Le deal à ne pas rater :
Réassort du coffret Pokémon 151 Électhor-ex : où l’acheter ?
Voir le deal

Interlude [Joséphine]

Constantine Égalité
Constantine ÉgalitéDirecteur du Département des Mystères
Messages : 382
Profil Académie Waverly
Interlude [Joséphine] Icon_minitimeJeu 1 Avr 2021 - 16:49
28 mars 2011

Intimidé, déchiré, humilié. Mais je ne suis pas mort. Une toute petite partie de moi aurait souhaité l’être, je crois. Surtout pendant. J’ai si mal. Mon corps brûle, s’ébroue de spasmes, c’est affreux. Je suis devenu une grande plaie battante dont les nerfs épargnés se repaient de la souffrance de ceux qui hurlent. Je boîte, les dents crispées, fermement encadré par deux veilleurs dont j’ignore totalement l’attitude tant je suis concentré sur toutes les information que me transmet mon corps, lamentable, qui se traîne jusqu’à la sortie. On me traite très poliment désormais. J’essaie de dissimuler que mes dents claquent encore, incontrôlables, mais mes dernières épaves de fiertés se sont évaporées dans le bureau quand j’ai hurlé en suppliant. C’est déjà un souvenir flou dont ne perdurent que les sensations fulgurantes de souffrance et le ton mat à mon oreille qui me dit de ne jamais, jamais recommencer.

Je veux les écouter mais je suis transis par la folie qui m’a amené ici. En état de choc, contre moi-même et contre eux, je ne comprends pas quel état a pris possession de moi. La rage est pourtant toujours là, la silhouette de Joséphine très proche de moi demeure une priorité. Je frissonne brutalement sous la caresse de l’extérieur alors qu’on s’immobilise sur le perron. Un instant je  tenter de reprendre mes esprits, de recommencer à réfléchir, mais il n’y a pas grand-chose de capable en moi. Je ne suis plus qu’un mécanisme instinctif déchiré.

Une à une, je descends les marches. Je sens mes membres comme s’ils étaient ouverts jusqu’à l’os où éclatés de fractures multiples. Je sais que ce n’est que le souvenir traumatique de la douleur, parce qu’ils n’ont laissé aucune traces, et que je serais sûrement capable à nouveau, dans quelques heures, de me mouvoir avec un vague souvenir de ce que je subie en ce moment. Mais ça me semble impossible. Pour l’instant il faut que je m’immobilise après la dernière marche, contre le mur, pour vomir au pieds des Folies. Ça ne me soulage pas, et quand je reprends ma marche c’est avec une respiration haletante et en longeant le bâtiment pour faire le moins d’efforts possibles.

C’est un cheminement qui dure des heures. Pour gagner la ruelle dans laquelle je sais sans pouvoir l’expliquer où ils ont abandonné le corps de Joséphine, j’ai l’impression d’un temps infini, d’une ascension interminable jusqu’à sa forme recroquevillée sur les pavés. Quand je m’agenouille près d’elle je suis vaguement conscient de le faire avec un gémissement tragique et étouffé. Doucement je touche son épaule pour la tirer vers moi et découvrir son visage tuméfié.

Ils l’ont défiguré. Sa peau pâle est couverte d’hématomes violacés qui s’étendent sur ses bras, ses jambes, sa nuque, comme des éclatement de voie lactée. Ses cheveux collent à son front, à sa joue entaillée, au sang qui a coulé de son nez et de sa lèvre fendue en gros bouillons cramoisi. Je frisonne d’un mélange inexplicable de répulsion, de fascination, de colère et de souffrance mêlée. Doucement je passe un pouce sur sa pommette marquée par les coups pour en effacer l’hémoglobine. Le bout de mes doigts effleurent les contours de son visage délicat, de sa paupière enflée. Je sais qu’elle me regarde.

Avec précaution, je glisse mon bras derrière sa nuque pour ramener son visage contre ma poitrine. Tendrement je la sers contre moi, et transplane dans un craquement.  

Les étages qui nous séparent de mon appartement sont les pires. Le corps silencieux de Joséphine dans les bras, je gravis chaque marche en plaçant ma volonté dans les pas que j’effectue, les uns après les autres. Enfin je pousse la porte de chez moi. Chevalerie nous accueille avec un feulement, perturbé sans doute par l’odeur du sang qui recouvre la mienne et qu’il met un instant à reconnaître. Il se jette alors sur moi pour lécher mes mains alors que je referme la porte derrière moi. Méfiant, il renifle Joséphine que j’apporte jusqu’à ma chambre pour la poser sur mon lit. Il me faut quelques minutes encore pour aller fouiller dans mes placards et trouver quelques potions de premiers soins que je pose près de Joséphine.

Je m’assied sur le bord du lit après m’être débarrassé de ma cape encombrante avec un tas de grognement motivés par la rigidité de mes muscles. Chevalerie n’a pas quitté le chevet de Joséphine qu’il inspecte et gratifie de coups de nez suspicieux. Je débouche la première potion, un anti-douleur, que je présente aux lèvres de Joséphine.

- Joséphine… Ouvre les yeux. Il faut que tu boives. » Dis-je et je perçoit que mon ton est las.


cdd1d3c85c0300ef4f5ba7c4f45e58f3.gif
I've been throwing stones, waiting by the river, I've been on my own, praying like a sinner, and you've been gone too long, I'm waiting out the winter, I've been on my knees, praying like a sinner© by Sun, avatar by hedgekey

Spoiler:
Joséphine Walker
Joséphine WalkerProfesseur de danse
Messages : 310
Profil Académie Waverly
Interlude [Joséphine] Icon_minitimeSam 3 Avr 2021 - 10:28
Les coups avaient cessé, pendant un temps. Elle avait cru que c’était terminé, avait senti que les choses s’agitaient, n’avaient pas eu la force de rouvrir les yeux ou de se redresser pour voir ce qu’il se passait. Derrière ses paupières closes, elle percevait par flash une scène qui se déroulait à quelques mètres de là, dont elle ne faisait pourtant pas partie. Une colère qui n’était pas la sienne palpitait faiblement dans un coin de son esprit. Elle aperçut la porte du bureau de Roy s’ouvrir à la volée, crut entendre la voix de Constantine. Puis plus rien. Et les coups reprirent, aussi brusquement qu’ils avaient cessé. Cette fois-ci ses tortionnaires ne prenaient aucun soin à épargner son visage. Joséphine savait qu’elle n’avait jamais eu de beaucoup de valeur à leurs yeux, mais jusqu’alors elle était au moins une jolie fille à ne pas abîmer. Une pute qui pouvait leur rapporter de l’argent. Elle n’était même plus ça désormais, elle n’était plus rien du tout.

Elle était à moitié inconsciente quand elle sentit qu’on la soulevait de terre et qu’on la trainait à l’extérieur du cabaret en passant par les sorties de secours à l’arrière du bâtiment. Le vent frais vint se frotter à son visage, réveillant des plaies dont elle n’avait même pas encore pris conscience. Puis ses genoux heurtèrent le sol à nouveau alors qu’on la laissait tomber à l’ombre d’une ruelle déserte. Ils allaient l’abandonner ici. C’était enfin fini.

