Spinning over you [Archelly]

6 Juin 2011


Un rayon de soleil filtrant au travers des rideaux de la chambre venait caresser le visage encore endormi de Nelly. L’air paisible, la jeune femme était lovée dans les draps doux, le corps parfaitement détendu contre celui d’Archibald dans son dos. Lorsque la lumière fut trop forte pour ses paupières closes, la jeune femme abandonna ses rêveries et cligna des yeux. L’appartement était silencieux et seul le chant lointain des oiseaux, douce mélodie des matins d’été, lui parvenait de l’extérieur. Elle sentait le bras d’Archie autour de sa taille ainsi que son souffle lent et chaud dans sa nuque et ce constat lui tira un frisson de bien-être. Savourant l’instant, elle resta immobile quelques minutes, s’imprégnant de cette douce sensation de plénitude et de chaleur qui l’enveloppait, avant de tendre le bras jusqu’à son Pear posé sur le chevet. En déverrouillant l’appareil, elle constata que la matinée était bien entamée et songea qu’il lui faudrait bien plus de grasse matinée comme celle-ci. En bonne adolescente qui se respecte, la jeune femme consulta ses notifications et ouvrit ses messages avant de scroller son fil d’actualité Instamag où un message s’afficha. Le réseau social lui proposait de consulter le bilan d’activité de son compte du mois écoulé où elle pouvait voir combien de likes et de commentaires elle avait eu sous ses publications, combien de personnes s’étaient abonnées à son compte et au contraire combien s’en étaient désabonnées… Depuis qu’elle avait acquis une petite notoriété sur les réseaux sociaux magiques grâce à la pub que Mildred Magpie lui avait faite en parlant d’elle sur ses propres réseaux, Instamag lui avait automatiquement proposé de basculer en compte professionnel sur lequel des fonctionnalités supplémentaires étaient proposées. Au début, elle s’était un peu sentie comme Kessy Brooks à pouvoir accéder ainsi aux statistiques de son compte – bien qu’elle n’arrive pas à la cheville de l’influenceuse – mais elle avait fini par s’en lasser et s’inquiétait même un peu du fait que son compte semblait dorénavant bien plus analysé…
Cependant, ça ne l’avait pas empêchée d’apprécier son gain non négligeable d’abonnés et Nelly se prêtait au jeu de donner l’impression que sa vie était intéressante et parfaite comme semblaient le croire certaines personnes. Elle ouvrit d’ailleurs l’appareil photo en mode selfie et cadra l’objectif pour seulement faire apparaître Archibald qui dormait à poings fermés derrière son épaule dénudée où tombaient quelques mèches de cheveux. Sur ce cliché, sa vie avait l’air parfaite, elle le reconnaissait, songea-t-elle en y dessinant un cœur avant de le poster sur sa story. Niaise à souhait, mais parfaite.

La jeune femme reposa son Pear sur le meuble de chevet et quitta à regret les bras de son petit-ami pour se glisser doucement en dehors du lit. Archie soupira dans son sommeil et se retourna dans les draps, pas le moins du monde dérangé dans sa torpeur. Nelly enfila sa nuisette et sortit de la chambre sur la pointe des pieds pour passer aux toilettes et rejoindre la salle de bain où elle se coiffa rapidement. Elle gagna ensuite la cuisine ouverte sur le séjour, récupéra sa baguette posée sur le bar et en quelques sortilèges informulés elle prépara un bon petit déjeuner, à base de sucré et de salé, le tout servi sur un plateau. Le sourire aux lèvres, la préfète fit léviter sa préparation et retourna silencieusement dans la chambre où Archie n’avait toujours pas quitté les bras de Morphée. Aussi légère qu’une plume, elle se glissa à nouveau sous les draps et vint enlacer amoureusement son petit-ami, se pressant dans son dos.

« Bonjour bel endormi, souffla-t-elle dans le creux de son oreille. De quoi tu rêves ? » demanda-t-elle dans un murmure, le sourire aux lèvres.

Nelly laissa courir sa bouche sur le cou d’Archibald et y déposa quelques baisers, profitant de son odeur et de la chaleur de son corps encore endormi. Posant les yeux sur le plateau qui lévitait encore face au lit, Nelly cala sa tête dans le creux de l’épaule du jeune homme.

