17 Avril 2010Un cliquetis dans la serrure et la porte du pavillon d’Appleby s’ouvrit sur Jonah et ses trois plus jeunes fils. Les Forbes venaient de passer la journée chez les parents de l’enseignant pour l’anniversaire de Virgil et ils rentraient enfin à la maison, la panse plus que pleine.
-Je suis mort, je vais me coucher, souffla Gaby en se déchaussant. Il était assis par terre, sur le tapis de l’entrée et tirait sur ses chaussures des deux mains.
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Pense à te brosser les dents avant d’aller au lit, lui rappela Jonah en allumant d’un sortilège les lampes de la maison jusqu’alors plongée dans l’obscurité.
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Ok…mais avant j’aimerai bien revoir le magnifique papier à lettres qu’a reçu Virgil pour ses dix-sept ans, railla le benjamin de la fratrie. Il jeta un regard en biais à son ainé pour guetter sa réaction.
-Très drôle.Beau joueur, Virgil sortit toutefois le fameux cadeau de tante Geneviève du sac que lui avait prêté sa grand-mère pour le transport -
« ça serait dommage d’abimer un si joli cadeau ! ». Mais bien sûr !
Les trois frères se penchèrent au dessus du papier à entête illustré de corbeaux et de roses noires, le tout ornementé de rinceaux et de volutes. Après plusieurs secondes de contemplation, Gabriel brisa finalement le silence.
-J’étais pas bien sûr mais en fait si : il est vraiment laid.Les garçons s’esclaffèrent.
-J’ai trop aimé ta tête quand tu as ouvert le paquet, souffla alors Casey sans quitter des yeux les corbeaux imprimés,
t’étais trop drôle.-Attends, tu rigoles ? j’ai fait des efforts ! J’ai souri !Virgil avait fait tout ce qu’on attendait de lui, pour une fois. Il avait été poli et gentil parce que ses grands parents s’étaient fait une joie d’organiser cette fête d’anniversaire pour sa majorité.
- Justement ! répondirent à l’unisson ses cadets . Gaby mima un espèce de sourire mécanique censé reproduire
l'expression de Virgil lors de la découverte du papier à lettres.
-Non j’avais pas cette tête.-Bien sûr que si ! Dis lui Casey !-Carrément !Alors que les trois frères se chambraient gentiment, Jonah les observait à distance, appuyé sur le comptoir du bar. Dire que Virgil fêtait ses dix-sept ans, sa majorité. Où était passé ce petit garçon blondinet à qui il avait appris à voler ? Celui qui s’était fracturé la malléole sur un terrain de football et qui avait des affiches du monde de Némo accrochées dans sa chambre ?
Le temps passait si vite… C’était typiquement le genre de phrase toute faite que disaient tous les parents mais en regardant la silhouette efflanquée de son fils, qui le dépassait maintenant de plusieurs centimètres, Jonah eut un léger pincement au cœur. Depuis combien de temps ne s’étaient ils pas parlés tous les deux ? Parlés vraiment. Avec Dean, le dialogue ne s’était jamais rompu : Les conversations entre le père et le fils s’étaient approfondies, enrichies avec les années, au fur et à mesure que son ainé devenait un adulte responsable. Aujourd’hui, ils se considéraient quasiment d’égal à égal mais les choses étaient différentes avec Virgil.
Son cadet n’avait jamais été un gamin facile et ce depuis sa plus tendre enfance mais son comportement s’était encore dégradé ces dernières années.
« La fameuse crise d’ado. » disait-on autour de lui
« ça lui passera. » toutefois Jonah avait l’impression que le malaise était plus profond et qu’ils s’éloignaient inexorablement de Virgil... Son cadet avait multiplié les écarts ces dernières années et leur relation père/fils en avait cruellement pâti. Comme leurs conversations tournaient systématiquement au rapport de force, elles avaient eues tendance à se raréfier voir à se tarir. Bien sûr, ils évoquaient encore ensemble les résultats sportifs mais un fossé invisible semblait s’être creusé entre eux depuis quelques mois maintenant.