Joséphine se recroquevilla sur elle-même, tout son corps secoués de tremblements causés tant par le froid que par la douleur. Elle ne pouvait pas restée ici, couverte de blessures et uniquement vêtue d’un justaucorps. Elle allait ouvrir de fatigue, ou de froid. Elle devait absolument trouver la force de rentrer chez elle. Elle serra les dents et prit appui sur ses mains pour se redresser lentement. Chaque mouvement lui arrachait un gémissement de douleur et faisait rouler ses larmes sur ses joues. Elle parvint à s’asseoir contre le mur et laissa sa tête retomber en arrière contre la pierre. Il fallait absolument qu’elle se relève mais savait que ses jambes ne la porteraient plus. Elle devait se laisser le temps de reprendre un peu de forces. Elle ferma les yeux et essaya d’apaiser sa respiration ignorant les douleurs provoquées par chacune de ses inspirations. Elle commençait seulement à se calmer quand une vive douleur éclata au niveau de sa main gauche. Elle voulut hurler mais ne produisit qu’un grognement étouffé alors qu’elle ramenait sa main -parfaitement intacte- contre elle. Sa respiration et les battements de son coeurs s‘accélérèrent sous le coup de cette douleur fantôme, et elle perdit connaissance.

***

Elle sentit une main se poser sur son épaule, et se força à ouvrir les yeux. Sa vision était trouble mais elle reconnut Constantine. Elle était incapable de dire s’il était réellement en face d’elle, s’il n’était présent que dans son esprit ou s’il n’était pas là du tout. Incapable de penser, elle se raccrocha à ce regard familier et se laissa attirer à lui dans un état de demi-conscience.

***

Une nouvelle fois elle rouvre les yeux sans se rappeler du moment où elle les a fermés. Cette fois-ci elle est étendue sur quelque chose de moelleux. Un lit, lui souffle sa conscience. Pas le sien. Constantine se tient encore dans on champ de vision, un peu flou. Il est affreusement pâle. Il lui tend une fiole de potion, lui dit de la boire. Elle n'a pas encore complètement recouvré ses esprits et pourtant la partie éveillée de son cerveau l’invite à la méfiance. Elle ne sait pas ce qu’il fait ici, elle ne sait pas ce qu’il veut ni comment il s’est retrouvé d’un seul coup dans son esprit tout à l’heure, mais elle ne lui fait pas confiance. Elle se détourne de la fiole qu’il lui présente mais renonce à l’idée de le repousser pour l’éloigner d’elle, consciente qu’elle n’en aurait pas la force.

Elle reprend peu à peu conscience de ses membres douloureux, du goût de son propre sang dans sa bouche, de sa lèvre enflée. Elle se souvient des coups, de la violence, de la douleur. Et elle se souvient de cette autre douleur, celle qui n’était pas vraiment réelle et qui l’avait pourtant plongé dans des tourbillons de souffrance. Elle ne comprend rien de ce qui lui est arrivé, elle ne sait pas où elle est, le seul élément familier dans son environnement est le visage de Constantine en face d’elle. Les souvenirs de son séjour à Skye se superposent à l’instant présent et elle sent une vive angoisse lui étreindre la poitrine. Elle a peur, peur de ce qui s’est passé, de ce qui pourrait se passer encore. Elle tente de prendre une grande inspiration pour se calmer, n’y parvient pas. Respirer lui fait mal, elle a surement quelques cotes cassés. Son souffle devient saccadé, irrégulier, alors que la peur se diffuse en elle.

"Que…Qu’est-ce qui se passe ?" souffle-t-elle, au bord du sanglot.

Elle n’a pas d’autre choix que de s’en remettre à lui. Elle accepte de se raccrocher à n’importe quelle explication qu’il voudra bien lui donner, pour ne pas sombrer dans la folie qu’elle sent planer au dessus d’elle, menaçante.


Interlude [Joséphine] Signature-Jo
Constantine Égalité
Constantine ÉgalitéDirecteur du Département des Mystères
Messages : 382
Profil Académie Waverly
Interlude [Joséphine] Icon_minitimeSam 3 Avr 2021 - 21:44
Joséphine a peur, c’est évident. Elle a peur de moi. Elle me voit à peine mais ce qu’elle perçoit de ma présence suffit à lui donner une pâleur rigide, une tentative de recule faible et vaine, des coups d’oeil décharnés comme si elle était de retour dans la petite chambre capitonnée de Skye. Elle est au bord de ces larmes si précieuses que je lui ai déjà arraché, mais cette fois ce n’est pas moi qui en suis responsable. Elle se détourne de la fiole, égarée mais pas suffisamment pour oublier d’être méfiante. Peut-être désormais n’y a t-il plus que son instinct qui s’exprime et tente maladroitement de la protéger. À quoi bon.

Tendrement je prends son menton entre mes doigts pour la forcer à ramener sa bouche près du minuscule goulot de verre qui attend ses lèvres. Avant de forcer un passage, espérant qu’elle acceptera d’elle-même la médecine ouatée que je lui propose pour alléger sa douleur, je réponds à sa question :

« Ils t’ont battue. Des veilleurs. Je ne sais pas ce que tu leur as fait. » Je tente d’apaiser mon ton, de me faire rassurant, mais comment pourrait-elle se sentir en sécurité en ma présence ? Je ne sais pas non plus comment formuler ce que j’ai vu, ce que j’ai senti, et ce qui s’est passé en moi qui fait que je suis là, à ses côtés. « Je t’ai trouvé derrière les Folies Sorcières, je nous ai fait transplané. C’est un anti douleur, » fais-je en approchant un peu plus la fiole de ses lèvres. « Bois, ça va te soulager. » Enfin elle accepte le médicament. « Si tu préfères aller à Saint-Mangouste je peux t’y amener. » Dis-je une fois qu’elle a terminé de boire. « Ou tu me laisses te soigner. »

Par reflexe, parce que mon énergie était concentrée dans l’effort à faire pour la sortir de cette ruelle puante sans perdre moi-même connaissance, je n’ai pas spécialement pensé à l’emporter d’abord à l’hôpital. Les gens comme moi détestent qu’on leur pose des questions. Quelque chose me dit que les gens comme elle tout autant, mais je ne veux pas qu’elle se sente prisonnière. Cette fois elle ne l’est pas.

C’est étrange, de la trouver là. Depuis Skye nous ne nous sommes pas revus, pas croisés, pas parlé. J’ai laissé entre nous une dimension s’étendre pour la laisser reprendre ses esprits… Pour me laisser reprendre mes esprits également. Le souvenir de ma mémoire tronquée, manipulée, bouleversée par ce que j’ai dû lui faire revivre et le lien étrange qui s’est manifestement établi entre nous n’est pas quelque chose que je maîtrise, et qui me fait peur, terriblement. Le coup de folie que je viens de vivre me saisit d’un haut le cœur chaque fois que j’y pense. J’ai l’impression que je revis sporadiquement la période terrible qui avait suivi la mort de Camille. J’ai peur. Et peur d’en parler comme si y poser des mots risquait de rendre notre expérience plus réelle encore. C’est stupide.

Pourquoi n’ai-je pas supporté qu’on puisse lui faire du mal ? Je ne comprends pas. Une partie de moi pense, suppose, que ça trouve peut-être un lien dans cette connexion puissante qui s’est créé entre nous, mais au fond je sais pertinemment que c’est un mensonge. La légilimencie ne fonctionne pas comme ça. Je pourrais percevoir son agonie tout en lui souhaitant encore la mort. Pourquoi ai-je craint qu’elle disparaisse ? Est-ce à cause de Camille ? Est-ce à cause de ce que nous avons partagé ? Est-ce parce qu’elle est la seule à me connaître sous tous mes revers et dans mes pires travers et à poser sur moi le regard le plus objectif au monde ? Je n’en sais rien. Je sais juste que la sentir près de moi, en sûreté, me remplit d’un soulagement bouleversant. Je tremble de me connaître aussi mal et de me découvrir la spontanéité folle d’un quasi-suicide à l’idée qu’on puisse la détruire.