« Petit déj au lit, ça te tente ? » reprit-elle en levant ses yeux noisettes vers le visage de son petit ami.

L’appartement d’Archibald révélait beaucoup d’éléments sur sa personnalité pour toute personne un tant soit peu observatrice. Son sens de l’organisation, car chaque objet semblait avoir sa place – jusqu’à ses livres qui étaient triés par ordre alphabétique. Son amour pour l’art, qui se percevait dans les différentes œuvres – acquises ou données par sa famille – qui égayaient les murs de son appartement. Un clavier, accolé à son bureau, qui ne lui servait plus autant que lorsqu’il était entré en première année à l’Académie des Arts et que son tronc commun comportait une large part de musicologie. Sa baguette magique, posée sur sa table de chevet, à côté de son portefeuille en cuir, usé par le temps mais dont il refusait de se séparer pour des raisons sentimentales – Archibald était un homme plutôt attaché aux objets et promptes à les garder s’ils représentaient pour lui des souvenirs attachés à des émotions encore fortes.

Pour l’instant, Archie était profondément endormi, dans l’un de ces sommeils où rien ne pouvait le perturber. Il avait passé son bras gauche par-dessus la taille de sa petite-amie, et son visage était enfoncé dans son oreiller, à moitié dissimulé par ses couvertures. Enfermé comme il l’était dans un songe aux couleurs chaudes et agréables, Archie ne sentit pas Nelly bouger contre lui pour saisir son téléphone, ni même quitter son lit pour se lever. Une vague grimace d’incompréhension passa sur son visage – il lui semblait tout de même qu’une source de chaleur venait à manquer – mais il ne poussa pas plus loin sa réflexion et repartit dans les bras de Morphée.

Archibald avait toujours été un grand dormeur, le genre à ne pas sortir de son lit avant midi lorsqu’il en avait l’opportunité, et à sentir cruellement les effets du manque de sommeil sur son caractère. Cependant, comme son père lui avait toujours rabâché que « le monde appartenait à ceux qui se levaient tôt », Archibald s’était longtemps fait violence pour avancer son réveil, afin de bénéficier d’une matinée entièrement productive, comme celles qu’avaient l’habitude de vivre son père. Mais force était de constater que ce rythme n’était pas pour lui : Archie préférait largement dormir quelques heures de plus le matin, quitte à se coucher plus tard – son pic de productivité étant atteint aux alentours de vingt-heures.

Une présence vint cependant perturber son sommeil lourd en se glissant dans son dos. Le premier réflexe d’Archie fut de l’ignorer – car, peut-être, finirait-elle par s’en aller – mais les quelques mots qui atteignirent son oreille lui tirèrent un vague sourire, et sa main vint trouver celles de Nelly qui s’étaient posées sur son torse.

« Bonjour… » lâcha-t-il d’une voix encore étouffée par le sommeil. Il fit un effort monstre pour ouvrir les yeux mais la lumière aveuglante – ils avaient oublié de tirer les rideaux hier soir, de toute évidence – le poussa à les refermer immédiatement. Le jeune homme s’habitua doucement à la luminosité, mais resta immobile encore quelques secondes, conquis par les baisers que sa petite-amie déposait aux creux de son cou.

Il s’étira longuement, Nelly toujours dans son dos et étouffa un bâillement alors qu’elle murmurait une proposition qui acheva de le réveiller. Ses yeux s’ouvrirent – définitivement cette fois – sur le plateau qui lévitait à côté de son lit, chargé de mets en tout genre.

« Ohh mais tu es incroyable. » fit-il en se tournant pour être sur le dos, puis en se redressant sur son coude pour lui faire face. Il l’embrassa d’abord sur le front, puis sur les lèvres, et glissa une main sur sa joue. « Tu as bien dormi ? Je ne t’ai pas du tout entendu te lever. » avoua-t-il avec un demi-sourire.  

"Oui, je sais, répondit Nelly avec un sourire lorsqu'Archie la qualifia d'incroyable en avisant le plateau de petit déjeuner qu'elle avait préparé. Je l'ai fait avec amour," eut-elle le temps d'ajouter avant que son petit ami ne s'empare de ses lèvres.

