Empire State of Mind [Sasha & Casey]

13 aout 2010


_ Avec Teddy on a dit qu’on allait passer les essais. J’aimerai bien être Poursuiveur. Ou Gardien. En fait n’importe quel poste m’irait  pourvu que je fasse partie de l’équipe ! s’enthousiasma Gabriel. Il fourra une cuillère de cornflakes dans son gosier au moment où Virgil répondait :
_ Je crois que les Serpentard ont besoin d’un porte bidon. Ce poste est fait pour toi. Souffla ce dernier sans quitter des yeux les hologrammes de son Pear posé sur la table du petit déjeuner.

Les Forbes avaient élu domicile  dans un joli loft industriel du quartier magique de New York. Un ami de Jonah avait échangé son appartement à deux pas de l’OA contre la petite maison familiale d’Appleby en Angleterre, si bien que la famille était en mesure de découvrir la Grosse Pomme à moindre coût. Gabriel, Casey et Virgil avaient rejoint leur père début août, juste après le départ de Thelma, et Dean était sensé les retrouver dans deux jours.

Toutefois, avant d’être rejoint par le quatrième membres de la fratrie, les Forbes avaient une jeune invitée à accueillir aujourd’hui même. Si l’information semblait avoir échappée à Gaby et Virgil, il y en avait un qui savait exactement combien de minutes il lui restait à patienter avant de retrouver Sasha Benson : Trente deux, pour être exact.

Casey referma le clapet de son Pear et reporta son attention sur ses deux frères occupés à déjeuner. Ils étaient loin d’être prêts, contrairement à lui qui était déjà douché, coiffé, parfumé et habillé avec soin depuis plusieurs heures. En effet, le Poufsouffle comptait les jours que le séparait de ce moment depuis le début des vacances d’été. Ce 13 août était marqué d’une pierre blanche : Sasha Benson venait passer toute une journée avec lui… Et ses frères. Et son père. Ok, mais quand même.
Casey gardait en mémoire le moment qu’il avait partagé avec la Serpentard  lors du bièraubeurre quizz et il espérait pouvoir retrouver cette complicité même si la perspective d’avoir ses frères sur son dos toute la journée ne le réjouissait guère…
Pour être tout à fait honnête, cela le stressait même carrément. Il détailla quelques instants Gaby, vêtu de la tête au pied de sa toute nouvelle tenue des « Quidditch Yankees de New York » et Virgil simplement habillé de son caleçon, les cheveux emmêlés et les plis de son oreiller encore imprimés sur sa joue.
A cet instant Jonah pénétra dans la pièce à vivre, les bras chargés de linge à étendre et son Pear Two virevoltant autour de lui tel un vif d’or.



« Bien sûr. Je comprends. J’aurais aimé le rencontrer mi-juillet comme c’était prévu initialement, dit il à l’attention de l’hologramme du Pear. D’un coup de baguette, il fit léviter le linge jusqu’à l’étendage sur le balcon avant de reprendre, Je projette de rédiger un chapitre entier sur les exosquelettes magiques dans mon prochain livre et je sais qu’il est le plus grand spécialiste en la matière, Jonah ordonna rapidement le plan de travail et aligna les paires de chaussures dans l’entrée d’un sortilège sans quitter des yeux son écran, mais malheureusement le Professeur DiLioffo a eu un empêchement le jour où nous avions prévu de nous voir et aujourd’hui ce n’est vraiment pas possible pour moi : J’ai mes enfants et une amie à eux qui passe la journée avec nous… » expliqua-t-il à la secrétaire matérialisée dans son Pear Two.

Virgil releva le nez de son propre écran pour croiser le regard de Gabriel :

-Une amie ? articula-t-il silencieusement pour ne pas déranger la conversation de son père. Il fronça les sourcils d’un air dubitatif.
Gaby réfléchit quelques instants et son visage s’illumina subitement. Il désigna Casey de son pouce et articula en silence le nom de Sasha Benson avant de tourner un regard coquin en direction de Casey, rapidement imité par Virgil.

Le Poufsouffle sentit immédiatement  ses joues s’empourprer sous le regard de ses frères. Il lutta pour ne pas s’affaisser sur son siège et se soustraire ainsi aux œillades moqueuses de ses frangins.

« Cela aurait été avec plaisir mais j’ai déjà réservé mes entrées au Musée de l’Histoire de la Magie Américaine pour cet après-midi, je ne peux vraiment pas annuler…Ce matin ? C‘est compliqué également, je dois récupérer l’amie de mon fils à Salem voyez vous, j’aurai peut-être un petit créneau entre 11h et 12h… »

Indifférents à la conversation de leur père, Gabriel, la bouche en cœur,  mimait un baiser entre ses deux index sans quitter des yeux Casey, quand à Virgil, il passait langoureusement sa langue sur sa lèvre supérieure en haussant les sourcils de manière suggestive.

Casey avait pudiquement baissé les yeux sur la table. Non il n’était pas en couple avec Sasha Benson ! Ils étaient juste amis ! A en juger par leurs taquineries balourdes, ses frères étaient bien incapables de comprendre ce concept.

« Virgil… Virgil ? …Virgil ! »

Le Gryffondor fut contraint d’interrompre ces mimiques d’une grande subtilité et reporta son attention sur son père qui avait visiblement mit sa conversation en attente.

« Peux tu garder les garçons et Sasha en fin de matinée ?
-Moi ? s’étrangla Virgil, y a pas moyen j’avais prévu de faire autre chose…
- J’en aurais pas pour très longtemps. C’est vraiment un rendez-vous important.
-Non, je veux pas me coltiner Gab, Casey et sa copine, y a pas écrit Mary Poppins ici, dit-il en traçant une ligne invisible sur son front
-Tu peux bien me rendre un service une fois de temps en temps, insista Jonah visiblement agacé par les simagrées de son fils.

Même si la plupart du temps Casey tenait avec son père, il devait avouer qu’il n’avait pas du tout envie de se retrouver sous la responsabilité de son ainé durant une heure.

-C’est pas un service que tu me demandes c’est un ordre que tu me donnes, reprit Virgil en rivant ses yeux cernés sur son père, Nuance. Qu’est-ce que tu veux que je réponde à part « Oui Papa. Bien sûr Papa. Avec plaisir Papa. »

Casey et Gaby échangèrent un regard –l’atmosphère était toujours aussi pesante entre Virgil et Jonah, et ce, malgré les vacances. L’air pouvait se charger en électricité en quelques secondes à peine et Casey redoutait plus que tout ces moments de conflits latents. Il retint sa respiration tandis que son frère et son père se toisaient l’un l’autre avant que Jonah ne se compose  un visage avenant pour reprendre son appel.

« C’est bon. Je me suis arrangé avec mes fils. Mon ainé gardera les autres, dit-il, son regard braqué sur Virgil. Je peux vous retrouver dans vos locaux à 11h. »  Après quelques formules de politesse Jonah raccrocha et ajouta à l’attention de Virgil : Dépêche toi de te préparer. On transplane dans dix minutes. »



Quinze minutes plus tard, ils étaient tous les quatre sur la pelouse du campus de Salem baignée d’une lumière estivale. Jonah, en bermuda et polo, patientait à l’ombre d’un arbre centenaire flanqué de Casey et Gabriel. Virgil s’était éloigné, surement pour fumer en paix une cigarette lorsque la doyenne apparut accompagnée de Sasha à l’autre bout de l’étendue herbeuse. Le père de famille et ses deux fils marchèrent à leur rencontre et Jonah  salua les deux femmes d’une poignée de main chaleureuse.

« Bonjour Madame la doyenne, bonjour Sasha. » lança-t-il d’un air avenant, Alors, comment se déroule le programme ? » demanda-t-il autant à l’une qu’à l’autre.

Casey était resté en retrait, ne sachant pas vraiment comment procéder. Même s’il n’avait plus Virgil sur le dos, il voyait bien que Gaby ne perdait pas une miette de ses faits et gestes et qu’il attendait de voir comment les deux adolescents allaient se saluer. Pour le coup, Casey était bien incapable de prendre les devants et il décida d’attendre que Sasha fasse le premier pas pour venir leur dire bonjour…

Casey enviait l’aisance de Sasha. La facilité avec laquelle elle interagissait avec les autres, surtout avec les adultes qui avaient légèrement tendance à le terroriser, lui. Elle semblait à l’aise en toutes circonstances : Qu’elle se promène avec la doyenne de l’université de Salem, qu’elle converse avec son père avec enthousiasme ou qu’elle décide de l’embrasser, sur la joue, devant Gabriel, elle assumait chacun de ses faits et gestes, sans se soucier du jugement des autres.  

D’ailleurs ce baiser ne manqua pas de faire réagir Gaby qui retint difficilement un gloussement –mi moqueur mi gêné- devant cette scène. Il faisait le malin tout à l’heure mais bizarrement il était nettement moins prompt à mimer  un baiser entre ses doigts maintenant que Sasha était là. Casey surpris même le regard de son frère remontant des jambes dénudées de la jeune femme à ses pommettes rosées tout  en passant par  son harmonieuse silhouette mise en valeur  par son élégante robe blanche. Il était clair que Gaby n’avait plus envie de se moquer.

Plus du tout .

Quant en Casey, difficile de savoir ce qu’il ressentait à cet instant tant il éprouvait des émotions contradictoires. Son cœur battait à mille à l’heure, au moins, et il se sentait aussi heureux que fébrile. Aussi gêné qu’impatient. A la fois mal à l’aise de vivre ces retrouvailles en présence de quasiment toute sa famille mais en même temps tellement chanceux de pouvoir passer, ne serait-ce qu’une journée, avec Sasha sans les autres élèves de leur année.