Je tends la main pour reposer le flacon vide que j’ai ôté d’entre ses doigts. Tout mon corps à cette simple tension s’éveille à nouveau des remugles poisseux de la souffrance. Un spasme électrique de douleur m’immobilise quelques secondes les dents serrées, avant de me laisser revenir à ma position initiale. Je souffle pour expirer la fièvre qui m’a prise sous le coup de la brûlure.

- Si tu ne veux pas aller à l’hôpital il faut que tu me laisses vérifier tes blessures. » Fais-je pour lui indiquer à quoi elle s’expose.


cdd1d3c85c0300ef4f5ba7c4f45e58f3.gif
I've been throwing stones, waiting by the river, I've been on my own, praying like a sinner, and you've been gone too long, I'm waiting out the winter, I've been on my knees, praying like a sinner© by Sun, avatar by hedgekey

Spoiler:
Joséphine Walker
Joséphine WalkerProfesseur de danse
Messages : 310
Profil Académie Waverly
Interlude [Joséphine] Icon_minitimeLun 5 Avr 2021 - 19:45
Joséphine retient son souffle alors que Constantine attrape délicatement son menton. Ses doigts sont glacés mais le frisson qui lui parcourt le dos n'est pas provoqué par le froid. Elle est morte de peur et le supplie du regard de ne rien faire. Ils se sont déjà tenus ainsi, dans une position quasiment identique, ses yeux dans les siens, et elle sait ce qui vient ensuite. Elle redoute une nouvelle intrusion mentale dont elle a le sentiment qu'elle ne ressortira pas indemne. Son esprit embrumé peine déjà à rassembler les morceaux des dernières heures écoulées pour en construire un souvenir incomplet. Elle ne veut pas sombrer une nouvelle fois.

En quelques mots il lui livre un récit brut et objectif qui corrobore ses derniers souvenirs. La vérité n'a pas grand-chose de rassurant mais elle la préfère aux doutes et à la confusion. Elle s'autorise finalement à respirer et entrouvre les lèvres alors qu'il insiste pour lui faire boire une potion qu'il prétend être un anti-douleur. Elle n'a aucune raison de le croire mais ses blessures se réveillent les unes après les autres et la souffrance est de moins en moins supportable. Elle n'a pas la force de résister à cette promesse de soulagement. Pourtant quand il lui propose de l'emmener à Sainte-Mangouste, sa réponse est automatique.

"Non, ça va aller."

Elle sait très bien que si elle arrive à l'hôpital dans cet état-là, on lui posera des questions. Les traces sur son corps laissent peu de place au doute et elle sait qu'on va lui réclamer des explications. Ils vont lui demander un nom, surement dans le but de la protéger, mais elle ne pourra pas leur donner. Elle refuse de prendre le risque de se retrouver face à un agent de la Police Magique qui la forcerait à porter plainte. Elle sait trop bien à quel point les Veilleurs sont intouchables, et elle aurait trop peur des représailles.

"Si tu ne veux pas aller à l’hôpital il faut que tu me laisses vérifier tes blessures."

Elle se raidit. Elle n'aime pas l'idée qu'il la touche, qu'il la manipule. Il l'a déjà trop fait. Pourtant elle hoche la tête, elle est consciente qu'elle a besoin de soin et qu'il est la seule personne qui puisse les lui donner. Elle ne comprend pas pourquoi il est cette personne, d'ailleurs. Elle se souvient assez clairement de ce qu'il lui a rappelé un instant plus tôt. Elle se souvient des Veilleurs sur la terrasse couverte des Folies, elle se souvient des coups, et elle se souvient aussi avoir entendu la voix de Constantine alors même qu'il n'était pas présent. Comment s'est-il retrouvé là, d'abord dans son imagination puis aux Folies ?

Elle l'a clairement vu tressaillir alors qu'il reposait la fiole de potion sur la table de chevet. Ses gestes sont gauches, et chaque mouvement semble être douloureux. Comme si lui aussi avait été roué de coups. Des hypothèses commencent à se former dans son esprit mais elles lui semblent complètement folles. Comment aurait-il pu s'introduire dans son cerveau alors qu'ils étaient à des kilomètres de distance ? Mais sinon, comment expliquer sa présence aux Folies Sorcières ?

"Comment tu as su où j'étais ?" demande-t-elle en posant sur lui un regard chargé de méfiance et d'incompréhension.

Elle sait qu'elle ne devrait pas lui poser de questions, qu'elle ne devrait pas lui laisser l'occasion de lui mentir, mais une part d'elle a besoin de comprendre et envie de lui faire confiance. Pour une raison qu'elle ne s'explique pas, il est la personne qui est venue la sauver, et elle n'arrive pas à le détester autant qu'elle le devrait. Elle se souvient pourtant de ce qui s'est passé à Skye et elle sent qu'elle lui en veut encore, qu'elle lui en voudra toujours, mais il est aussi la seule personne présente pour elle en ce moment et elle a besoin de se raccrocher à lui.


Interlude [Joséphine] Signature-Jo
Constantine Égalité
Constantine ÉgalitéDirecteur du Département des Mystères
Messages : 382
Profil Académie Waverly
Interlude [Joséphine] Icon_minitimeMer 7 Avr 2021 - 20:58
Sa terreur est là, dessinée sur son visage que les tâches nervurées des coups ne peuvent dissimuler. Son regard brille d’une ferveur suppliciée, et muette elle me prie de toutes ses forces de ne pas lui faire mal. Ça me sert la gorge mais je contemple avec fascination ce pouvoir que j’ai sur elle, cette peur qu’elle a de moi et qui me permettrait de la briser d’un simple geste si j’en avais l’envie. Mais ce n’est pas le cas. Avec elle je me découvre des passions que je n’avais jamais eu conscience d’avoir en moi. Parce qu’elle est si pleine de Camille je l’ai haï avec toute la passion de mon âme et décidé de faire d’elle un objet au service d’une cause qui la dépasse. Parce qu’elle est si pleine de Camille, elle m’a fait souffrir d’une culpabilité que nul autre n’aurait pu aviver tant elle est déjà présente, cette vieille compagne qui à force de m’étreindre a pris la forme de mon corps et s’est greffé à moi.

Elle est si pleine de Camille que j’ai passionnément besoins de la protéger du mal que je ne lui fais pas, hypocrite et sale monstre pervers, de calmer la souffrance des marques sur son corps, des bris d’os dans son ventre, du choc dans son esprit. Comme si ce que je lui avais fait ne faisait pas de moi son bourreau. Je sais consciemment que je ne cherche pas le pardon, ce n’est pas un acte commis pour l’absolution de quoi que ce soit. Je lui fais peur et je prends cette peur comme la juste récompense, infecte et douloureuse, de ce que je lui ai fait. A skye je l’ai détesté et voulu toute à la fois. En la découvrant si fragile, en sentant dans mon squelette endolorie les heurts de sa propre punition, en ayant tout le long des muscles encore l’horreur de mon traitement et la folie qui m’a habité, je la veux simplement apaisée et entourée de toute la chaleur d’une affection profonde et bizarre qui s’exprime sans que je l’aie invoquée.

Je ne sais plus qui de la haine ou de l’amour prédomine, ils se sont confondus dans une étreinte troublée par la colère. Au fond ça n’a plus d’importance. Je ne cherche pas à comprendre les sentiments étranges et forts qui s’entremêlent en moi pour Joséphine. Ceux-là aussi se passent de mots.