Elle savoura ce contact et goûta ses lèvres chaudes et rassurantes. S'endormir et se réveiller à ses côtés semblaient être ce qu'elle avait toujours voulu et ce dont elle avait toujours eu besoin. Lorsqu'elle le voyait, elle se sentait tout de suite mieux, plus sereine, plus calme, comme si sa présence pouvait supprimer tout ce qu'il avait de moins bien dans sa vie, tout ce qui était gris et terne, ne laissant qu'une douce lumière chaude et apaisante. Il la rassurait, la rendait plus confiante, ses angoisses n'existaient plus quand il était là, il semblait avoir le don de lui ôter un poids des épaules qu'elle ne soupçonnait même pas. Avec Archie, elle se sentait différente, comme une version amélioré d'elle même.

Peut être était-ce sa douceur ou bien son aura naturelle, Nelly ne savait pas vraiment ce qui chez le jeune homme lui provoquait cet état d'esprit mais elle l'avait rapidement constaté. Et rien ne semblait être en mesure de perturber le calme intérieur qu'elle ressentait. Tout comme rien ne pouvait troubler le sommeil d'Archie qui dormait toujours sur ses deux oreilles quoi qu'il arrive.

"Très bien, souffla Nelly quand le jeune homme s'enquit de la qualité de sa nuit. Elle se lova contre son épaule, un sourire aux lèvres. Je dors toujours super bien avec toi. Bien mieux que dans mon lit à Poudlard en tout cas. Il était simple, petit, froid et surtout, elle y dormait seule. Tu ne m'entends jamais me lever, reprit elle en levant des yeux rieurs vers son visage. Espèce de grosse marmotte va ! Tu fais comment quand tu dois te lever pour aller en cours ?"

Elle le voyait bien se faire violence en programmant environ 15 réveils tous espacés de quelques minutes à peine. Chloe avait malheureusement adopté cette stratégie à l'école et dérangeait l'intégralité du dortoir presque chaque matin.

"Je ne suis pourtant pas là pour te retenir au lit, minauda la préfète en capturant brièvement les lèvres du jeune homme. Lorsqu'ils se voyaient, ils traînaient assez longtemps sous les draps car, et bien, pourquoi se forcer à les quitter s'ils n'avaient pas d'impératifs ? Bon, attaquons ce petit déjeuner, dit elle en se redressant dans le lit pour prendre sa baguette et attirer le plateau à eux. Café ou thé ? On a des œufs, du jambon, du jus d'orange, des yaourts, des pancakes et j'ai fait une salade de fruits, énuméra la jeune femme alors qu'elle arrangeait les oreillers pour s'installer confortablement aux côtés de son petit ami. De toute manière, vu l'heure, je crois qu'on peut partir sur un brunch."

Entendre Nelly évoquer Poudlard lui procurait toujours une sensation un peu curieuse qu’Archibald ne parvenait pas véritablement à identifier. Cela faisait quatre ans qu’il avait lui-même quitté le château, et ses souvenirs de cette époque commençaient doucement à s’estomper, à être remplacés par ceux, plus récents, qu’il se fabriquait à Leopoldgrad. Archie aimait sa vie telle qu’elle était aujourd’hui : ses amis rencontrés sur les bancs de l’école, les longues soirées qu’ils passaient ensemble, les grands évènements qui étaient organisés sur leur campus, les expositions auxquelles il se rendait le samedi, les vernissages le jeudi soir, les vacances prévues à la dernière minute. Il était désormais complètement installé dans cette vie d’étudiant, après quelques années passées à trouver son équilibre. Le plus difficile avait été – comme pour bien des étudiants – sa première rentrée qui ne s’était pas déroulée à Poudlard comme cela avait été le cas pendant sept ans, mais à l’Académie des Arts Magiques. Perdre ses repères de la sorte, après les avoir patiemment et durablement construit pendant sept ans autour du même lieu et des mêmes personnes, avait été pour Archie particulièrement déroutant, voire un peu douloureux. Il s’était senti perdu les premiers mois, nostalgique aussi de cette époque où tout semblait facile et évident. Puis, au fur et à mesure que les mois passaient, il s’était adapté à ce nouveau monde, pour finalement l’accepter totalement.