Quelle n’avait pas été la surprise de Jonah d’apprendre, de la bouche de Neville, que Virgil envisageait de faire un stage au Centre de Réhabilitation de Skye. En tant que directeur de Maison de son fils, son collègue avait chapeauté sa candidature pensant que Jonah était parfaitement au courant de l’intérêt soudain de son cadet pour les manipulations mentales magiques. A vrai dire, Jonah était tombé des nues. Non seulement il n’avait jamais eu vent de cette passion mais Virgil n’avait absolument pas évoqué ses projets d’avenir avec son père. Jonah en était resté à cette poursuite d’études quelque peu fantaisiste d’année sabbatique prise au sein de Médicomages sans Frontières l’association de son ami Douglas Kane.
Après avoir mené sa petite enquête, Jonah s’était aperçu que son fils avait soigneusement -et secrètement- construit son projet professionnel : Il avait pris des renseignements auprès de Meredith lors de la soirée de St-Valentin –son amie le lui avait dit- et il avait mis son plan à exécution en demandant des lettres de recommandations à ses professeurs et notamment à Thelma. Son intérêt pour Skye était même remonté jusqu’aux oreilles de Daisy qui lui avait visiblement envoyé un courrier visant à soutenir sa candidature.
Jonah aurait dût être fier –Après tout Virgil se prenait enfin en mains- mais il ne pouvait pas s’empêcher de se sentir agacé et surtout inquiet pour son fils.
Agacé, parce qu’il avait été tenu complètement à l’écart de ce projet. C’était une réaction d’orgueil peut-être un peu puérile mais ce sentiment était bel et bien réel. Il savait que son fils l’avait sciemment tenu à distance pour d’obscurs raisons. Virgil était intelligent et il savait exactement quoi faire, quoi dire –et ne pas dire- pour contrarier son père : Jonah était à l’origine de la mise en place des stages en entreprise dès la cinquième année. Il avait porté ce projet depuis septembre et l’avait ardemment défendu au C.A. Il avait pris contact avec les partenaires, rédigé les conventions, acté les partenariats et il se serait fait une joie d’aider son fils à obtenir un stage : De rédiger avec lui un C.V, de l’entrainer pour un éventuel entretien, bref de le soutenir et de l’assister dans sa démarche.
Que Virgil s’arrange pour qu’il soit le dernier informé de sa candidature au Ministère de la Santé était assurément une petite pique déguisée de son fils.
Bien qu’il se sente un tantinet vexé par les cachotteries de Virgil, l’agacement ne prédominait pas dans le cœur de Jonah. Il ressentait surtout une profonde inquiétude et un puissant sentiment de malaise dont il n’arrivait pas à se départir depuis qu’il avait appris cette nouvelle. Virgil à Skye ? Cette perspective était loin de le réjouir.
Qu’allait donc faire son fils dans ce centre si controversé ? Quel intérêt pouvait-il trouver à intégrer ce service ? Les rumeurs de torture pratiquées là-bas étaient-elles arrivées jusqu’aux oreilles de son cadet ?
D’après les journaux clandestins, bon nombre de résistants étaient envoyés à Skye pour se faire lobotomiser et Jonah n’était pas sans savoir que Virgil avait toujours eut un petit côté pernicieux et un intérêt prononcé pour les étrangetés. Avait-il choisi cette orientation à dessein pour assouvir ses plus sombres penchants ? Etait-il intéressé par ces horribles pratiques ou ignorait-il tout la face cachée du Centre de Réhabilitation Mémorielle?
Jonah était incapable de le dire. Il aurait aimé pouvoir assurer, haut et fort, que Virgil ne ferait pas de mal à une mouche mais c’était malheureusement impossible. Son fils lui cachait trop de choses depuis des mois –l’histoire de la lettre à Mildred Magpie en était la plus belle illustration- et Jonah ignorait totalement ce qui se passait réellement dans la caboche de Virgil. Alors qu’il l’observait en compagnie de ces deux jeunes frères il se rendait compte à quel point son fils était devenu un étranger pour lui…
« Hein ‘Pa ! C’est bien vrai ! »Jonah cligna brièvement des paupières et reporta son attention sur Gabriel qui venait de l’apostropher.
« Quoi ? »« Que maman nous récupère demain à sept heures. »« Oui, c’est bien ça. Elle a insisté pour que vous soyez prêts tôt. »Agathe entendait bien profiter un maximum de ses fils et elle ne comptait pas faire cadeau d’une demi-journée à Jonah. Les vacances scolaires d’avril était scindée en deux périodes de garde résolument identiques.