« Moi aussi je suis content de te voir. » articula-t-il en s’efforçant de soutenir le regard de la jeune fille. Merlin que c’était difficile ! Il n’arriva pas à le faire plus de quelques secondes d’ailleurs et s’empressa de se perdre dans la contemplation de l’Université qui offrait une diversion parfaite aux magnifiques yeux bleus de Sasha :

« Ces bâtiments sont vraiment jolis. » commenta-t-il en observant la bibliothèque.

Vraiment jolis ? Par Helga. Ne pouvait-il pas trouver mieux ? Casey avait du vocabulaire quand il s’agissait  d’écrire des histoires médiévales ou des nouvelles fantastiques  mais la transposition orale restait très compliquée pour lui…ce qui n’était pas le cas de Gaby.

« T’as vu des matchs de Wizz-Balls ? s’enquit le benjamin des Forbes en faisant un pas vers Sasha, A s’qu’on dit Salem a la meilleure équipe Universitaire. J’ai lu qu’il ont été dix fois champions de le Ligue. C’est pour ça qu’ils ont une baguette brodée sur leur maillot. J’aimerai bien essayer. T’y as déjà joué toi ? Vous avez des cours de Wizz-Balls dans ton programme ? Parce que si vous… »

« Et donc voici mes trois fils, interrompit Jonah en s’immisçant dans la conversation des enfants. Il se tourna légèrement vers  Mrs . Taylor et entama les présentations,  Casey,  qui est dans la promotion de Sasha mais dans une autre maison  –Bonjour Madame- Gabriel, qui vient de fêter ces douze ans- Bonjour M’dame ! – et… Virgil."Le Gryffondor qui patientait dans le dos de Sasha depuis plusieurs minutes gratifia la doyenne d’un vague signe de tête avant de baisser les yeux sur l’amie de son frère. Il l’observa d’un regard éteint durant quelques secondes et reporta lentement son attention sur son père d’un air blasé,  Si cela vous convient je raccompagnerai Sasha pour 22h- 22h30 environ. Nous mangeons au restaurant ce soir mais j’ai réservé durant le premier service afin qu’elle ne rentre pas trop tard, Jonah se tourna vers son élève pour lui décrocher un sourire, c’est que tu as cours demain ! »


Les Forbes s’apprêtaient donc à partir lorsque deux jeunes étudiantes, vêtues aux couleurs de Salem traversèrent la pelouse pour venir à leur rencontre.

-Bonjour Mrs Taylor ! s’exclamèrent-elles à l’unisson.
- On voulait juste souhaiter une bonne journée à Sasha ! enchaina la brune en reportant son attention sur  la Serpentard. Amuses-toi bien à New York avec Casey… » souffla-t-elle en lui pressant doucement l’avant bras.
Elle gratifia Sasha d’une œillade complice et observa tour à tour les fils Forbes comme pour tacher de deviner lequel d’entre eux faisait battre le cœur de sa  nouvelle copine anglaise…

Casey était impressionné. Non pas par les nombreux bâtiments qui permettaient de retracer à eux seuls l’histoire de l’architecture mais par les connaissances de Sasha. Il se demandait si elle pouvait citer le style des immeubles situées aux abords de cette pelouse et se promit de se renseigner sur l’architecture en général avant la rentrée prochaine. Il était déjà féru de constructions médiévales –Les châteaux forts et les villages fortifiés n’avaient pas de secret pour lui- alors cela ne le gênait pas d’accroitre ses connaissances en matière d’architecture, surtout si cela lui faisait un point commun avec sa camarade de classe.

Pour le moment, il ne se sentait pas vraiment prompt à dater les oriels de l’immeuble situé en face d’eux aussi préféra-t-il rester silencieux. Non seulement il craignait de passer pour un imbécile mais en plus Sasha venait de se lancer dans une conversation avec Gabriel à propos du Wizz-Ball. L’adolescent écouta sans mot dire, et avec un intérêt non-feint, les explications de son petit frère ainsi que les commentaires de Sasha. Il esquissa même un timide sourire devant l’exclamation de Gaby, visiblement enthousiaste à l’idée d’expliquer les règles de ce sport à la si cultivée Sasha Benson.

« Oh ouai ! Carrément ! Y a pas de souci, Je peux t’apprendre! Et si tu veux, j’ai même téléchargé une appli sur Pear pour regarder les matchs et connaitre tous les résultats des championnats universitaire et professionnel, commenta Gabriel en sortant son Pear One de la poche de son bermuda tandis que Jonah réglait les derniers détails avec Mme Taylor. Le benjamin de la fratrie alla se positionner entre Casey et Sasha  pour montrer  à la jeune fille une icône holographique semblant tourner frénétiquement sur elle-même, ça s’appelle Wizz-Score ! »
« Gab, elle s’en fout. » intervint Virgil d’un air morne, le dos toujours appuyé sur son arbre.
Gabriel fronça les sourcils sans quitter des yeux son écran. « Non elle s’en fout pas. » grommela-t-il en ouvrant l’application. Tu vois, là t’as les différents championnats et… »
« Si, elle s’en fout. »

Comme à chaque fois que Virgil était en présence de ses rares amis, Casey avait littéralement des sueurs froides. Sur le fond, son ainé avait peut-être raison –rien ne laissait penser que Sasha puisse être une passionnée de Wizz-ball- mais sur la forme…
Le Poufsouffle releva les yeux en direction de son père, priant pour qu’un regard désapprobateur de ce dernier fasse taire ses deux frères mais Jonah était tellement occupé à parler avec emphase du programme d’été de Salem qu’il ne se rendit même pas compte de ce qui se jouait sous ses yeux.

« Elle m’a dit qu’elle voulait que je lui explique les règles ! » insista Gabriel d’un air contrarié.
« Elle a dit ça parce qu’elle est polie. C’est tout. » rétorqua Virgil les mains au fond de ses poches. Il interrogea Sasha du regard comme pour la prendre à témoin et Gaby l’imita, les yeux brillants d’espérance.

« Ne te sens pas obligé de rép… » commença Casey afin de voler au secours de sa camarade. Il n’avait aucune envie qu’elle se mette à dos l’un ou l’autre de ces frères. Casey avait toujours fonctionné comme cela : Il ménageait tout le monde, ne prenait pas partie, arrondissait les angles. Il restait l’éternel facilitateur de la famille : L’huile dans les rouages.

Discret mais plus que jamais nécessaire.

Il n’eut toutefois pas l’occasion de terminer sa phrase puisque deux jeunes femmes légèrement plus âgées que lui le firent taire. Elles irradiaient d’assurance l’une et l’autre –comme Sasha-  et tous les regards se tournèrent vers elles lorsque la Serpentard fit les présentations officielles : Jonah, Virgil, Gaby… Casey allait les gratifier d’un léger sourire à l’entente de son prénom – en s’efforçant de ne pas avoir le regard fuyant, bien sûr- mais le jeune garçon se figea complètement en sentant la main de Sasha se refermer sur  son biceps.

Le sien. Pas celui de quelqu’un d’autre.
Oh Merlin, pensa-t-il en sentant immédiatement les battements de son cœur s’emballer.

Comment devait-il réagir à cette proximité soudaine et surtout, que sous-entendait-elle ?  Il avait peur de deviner et cette conclusion l’exaltait autant qu’elle le terrorisait. Ce genre de chose n’arrivait pas. Du moins, pas à lui. Depuis quand la fille la plus intelligente, la plus brillante de l’école l’avait-elle remarqué ? Avait-elle attendu ce 13 août aussi impatiemment que lui ? Tout portait à croire que oui. L’adolescent chercha brièvement le regard de Sasha, comme pour y lire une sorte de confirmation, mais elle était trop occupée à sourire à ses deux nouvelles amies américaines pour qu’elle remarque le trouble dans lequel elle l’avait propulsé avec ce simple geste anodin.


Casey surprit toutefois  le regard étonné de son père – Jonah dut d’ailleurs s’y reprendre à deux fois, pensant avoir halluciné – Ses  yeux bleus passèrent de la main de Sasha au visage de son fils, plongeant ce dernier dans un profond embarras.

Voilà, voilà.

Casey avait juste envie de se terrer sous la pelouse de Salem maintenant. L’adolescent se racla la gorge et reporta son attention sur ses chaussures. Tant pis pour ses bonnes résolutions de regard franc et assuré, il avait encore tout le reste de la journée pour s’entrainer.


« Et bien…Ma foi. Enchanté mesdemoiselles. Ravi de vous avoir rencontrer…» répondit Jonah après un bref instant «  …mais nous allons devoir vous abandonner.  Il est temps pour nous d’y aller. »

Leane et Maureen  saluèrent chaleureusement Sasha et s’éclipsèrent en compagnie Mrs. Taylor laissant la famille Forbes sur la pelouse.

« Bien… » souffla Jonah, visiblement un peu décontenancé par la tournure des événements, Je fais transplaner Casey et Sasha et tu t’occupes de Gabriel ? » reprit-il en interrogeant Virgil du regard. Le Gryffondor haussa les épaules avec indifférence.
« Je veux pas transplaner avec Virgil. »
« Et pourquoi ça ? s’enquit Jonah en posant ses deux mains sur les épaules des deux adolescents dont il avait la charge.
« Il va faire exprès de me désartibuler ! »
« J’ai que ça à faire. »
« Après je serai défiguré par sa faute » grommela Gaby.
« Regarde toi dans un miroir : t’es déjà défiguré. »
« Toujours moins que toi ! »
« Bon. Vous arrêtez tous les deux ? Virgil occupes toi de ton frère, et toi- Jonah fronça les sourcils pour observer Gabriel qui gesticulait en tout sens pour échapper à la poigne de son ainé, Arrête de gigoter. Virgil n’a pas son permis depuis longtemps alors il faut que tu sois sage durant le transplanage. »


Ils apparurent moins de cinq minutes plus tard  à l’angle de l’OA et de Broom Avenue, au cœur même du quartier touristique du New York City Magique. Ils libérèrent rapidement l’aire de transplanage et se mêlèrent à la foule bigarrée.  Tout autour d’eux, des hauts gratte-ciels mouvants filaient droit vers le ciel en tourbillonnant sur eux mêmes. Au pied de ces géants de verre et d’acier, les échoppes et des magasins de souvenirs étaient remplis de  sorciers et sorcières du monde entier. Plusieurs spectacles de rues animaient l’Avenue : Des vélanes dansant sur les pavés, des gobelins magiciens, et même un dresseur de dragons nains ! Un peu plus loin à l’Est on pouvait deviner les lumières chatoyantes du Light-District inondant la foule de badauds. A l’Ouest, les arbres millénaires du Centaure Park.