Désormais, Poudlard lui semblait loin. Il gardait de sa vie au château des souvenirs très forts, des personnes qui lui étaient toujours très chères, mais il était désormais très éloigné de la vie qu’il avait menée là-bas. Nelly, au contraire, était pleinement en train de la vivre, de l’expérimenter. C’était parfois dans ces moments-là qu’Archibald ressentait entre eux un certain écart d’âge qui, s’il n’était pas gênant dans leur relation quotidienne, n’en restait pas moins objectivement présent.

« Les lits à Poudlard, c’est presque un crime contre le sommeil en même temps. » approuva toutefois Archibald en s’étirant. Il avait en tout cas souvenir des matelas durs comme de la pierre et des lits froids en plein hiver. « Je mets une dizaine de réveils. » révéla-t-il alors lorsqu’elle le questionna sur la façon dont il gérait son réveil en pleine semaine. « Et ça ne suffit pas toujours. » admit-il avec un sourire contrit. « Je sais, tu détestes les gens qui font ça le matin mais, vraiment, sinon je continue de dormir jusqu’à quatorze heures sans aucun problème. »

Ce qui ne serait pas pour lui déplaire, songea-t-il fugacement, avant que Nelly ne fonde contre lui pour l’embrasser. Il accueillit son baiser avec un sourire en glissant une main dans son dos, avant de la laisser lui présenter tous les mets qu’elle avait joliment disposé sur un plateau.

« Oh, je commencerai bien par des œufs tiens. » fit-il en en se penchant en avant pour saisir une assiette et une fourchette. « Et un thé. » énonça-t-il en servant une tasse. Tu veux quoi toi ? » s’enquit-il en se retournant vers Nelly pour la questionner du regard.

Sa remarque lui fit diriger son regard vers son réveil, qui affichait en effet une heure relativement avancée de la matinée. Archie eut un sourire qui n’était absolument pas désolé, et haussa les épaules.

« En même temps, quelle idée de se réveiller plus tôt pendant les vacances. » argua Archie en plongeant sa fourchette dans ses œufs. « Tu as envie de faire quelque chose de particulier aujourd’hui ? » demanda-t-il en observant sa petite-amie, installée à côté de lui.

« Vraiment, je ne comprends pas comment tu peux t’infliger cette torture. Un réveil qui t’arrache de ton sommeil c’est déjà suffisamment violent alors une dizaine ??? Ça veut dire que tu te réveilles, que tu éteins ton réveil, que tu te rendors et que tu es à nouveau réveillé deux minutes après ? Tu sais que la torture c’est fini maintenant ? » fit remarquer Nelly avec un sourire amusé.

La jeune femme était d’avis que se lever le matin pour aller en cours était déjà assez pénible en soit pour se faire du mal en plus, alors, de son côté, elle tâchait de rendre ses réveils et ses préparatifs aussi efficaces qu’elle le pouvait pour qu’ils ne soient seulement qu’un mauvais moment à passer. Un jour, elle enseignerait sa technique de grande sage à Archie, songea-t-elle en le laissant se servir en œufs et en thé avant de se pencher pour attraper à son tour une assiette.

« Je vais commencer par un pancake avec plein de confiture, de la salade de fruit et un thé aussi, énuméra la préfète en se servant avec précaution. Désolée, j’ai utilisé presque tous tes fruits d’ailleurs, avoua-t-elle avec une petite moue. La moitié des bananes étaient en train de noircir de toute manière, il fallait bien les manger. »

Occupée à étaler de la confiture sur son pancake en souriant à la remarque d’Archie sur l’heure, Nelly s’accorda quelques secondes de réflexion avant de répondre à la question de son petit-ami.

« Hmm, je n’ai toujours pas visité le musée d’Histoire Naturelle, avança la jeune femme en reposant la confiture. Sinon, flâner avec toi n’importe où me va très bien aussi, ajouta-t-elle avec un sourire charmeur. Qu’as tu à me faire découvrir de plus dans cette grande ville ? »

Elle était sûre qu’elle était loin d’avoir tout vu et tout fait à Leopoldgrad et qu’il restait plein de jolis endroits intéressants à découvrir. Quoiqu’il en soit, elle était toujours heureuse de sortir aux côtés d’Archibald, peu importe l’endroit où ils iraient ; le jeune homme semblait connaître l’endroit comme sa poche et avait toujours des anecdotes à lui raconter.
Mais pour l’heure, ils en étaient à terminer leur petit déjeuner et ce n’est qu’une fois le plateau vide et l’estomac bien rempli que les deux amoureux très peu matinaux consentirent à quitter le confort du lit pour commencer à s’activer.