« Sept heures ? Je crois qu’un truc échappe à maman dans le concept même de ce que doivent être des vacances … » grogna Virgil en s’affalant sur le canapé de tout son long. Il attrapa la télécommande de la télévision moldue, l’alluma directement sur une chaine sportive et laissa retomber mollement son bras ballant jusqu’au sol.
« On va fêter l’anniversaire de Virgil chez pépé et mémé et maman veut qu’on l’aide à préparer le gâteau. » expliqua Gaby,
on va faire un framboisier. C’est moi qui ait trouvé la recette mais c’est long à préparer ! »Jonah esquissa un sourire devant l’enthousiasme de Gabriel qui se réjouissait toujours de tout.
« C’est bien. Tu m’enverras un hologramme de ta création ? »« Bien sûr ! Et si je le réussi bien, j’en ferai un pour toi ! »« Huuum, j’adore les framboisiers, répondit Jonah,
mais si vous voulez être en forme demain pour préparer ce festin, filez donc vous coucher ! » Il embrassa Gaby sur le front, donna une légère tape sur l’épaule de Casey et les deux gamins filèrent en direction des chambres . «
Et n’oubliez pas les dents ! »Le père de famille se tourna alors vers Virgil toujours allongé sur le canapé.
« Manchester joue ce soir. J’attends juste le résultat. » souffla ce dernier sans quitter l’écran des yeux .
« Il y a combien ? » demanda Jonah en s’approchant pour s’installer sur le fauteuil voisin.
« 0-0 pour le moment. »Le chronomètre en haut de l’image indiquait soixante cinq minutes de jeu. Jonah avait donc une bonne demi-heure avant que Virgil n’aille au lit. C’était peut-être l’occasion rêvée pour essayer d’avoir une conversation avec lui, et, peut-être , tenter de le mettre en garde contre Skye, songea-t-il en observant le match sans le regarder vraiment: Ils avaient passé une journée sympathique, Virgil semblait détendu et ils étaient seuls.
« Tu as passé une bonne journée ? » s’enquit-il alors, en reportant son attention sur le visage de son fils, éclairé par la lumière bleutée du téléviseur.
Virgil était affalé devant la télévision, le regard rivé sur la retransmission du match. Manchester United jouait pour la première place au championnat ce soir et le Gryffondor espérait bien que son équipe préférée allait s'imposer le jour de son anniversaire... Ce cadeau était nettement plus réjouissant que du papier à lettres, il fallait bien l'avouer. Tout concentré qu'il était sur la rencontre, il n’avait pas remarqué qu’il se trouvait dorénavant seul avec son père dans le salon du pavillon d’Appelby. Il fallut que ce dernier l'interpelle pour que Virgil se rende compte de l'absence de ses cadets qui avaient déjà rejoints leurs chambres à coucher.
"Hum Hum... » Souffla-t-il après avoir regardé quelques instants autour de lui à la recherche de ses deux frères.
Leur présence systématique évitait que le conflit latent entre Jonah et Virgil ne s’envenime. En effet, dès qu'ils se retrouvaient seuls tous les deux ils finissaient immanquablement par se disputer. Gabriel et Casey remplissaient à merveille leurs rôles de chaperons : Gaby monopolisait tellement les conversations que Virgil pouvait rester silencieux des heures durant, et ainsi, ne pas s’attirer les foudres de son paternel, quant à Casey, ils avaient tous pu remarquer qu’il était perturbé depuis l’article de Miniplettes concernant son père et sa directrice de maison. Depuis, c’était un peu comme si Jonah et Virgil avaient passé un contrat tacite : Pas de disputes devant les plus jeunes. Toutefois, ce soir, c’était la première fois qu’ils se retrouvaient en tête à tête depuis le début des vacances. Conscient de cet état de fait, Virgil opta pour une posture légèrement moins détendue. Il se redressa et s’assis dans le coin du canapé, son bras tenant toujours la télécommande posé sur l’accoudoir. Sur ses gardes, il attendait la remarque suivante de Jonah. Allait-elle porter sur Magpie ? Sur les rumeurs concernant le trafic de Volubilis ? Sur sa prétendue relation avec Corrigan ?
Virgil savait comment fonctionnait son père: il commençait par poser quelques questions anodines avant de rentrer dans le vif du sujet...