« Bienvenue à New-York. » souffla Casey en slalomant entre les sorciers pour se rapprocher de Sasha. Il espérait qu’elle était aussi conquise et impressionnée que lui par les proportions hallucinantes d’une telle cité, c’est fou, non ? » poursuivit-il tandis qu’un couple de sorciers asiatiques échangeaient un baiser fougueux juste devant eux. Ici, tout devenait envisageable. Les rêves les plus fous prenaient vie et devenaient réalité. Le champs des possibles s’élargissait. Dans cette ville, chacun avait le pouvoir de devenir celui qu’il voulait être. Et ce que Casey souhaitait plus que tout, c’était d’être le petit-ami de Sasha Benson.



Qui l’aurait cru ? Le premier de ses fils à ramener un fille dans la famille était…Casey. Jonah avait toujours cru que Dean serait le premier : Non seulement il était l’ainé mais sa personnalité sociable, son contact facile et son humeur toujours égale faisait de lui le candidat idéal  pour  une idylle sérieuse. Il devait l’avouer, Jonah avait imaginé à plusieurs reprises sa future belle-fille –Une musicienne, comme Dean, cultivée et drôle- ou alors une fille sérieuse et réfléchie dans le genre de Claire Kane. Les années passant, Jonah s’était persuadé que Dean attendait « la bonne » et qu’il ne souhaitait pas lui présenter ses conquêtes dont il savait qu’il ne construirait pas sa vie avec.

L’éventuelle petite-amie de Virgil lui causait davantage d’inquiétude. Jonah connaissait trop bien l’esprit de contradiction de son cadet et il imaginait non sans mal la sorcière junkie, vulgaire, fille-mère -et qui sait peut-être même, repris de justice- qui pourrait faire craquer son second fils.

Enfin,  pour être tout à fait honnête, il n’avait jamais imaginé Casey en couple. Même l’éventualité que Gaby ait une petite chérie lui semblait plus probable. Bien qu’il soit un adorable garçon, Casey manquait cruellement d’assurance et de confiance en lui et il était  bien trop timide pour séduire qui que ce soit, non ? Force était d’admettre qu’il s’était trompé, surtout depuis qu’il avait vu la main de Sasha Benson posée sur le bras de son fils, qui, à bien y regarder, n’était plus vraiment un enfant maintenant.
Il n’était plus si petit, ni si innocent, constata Jonah en l’observant depuis l’autre côté du trottoir avec une pointe de nostalgie. Il faudrait sans doute qu’ils aient une conversation d’homme à homme d’ici peu pourtant le père de famille n’était pas pressé de voir son troisième fils entrer dans l’âge des premiers amours.   Même s’il  appréciait réellement Sasha Benson –il l’avait nommé préfète après tout-  Jonah n’aspirait pas à devenir grand père trop rapidement…

L’enseignant traversa toutefois le large trottoir  pour rejoindre les deux apprentis tourtereaux devant lesquels il se posta. Il se tourna légèrement vers son invitée du jour et expliqua alors :

« J’ai un entretien professionnel ce matin pour une heure, tout au plus. Après je serai toute la journée avec vous mais en attendant Virgil va vous garder pendant que je m’absente. Jonah leva la tête pour faire signe à Virgil et Gaby d’approcher,  S’il y a le moindre soucis, vous n’hésitez pas, vous m’appeler sur mon Pear, d’accord ? »
Casey hocha la tête en silence.
-Paaapa, Virgil m’appelle Porte-Bidon ! »
Jonah ferma lentement les yeux et retint un soupir. Calme. Zen. Ne pas s’énerver devant Sasha Benson. Il jeta un travers à Virgil qui leva les mains de part et d’autre de son visage en toute innocence.
-On t’appelle s’il y a un souci, fayota ce dernier.
Le père de famille le gratifia d’ un ultime avertissement visuel  avant de reporter son attention sur Sasha et Casey pour leur donner rendez-vous ici-même, dans une heure.

« D’accord. » approuva Casey avant que son père ne s’éloigne en direction d’une haute tour de verre.

Virgil s’approcha alors de ses deux frères et de Sasha avant de river  ses mains au fond de ses poches.

« Bon, vu que je suis obligé de faire du babysitting non rémunéré vous n’avez pas le choix : Vous allez devoir m’aider, s’exclama-t-il en scrutant les magasins de souvenirs aux vitrines surchargées, Je dois trouver la plus moche boule à neige de New York.
-Pourquoi ?
-Pour faire un cadeau.
-Pourquoi t’offres un cadeau  moche ?
-Je vais quand même pas offrir un truc beau. » grimaça Virgil comme s’il s’agissait de l’idée la plus stupide qui soit. Il avait une réputation à tenir, bordel de troll.
-Je pensais qu’on aurait pu aller voir le Light District ou Centaure Park, hasarda Casey. Il venait de prendre son courage à deux mains pour mettre cette hypothèse sur la table.
Virgil observa tour à tour son frère et Sasha.
-Ah oui ? Tu pensais ça…L’espoir fait vivre ! lacha-t-il alors avec un sourire mauvais.

Casey se sentit rougir de honte en voyant Sasha prendre sa défense face à Virgil. En soit, c’était gentil de sa part mais le Poufsouffle n’aspirait qu’à une chose, que cette heure se déroule du mieux possible. Ne valait-il pas mieux suivre son ainé docilement dans les boutiques de souvenirs ?
De toute évidence, Sasha n’était pas de cet avis. Elle sortit un billet moldu de son sac à main et proposa de rémunérer Virgil pour qu’il les laisse seuls. A la fois surpris et touché par cette attention, Casey observa Sasha comme s’il la découvrait pour la première fois. Bien sûr, il savait qu’elle n’était pas du genre à se laisser marcher sur les pieds mais, là, elle frappait un grand coup. A croire qu’elle avait parfaitement cerné Virgil ! Ce dernier se saisit du billet et l’examina, comme s’il tentait de savoir s’il s’agissait d’une contrefaçon, puis il le glissa prestement dans la poche arrière de son bermuda.

« Deal. » dit-il en faisant quelques pas à reculons. Il désigna Sasha de son index et poursuivit : « Par contre c’est plus cher si vous voulez que j’amène Gab avec moi. »
« Hééé, mais moi je veux rester avec Casey et Sasha ! » s’exclama ce dernier.
« Toi on te demande pas ton avis. » répondit Virgil en toisant le benjamin de la fratrie pour observer tour à tour Sasha et Casey, alors ? »

La Serpentard avait déjà trouvé cette idée ingénieuse pour se débarrasser de Virgil, Casey n’entendait pas lui laisser tout faire. Inspiré par l’audace de sa camarade, il dégaina à son tour son porte feuille –un porte feuille à scratch qui faisait terriblement bébé constata-t-il avec horreur-  puis il sortit deux galions de la petite poche à fermeture éclair et les tendit à son frère ainé.
« Non mais j'hallucine ! Tu es en train de payer pour te débarrasser de moi ? Pas toi Casey ! » s’offusqua Gabriel d’un ton outré.
C’est vrai que ce n’était vraiment pas sympa, tergiversa le Poufsouffle,  un tel comportement  ne lui ressemblait guère.
« C’est pas contre toi Gaby… » tenta-t- il pour faire entendre raison à son petit frère. Gabriel ne pouvait-il pas comprendre la situation , de lui-même, et les laisser tranquille ? Casey avait l’occasion de passer une heure entière en tête à tête avec Sasha Benson  -une aubaine inespérée pour lui- devait-il laisser passer cette chance pour rester fidèle à ses principes ?

Oui, bien sûr que oui, lui souffla une petite voix. Évidemment même.

Il était un garçon gentil et il savait que Gabriel ne méritait pas d’être traité ainsi. Quel genre de frère se débarrassait de son cadet pour passer un moment avec une fille ? Pas lui en tout cas. Il était sur le point de revenir sur sa décision lorsque Virgil coupa court à ses tergiversations en partant d’un léger rire moqueur.

« Ahaha. T’as vu Gab' ? Tu es tellement chiant que même Casey est obligé de me payer pour que tu le laisses tranquille, Virgil reporta alors son attention sur le Poufsouffle, C’est bon va, garde tes sous pour lui payer une glace, dit-il, goguenard, en désignant Sasha du menton. Il passa son bras autour des épaules de Gabriel et l’entraina avec lui en direction des magasins de souvenirs, 50 minutes, répéta-t-il avant de disparaitre dans la foule laissant les deux adolescents seuls.

Pourtant, Casey était bien incapable de se réjouir pleinement de cette situation. Certes, il avait obtenu ce qu’il souhaitait au plus profond de lui-même mais il ne pouvait pas s’empêcher de culpabiliser.

« Ça m’embête un peu pour Gabriel… » souffla-t-il en reportant son attention sur Sasha, C’était vraiment pas cool pour lui. » Il secoua légèrement la tête, contrarié à l’idée de s’être montré si égoïste.  Les remords l’empêchaient de savourer pleinement ce moment mais il était tellement soucieux du bien-être d’autrui qu’il décida de ne pas trop s’appesantir sur son ressenti. Sasha avait œuvré pour qu’ils aient un peu d’intimité alors il n’allait pas gâcher ce moment en pleurnichant sur son sort.