« J’ai besoin de prendre une douche, fit Nelly en posant le plateau sur le bar de la cuisine qu’elle débarrassa en quelques sortilèges. Tu m’accompagnes ? » proposa-t-elle à Archibald en s’approchant de lui pour l’enlacer, un sourire mutin sur les lèvres.

« Mais c’est parce que c’est encore plus dur de me lever que d’éteindre mon réveil toutes les cinq minutes ! » argua Archie en riant. « Ou alors c’est parce que j’ai des désirs masochistes inavoués, je ne sais pas. » plaisanta-t-il en s’étirant.

Le jeune homme se redressa pour accueillir dans son lit le plateau chargé de victuailles préparés par Nelly. Il saisit la bouilloire pour se verser un thé, et attrapa une assiette dans laquelle il fit glisser quelques œufs. Bien plus réveillé que quelques minutes auparavant, Archibald savoura sa boisson chaude qui le tira définitivement du sommeil. Il haussa les épaules aux excuses que lui fit Nelly.

« Oh, t’inquiète, tu as bien fait. J’irai en racheter plus tard. »

A vrai dire, il était plutôt heureux qu’elle se soit sentie suffisamment à l’aise pour se servir seule chez lui. Archie se fit donc un plaisir d’honorer sa salade de fruits et en versa un peu dans un bol pour la déguster. Il s’accorda une petite seconde de réflexion pour songer au planning de leur journée, avant de le proposer à Nelly :

« Eh bien on peut parfaitement aller visiter le musée d’Histoire Naturelle, en plus je crois qu’il y a une exposition en ce moment sur le génotype sorcier, c’est sûrement très intéressant. » Archibald, qui venait d’une famille entièrement moldue, avait toujours été intrigué par cette magie qui s’était manifestée en lui, alors qu’elle était absente chez ses parents ou chez ses frères et sœurs. Il savait bien que les chercheurs n’avaient pour l’instant aucune réponse à proposer à ce qui apparaissait comme un heureux hasard pour beaucoup de nés-moldus, mais il était curieux de connaître le contenu de l’exposition proposée par le musée. « Et… » Il hésita un instant. « J’ai des amis de mon école qui exposent en fin d’après-midi, dans un petit atelier. Ça te dirait d’y aller ? »

Cela faisait quelques jours qu’il y songeait, sans véritablement parvenir à se décider sur le bien-fondé de cette idée. Son histoire d’amour avec Nelly n’était pas secrète, mais elle n’avait pas été accueillie sans questionnements de la part de ses amis. Si certains se fichaient royalement de leur légère différence d’âge, d’autres n’hésitaient pas à lui faire remarquer que sa compagne était à peine majeure, et toujours pas sortie de Poudlard. Archie, de plutôt bonne composition, ne relevait pas forcément les vannes qui pouvaient se révéler être pourtant blessantes. Il tenait néanmoins à ce que sa petite-amie fasse véritablement la rencontre des personnes qui lui étaient chères en se disant que, peut-être qu’en fréquentant Nelly, ses amis se rendraient compte qu’elle n’avait rien de l’adolescente qu’on la pensait être.

Après un petit-déjeuner en règle, Archibald et Nelly se retrouvèrent dans la cuisine. Le jeune homme accueillit la proposition de sa petite-amie avec un sourire charmé et referma ses bras dans son dos pour l’embrasser.

« On ne refuse pas une telle proposition. » murmura-t-il dans son cou. « Viens. » fit-il en l’attirant à sa suite dans la salle de bain, où leurs baisers réchauffèrent tout autant leurs corps que la chaleur de l’eau.