À mon soulagement, elle accepte de boire, et refuse l’hôpital. C’était prévisible. J’hésite à l’interroger mais garde pour moi mes questions en frustrant ma curiosité. Ce n’est pas le moment de la presser et j’ai pour elle un respect paradoxal qui lui laisse ce coin de secret. Je la voie suffisamment se tendre lorsqu’elle envisage le contact de mes mains sur elle pour lui épargner une autre forme d’intrusion par la parole. Alors que j’ai été capable de forcer son esprit, de me mêler étroitement à elle au point de ne plus la sentir totalement ailleurs, de fouiller des souvenirs qu’elle n’invoquait même pas pour elle, l’idée soudain de la toucher me gêne autant qu’elle. J’ai une conscience très forte de la souillure que je vais poser sur son corps après en avoir laissé des traces dans son esprit.

D’un geste maladroit je tire de ma poche intérieu la baguette qu’ils m’ont rendu, grimace, invoque d’un accio une boîte circulaire en ivoire. Je me lève pour la regarder. Sa tenue laisse apparente les tâches mauves qui s’élargissent paresseusement sur ses cuisses, ses tibias, ses épaules, ses poignets. Je m’agenouille au bout du lit en réprimant un spasme que mes nerfs, qui ne se déshabituent pas, m’envoient comme un signal, et défait avec des geste doux les chaussures inconfortables. Je sens sur moi son regard qui me scrute, méfiante.

- Comment m’as-tu trouvé ? » Je garde le silence, retire une chaussure, puis deux. Je m’appuie sur le lit pour me relever.
- Il faudrait que tu retires ton… Ton costume. » Dis-je en pointant le vêtement unique frangé de strass qu’elle porte comme une camisole qui, probablement, écrase de côtes qu’elle a brisé. Comme ses yeux, noirs et insistants ne me lâchent pas, je pince un peu les lèvres. J’hésite à ne pas lui répondre, ou à lui dire qu’on en parlera plus tard, mais le trajet de la discussion est si évident qu’il me paraît plus simple de céder tout de suite. "Je t’ai vu, dis-je. Doucement j’ouvre le pot dont émane une fragrance de plantes mélangées. J’ai senti aussi. Ce qu’ils te faisaient. » Et à ce stade, je n’ai aucune envie de lui parler de la façon dont j’ai fais irruption aux Folies.


cdd1d3c85c0300ef4f5ba7c4f45e58f3.gif
I've been throwing stones, waiting by the river, I've been on my own, praying like a sinner, and you've been gone too long, I'm waiting out the winter, I've been on my knees, praying like a sinner© by Sun, avatar by hedgekey

Spoiler:
Joséphine Walker
Joséphine WalkerProfesseur de danse
Messages : 310
Profil Académie Waverly
Interlude [Joséphine] Icon_minitimeSam 10 Avr 2021 - 9:42
Joséphine réprime un frisson alors que les mains froides de Constantine effleurent sa cheville pour lui retirer ses talons hauts. Elle ne réalise qu'à cet instant à quel point ses chaussures étaient inconfortables. Face à la douleur qui se répand dans tout le reste de son corps, cette sensation désagréable était passée inaperçue. Elle se raidit quand il lui demande de retirer son costume et ne bouge pas. Elle sait que ça n'a aucun sens, de refuser qu'il la voie. Elle est terriblement consciente de ne plus rien avoir à lui cacher, lui qui a vu ses souvenirs les plus secrets, les plus intimes. Pourtant l'idée la dérange et elle refuse de se dénuder devant lui, alors même qu'elle n'a jamais vraiment été pudique -déformation professionnelle.

Elle a remarqué qu'il évitait de répondre à sa question et ce silence vient nourrir sa méfiance à son égard. Elle ne le quitte pas des yeux alors qu'il se relève et elle répète "Comment tu as su ?". Une partie d'elle se doute de la réponse. Son cerveau, dans sa vaine quête d'explications, a élaboré une théorie, une idée qu'elle ne veut pas envisager mais qui vient heurter violemment sa conscience en même temps que la réponse de Constantine, "Je t’ai vue". Il a senti aussi, ajoute-t-il doucement comme si ce phénomène n'avait rien d'inquiétant. Elle n'arrive pas à se satisfaire de cette réponse qu'elle sait pourtant être honnête.

Elle l'a vu, elle aussi, se souvient-elle. Enfin, elle ne l'a pas vu lui directement, mais elle a vu l'endroit où il se trouvait, la pièce aux murs sombre. Elle ne l'a pas vu lui, elle a vu ce qu'il voyait. Comme si elle était dans sa tête. Elle ne comprend pas comment une telle chose peut-être possible alors qu'ils se trouvaient à plusieurs dizaines de kilomètres l'un de l'autre mais à ce stade elle est persuadée que cela ne peut être que le fait de Constantine. Peut-être une nouvelle expérience.

"Je crois que... Je crois que j'ai senti aussi. Son regard glisse du visage de Constantine jusqu'à sa main gauche alors qu'elle se rappelle très distinctement de cette violente douleur qui avait irradié dans tout son bras, alors même qu'elle se trouvait parfaitement seule à l'abris d'une ruelle sombre. Comment tu as fait ?"

Elle a besoin de réponses mais elle sait qu'il attend aussi des explications de sa part, qu'elle consent finalement à lui donner. Ils avancent à tâtons, une question après l'autre, et son instinct l'invite à la méfiance alors qu'elle cherche à se positionner par rapport à lui. Elle ne sait plus si elle doit le considérer comme son sauveur ou son ennemi. Elle sent encore sa haine et sa colère vibrer quelque part en elle mais elles sont opprimées par l'inquiétude, la curiosité, et peut-être un peu de reconnaissance. Il s'est passé quelque chose entre eux, ce soir. Quelque chose qu'elle ne comprend pas mais qu'elle ne peut pas ignorer. Elle a besoin de mettre son aversion de côté le temps d'avoir des réponses.

"Je ne porte rien en dessous..." avoue-t-elle finalement en baissant les yeux sur son costume.

La tenue ne dissimule pas grand chose de son corps mais le corset compresse sa cage thoracique et -elle le sait- ne l'aide pas à mieux respirer.


Interlude [Joséphine] Signature-Jo
Constantine Égalité
Constantine ÉgalitéDirecteur du Département des Mystères
Messages : 382
Profil Académie Waverly
Interlude [Joséphine] Icon_minitimeSam 10 Avr 2021 - 22:00
Je crois que Joséphine aussi commence à comprendre. Aucun de nous ne l’accepte encore vraiment, mais tous les deux sommes forcés de considérer comme une réalité ce qu’il vient de se passer entre nous. C’est dérangeant. Perturbant. Et terrifiant à certains endroits, mais ça a eu lieu. Et plus j’y réfléchis moins il me semble possible de broder de nouvelles théories parce que finalement, la réponse à toutes nos interrogations est très simple. Nous avons un lien. Un lien psychique puissant qui s’est très probablement établi entre nous à Skye, et qui, contrairement à ce que nous avons pensé tous les deux, ne s’est jamais rompu.

Il n’y a aucun moyen d’être ravi de cette conclusion.