« Enfin… J’espère qu’il finira par comprendre… » souffla-t-il en s’efforçant d’afficher un sourire timide « Alors, dis moi… Qu’est-ce que tu veux faire ? » s’enquit-il alors. Il était prêt à se plier en quatre pour que Sasha Benson passe la meilleure heure de sa vie entière.

Casey ressassait intérieurement sa réaction envers Gaby –Mais qu’est-ce qui lui était passé par la tête bon sang !?- mais il s’efforçait de faire bonne figure devant Sasha. Elle avait balayé ses remords en lui assurant que son petit frère comprendrait surement et il avait répondu à sa remarque en esquissant un sourire poli, n’osant plus évoquer le trouble réel dans lequel il était plongé.

Bien sûr Gabriel finirait par comprendre, ce que Casey ne saisissait pas, lui, c’était son propre comportement. Etait-il déjà à ce point attaché à Sasha pour se fourvoyer ainsi et envisager de payer Virgil pour se débarrasser de Gaby ? Certes l’idée ne lui avait traversée l’esprit que quelques secondes, tout au plus, mais tout de même.

L’adolescent releva les yeux vers Sasha pour l’observer à la dérobée. Il allait passer pour un pleurnichard ou un garçon trop sensible s’il accordait trop d’importance à ce fait qu’elle jugeait minime. Mieux valait passer ce ressenti sous silence et tout mettre en œuvre pour qu’elle passe un excellent moment en sa compagnie. Il avait tellement à cœur qu’elle soit heureuse qu’il était prêt à étouffer sa culpabilité –au moins momentanément.

« Oui, excellente idée. » dit-il lorsqu’elle suggéra d’aller faire un tour en barque en Centaure Park. Il ne trouva pas utile de préciser qu’il avait déjà fait cette animation la veille avec son père et ses frères. Sasha avait l’air tellement ravie à l’idée de naviguer sur le lac qu’il ne lui révéla pas ce « détail ». Et puis, il avait aimé cette animation, tenta-t-il de se convaincre, en dépit du fait que le sort sensé guider leur barque sous le « pont des amoureux » les avaient amené, lui et Virgil, dans une zone marécageuse et boueuse pleine de roseaux et de branches basses. Que tous les couples présents sur le pont avaient ri en les voyant s’enfoncer dans les branchages sans qu’ils ne puissent maitriser leur barque. Ils étaient ressortis couverts de toile d’araignée et les bras griffés de toutes parts par les rameaux… sous l’hilarité des touristes.
A l’arrivée, le loueur de bateaux leur avait offert un second tour gratuit pour s’excuser de ce désagrément mais Casey avait préféré céder sa place à Gabriel tant il était peu désireux de revivre une expérience similaire. Il était resté sagement sur la berge avec Jonah à regarder ses frères naviguer paisiblement, cette fois, sur le lac.

« C’est vraiment très joli Centaure Park... » souffla-t-il en bifurquant en direction du célèbre poumon vert de la Grosse Pomme.

Joli, joli, il n’avait que ce mot à la bouche ma parole ! Ce n’était pas joli : C’était grandiose, époustouflant. Le contraste entre les gratte-ciels miroitants au soleil et la nature luxuriante était saisissant ! Casey avait pris tellement de plaisir à observer les animaux exotiques de l’espace zoologique, à détailler les habitudes des sorciers new-yorkais se retrouvant au parc pour pique-niquer, jouer au quidditch ou au Wizz ball. Il avait adoré cet espace hors du temps, coupé de la frénésie du centre ville. Il devait l’avouer, il s’était imaginé en train de déambuler dans les allées du parc avec Sasha, main dans la main, et ce scénario n’avait jamais été aussi proche de se réaliser…

Oserait-il pour autant faire le premier pas ?

Il faudrait d’abord que sa camarade l’impressionne un peu moins. S’il n’arrêtait pas d’enchainer des banalités depuis qu’il l’avait retrouvé à Salem c’était uniquement parce qu’elle l’éblouissait : Sa culture, son aisance, son naturel, tout chez elle forçait le respect et Casey avait bien du mal à retrouver le peu d’assurance dont il avait su faire preuve lors du bièraubeurre quizz. Il se sentait gauche et hésitant. Pire même ! Il l’était vraiment et il en avait surtout pleinement conscience : La boucle infernale.

Pour se rassurer, il songea à cette soirée à Pré-Au-Lard lors du Quizz, soirée qui avait commencé exactement de la même manière. Il avait bafouillé, parlé de météo –de météo - et il avait même trébuché sur le chemin qui les menait au pub. Pourtant Sasha était restée avec lui et ils avaient fini par bien discuter tous les deux.  Casey avait juste besoin d’un petit temps d’adaptation pour se sentir à l’aise et briser la glace, se rassura-t-il en reportant son attention sur Sasha.

« Alors ? Comment se passe ton programme d’été ? » s’enquit-il avec un intérêt non feint, tu as eu des cours de droit ? »  Elle lui avait avoué vouloir travailler dans la justice magique, cette matière devait sans doute être celle qu’elle attendait le plus, Tes amies avaient l’air sympa en tout cas… » ajouta-t-il en s’arrêtant sagement au passage piéton pour traverser l’Avenue. Un flot de balais volants et de magicobus leur barrait la route. De l’autre côté de la chaussée l’entrée ouest du parc était symbolisée par quatre gigantesques statues de pierre mouvantes représentant des dragons jouant avec une sphère armillaire comme avec un simple souafle.

Casey fut reconnaissant à Sasha de bien vouloir mener la conversation le temps qu’il se sente un peu plus à l’aise. Sa timidité maladive faisait généralement fuir les filles –et rire les garçons-  mais sa camarade semblait s’accommoder de sa gaucherie. Rares étaient les personnes qui cherchaient à savoir qui se cachait vraiment derrière ces joues empourprées et ce regard fuyant mais Sasha ne semblait pas rebutée à l’idée de le connaitre davantage.

Elle se montrait tantôt bienveillante, tantôt audacieuse – Aahh cette main posée affectueusement sur son bras !- et Casey n’était pas vraiment habitué à ce genre de considérations. Loin de là même ! Son petit monde à lui, isolé, certes, mais aussi tranquille et douillet, était tout tourneboulé par la simple présence de Sasha à ses côtés aujourd’hui.

Pourtant, la jeune femme agissait comme si cette situation était parfaitement normale. Elle faisait mine de ne pas remarquer son inaptitude sociale et discourait avec emphase sur le droit international et les législations propres à chaque pays. Quelle fille brillante, songea-t-il en l’observant d’un air admiratif. Il n’était pas sûr de tout comprendre aux propos de son amie mais l’enthousiasme de Sasha faisait plaisir à voir.
En plus, elle l’estimait assez intelligent pour avoir ce genre de discussion avec lui. C’était à la fois flatteur et un peu anxiogène pour Casey. En tout honnêteté, il n’était pas vraiment callé en droit et il se promit de se documenter sur le sujet. Il voulait être à la hauteur et donner le change, la simple idée que Sasha s’ennuie en sa présence lui faisant horreur.
Sa connaissance des lois américaines s’avérait plutôt limitée pour le moment mais il essaya toutefois de rebondir sur les propos de la jeune femme.

« Juste avant de prendre le Portoloin international on nous a fait remplir un document avec plein de questions saugrenues, souffla-t-il alors, comme « Souhaitez vous briser le secret Magique ? » ou encore « Comptez vous commettre un attentat sur le sol américain ? » Virgil avait fait remarqué, à juste titre, qu’il y avait peu de chance pour qu’un Mardolien coche la case« OUI BIEN SUR. TOUTAFÉ ». Casey quant à lui  s’était demandé quelle valeur juridique avait ce document sans toutefois poser la question à son grand frère pressentant qu’il se serait surement fendu d’une réponse totalement hors de propos…contrairement à Sasha.

« Est-ce que…euh… tu sais pourquoi ils font ça ? » demanda-t-il donc, à la fois gêné de son ignorance et persuadé que sa camarade allait se faire une joie de lui répondre, Ils m’ont même demandé si je transportais du fromage et de la charcuterie… » ajouta-t-il d’un air dubitatif en pénétrant dans le parc.