Une serviette enroulée autour du corps, Nelly ressortit de la salle de bain le cœur léger et le sourire aux lèvres. L'eau et les tendres caresses d'Archibald sur son corps lui avaient fait le plus grand bien et cet instant d'intimité embué complétait à la perfection la matinée qu'ils passaient ensemble. La jeune femme songeait qu'il leur fallait plus de moments comme cela, plus de week end ensemble. Elle s'estimait déjà heureuse d'avoir l'opportunité de quitter Poudlard les week end pour rendre visite à son petit ami dès qu'elle le souhaitait mais, souvent, en semaine, après une longue journée de cours, elle aurait fait n'importe quoi pour pouvoir retrouver les bras du jeune homme.
Elle se consolait alors en se disant que la fin de l'année approchait à grands pas et face à ce constat Nelly était partagée entre la joie d'être enfin libérée de ses obligations d'élève - et d'avoir ainsi tout l'été pour profiter d'Archie et de ses amis - et la nostalgie déjà bien présente de devoir quitter Poudlard où elle avait passé sept ans de sa vie. Se rajoutait à cela l'angoisse qu'elle pouvait ressentir pour son avenir et son orientation post-ASPIC alors la préfète tachait de penser à l'été qui se profilait et à tout ce qu'elle aurait l'occasion de faire. Ce n'était pas le temps qui allait lui manquer pour profiter d'Archibald plus souvent et elle avait également hâte de revoir ses amis avec qui elle comptait se prélasser des après midi entières au bord de la piscine. Archie et elle n'en avaient pas encore vraiment discuté mais ils pourraient aussi se réserver quelques jours en amoureux, voire même partir quelque part en vacances ? Ce serait la première fois et, en plus, ils allaient bientôt fêter leur six mois de relation alors ce serait l'occasion de marquer le coup !

Toute à ses pensées, Nelly se sécha rapidement les cheveux avant de passer une petite robe d'été alors qu'Archibald sortait de la salle de bain à moitié habillé, les cheveux ébouriffés et le nez dans son Pear. Elle le rejoignit en quelques pas, un sourire amusé imprimé sur les lèvres. En toute objectivité, elle le trouvait à la fois très sexy et absolument adorable. Comment pouvait-il être les deux en même temps, sincèrement ? Il devait avoir une sorte de super-pouvoir. Ou il était simplement comme ça, en toutes circonstances, sans effort - c'était la seule explication qu'elle acceptait - et il était tout à elle. Nelly, possessive ? A peine. La jeune femme se hissa sur la pointe des pieds pour ordonner elle-même la tignasse encore mouillée de son petit-ami.

"Pourquoi je m'embête à faire des soins à mes cheveux alors que toi, par exemple, tu ne fais rien et ils sont parfaits ? C'est injuste, souffla-t-elle avec une petite moue. La jeune femme coiffa ses cheveux en mini frange juste pour l'embêter et eut un petit rire face au résultat. Voilà parfait, c'est tout ce qui manquait à ton charme, se moqua-t-elle avant de ramener les cheveux du jeune homme dans une coiffure plus naturelle. Allez, tu traînes, va finir de t'habiller !" le pressa-t-elle ensuite avec une petite tape sur l'épaule.

La préfète se retrouva seule un moment et en profita pour rassembler ses affaires dans son sac à main : une gourde d'eau pour la journée, ses lunettes de soleil, sa baguette magique, son porte-feuille... Où diable était donc son Pear ? Elle retourna dans la chambre là où elle l'avait laissé et en passant près du bar de la cuisine son attention fut détournée par le Pear d'Archie qu'il venait de poser là. Le jeune homme ne l'avait pas verrouillé et venait de recevoir un nouveau message. Plus poussée par sa curiosité que par une réelle méfiance, Nelly vérifia qu'il était toujours dans une autre pièce et s'approcha du Pear. Il ne lui fallut que quelques secondes pour lire les messages qui étaient affichés et comprendre qu'ils parlaient d'elle. Sa gorge se serra et elle dut lutter pour ne pas s'emparer du Pear et répondre aux amis d'Archibald - ou les insulter. A la place, elle se composa une expression parfaitement neutre et s'éloigna pour aller récupérer son propre Pear dans la chambre.