Je croise son regard, qui glisse sur ma main. Comme si je portais encore la marque des coups qu’ils m’ont fait subir, je tente nerveusement de la dissimuler contre ma jambe. Évoquer l’acte ravive la douleur et je dois maîtriser un haut le cœur. Concentré sur Joséphine, j’essaie de penser le moins possible à ce qui vient de m’arriver, pour l’instant incapable d’en accuser ni le choc ni la brutalité. J’espérais qu’elle n’aurait rien vécu, que peut-être ce n’était qu’une perception à sens unique mais il n’en est manifestement rien. J’ignore ce qu’elle a pu voir d’autre. M’inquiéter des secrets du Département, je n’en n’ai pour l’instant pas l’énergie. Je me contente de lui répondre par un regard las et désolé. Évidemment je ne cherche pas la compassion, elle ne peut sans doute pas faire grand-chose de mes excuses après tout… C’est de ma faute si nous en sommes là. Mais ce n’est pas quelque chose que j’ai voulu. Et la raison pour laquelle elle a été couverte de coups puis jetée dans une ruelle, pour une fois, n’a rien n’à voir avec moi.

- Comment tu as fait ? » Demande Joséphine alors que je me rapproche de la tête de lit, la main fermement serré autours de la boîte. Son ton a changé, il n’est plus chargé de cette unique amertume haineuse qu’elle avait à Skye et lors de nos retrouvailles. Elle s’est adoucit, mais je ne sais pas si c’est dû à sa situation épuisante, ou simplement au fait que comme moi, elle hésite sur sa position.
- Je ne sais pas si tu vas me croire. » Réponds-je en me débarrassant de ma veste et en retroussant péniblement les manches de ma chemise. J’humecte mon doigt du baume que contient la boîte. « Mais je n’ai rien fais. C’est juste arrivé. Je travaillais et soudain j’ai senti. Après quoi je t’ai vu. » Un parfum tendre de jasmin et d’anis flotte près de nous. « Pour tout dire, je crois que c’est toi qui est venue me chercher, » dis-je en cherchant son regard, qui m’avertit alors que je m’approche.
- Je ne porte rien en dessous…
- Ho. » Bien entendu, je rougis, et pose l’onguent sur un tas de livres qui jouxtent la table de nuit à côté d’elle. « Heum. Je reviens. »

Je rêve d’une douche. Une douche brûlante pour apaiser mes muscles, mes os, mon esprit qui tente de revenir inlassablement à ce qui me noue les tripes d’angoisse. Dès que j’ai quitté la chambre et que je ne sens plus sur moi le regard de Joséphine, la nausée revient, virulente, et me force à faire un détour précipité par les toilettes où je vomis à nouveau de longues minutes.

Je sais que ça va cesser. Aucune des blessures qui m’ont été infligées n’ont été réparés aussitôt. Mais je ne sais pas comment le système nerveux peut réagir et comprendre une blessure répétitive aussi violente, même si elle a disparu. Pour le moment, tout mon organisme réagit au traumatisme et je fuis les flash de souvenirs qui me traversent en concentrant mon attention sur des choses triviales.

J’ai l’habitude du traumatisme.

Vomir m’a presque fait du bien. Lorsque je me redresse, je me sens capable d’aller fouiller dans une penderie où j’entasse à peu près n’importe quoi à la recherche de n’importe quels vêtements confortables pour Joséphine. Tout en préparant magiquement deux verres d’eau, dont un que je bois entre deux retournements de tiroir, je fini par mettre la main sur un vieux jogging en coton gris parfaitement triste, et un tee-shirt à l’effigie de la tour Eiffel avec marqué en gros caractère :  PrInterlude [Joséphine] 2764ud to be french, qu’Amy m’a rapporté de France en pensant sincèrement me faire un cadeau.

Je reviens au chevet de Joséphine avec les vêtements et le verre.

- Tiens… Je pense que le tee-shirt est approprié. » Je tente un vague sourire qui se dessine crisper. « Et si jamais tu as soif… Tu peux te débrouiller pour te changer… ? »

Son costume ressemble au genre de choses qu’on ferme dans le dos et dont on ne s’extirpe qu’avec difficulté.



cdd1d3c85c0300ef4f5ba7c4f45e58f3.gif
I've been throwing stones, waiting by the river, I've been on my own, praying like a sinner, and you've been gone too long, I'm waiting out the winter, I've been on my knees, praying like a sinner© by Sun, avatar by hedgekey

Spoiler:
Joséphine Walker
Joséphine WalkerProfesseur de danse
Messages : 310
Profil Académie Waverly
Interlude [Joséphine] Icon_minitimeDim 11 Avr 2021 - 10:39
Constantine affirme qu'il n'est pas responsable de ce qui s'est passé entre eux et elle hésite à le croire. Elle sait qu'elle ne peut plus lui faire confiance -qu'elle n'a jamais pu, vraiment- mais elle ne voit pas quel intérêt il aurait à lui mentir. Elle a du mal à intégrer tout ce que sa réponse implique. S'il n'a rien fait pour que ce lien s'établisse, est-ce qu'il était là depuis Skye ? Est-ce que Constantine a vu d'autres choses, dans son esprit ? Est-ce qu'il a assisté à d'autres moments de sa vie ?

Elle se sent brusquement dépossédée de sa vie privée, comme elle l'a été à Skye, et terriblement vulnérable face à ce lien contre lequel elle n'a aucune défense. Lui est l'expert, il sait de quoi il parle, il connait ces choses-là. Il a l'expérience de la légilimancie là où elle n'a jamais été qu'un simple cobaye dans ses expériences. Le rapport de force lui semble complètement déséquilibré, pourtant il affirme que c'est peut-être elle, qui est venue le chercher ce soir.

"Non, se défend-elle. Je n'ai rien fait, assure-t-elle en cherchant son regard. Je ne saurais même pas comment..."

Elle voit distinctement le visage de Constantine rougir quand elle lui avoue ne rien porter sous son costume de scène, qu'elle se refuse à enlever. Dans d'autres circonstances, elle se serait probablement moqué de cette réaction mais elle est elle-même trop gênée pour le faire. D'ordinaire plutôt à l'aise avec la nudité, elle prend conscience d'à quel point elle a envie de se protéger de lui et de son regard qui en a déjà trop vu. Il quitte momentanément la pièce et elle se retrouve seule avec ses pensées qu'elle n'arrive plus à ordonner. Les réponses aux questions qu'elle se posait n'ont fait que soulever d'autres questions et générer de plus en plus d'inquiétudes.

Incapable de penser à ce phénomène psychique qui la terrifie autant qu'il l'intrigue, elle décide de se concentrer sur son état physique. Elle n'a pas bougé depuis que Constantine l'a déposé sur le lit qu'elle devine être le sien, et tente doucement de se redresser. Chaque geste lui arrache une grimace de douleur et elle s'arrête plusieurs fois dans ses mouvements pour reprendre son souffle. Elle est incapable de s'appuyer sur son bras droit, dont l'épaule semble avoir été réduite en bouillie, et ses jambes sont marbrées de bleus. Elle porte une main à son visage, effleure sa lèvre fendue, sa paupière enflée, gratte du bout de l'ongle un peu de sang séché sur sa joue. Elle n'est pas dans sa meilleure forme, mais elle est vivante, et plus ou moins en sécurité. Elle n'arrive plus tout à fait à repousser cette vague de reconnaissance à l'égard de Constantine.

Elle est assise au bord du lit quand il revient avec un verre d'eau et une tenue qui arrache un bref sourire à Joséphine.

"Je ne te savais pas si chauvin, lance-t-elle, en français, en découvrant le T-shirt qu'il lui tend. Merci."

Le simple fait de tendre le bras pour attraper les vêtements lui arrache une grimace qu'elle tente vainement de dissimuler.