Les bruits de la ville s’atténuèrent soudainement pour laisser place au chant des oiseaux et au bruissement du vent dans les feuilles d’arbres. La quiétude des lieux apaisa immédiatement le jeune garçon et les traits de son visage se décrispèrent lentement. Casey avait toujours été très sensible au bruit. Il lui était bien impossible de réviser dans la salle commune ou dans la salle des quatre maisons, la moindre conversation entre deux élèves l’empêchant de se concentrer. Il avait besoin d’un silence total pour apprendre ses leçons ce qui expliquait, entre autre, son isolement fréquent. Les cours du professeur Wembley étaient un véritable calvaire pour lui. Bien qu’il adora l’Histoire de la Magie, le chahut régnant dans la salle de classe du professeur l’empêchait d’apprécier cet enseignement à sa juste valeur. Il passait généralement tout son cours, le front plissé et le regard braqué sur son enseignant pour lire sur ses lèvres. Il ressortait de cette heure lessivé par cet effort de focalisation et avec la certitude de ne pas avoir saisi 1/3 du contenu  malgré son investissement acharné… Il avait parfois envie de baisser les bras. De s’accouder sur son bureau et de laisser vagabonder son esprit. De réfléchir aux histoires qu’il écrivait en secret avant de se morigéner.
Il ne pouvait pas se permettre de se laisser aller. Jamais. Il n’avait pas les facilités d’une Sasha Benson ! Casey était condamné à travailler d’arrache-pied pour garantir son modeste niveau… Modeste niveau qui lui permettait tout de même, aujourd’hui, de passer un peu de temps avec la fille la plus intelligente de sa promotion. Ses efforts payaient au fond…

La jeune femme lui demanda d’ailleurs s’il avait fait quelques visites depuis son arrivée. Le visage de Casey se fendit d’un sourire sincère :

« Oui j’ai vu plein de choses géniales ! s’enthousiasma-t-il un peu ragaillardi par la tournure des événements. Sasha avait l’air heureuse et contente de le voir. Ses frères et son père n’étaient pas là pour le surveiller. Tout semblait parfait, on a fait beaucoup de ballades en fait, le pont de Brooktown, Spell Street, le Light district de nuit… Oui, tout se déroulait parfaitement mise à part cette histoire de barques. …et euh…Je suis monté en haut de le OneVargasTower aussi… poursuivit-il avec un sourire un peu figé. Pourquoi ne lui avait-il pas dit qu’il avait déjà fait cette activité navigation ? Devait-il le lui dire maintenant ? Était-ce trop tard ? Allait-elle le trouver bizarre s’il révélait cette information si tardivement ?Et…euh…On s’est promené à Centaure Park aussi…euh … Non, définitivement il ne pouvait pas lui révéler maintenant qu’il avait déjà navigué sur le lac la veille. Elle se faisait une telle joie de faire un tour de barque qu’il ne voulait pas qu’elle y renonce sous prétexte qu’il avait déjà pratiqué cette activité ( et qu’il l’avait détesté). Les souhaits de Sasha passaient très clairement avant les siens mais plus ils descendaient en direction de l’étendue d’eau, plus l’appréhension de Casey montait :  Et si le loueur le reconnaissait ? Pire, s’il faisait une remarque ?
Casey expira lentement pour se calmer. Il avait bien conscience de faire toute une montagne d’un détail mais c’était plus fort que lui. Il ne pouvait pas empêcher son cerveau de fomenter les pires scénarios, le privant de surcroit de profiter de cette agréable ballade en si charmante compagnie. Il devait se forcer à relativiser : Après tout,  il y avait peu de chance pour qu’ils tombent exactement sur le même loueur, ce vieux monsieur dégarni, alors pourquoi s’inquiéter ?

Le sang de Casey ne fit qu’un tour lorsque, au détour d’un virage, il reconnut le crane luisant au soleil du loueur. Brusquement silencieux, l’adolescent avala sa salive et alla se positionner dans la file, le cœur batant. Ce vieillard voyait passer des milliers de touristes chaque jours, il n’allait pas le reconnaitre quand même ?.

Fébrile, l’adolescent attrapa son porte feuille à scratch et en sortit quelques galions qu’il compta consciencieusement après avoir observé le panneau des tarifs. Il tenait à faire l’appoint afin de minimiser les échanges avec le loueur.

« Ah. Et … euh..Je t’invite. » murmura-t-il à l’attention de Sasha avant de se réfugier dans la contemplation de ses pièces qu’il recompta une énième fois. Foutu regard fuyant !  Non seulement il n’avait pas envie que le commerçant l’identifie mais en plus il n’était pas du tout à l’aise avec cette notion d’invitation. Il n’avait jamais invité qui que ce soit dans sa vie et il ne savait pas quoi faire, ni quoi dire, ni comment se comporter :  Il se sentait bien incapable de feindre le détachement tranquille d’un Dean, l’évidence brusque d’un Virgil et encore la joie assumée à l’idée de  partager un moment entre amis d’un Gabriel !
Merlin, quel calvaire !  

Les deux adolescents débouchèrent sur le ponton tandis que le loueur était occupé à sermonner un groupe de jeunes touristes étrangers. Casey pria mentalement pour que les allemands fassent chavirer leur barque –il n’était pas contre une petite diversion- mais malheureusement le loueur reporta son attention sur lui… et le reconnut instantanément. L’homme se fendit même d’une remarque qui laissa clairement entendre qu’il était venu très récemment faire un tour de barque. Pourquoi fallait-il que ce scénario catastrophe se vérifie ?
Casey croisa brièvement le regard interrogateur de Sasha et se ratatina littéralement sur lui-même.

« Euh… non. Enfin oui…Euh… balbutia-t-il en sentant une brusque chaleur envahir son visage et ses oreilles. Il était mortifié. Mort de honte. Euh…d..deux personnes…Une barque….tarif réduit. Les phrases avec des verbes et des formules de politesse, c’est mieux, songea-t-il amèrement, s’il vous plait. » Il s’empressa de déposer les galions dans la main du loueur et s’installa prestement dans la barque pour quitter l’embarcadère au plus vite.

Qu’allait penser Sasha maintenant ? Elle allait le trouver stupide  ! Peu sûr de lui ! Incapable de s’affirmer ! Une vraie lavette, songea-t-il en se triturant les mains d’anxiété et de honte mêlées. La barque se mit lentement en mouvement et s’éloigna tranquillement du ponton tandis qu’il ressassait mentalement cette erreur, son regard posé sur ses mains jointes.

Oh merlin, et avec tout ça, il n’avait même pas eu la présence d’esprit d’aider Sasha à descendre dans l’embarcation comme l’aurait fait un vrai gentleman. Il avait tout faux. Sur toute la ligne.

« J’ai déjà fait de la barque hier, confessa-t-il alors comme s’il admettait un crime odieux. Il releva les yeux vers la jeune femme qui lui faisait face et ajouta, elle était mal ensorcelée si bien qu’elle nous a emmené dans les joncs là-bas, il désigna la zone marécageuse couverte de broussaille du regard. Il hésita à relever une mèche de cheveu sur son front qui cachait une vilaine balafre due aux branches basses mais il ne voulait pas paraitre plus pathétique qu’il ne l’était déjà. J’aurai dû te le dire. C’était idiot de ma part, souffla-t-il en secouant la tête, Je ne sais pas pourquoi je ne te l’ai pas dit. Enfin si je sais, rectifia-t-il, Tu avais l’air si contente à l’idée de venir ici… »

Il haussa les épaules et ajouta un peu penaud.

« Je voulais te faire plaisir. »

Sasha avait beau affirmer qu’il n’avait pas agi comme un idiot et que ses intentions étaient louables, Casey savait très bien que c’était faux. Il avait perçu le reproche -et surtout  la déception- dans la voix de sa camarade et cette idée lui était insoutenable. Il aurait voulu que ce rendez-vous se passe bien, que la conversation coule entre eux naturellement, un peu comme au bièraubeurre quizz, mais Casey s’était mi une telle pression qu’il avait tout fait capoter. Cela lui arrivait souvent. Il gardait encore en mémoire cet exposé oral en Histoire de la Magie qu’il avait préparé durant de longues heures. Le jour venu, face à son professeur et ses camarades, il n’avait pas été en mesure d’aligner trois phrases cohérentes. Cette timidité maladive s’avérait tellement handicapante au quotidien qu’elle lui minait le moral.  Même la main de la jeune femme posée sur la sienne ne parvenait pas à lui remettre un peu de baume au cœur. Sasha avait pitié de lui : Ce n’était pas un geste d’affection, loin de là, juste un vague élan de réconfort et d’indulgence. Voila ce qu’il lui inspirait.

Casey n’esquissa pas le moindre geste pour retenir la main de Sasha lorsqu’elle s’éloigna. Il  se perdit lui aussi dans la contemplation du parc sans vraiment parvenir à se concentrer sur la beauté et la quiétude des lieux. Après un long silence gênant, Sasha décréta qu’après leur tour de barque ils feraient quelque chose de nouveau et, avec un enthousiasme feint, elle lui demanda ce qui lui ferait plaisir.

Oh non, Merlin. Pas ça, songea Casey plus que jamais mal à l’aise. Pourquoi lui laissait-elle le choix de la prochaine activité alors qu’il venait de lui gâcher la sienne !? Casey avait déjà beaucoup de mal s’affirmer en temps  normal. En effet, il était rarement –pour ainsi dire jamais- le décisionnaire :
« Choisissez ce que  vous voulez… » soufflait-il quand ses frères se battaient pour le programme tv  « N’importe, j’aime les deux » éludait-il quand on lui demandait de faire un choix alors il ne se voyait clairement pas imposer le programme de l’après midi à Sasha.

« Euh… Je sais pas trop… » souffla-t-il en sentant son cœur s’emballer sous le poids de cette immense responsabilité. Il s’efforçait de passer en revue les animations qui seraient susceptibles d’intéresser son amie. C’était plus fort que lui. L’idée de l’emmener dans cette petite librairie spécialisée dans les romans d’Héroïc-Fantaisy -qu’il rêvait pourtant de visiter depuis le début de son séjour à New-York et qui se trouvait à quelques pas de Centaure Park- ne lui traversait même pas l’esprit. « Peut-être qu’on pourrait aller voir le siège de l’ONUM ?" L’Organisation Nationale des Nations Unies Magiques, voilà quelque chose qui devrait intéresser sa camarade et lui rendre assurément son beau sourire, estimait-il.

Malheureusement, Sasha dut trouver sa proposition particulièrement  incongrue – Qui proposait ce genre de visite pour un rendez-vous galant ?- puisqu’elle lui demanda de but en blanc si elle lui faisait peur. Peur. Rien que ça !