Sa différence d'âge avec Archie était bien réelle et elle éveillait parfois des interrogations de la part de ses amis. Tous se demandaient où ils s'étaient rencontrés et comment ils en étaient arrivés à sortir ensemble alors que presque tout les séparait. A Poudlard, leur couple était à la fois fantasmé - qui était ce mystérieux Archibald ? - et moqué. Les railleries restaient rares et pas bien méchantes. De toute manière, Nelly se fichait royalement de l'avis de ses camarades qui étaient, pour certains, puériles et probablement jaloux. Cependant, découvrir que l'histoire semblait se reproduire du côté des amis d'Archibald lui laissait un goût amer qui avait du mal à passer. Ils étaient plus âgés et donc censés être un peu plus matures et accepter leur relation sans se soucier et se moquer de leur écart d'âge mais visiblement, ce n'était pas le cas. La proposition de son petit-ami à se rendre à l'exposition de ses camarades de l'Académie lui semblait soudainement beaucoup moins intéressante. Elle n'avait pas vraiment envie de se retrouver confronter à leurs jugements ou à leur hypocrisie ; bien que cela puisse être l'occasion de leur montrer qu'elle n'était pas la petite adolescente qui avait besoin d'une baby-sitter, au contraire.

Lorsqu'Archie la rejoignit finalement, elle se composa un visage enjoué et masqua son amertume derrière le sourire qu'elle lui adressa.

"Prêt ? On y va ?" fit-elle en mettant ses chaussures avant de passer la bandoulière de son sac sur son épaule.

La rue était baignée d'une belle lumière d'été et des badauds profitaient de la météo clémente. Archibald et Nelly prirent la direction d'une rue plus passante qui les mènerait au musée d'Histoire Naturelle Sorcière. La préfète avait mis ses lunettes de soleil et laissait courir son regard autour d'elle, plongée dans le silence, soucieuse. Elle ne savait pas si elle devait dire à Archie qu'elle avait vu sa conversation avec ses amis. Comment réagirait-il ? Il partageait très certainement son avis sur ce genre de moqueries mais peut-être serait-il vexé qu'elle ait lu les messages. Elle n'avait pas non plus volontairement fouillé - son Pear n'était pas verrouillé - mais il y verrait peut-être un manque de confiance de sa part. Ce qui n'était pas le cas ! Elle lui faisait entièrement confiance et n'avait jamais songé un seul instant à surveiller ses messages. Et puis quoi encore ? Elle n'était pas une psychopathe. Elle était peut-être un peu possessive mais pas à ce point ; elle l'aimait et était fière de pouvoir dire qu'il était son petit-ami, voilà tout. Mais était-ce réciproque ? Bien plus que de la vexer, ces messages réveillaient en elle une angoisse héritée de sa relation avec Virgil. De son côté, elle assumait entièrement son couple avec Archie, malgré leur légère différence d'âge et leurs occupations différentes. Elle n'avait aucun problème à en parler. Mais qu'en était-il pour Archie ? Assumait-il pleinement sa relation avec elle ? En tirait-il ne serait-ce qu'une once de fierté ou au contraire était-il gêné dès qu'il devait la mentionner ? La jeune femme était ressortie contrariée et blessée de son histoire avec Virgil qui n'avait jamais voulu assumer leur rapprochement, et elle ne voulait pas reproduire le même schéma avec Archie. Aussi finit-elle par rompre le silence qui s'était installé en se rapprochant de son petit-ami pour entrelacer ses doigts aux siens.

"Je me demandais... Ca ne pose pas de problèmes à tes amis si je viens voir leur exposition ? Ils ne me connaissent pas et veulent peut-être faire ça entre vous... Elle fit une pause pour poser les yeux sur le jeune homme et, serrant un peu plus sa main dans la sienne, reprit : Tu leur parles de moi un peu ?"

Archibald sortit de la douche les cheveux encore humides, une serviette posée sur les épaules. Il n’avait revêtu que son pantalon, et s’était arrêté en plein milieu de son salon pour saisir son téléphone, qu’il avait laissé sur le comptoir de la cuisine. Après une brève hésitation, il le déverrouilla et afficha les cinquante-trois notifications du groupe qu’il partageait avec ses amis des Arts Magiques. Avec le vernissage qui approchait à grand pas, la plupart concernait des détails purement techniques : est-ce que l’installation était finalisée ? A quelle heure se retrouvaient-ils pour terminer les derniers préparatifs ? Archibald consulta les différents messages sans y répondre, avant de rédiger, à son tour, une requête qu’il effaça une première fois, indécis.