"Oui, répond-elle, beaucoup trop vite, quand il lui demande si elle est capable de se changer. Elle refuse d'envisager une autre réponse. Ça va aller."

La vérité la rattrape bien trop vite. Elle a laissé sa baguette sur sa coiffeuse dans la loge des Folies, et sa mobilité est bien trop réduite pour qu'elle puisse envisager de se changer sans utiliser la magie. Son body est fermé par des agrafes dans son dos, qui lui semblent tout simplement impossible à atteindre seule dans son état.

"En fait, est-ce que tu peux... le rattrape-t-elle alors qu'il s'apprête à quitter la pièce à nouveau. Défaire, dans le dos ?"


Interlude [Joséphine] Signature-Jo
Constantine Égalité
Constantine ÉgalitéDirecteur du Département des Mystères
Messages : 382
Profil Académie Waverly
Interlude [Joséphine] Icon_minitimeVen 16 Avr 2021 - 20:32
Tous les deux nous sommes gênés par cette trêve imprévue. Le comportement de Joséphine a changé. Elle est tendue et mal à l’aise, mais son animosité presque animale a disparue. Elle y a laissé la peur, et une douceur qui ressemble à une tâche de vin sur une nappe immaculée. Déplacée et très visible. Mais pas d’une façon agréable.

Je sais qu’en temps normal Joséphine possède un tempérament fier que j’ai beaucoup qualifié de bravache, malgré le déplaisir que je faisais à Camille en utilisant ce terme. Je l’ai rarement vu baisser les yeux et elle n’aurait jamais hésité à me flanquer un coup de pieds sous la table au cours des grandes réceptions pour me transmettre le peu d’affection qu’elle me portait. Au Folies Sorcières, lorsque je suis venue la chercher pour passer avec elle le marché qui allait la conduire à Skye, j’avais retrouvé des fragrances de cette Joséphine que j’avais quitté en même temps que j’avais quitté la France, fière et orgueilleuse, spirituelle autant que superficielle, et aussi têtue que lâche. Même vêtue seulement de crêpages de lingeries si révélatrice de ses formes dissimulées, elle n’avait pas montré cette gêne un peu prude exacerbée par sa vulnérabilité terrible.

Nous avons tous les deux conscience, étouffés par la promiscuité de cette chambre qui trahis et expose à son regard une partie de ma vie intime, d’être soudain comme deux enfants indécis sur les gestes, qui fuyons les rencontres inopinées de nos regard et s’inquiétons d’un contact ou d’une parole. Nous donnons à ces possibilité une dimension presque mystique, comme si révéler un instant nos peurs et nos incertitudes (parce que tous les deux nous avons eu mal et sommes encore terrifiés de ce que nous venons de vivres,) pouvait réactiver ce lien inexplicable dont nous parlons avec détours, sans en comprendre le sens ni la fonction.

Je sais qu’elle va me tenir responsable et me demander de faire quelque chose et je sais que je n’ai ni la force ni la disponibilité adéquate pour lui garantir que je saurais résoudre ce problème. En vérité, je n’en sais rien. Je n’ai encore aucune idée de ce dont il s’agit précisément et il nous faudra probablement tester cette connexion pour en établir les limites, avant que je puisse conclure ce que je suis capable d’en faire. Pour le moment, je rêve seulement d’un bain brûlant, et d’une potion de sommeil pour les dix prochaines heures.

Ce que je ne prendrais pas car Joséphine me rappelle au moment où je vais sortir pour lui laisser l’intimité nécessaire. Nous espérions probablement souffler tous les deux quelques minutes en nous soustrayant à la vue l’un de l’autre mais c’est peine perdue. Lentement je fais demi-tour, lentement je reviens m’assoir près d’elle, avec les gestes d’un être malade qui pour éviter d’éveiller son mal tente de faire de ses mouvements une sorte d’immobilité permanente.

Je repousse d’abord ses cheveux qui voilent le dos de son costume. Elle s’est redressée un peu, avec une façade digne mais ses pupilles ne peuvent pas cacher la douleur qu’elle ressent. Il me paraît évident que certains de ses os sont brisés, foulés ou fracturés, et son épaule peut être démise. Elle a au niveau du poignet un gonflement violacé qui s’affirme de minutes en minutes. Du doigt je cherche les agrafes. La nervosité, le choc traumatique du marteau couplés à la fatigue donnent à mes doigts plus de maladresse encore qu’au naturel. Je mets un temps infini à me débarrasser des deux premiers, pris en tenaille entre les mèches rebelles qui s’y faufilent et la certitude que nous sommes dans une situation qui ne fait pas sens. Ou peut-être que si. « Ho et puis merde… » Murmures-je finalement pour moi-même avant de me saisir de ma baguette. Je la lève pour terminer magiquement ce que j’ai commencé.

Évidemment c’est cet instant qu’elle choisit pour se retourner contre moi.

D’abord, je sens la magie crépiter entre mes doigts sans trouver le conducteur naturel que je tiens fermement pointé sur le dos de Joséphine. Je ferme brièvement les yeux, pas complétement surpris de subir un blocage magique après ce que je viens de vivre mais sans pouvoir empêcher une terreur traumatique de se couler tranquillement dans ma poitrine. Ma baguette en profite pour exprimer son caractère contradictoire. Lorsque le sortilège jaillis, ce n’est pas pour dégrafer quoi que ce soit mais littéralement faire disparaître le costume et laisser Joséphine, assise et nue sur mon lit.

Évidemment je bondis loin d'elle et me retourne en ayant à peine vue sa nuque et la cambrure de son dos. Je ferme les yeux.

- Désolé ! Désolé, désolé, je ne voulais pas faire ça. Je ne voulais vraiment pas faire ça.

Elle va penser que je l’ai fait exprès.


cdd1d3c85c0300ef4f5ba7c4f45e58f3.gif
I've been throwing stones, waiting by the river, I've been on my own, praying like a sinner, and you've been gone too long, I'm waiting out the winter, I've been on my knees, praying like a sinner© by Sun, avatar by hedgekey

Spoiler:
Joséphine Walker
Joséphine WalkerProfesseur de danse
Messages : 310
Profil Académie Waverly
Interlude [Joséphine] Icon_minitimeMar 20 Avr 2021 - 8:44
Le silence qui s'installe entre eux alors que Constantine s'assoit près d'elle sur le lit est pesant. Josephine a soudain une conscience accrue du bruit de sa propre respiration et des perturbations que provoquent le moindre de ses gestes dans leur environnement. Elle se contraint au silence et à l'immobilité. Le silence est gênant mais elle sait qu'elle ne pourrait rien dire ou faire qui ne viendrait pas nourrir davantage ce sentiment de malaise. Les mains de Constantine écartent ses cheveux de son dos et elle sent ses doigts s'affairer péniblement autours des premières attaches de son corset. Elle se concentre sur ses gestes pour empêcher son cerveau de penser à autre chose, de revivre ce qui vient de se passer et d'essayer de comprendre comment cela a pu se passer. Elle est persuadée que le moindre cheminement de pensée un peu trop aventureux pourrait de nouveau jeter un pont entre leurs deux esprits et elle n'a pas très envie de renouveler cette expérience.

Elle le sent finalement se lever alors même que son costume n'est pas à moitié défait et tourne légèrement la tête sur le côté pour le voir sortir sa baguette. Cela parait effectivement être une solution plus rapide, et plus efficace. Alors qu'elle s'attend à sentir la pression de son corset se relâcher dans son dos, c'est tout le vêtement qui disparait d'un seul coup. D'un geste réflexe, elle referme aussitôt ses deux bras sur elle pour se couvrir. Ce mouvement incontrôlé lui arrache un gémissement de douleur et lui fait monter les larmes aux yeux.