« Pardon ? s’étonna Casey en reportant vivement son attention sur la jeune femme, Non, bien sûr que non. Pas du tout ! » s’empressa-t-il de répondre en sentant ses oreilles s’empourprer.
Grillé.
Pourtant, il n’avait pas peur de Sasha au sens premier du terme : Il ne craignait pas pour sa vie en sa présence et ne se sentait pas en danger avec elle mais il mentirait s’il n’avouait pas qu’il était plongé dans un véritable trouble quand elle était à proximité.
Quant il n’enchainait pas les banalités, il multipliait les maladresses et il voyait bien qu’il avait fait une erreur en ne mentionnant pas son tour en barque de la veille. Ce mensonge par omission avait entamé la bonne humeur de sa camarade, pire elle se remettait même en question à cause de lui !
Leur rendez-vous tournait au fiasco uniquement parce que Casey était incapable de profiter de cette journée, trop paralysé qu’il était par les enjeux sous jacents : Sasha s’ennuyait-elle en sa compagnie ? Le trouvait-elle intéressant ? S’amusait-elle avec lui ? Partageait elle les sentiments qu’il ressentait à son égard ?
A force de se poser trop de questions, il passait incontestablement à côté de cette journée. Il devait remédier à ça.

« Disons plutôt que tu m’intimides un peu… » consentit-il en s’efforçant de la regarder dans les yeux. …Mais je suis très facilement intimidable aussi.» ajouta t-il alors. Il refusait de jeter la faute sur elle et de lui laisser endosser l’entière responsabilité de cet échec. Il aurait voulu être un Gryffondor plutôt qu’un Poufsouffle maladroit mais tant pis…Casey reporta son attention sur ses mains jointes et prit une profonde inspiration. Il était temps de se montrer un peu courageux et de se jeter à l’eau.

« En fait,…commença-t-il sans savoir ce qu’il allait dire ensuite. Son cœur battait la chamade et il se sentait fébrile, presque fiévreux,  je m’étonne à chaque seconde que tu sois là avec moi, ici, murmura-t-il. Il releva les yeux vers Sasha. Eux deux, ensemble, navigant sur une barque à Centaure Park, Elle, la surdoué éloquente, et lui, le timide maladive, Je ne peux même pas dire que c’est comme dans un rêve parce que je n'aurais jamais pensé que je puisse avoir cette chance un jour, expliqua-t-il pour que la jeune femme comprenne pleinement les raisons de son trouble. Dans son esprit, ce rendez-vous relevait quasiment du miracle,  Tu sais,… tu me plais beaucoup Sasha. »

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'Dé à 6 faces' : 5

C’était bien la première fois que Casey prenait un tel risque dans sa vie. Avouer ses sentiments sans détour, Merlin, quel saut dans l’inconnu ! En effet, oser confesser son attachement s’avérait être un exercice compliqué pour un garçon aussi timide et peu sûr que lui.  A peine eut-il terminé sa déclaration qu’il se morigéna intérieurement : N’allait-il pas la faire fuir ? Pourquoi avait-il fallut qu’il dise qu’il vivait leur nouveau rapprochement comme un rêve ? Mais quelle idée ! Il pouvait le penser mais certainement pas le verbaliser, voyons ! Elle allait le trouver trop fleur bleue, et surtout, bien trop attaché alors qu’il ne s’était absolument rien passé entre eux…
Il s’apprêtait presque à revenir sur ses propos pour tempérer quelque peu l’idolâtrie qui transpirait de son discours lorsqu’il vit Sasha relever les yeux sur lui. Le regard qu’elle lui lança le cloua sur place. Il n’y lisait aucune gène, aucun malaise. Au contraire.  Il émanait d’elle une assurance folle qu’il le tétanisait autant qu’il lui enviait.
Lorsqu’il la vit se lever précautionneusement pour le rejoindre, il sut que cela allait arriver. La barque tangua légèrement et il s’accrocha au banc en bois sur lequel il était assis. Elle allait le faire. Elle allait l’embrasser. Il était incapable de détacher son regard de ses yeux bleus et il ne parvint même pas à esquisser un sourire lorsqu’elle s’agenouilla devant lui, à la fois impressionné par son audace et séduit par son aplomb.
Il la regarda jusqu’aux derniers instants alors qu’elle avait déjà clos ses paupières, comme pour graver ce souvenir dans sa mémoire et il ferma les yeux seulement lorsque les lèvres chaudes de Sasha se pressèrent contre les siennes.
Les garçons de son dortoir avaient maintes fois évoquer leur premier baiser : Dylan avait affirmé qu’il avait embrassé Elphia dans le Poudlard Express et qu’il avait tourné sa langue dans sa bouche -dans le sens des aiguilles d’une montre- pendant trente bonnes minutes . « J’ai fait au moins 200 tours ! »  Astor avait évoqué un baiser fougueux en haut de la tour d’astronomie avec Kathrina Keller durant un orage et Casey se demandait quelle était la part de vérité dans les propos de ses camarades. Autant il ne doutait pas de l’expérience d’un Andrew Dubois, qui fréquentait depuis plusieurs mois Abigail Scavo maintenant, autant il doutait quelque peu des  prouesses de ses camarades qu’il n’avait jamais vraiment vu en galante compagnie.

En même temps, combien serait-il à le croire s’il racontait que Sasha Benson l’avait embrassé dans une barque voguant au beau milieu de Centaure Park ? Surement aucun.

Pourtant, c’était exactement ce qui était en train d’arriver. Le cœur de Casey battait à tout rompre dans sa poitrine tandis qu’il échangeait un doux baiser, empreint de timidité, avec sa camarade. Il pouvait sentir les mèches de cheveux de Sasha poussées par la brise contre son visage et il ne connaissait pas plus douces caresses au monde que celle-ci. Ses lèvres délicates, son odeur parfumée, … Casey aurait voulu que cet instant dure toujours bien que cela soit compliqué pour lui de s’abandonner totalement à cette étreinte. Faisait-il les choses comme un garçon devait les faire ? Sasha attendait-il de lui qu’il se montre un peu plus entreprenant ? Comme toujours il était partagé entre l’envie de profiter pleinement de ce moment et un désir ardent : Celui de faire plaisir à Sasha.


Alors qu’il était tout à ses pensées et qu’il tentait d’être le plus performant possible, une exclamation le fit légèrement reculer, rompant ainsi le baiser entre les deux adolescents.
« Ooohhh les amoureuuuuux ! Ohh les amoureeeuxx ! »
Deux fillettes, à peine plus jeunes qu’eux, se trouvaient sur le pont qui enjambait le lac et les montraient du doigt en riant. Elles n’étaient pas les seules à les observer puisque plusieurs passants installés sur les berges, regardaient dans la direction de leur embarcation d’un air tantôt attendri, tantôt amusé. Casey sentit son visage s’empourprer. Il ne savait si cette réaction était dû à son tout premier  baiser ou au fait que de nombreux touristes en aient été témoin.
L’adolescent croisa les yeux de Sasha et il esquissa un vague sourire un peu mal à l’aise en reportant son attention vers ses chaussures. Il se rendit compte seulement à cet instant que ses mains n’avaient pas quitté le banc en bois sur lequel il était assis. Il n’avait pas songé, une seule seconde, à enlacer Sasha qui s’était pourtant agenouillée devant lui. Merlin, quel piètre chéri il était !

Pourquoi avait-il fallu qu’il se concentre sur le sens des tours qu’il faisait avec sa langue !?

Un goût d’inachevé succéda à la bref euphorie qu’il avait ressentit pendant ce baiser. Merlin, il espérait qu’il n’avait pas été trop maladroit. Afin de remédier à cela, il se décala légèrement sur son banc pour faire une place à Sasha à côté de lui. Il n’allait quand même pas la laisser parterre tout le reste de leur croisière ! Il tendit une main pour l’aider à se relever au moment où leur embarcation passait sous le pont. Quelques touristes âgés d’une vingtaine d’années se mirent à siffler et à les applaudirent en riant si bien que Casey s’enfonça un peu plus sur lui-même, mortifié.
Alors qu’ils étaient plongés dans l’obscurité du pont où seuls quelques rais de lumières filtraient entre les planches, il risqua un nouveau regard en direction de Sasha. Ce qu’elle était belle ! Il n’arrivait pas encore à réaliser qu’ils venaient de s’embrasser tous les deux. Il hésita un instant  à capturer ses lèvres de nouveau mais leur barque retrouvait déjà la clarté du jour de l’autre côté de la passerelle aussi préféra-t-il se cantonner au seul geste audacieux dont il se sentait capable sous les yeux des touristes : Il attrapa sa main dans la sienne et la pressa doucement.

La main de Sasha dans la sienne, Casey s’efforça de calmer l’éternel sentiment d’ appréhension qui le caractérisait. Tout se passait bien –peut-être que ce baiser n’avait pas été parfait (c’était sûr même, songea-t-il la mort dans l’âme)- mais Sasha ne semblait pas lui en tenir (trop) rigueur. Elle lui adressa d’ailleurs un sourire serein qui rassura quelque peu le Poufsouffle.

Le ponton d’accostage était déjà en vue et le jeune homme se surprit à regretter que le tour ne soit pas plus long, lui qui avait pourtant détesté cette animation la veille. Il profitait d’ailleurs de la quiétude des lieux lorsque Sasha suggéra de faire une photo. Quelle excellente idée d’immortaliser cette balade sur le lac de Centerpa… *Clic*
Leurs deux hologrammes apparurent  sur l’écran du Pear. Casey, quelque peu décontenancé par la rapidité du geste cligna des paupières et se pencha légèrement pour observer l’image.  Sasha, la tête posée sur son épaule, était resplendissante comme toujours. Quand à lui, et bien, elle ne lui avait pas laissé le temps d’avoir l’air gêné si bien qu’il regardait en direction du Pear sans toutefois fixer clairement l’objectif. En fait, il était bien mieux que sur les photos posées sur lesquelles il semblait toujours un peu empoté.