Quelques remarques moqueuses sur son couple avec Nelly lui revenaient en mémoire, et le rendaient hésitant quant à sa façon de se comporter avec ses amis. Archibald n’était pas embarrassé par l’âge de Nelly – même si l’écart entre leurs quotidiens se ressentaient, parfois – mais il sentait que cela questionnait ses amis, qui ne se privaient pas pour lui faire remarquer plus ou moins délicatement. Pour cette raison, Archibald devait bien avouer qu’il n’était pas entièrement serein à l’idée de se rendre à cette exposition avec sa petite-amie, quand bien même la proposition lui était venue spontanément. Ce n’était pas qu’il avait honte, c’était seulement… Qu’il préférait ne pas exposer Nelly à des attitudes pas foncièrement bienveillantes de la part de son entourage. Le pouce suspendu au-dessus de son Pear, Archie finit par décider que son hésitation était stupide, et qu’il anticipait beaucoup trop une situation qui n’avait encore jamais eu lieu. Avec un soupir, il envoya une demande claire à ses amis, et reposa son téléphone sur le comptoir de la cuisine, au moment où Nelly – ravissante dans sa robe – se dirigeait vers lui avec une remarque qui lui tira un sourire.

« Tu n’en sais rien, peut-être que j’ai piqué ton masque pour les cheveux dans la douche ? » argua-t-il en passant un bras autour de sa taille. « Pour adoucir et illuminer la chevelure… » récita-t-il avec un sourire légèrement moqueur car, vraiment, Nelly investissait sa salle de bain de produits divers et variés dont il étudiait parfois les descriptions sous la douche. Pour la science. « Nelly, tu décoiffes mes cheveux doux et illuminés, t’abuses. » râla-t-il en levant des yeux rieurs au ciel.

Après un dernier baiser qu’il posa sur son front, Archibald s’éloigna pour rejoindre sa chambre, où il termina de se sécher et de se vêtir. Il passa une chemise légère, récupéra son portefeuille et sa baguette magique qu’il glissa dans les poches de son pantalon, et vérifia autour de lui qu’il n’avait rien oublié. Lorsqu’il revint vers Nelly, quelques minutes plus tard, il ne remarqua rien du trouble qui l’agitait. Il récupéra son téléphone, consulta ses notifications en fronçant les sourcils, mais se garda d’y répondre pour le moment.

« Oui, c’est bon ! » répondit-il d’un ton faussement enjoué, préoccupé par ce qu’il venait de lire.

Ce furent d’ailleurs les messages qu’ils avaient reçu qui occupèrent ses pensées pendant les premières minutes – silencieuses – de la marche qui les conduisait vers le centre de Leopoldgrad. Oliver et Enola n’avaient même pas cherché à mettre déguiser un peu leurs réticences et ce rejet mettait Archibald profondément mal à l’aise. Pour Nelly, évidemment et, un peu égoïstement, pour lui aussi. Il aurait préféré que son couple avec Nelly soit accepté sans être remis en question, sans devoir le justifier d’une quelconque manière, et sans se sentir jugé pour ça. Archibald avait toujours eu – et probablement était-ce l’héritage de ce gêne sorcier parmi sa famille moldue – beaucoup de mal à sortir de ce que les autres considéraient comme la norme. Il y avait été obligé, auprès des siens, quand ses pouvoirs s’étaient manifestés. Il était devenu « hors-norme » et s’était aperçu qu’il détestait ça.

Le geste de Nelly vers lui le tira de ses pensées. Il posa sur elle un regard songeur, ne sachant que répondre à cette question. Il n’avait pas envie de lui mentir mais, en même temps, il n’était pas persuadé que l’honnêteté soit la meilleure des solutions. Il trancha pour une réponse neutre :

« Oui, je leur parle de toi, évidemment. » Et c’était vrai. « C’est vrai qu’ils ne te connaissent pas mais en même temps, il faut bien qu’ils te rencontrent, pour ça… » fit remarquer Archie en pressant ses doigts entre les siens. « Et puis ils sont curieux, un peu, aussi. » C’était du moins son espoir. « Pourquoi tu me demandes ça ? Tu appréhendes de les rencontrer ? »