"Merde, Constantine !" jure-t-elle en français alors qu'il s'excuse et lui assure que ce n'était pas volontaire.

Etrangement, et sans savoir pourquoi, elle le croit. Elle entend à la façon dont sa voix lui parvient qu'il s'est retourné, et qu'il semble réellement pris au dépourvu par la tournure des évènements.

Elle sait qu'il y a quelque chose de presque puéril, à vouloir cacher sa nudité à tout prix. Elle s'est régulièrement produite sur scène à pleine plus vêtue, et des dizaines et dizaines d'hommes l'ont déjà vu nue, y compris Constantine lors de ses visite dans sa mémoire. Pourtant elle ne peut pas se résoudre à abandonner cette position de principe. Elle est déjà trop vulnérable pour laisser tomber ce dernier rempart qui lui semble représenter tout ce qu'il reste de sa dignité.

En se servant presque exclusivement de son bras gauche, moins douloureux et plus mobile, elle parvient à attraper le t-shirt posé sur le lit et à le passer au dessus de sa tête. Il est trop grand pour elle et suffisamment large pour qu'elle n'ait pas à trop se contorsionner pour l'enfiler. Evidement il est à l'envers mais elle ne songe même pas une seconde à rectifier cette erreur et attrape plutôt le pantalon de jogging. Elle serre les dents pour contenir les vagues de douleurs que provoquent chacun de ses gestes alors qu'elle entreprend de l'enfiler, une jambe après l'autre. Elle s'arrête plusieurs fois pour reprendre son souffle mais finit par se retrouver avec le pantalon sur les genoux. Elle pose prudemment les pieds au sol et se lève avec une lenteur infinie qui ne lui épargne pas un violent vertige, et finit de glisser le pantalon jusqu'à sa taille.

"C'est bon, annonce-t-elle finalement au dos de Constantine, de l'autre côté de le pièce. Je suis habillée."

Elle se rassoit sur le lit, un peu tremblante. L'effort a rendu son front humide de sueur et a réveillé des blessures dont elle n'avait même pas pris conscience. Son regard attrape aussitôt la main gauche de Constantine, celle qui tient sa baguette et celle qu'elle a senti être violemment blessé un peu plus tôt. Elle fait vite le rapprochement entre son sortilège raté et ce dernier évènement.

"C'est à cause de ce qu'ils t'ont fait ?" demanda-t-elle en relevant les yeux de sa main vers son visage.

Elle dit "ils" sans savoir exactement de qui elle parle, même si elle a bien évidement une idée de l'identité des personnes impliquées. Elle ne sait pas ce qu'il s'est passé exactement ni pourquoi sa main semble si parfaitement intacte de l'extérieure alors qu'il est évident qu'elle a connu un choc violent -elle se souvient trop bien de la douleur qui lui a paralysé tout le bras sans qu'elle ne comprenne d'où elle venait. Un choc si violent qu'il rend difficile de jeter un sort correctement. Joséphine commence à se dire que les sortilèges de soin ne sont peut-être pas la meilleure idée. Réparer des os et refermer des plaies sont des sortilèges plutôt élémentaires pour un bon sorcier, mais elle a soudainement un doute sur les capacités de Constantine à les maitriser.

"Evite de faire disparaitre mes os, s'il-te-plait."

Elle ne sait pas si elle plaisante -elle est trop fatiguée pour ça et le moment serait plutôt mal choisi- ou s'il s'agit d'une façon d'exprimer une inquiétude bien réelle.


Interlude [Joséphine] Signature-Jo
Constantine Égalité
Constantine ÉgalitéDirecteur du Département des Mystères
Messages : 382
Profil Académie Waverly
Interlude [Joséphine] Icon_minitimeMar 24 Aoû 2021 - 19:42
Dehors la lumière s’abaisse avec la lenteur paresseuse des beaux jours, si rares en Angleterre. Il y a un paradoxe toujours étrange à confronter le temps indifférent à nos humeurs, mais ce soir peut-être le rouge du ciel fait-il échos au sang perdus de nos corps respectifs. J’ai la main serrée contre ma poitrine, tremblante, rigide comme un bris de marbre polis ; aussi lourd, aussi inutile qu’une statue. La présence de Joséphine et ses mouvements heurtés sont la seule chaleur de la pièce, mais une chaleur déplacée. Je suis un serpent qui a laissé entrer la langueur tendre d’une souris dans son trou creusé de terre. Je m’attends à ce qu’elle se révolte mais pour une fois, mon instinctive honnêteté l’atteint. Elle ne remet pas en question mes attentions. Peut-être que notre connexion nous lit et qu’elle n’a plus besoins de preuves. Je n’aime pas cette idée. Je n’aime pas imaginer qu’elle ait plongé intimement en moi.

Comme si Camille ne lui avait pas déjà ouvert grand le passage sur les salissures de mon palais personnel.

Je me retourne lorsqu’elle m’appelle doucement pour me signifier qu’elle est présentable. J’ai encore dans l’iris la courbe évasée de ses hanches, éclair de chaire pâle surprises dans un demi-rayon de jours duveteux, constellé de bleus comme des lacs d’hémoglobine éclatés sous la peau.

- Non, réponds-je par réflexe sans même me rendre compte que je démens.

J’ai trop d’incertitudes. Cette vision, la présence de son âme peut-être si proche de la mienne et de son esprit contre le mien. J’ai peur que nous soyons deux couleuvres alanguies qui cherchions malgré nous à réchauffer le froid de nos écailles l’un contre l’autre. Cette crise de folie. Qu’elle est-elle ? Le sacrifice d’un désir de possession ? Quelles sont mes considérations pour Joséphine ?

Je n’en sais rien.

Elle existe. Elle est réelle et irréelle, comme le songe d’un souvenir douloureux qui s’exprime en flashback et disparaît pour revenir, inlassablement. Est-ce que je lui veux du bien, du mal, les deux ? Dois-je l’aimer ou la haïr ? La préserver ou la détruire ?

Elle me regarde dans les yeux, maintenant, et je me dis qu’en fait ça ne sert plus à rien de se mentir ou essayer de comprendre.

- Oui," corrige-je donc. "Pas seulement. Ça n’a aucune importance, Joséphine. Ça ne t’intéresse pas de savoir."

Ou peut-être que si ? Peut-être qu’elle a changé d’avis et que nous n’avons plus l’un pour l’autre qu’une haine profonde ? Je ne comprends pas cette espèce de proximité qui ne ressemble pas à de la complicité qui se met à exister entre nous. Pourquoi ne m’ordonne-t-elle pas de foutre le camp ? Pourquoi ne refuse-t-elle pas mes soins et mes attentions ?

Impossible de saisir la tentative dans son ton, je laisse couler, lui montre évidemment que je pose ma baguette près d’elle dans le but de ne plus m’en servir. À la place je lui indique la peau d’onguent magique qui parfume la chambre d’une forte odeur de plantes et d’anis. « Soulève ton tee-shirt. » Dis-je doucement. Elle va sûrement refuser de se laisser faire. Je connais sa fierté qui devrait lui dicter, plutôt souffrir aux endroits qu’elle ne pourra atteindre que de se laisser toucher par moi.