-Mamie a trouvé que tu avais grandi ces derniers mois...- Mouais, je sais, elle a voulu me mesurer, souffla Virgil sans quitter des yeux l’attaquant de Manchester,
j’ai pris douze centimètres. Apparemment.Il avait accepté de jouer les rats de laboratoire pour sa grand-mère. Il s’était posté devant la toise jaunie par le temps et il avait attendu docilement, le dos bien droit, qu’elle marque sa nouvelle taille sur l’échelle.
Mais quelque chose lui disait que ce n’était pas vraiment de sa poussée de croissance soudaine dont son père voulait lui parler et la véritable question ne tarda pas à arriver sur le tapis…
-Elle m’a demandé ce que tu projetais de faire après Poudlard …- HumHum,…moi aussi elle me l’a demandé.-Et tu as répondu…. ?Virgil reporta son attention sur son père un instant avant de river son regard de nouveau sur le téléviseur.
-…j’ai répondu que je ne savais pas encore.-Et la demande de stage à Skye, tu lui en as parlé ?L’information lui était donc arrivée aux oreilles. Pas trop tôt. Par quel biais ? Virgil n’en avait aucune idée. Que ce soit Corrigan, Londubat ou Mérédith qui ait vendu la mèche, l’adolescent éprouvait une satisfaction malsaine à l’idée que son paternel ait appris ses projets d’avenir de la bouche de quelqu’un d’autre que lui. Il masqua toutefois son contentement derrière son attitude nonchalante que le caractérisait si bien.
-Je n’ai pas jugé utile d’aborder ce sujet avec elle.-Et avec moi ? Tu n’as pas jugé utile de l'aborder non plus ?Le ton de la phrase était sans équivoque : Jonah était contrarié. Virgil poussa un profond soupir et roula ostensiblement des yeux.
- Tu comptes me faire une scène parce que je me suis débrouillé tout seul ? C’est pas ce que tu voulais ?Virgil avait le chic pour tenter de retourner les situations à son avantage et reporter la culpabilité sur son interlocuteur. Cela ne marchait pas à tous les coups mais il essayait systématiquement de renverser les rapports de force. Jonah connaissait assez son fils pour ne pas entrer dans son jeu. Le père de famille ferma donc brièvement les paupières, le temps de formuler sa réponse visant surtout à maintenir le contact avec son cadet. Dans un premier temps, du moins.
-Si, c’est ce que je voulais, admit-il,
d’après les échos que j’ai eus, tu as tout mi en œuvre pour obtenir ce stage… Amélioration net des résultats scolaires, refonte partielle du comportement.
-…mais ?Virgil n’était pas dupe, il savait que cette série de compliments avaient été prononcés à dessein.
-… Pourquoi Skye ?L’adolescent haussa légèrement les sourcils d’étonnement. Il s’était attendu à ce que son père s’interroge sur les raisons que l’avaient poussées à garder ces démarches secrètes et non pas sur la légitimité de son projet.
-Parce que ça me plait.- Qu’est ce qui te plait ? insista Jonah.
-Les manipulations mentales magiques, répliqua Virgil, quelque peu sur la défensive.
Jonah passa une main dans sa barbe. Comment faire comprendre à Virgil que le Centre de Réhabilitation Mémorielle était plus que controversé sans toutefois lui révéler le contenu des journaux clandestins. De telles aveux pourraient le mettre en danger.
-Sais-tu au moins en quoi consiste le travail des employés du Centre de réhabilitation ?Lobotomiser les personnes. Les torturer mentalement. Effacer leurs mémoires.
-Non et c’est bien pour ça que je veux obtenir un stage là bas, insista l’adolescent qui se redressa dans son fauteuil.
-Peut-être que tu devrais commencer par faire un stage auprès des Oubliators, ils pratiquent la Magie liée à l’Esprit eux aussi…
-Enchainer des sortilèges d’Amnésie sur des pauvres moldus qui n’ont rien demandé à personne? Génial. Souffla Virgil avec ironie,
T’appelles ça des Manipulations mentales ? Moi j’dirais plutôt que c’est un putain de travail à la chaine.Oubliator, le métier le plus surcoté de la Justice Magique !
