commentaire que Garlan fait à voix haute, sur un ton troublé, lui serre le coeur d’inquiétude et de compassion. Le regard d’Ivar retrouve la trace de ce vilain hématome sur sa joue, qui trahit les côtés les plus durs des dernières journées passées en prison. Des paroles de réconfort, il en a des dizaines qui se bousculent dans sa tête. Plutôt que de les dire, il choisit de les inscrire à son tour.

Il veut que Garlan ait lui aussi un mot à lire tous les jours, pour se réconforter pendant les moments où ils ne peuvent pas se parler. Il tourne les pages jusqu’aux toutes dernières réservées aux notes libres.

« Courage, je penserai tous les jours à toi jusqu’à ton retour. Je t’aime plus que tout. »

Il déchire sa page et la glisse dans la main de Garlan. Il profite de ce bref contact pour effleurer ses doigts en ramenant sa main vers lui.

« Garde-la avec toi » lui souffle t-il.

FIN DU RP