Elle devrait refuser.


cdd1d3c85c0300ef4f5ba7c4f45e58f3.gif
I've been throwing stones, waiting by the river, I've been on my own, praying like a sinner, and you've been gone too long, I'm waiting out the winter, I've been on my knees, praying like a sinner© by Sun, avatar by hedgekey

Spoiler:
Joséphine Walker
Joséphine WalkerProfesseur de danse
Messages : 310
Profil Académie Waverly
Interlude [Joséphine] Icon_minitimeVen 22 Sep 2023 - 9:47
Constantine évite sa question et Joséphine sent une vieille colère se réveiller en elle. Les souvenirs de Skye lui reviennent, et avec eux la désagréable sensation d’être reléguée encore une fois au statut de cobaye. Encore des secrets, encore des mensonges. Ce qui s'est passé aujourd’hui lui échappe complètement, et elle comprend que cela le dépasse peut-être lui aussi. Mais en refusant d'être honnête avec elle et de partager les quelques certitudes qu’il peut avoir, il la laisse se noyer dans un océan d'incompréhension. Il n'estime pas qu'elle ait le droit de savoir.

Si elle en avait eu la force, elle se serait levée et serait partie en claquant la porte. Mais elle sait que ses jambes ne la porteront pas très loin, et réalise qu'elle ne sait même pas dans quel coin de l'Angleterre elle se trouve. Londres, espère-t-elle. L'idée de la proximité d'autres personnes, dans des étages ou immeubles voisins, la rassure.

"Je décide si ça m'intéresse. Elle n'a pas assez d’énergie pour s’énerver vraiment, pour hausser le ton ou s'en prendre à lui, mais son regard s'est durci et sa mâchoire serrée trahit sa colère. Je veux savoir. "

Il doit penser qu'elle ne peut pas comprendre, et il a peut-être raison. Elle s'en fiche, elle tient à ce qu'il lui explique quand même. Peu importe que cela ait un lien plus ou moins direct avec l'incident qui les a réunis, elle a décidé qu'elle voulait savoir tout ce qu'il savait. Avoir les mêmes cartes que lui entre les mains.

Quand il lui demande de relever son t-shirt, elle hésite. Parfaitement consciente que sa soudaine pudeur est absurde, mais incapable de s'en défaire. Il a déterré ses secrets les mieux enfouis, violé ses pensées les plus inavouables, mais il n'a encore jamais franchi la barrière de son corps. Même lors de trois jours d'enfermement à Skye, ses doigts n'ont pas effleuré autre chose que son visage. Et elle s'accroche à ce rempart, à cette dernière barrière dressée entre eux. Cela n’a jamais été quelque chose de très important pour elle, pourtant. Elle a longtemps vendu son corps pour quelques galions, et n'attache plus rien de sacré ou d’intime au rapprochement physique. Le contact entre deux corps, cela ne signifie rien à ses yeux, pourtant cette fois-ci elle hésite à franchir ce pas, comme la jeune fille effarouchée qu'elle n'est plus. Parce que c’est le dernier morceau de carapace qu’il lui reste et que si elle l'abandonne elle se retrouvera complètement mise à nue, et sans défense. Elle sait toutefois que c'était un raisonnement idiot, et que ce dernier bouclier n'était qu'une chimère qui a volé en éclats depuis longtemps.

Constantine s'est retrouvé dans sa tête, sans y avoir été invité, alors qu'ils se tenaient à des kilomètres l'un de l'autre. Vouloir le tenir à distance après cet incident tient du ridicule.

Résignée, elle attrape le bord du t-shirt trop grand pour elle qu'elle relève avec des gestes lents en grimaçant de douleur, jusque sous sa poitrine. Le silence qui accompagne ses gestes est inconfortable et pesant, elle se sent obligée de parler pour y mettre fin. Et parce qu’elle ne sait rien et qu’on refuse de lui expliquer, elle ne peut que poser une nouvelle question, qui la tracasse depuis quelques minutes.

"Est-ce que ça va recommencer ?"

Elle ne comprend pas ce qui s'est passé, ni comment s'est arrivé, mais elle voudrait avoir la certitude que ça n'arrivera plus. Jusqu’à présent, elle pouvait se protéger de Constantine et de ses intrusions mentales en gardant ses distances. Si l’éloignement physique ne suffit plus à l’empêcher d’entrer dans son cerveau, elle redoute que le cauchemar de Skye ne se reproduise. Elle a posé sa question comme un reproche, mais son inquiétude est réelle.


Interlude [Joséphine] Signature-Jo
Constantine Égalité
Constantine ÉgalitéDirecteur du Département des Mystères
Messages : 382
Profil Académie Waverly
Interlude [Joséphine] Icon_minitimeJeu 18 Jan 2024 - 17:24
« Je décide si ça m’intéresse, » dit Joséphine. Je l’observe. Je la dévisage longuement, comme on cherche une forme dans les nuages, ou du figuratif dans une peinture abstraite. Je la dévisage, ses sourcils froncés, la ride noire qui se creuse à la commissure, pour avaler sa colère, la colère qui bouille sous son front. J’ai envie de rire, soudain. Ça me monte dans la gorge comme de l’acide ; je déglutis, je ne ris pas. Mon regard quitte son regard, et je ne réponds rien.

Sous mes doigts, je sens les muscles, sous la peau, qui se contractent. C’est un hurlement silencieux du corps qui refuse que je le touche. Là non plus, je ne dis rien, parce qu’il n’y a rien n’à dire. Elle a cédé si vite, malgré son dégoût et les barrières, malgré le dernier refuge qu’elle s’est construit, sous mes doigts, je sens la peau, sur laquelle ma peau glisse. Nos chaleurs se répondent comme si nous étions deux personnes normales performant un acte normal, comme si rien de cette situation n’était condamnable, ou grave, ou triste, ou pathétique, ou risible.

Je ne sais pas. Les mots sont coincés dans ma gorge, je leur ai construit une prison. Une petite cage bien à eux, dont les gardiens se moquent, un peu, des désirs de la pauvre Joséphine qui ne décide rien du tout. Elle ne décide pas qui bafoue ses pensées, son esprit ou son corps. Elle ne décide pas qui l’emploie ou qui la jette dans une impasse après avoir fait d’elle un éclaté de ciel arctique. Elle ne décide pas ce qu’elle peut savoir ni ce qu’on devrait lui dire.

La pâte suave au goût de sucre s’étale sur ses hématomes violacés. J’ai mal pour elle, envie de la serrer dans mes bras, ou de parler de Camille. Et puis, peut-être pour voler quelque-chose, ou obtenir une réponse, quelque-chose, elle parle. Je suis envahi d’une grande fatigue. Lentement, je la contourne, pour déposer sur le flanc exposé l’anis tendre du baume. Quand ma main retombe, je lève les yeux vers elle et je la fixe.

– Sans doute.

Voilà. Voilà ce que je sais, voilà ce qu’il faut dire. Un silence s’écrase sur nous. Ma main, fébrile, éclate de douleurs fantômes. Et comme un arc électrique dont le point culminant serait cette douleur, une certitude m’envahit soudain. Je regarde Joséphine, et je sais que je ne la reverrai plus.

À quoi bon, tout ça ?

– Je n’en sais rien, dis-je en me relevant.

Sans la regarder, je lui tends le pot, pour qu’elle finisse elle-même. Mes yeux se perdent dans le vague, loin, là-bas, j’observe onduler comme une forme claire et terriblement triste. J’ai une certitude d’absurdité. J’esquisse dans sa direction un vague geste de la main.

Je crois que Joséphine n’a rien à m’apporter, et que toute cette douleur aura été perpétrée en vain.
Contenu sponsorisé
Profil Académie Waverly
Interlude [Joséphine] Icon_minitime