« C’est vrai qu’elle est jolie. » assura-t-il en esquissant un sourire timide. Il n’osa pas demander à Sasha de la lui envoyer mais elle le proposa d’elle-même, Ce serait super. Merci.»
Casey savait que Sasha avait un compte instamag sur lequel elle postait des clichés de son quotidien. Il n’était pas très fier mais il avait passé ces dernières semaines à la stalker sur les réseaux sociaux. Il connaissait Maureen, Leanne et même Antonin comme s’ils étaient des camarades de Poudlard et se plaisait, le soir dans son lit, à lire la longue liste d’hashtag en dessous de chaque image : #Salem2010 #SummerSchool, #BestTeam, #Friends. Il se demandait si cette photo allait rejoindre la longue liste de ses publications estivales.

A l’heure des réseaux sociaux, la photo de couple assumée et publiée sur un profil avait une symbolique forte :  Elle était bien plus qu’un simple cliché de bonheur partagé, elle officialisait une relation aux yeux de tous. Ce n’était pas rien.  Sasha avait-elle envie que tout Poudlard soit au courant pour eux ?

Casey quant à lui était partagé. D’un côté, il nourrissait l’espoir d’être considéré comme le petit ami de Sasha, et de l’autre, il craignait cette médiatisation tant il n’avait pas pour habitude de se mettre en avant. Il avait bien instamag pourtant –avec une douzaine de followitchers dont tous les membres de sa famille- mais il postait seulement quelques photos de paysage en noir et blanc.
Les jeux de lumière dans les feuillages du parc auraient fait un très beau cliché mais l’adolescent ne voulait pas perdre une seconde de ce rendez-vous. Comme le soulignait Sasha, il ne leur restait plus qu’une vingtaine de minutes avant de rejoindre de nouveau Virgil et Gaby. Déjà. Casey perçut d’ailleurs une pointe de déception dans la voix de sa camarade et il en fut touché. Visiblement, elle aurait bien prolongé ce moment entre eux ici…et même à Poudlard. Casey était timide mais pas stupide. Il savait très bien ce que Sasha sous entendait par la phrase qu’elle venait de prononcer, d’apparence anodine : Elle voulait sortir avec lui, pas seulement ici, mais aussi à l’école !

«  Ce serait vraiment super  *mais varie un peu ton vocabulaire par Merlin* Je veux dire,… j’adorerai, se reprit-il. Porté par un bref élan de confiance il suggéra alors, peut-être qu’on pourrait faire le trajet jusqu’à Poudlard dans le même wagon… Comme ça tu pourras me raconter la fin de ton camp d’été à Salem. »

Oui. Il venait de donner rendez-vous à Sasha Benson. Merlin. Il s’étonnait lui-même.
L’embarcation ensorcelée ne tarda pas à rejoindre le ponton pour accoster. Cette fois, Casey ne manqua pas à ces devoirs. Maintenant qu’il était pleinement rassuré sur les sentiments que Sasha lui portait et sur la direction qu’elle voulait donner à leur relation, il se sentait nettement plus à l’aise : Il proposa son aide à la jeune femme pour quitter la barque sans encombre et une fois sur la terre ferme, il attrapa sa main pour marcher à ses côtés, comme l’auraient fait deux tourtereaux. Enfin, ils  s’arrêtèrent pour acheter un glace –goût coco pour lui- dans un petit kiosque. Tant pis pour la super librairie spécialisée dans l’Heroïc Fantaisy située à l’angle de CentaurePark. Il irait un autre jour. Il n’avait aucune envie d’embêter Sasha avec ses passe-temps de Magicogeek !

« Tu veux gouter ? proposa-t-il en tendant sa glace entre eux alors qu’ils retrouvaient le trafic continu et le bruit ininterrompu des grandes avenues new-yorkaises. Honnêtement,  Casey se serait presque cru dans une de ces comédies romantiques moldues  où les deux protagonistes parcourent la Grosse Pomme main dans la main.
« Je crois que là-bas c’est le Woolworth Building, dit-il en indiquant d’un geste du menton un bâtiment impressionnant situé deux cent mètres plus loin, le siège du MACUSA, tu veux qu’on aille le voir avant de rejoindre les autres ? » proposa-t-il après avoir jeté un bref coup d’œil à sa montre.  
Il était sûr que cet édifice intéresserait Sasha bien plus que cette devanture de  magasin de jouets garnie de plus de 100 automates ensorcelés qui paraissait pourtant si cool…

Casey esquissa un sourire en voyant les yeux de  Sasha briller d’excitation. Il ne parlait pas beaucoup mais son sens de l’observation était particulièrement aiguisé. Il était passé maitre dans l’art d’interpréter les expressions, les regards et les silences et , pour le coup, il ne s’y trompait pas : Il avait mentionné l’activité parfaite pour sa toute nouvelle petite amie. Devant son enthousiasme, il en oublia littéralement ses propres envies. La boutique de jouets aux automates lui semblait bien moins attrayante que l’idée de faire plaisir à Sasha !

Il l’écouta avec intérêt lorsqu’elle dévoila ses connaissances sur le Woolworth Building. Tout ce qu’il savait de cette architecture, c’était que la flèche était d’inspiration médiévale puisqu’elle n’était pas sans rappeler l’architecture de Poudlard. Pour le reste, ses connaissance se limitaient à ce que lui avait dit son père la veille …et qu’il n’avait écouté que d’une oreille distraite tant cette journée avec Sasha occupait déjà tous ses esprits.

« Non je l’ignorais, répondit-il lorsque Sasha affirma qu’il s’agissait de l’un des plus vieux building de New York. La jeune femme sembla alors regretter ses dires et s’excusa de monopoliser la conversation. Honnêtement cela ne posait vraiment aucun problème à Casey. Il préférait les personnes bavardes –il n’avait pas trop à parler au moins !

« J’aime bien t’écouter, l’encouragea-t-il, tu dis toujours des choses intéressantes »

Il ne disait pas cela pour flatter l’ego de sa petite amie, il le pensait vraiment !

Sasha approuva son idée d’aller voir le MACUSA d’un peu plus près non sans le vanner au passage. Un peu désorienté par ce trait d’humour –ou cette moquerie déguisée- il afficha un sourire muet et discret, trop timide à l’idée d’avouer que, tout de même, cela le blessait un peu. Sa timidité maladive était un sujet sensible dont il n’arrivait pas encore à rire et il préférait largement les moments où Sasha l’inondait de ses connaissances plutôt que ceux où elle le tournait en ridicule.

« Non je ne l’ai pas déjà visité, répondit-il en se forçant à sourire (il ne voulait pas passer pour un rabat-joie non plus), Qu’est-ce que tu veux dire par système de sécurité magique le plus perfectionné au monde, reprit-il  en bifurquant à l’angle de l’avenue pour prendre la direction du Woolworth Building, Tu as lu des articles dessus ? »

Les deux adolescents passèrent devant plusieurs enseignes toutes plus créatives les unes que les autres mais ils ne se laissèrent pas distraire de leur but. En quelques minutes ils arrivèrent au pied du gratte-ciel aux proportions impressionnantes.

« On dirait qu’il touche le ciel. » Commenta Casey, la tête inclinée en arrière, fasciné. Il reporta alors son attention sur l’entrée desservie par une série de marches usées par endroits en haut desquelles attendaient plusieurs agents de police. Quelques personnes faisaient la queue en vue d’un contrôle d’identité avant de pénétrer dans l’immeuble. Soudainement anxieux à l’idée de se faire éconduire comme des malpropres, Casey se mordilla l’ongle du pouce :

« Tu penses qu’ils vont nous laisser rentrer ? demanda-t-il sans quitter les agents des yeux, Je veux dire, s’ils ont réellement un système de surveillance sophistiqué ils ne vont peut-être pas laisser passer deux mineurs non accompagnés. Et étrangers qui plus est.» ajouta-t-il en se tournant vers Sasha. Il ne voulait pas avoir l’air trop stressé mais c’était plus fort que lui : Il préférait presque renoncer à rentrer plutôt que d’être confronter à des agents de police peu commodes…

« T’es sure ? » demanda Casey en reportant de nouveau son regard sur les agents de police magique. Ils  avaient peut-être l’habitude d’accueillir des touristes mais ils n’avaient pas l’air très engageant avec leurs mines patibulaires et leurs regards cachés derrière des solaires à monture épaisse. L’argument « c'est moi qui parlerai !" finit  toutefois par le convaincre et Casey se laissa entrainer, à contre cœur, par sa petite amie en direction des marches.

Il se positionna à côté d’elle dans la file et, comme convenu, la laissa prendre la parole avec enthousiasme, visiblement peu impressionnée par l’agent à la chemise brodée MBI. Casey n’était pas rassuré pour autant. Les contrôles de baguettes le stressaient. Il n’avait absolument rien à se reprocher pourtant mais il craignait toujours que quelque chose ne fonctionne pas au moment de son passage. Pour venir à New York, il avait été nettement plus anxieux à la douane magique que lors de l’utilisation du portoloin international ! Cette peur s’avérait  totalement irraisonnée-il le savait- mais c’était plus fort que lui. Il irait mieux après avoir passé le cordon de sécurité.

Sasha était pour le coup son exacte opposée :  Parfaitement confiante, elle déclina son identité, sa date de naissance et la composition de sa baguette avec une facilité déconcertante. Casey était sûr qu’il allait bafouiller ou faire une phrase trop alambiquée dans laquelle il allait se perdre lui-même. Allez quoi, ce n’était pas si compliqué ! Calquant son phrasé sur celui de Sasha, il se répéta intérieurement ce qu’il allait devoir dire à son tour « Forbes Casey, 24 février 1995, bois de laurier, crin de licorne. Forbes Casey, 24 février 1995, bois de laurier, crin de licorne. Forbes Casey, 24 février … »

Le froncement de sourcils de l’agent n’échappa pas à son regard anxieux, ni le long paragraphe rouge qui apparut sur le parchemin après que Sasha eut décliné son identité.  Casey sentit brusquement ses craintes se justifier : Quelque chose clochait.

L’adolescent, quelque peu paniqué, se pencha légèrement vers Sasha dont le sourire semblait s’être figé sur ses lèvres. Elle aussi elle savait.

« Qu’est-ce que… » murmura-t-il avant d’être interrompu par la voix forte du policier.

"Quelles étaient vos relations avec l'ancienne criminelle américaine Ana Sorden, Miss ?"

Le cœur de Casey se mit à battre plus fort et plus vite à la mention de la tristement célèbre terroriste qui avait été leur professeur d’Arithmancie. Il y avait tout un tas de rumeurs qui courraient sur les liens qui unissaient Sasha à Ana. Des liens étranges, profonds et ambigus, qui dépassaient le cadre des traditionnels rapports élève professeur. La preuve, à son évasion d’Azkaban, Sorden avait cherché à rentrer en contact avec une seule personne : Sasha Benson, et il se racontait parfois que c’était la jeune fille, elle-même, qui avait mis fin aux jours de l’arithmancienne. Le procès s’était tenu à huit clos et cela n’avait fait qu’entretenir le flou autour des circonstances de la mort de la terroriste et alimenter davantage les ragots. Certains disaient que Sasha étaient devenue une marollienne et qu’elle œuvrait dans l’ombre pour briser le secret magique. C’était pour cela qu’elle étudiait si sérieusement et si brillamment. Casey n’avait jamais accordé trop de crédits à toutes ces rumeurs –fruit de la  jalousie pour la plupart- mais il savait que Sasha figurait parmi les élèves que son père suivait très, très, attentivement. Et pas uniquement parce qu’elle était une excellente élève.

L’adolescent déglutit avec difficulté, incapable de prononcer ne serait-ce qu’un seul mot. Il aurait voulu dire qu’ils n’avaient absolument rien à voir avec cette femme perverse et folle à lier mais les mots ne parvenaient pas à sortir de sa bouche. Sasha essayait tant bien que mal de défendre sa cause mais sa belle assurance fondait comme neige au soleil. Le regard inquiet qu’elle lui jeta fini par le convaincre de partir. Il ne souhaitait pas voir Sasha davantage déstabilisée.

« Viens,… allons-y… » dit-il en tentant de l’entrainer par le bras en direction du bas de l’escalier, en vain. Sasha ne voulait pas lâcher. Merlin, elle était pire qu’une Gryffondor ! Casey lui jeta un regard suppliant qu’elle ignora préférant évoquer son statut de  stagiaire d’été à Salem, comme si cela lui offrait un passe-droit.
Mauvaise stratégie, analysa d’emblée Casey. L’agent du MBI lui avait dit de partir. Pourquoi insistait-elle ? La réaction du policier ne se fit pas attendre : Il la coupa sèchement et lui fit un rappel à l’ordre sans équivoque, lui demandant expressément de clarifier sa situation.  

« Maintenant écartez-vous, s'il-vous-plait »

Casey entraina Sasha sur le côté pour libérer la file d’attente. Merlin ce qu’il se sentait mal. Non seulement il ne vivait pas très bien le fait de s’être fait ainsi rabrouer publiquement mais il imaginait sans mal la honte et le sentiment d’humiliation que Sasha devait ressentir. Elle était celle qui avait insisté pour visiter le MACUSA, lui assurant que tout se passerait bien, et la déconvenue était de taille. Casey pouvait aisément deviner sa profonde déception surement mêlée de honte. De plus, l’agent avait surement du réveiller de très mauvais souvenirs en évoquant Ana Sorden.  Casey était tellement mal pour elle ! Bien plus que pour lui-même finalement.

« Ça va ?... Tu vas bien ? demanda-t-il en se penchant pour chercher son regard.
Le regard noir que Sasha lui jeta lorsqu’elle releva la tête lui fit presque faire un pas en arrière. Il s’était trompé, Sasha n’était pas triste, elle était en colère. Elle lui intima de le suivre et assura pleine d’amertume qu’elle n’avait pas envie de visiter le MACUSA de toute façon. Casey ne s’y méprenait pas. Sasha ne voulait pas perdre la face. Il avait vu tant de fois Virgil ou Gaby agir de la sorte qu’il connaissait ce mécanisme par cœur. Était-ce si difficile d’admettre sa déception ? L’adolescent resta silencieux ne sachant pas trop comment réagir. Il avait envie de lui dire qu’avec lui, elle pouvait se livrer, assumer ses émotions sans faux-semblant. Parler de Sorden si elle en avait envie- ou pas d’ailleurs- il ne la jugerait pas. Sa camarade préféra l’entrainer  par le bras, en bas des marches sous le regard interrogateur des touristes. Casey trouva ce geste un peu brusque mais il n’en dit rien, conscient que Sasha n’était pas dans son état normal. Elle suggéra d’aller faire du shopping et  sa réplique ne pouvait pas sonner plus faux. Sasha Benson n’était pas intéressée par le shopping. Aucune vitrine new-yorkaise n’avait accrochée son regard et seules les plaques commémoratives ou informatives disséminées dans la ville avaient trouvées grâce à ses yeux aujourd’hui.

« On est pas obligé tu sais. On peut juste marcher. »

Ils firent quelques pas en silence réempruntant machinalement l’avenue qu’ils avaient prise pour venir jusqu’au Woolworth Building. Après plusieurs minutes de réflexion, Casey se décida finalement à percer le silence malgré ses craintes.

« Tu …tu veux parler de ce qui s’est passé ? » s’enquit-il d’un ton doux en posant son regard sur Sasha.

Le moment était surement mal venu pour évoquer Ana Sorden puisque Sasha esquiva sa question. Casey hocha docilement la tête quant elle affirma qu’elle allait clarifier la situation et faire en sorte de ne plus être associée, de près ou de loin, à l’arithmancienne terroriste. Le jeune homme n’insista pas davantage. Il ne tenait pas à faire perdurer plus que de raison cet instant de malaise.  Il fut toutefois touché que Sasha le remercie et approuva d’un nouveau signe de tête lorsqu’elle suggéra d’aller retrouver ses frères.

C’était surement trop tôt dans leur relation pour évoquer des sujets de conversations aussi intimes –ils n’étaient en couple que depuis 34 minutes après tout- mais Casey voulait que Sasha comprenne qu’elle pouvait compter sur lui et qu’il était là pour elle si elle avait besoin de parler. Toutefois, il doutait fortement qu’elle soit le genre de personne à s’épancher sur ses déboires personnels. Sasha semblait avancer dans la vie sans regarder en arrière. Il lui enviait cette détermination sans faille. Elle ne se laissait pas entraver par son passé et comptait bien réussir, sans l’aide de personne. Sa dernière remarque ne fit que confirmer cette thèse.
Honnêtement, Casey aurait voulu pouvoir s’appuyer sur l’aide de Jonah. Il n’y avait pas de honte à se faire aider par un adulte, surtout si celui-ci pouvait tout à fait tirer les choses au clair avec un simple appel Pear à l’ambassade. Casey savait que si son père avait été mi au courant de leur petite mésaventure, il aurait mi un point d’honneur à régler cette situation rapidement afin que Sasha puisse visiter le MACUSA aujourd’hui même.

Toutefois elle refusait purement et  simplement l’idée que Jonah intervienne en sa faveur. Soit. Casey n’irait pas à l’encontre des souhaits de sa petite-amie. Insister davantage pour qu’elle obtienne gain de cause ne lui traversa même pas  l’esprit.

« Comme tu voudras. » se contenta-t-il de dire en bifurquant en direction du light district où Gaby et Virgil les attendaient.  Il aurait bien aimé l’embrasser une dernière fois avant qu’ils ne se retrouvent en compagnie de toute la fratrie Forbes mais ils étaient maintenant trop proches du lieu de rendez-vous et Casey craignait de se faire surprendre. Il savait que ses frères ne manqueraient pas de le chambrer si sa relation avec Sasha était effective (quoique, même s’ils avaient un doute, ils se conduiraient exactement pareil.). C’était plutôt une forme de pudeur qui l’empêchait d’être aussi démonstratif et il ne tenait pas à être le premier de la fratrie à ramener une fille dans la famille.

« Ils sont là-bas. » dit-il en avisant ses frères assis sur un banc de l’autre côté de l’avenue. Virgil scrollant son Pear, un sac "I NY" entre les mains  et Gaby, observant la foule tout en mangeant une glace. Le benjamin de la fratrie fut d’ailleurs le premier à les remarquer lorsqu’ils arrivèrent à proximité.

« Alors, c’était bien votre balade en tête à tête ? » bougonna-t-il. De toute évidence, il n’avait pas encore digéré le fait d’avoir été évincé de leur duo. «  Vous vous êtes bien amusés ? » ajouta-t-il avec une pointe d’envie dans le regard.

« Oui. » se contenta de répondre Casey en sentant le rouge lui monter aux oreilles. Ses frères pouvaient-ils deviner qu’il avait échangé son premier baiser rien qu’en le regardant ? Il était sûr que Virgil était en mesure de deviner son trouble. Fort heureusement ce dernier ne leva pas les yeux de son écran.

« Dooonc, on a fait tous les magasins de souvenirs du Light district, Gaby a voulu s’acheter une casquette mais il n’avait pas assez d’argent de poche alors il s’est rabattu sur un horrible porte-clefs en pâte à sel.
-C’est pas de la pâte à sel !
-ça y ressemble fortement, contra Virgil avant de reprendre, J’ai trouvé mon hideuse boule à neige, quant à vous…. Il reporta son attention sur les mains vides de Casey et Sasha qui n’avaient visiblement pas fait d’emplettes,… Et bien,… vous n’avez rien trouvé qui vous intéresse.  Il reporta ses yeux cernés sur les deux adolescents, C’est bon ? Vendu ? »
Casey échangea un regard avec Sasha et hocha finalement la tête en signe d’assentiment.
Vendu.

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