-Pas la peine d’être vulgaire, grogna Jonah,
c’est juste que le domaine que tu as choisi est très complexe et…-C’est quoi le problème, papa ? le coupa Virgil,
j’ai l’impression que tu veux me dissuader.Il ne comprenait pas l’attitude de son père. Certes, il s’attendait à ce qu’il soit vexé d’avoir été tenu éloigné de ses démarches –Virgil avait tout fait pour, d’ailleurs- mais il n’aurait jamais imaginé que son choix de cursus pose problème. La magie liée à l’Esprit était un domaine prestigieux. Ceux qui réussissaient sur ce terrain faisaient partie de l’élite sorcière -Dumbledore, Rogue, Harry Potter, pour ne citer qu’eux- et Virgil était persuadé qu’il avait de bonnes dispositions, lui aussi.
« Tu crois que je vais me planter ? Que je suis pas assez bon ? C’est ça ?« Mais non ça n’a rien à voir ! répondit Jonah, Son fils ne pouvait tout simplement pas collaborer aussi étroitement avec le régime, c’était du suicide. Que se passerait-il le jour où il verrait, de ses yeux, les exactions de Marchebank. Aurait-il la possibilité de faire machine arrière, ou pire, prendraient il part, sciemment, à ces tortures ? Jonah refusait d’envisager ce dilemme ne serait-ce qu’une seconde. Il devait parvenir à faire changer d’avis son fils.
« C’est juste que c’est dangereux, Virgil, très dangereux ! »- Pourtant ça ne te dérange pas quand c’est Mérédith ou ta petite copine qui pratiquent les manipulations mentales magiques, asséna-t-il du tac au tac.
Tout le monde savait à Poudlard que la magie liée à l’Esprit était le domaine de prédilection de Thelma.
-Laisse le Professeur Corrigan en dehors de ça._Donc, c’est bien ta copine.-Ce n’est pas le sujet de notre discussion.-Non, tu as raison, le sujet de notre discussion c’est que, quoi que je fasse, tu ne seras jamais content, jamais satisfait de mes choix. Virgil secoua la tête de gauche à droite peinant à contenir le sentiment de colère qui irradiait tout son corps. Son père ne pouvait-il pas être fier de lui, une fois dans sa vie ?Virgil se leva de son siège et reprit un ton plus haut,
Je postule pour un stage dans le département le plus prestigieux du Ministère et toi tu trouves encore des choses à redire. Qu’est ce qui est dangereux ? Que je m’épanouisse dans ce que je fais ?-Que tu intègres Skye.-Pourquoi ?Jonah aurait pu répondre
*Parce que tu risques, un jour, d’avoir à torturer ton propre frère ou ton propre père. Voila pourquoi.* mais il ne le fit pas. Evoquer la Résistance avec Virgil était tout bonnement impossible. Il n’était pas encore assez mature, ni digne de confiance, pour entendre les révélations de son père. Jonah aurait voulu être totalement sincère avec lui, vraiment, mais les événements de ces derniers mois le poussait à garder ces révélations pour lui. Pour leur bien à tous. Au lieu de ça, il resta silencieux quelques instants et finit par dire.
_Les expériences qui y sont menées posent des questions, au niveau éthique. Certaines sont particulièrement immorales… commença-t-il, précautionneusement.
_La Magie EST immorale, elle l’a toujours été ! La légilimancie, les filtres d’amour, le polynectar
Je vois pas pourquoi, d’un coup, ça te pose un problème ! Je crois plutôt que tu cherches un prétexte pour que je change d’avis !_ Ce que tu peux être égocentrique ! s’agaça Jonah en pressant ses tempes de la pointe de ses doigts,
Tout ne tourne pas autour de ton petit nombril Virgil ! ajouta-t-il en se levant à son tour de son siège,
Quand vas-tu comprendre ça et grandir un peu ! Tu as dix sept ans, par Merlin, comporte-toi en adulte !»Virgil accueillit l’ultime banderille de son père en silence. Les deux Forbes se toisèrent un instant.
« Je vais me coucher. »« Pourquoi est-ce que tu fuis la discussion ? demanda Jonah qui retint in extremis un
*on dirait ta mère.* peu flatteur.
« Parce que c’est pas une discussion, papa ! s’emporta Virgil,
Tu veux juste imposer ton point de vue et quand je te demande des explications tu ne m’en donnes pas des valables. J’ai juste droit à un « Conduis toi en adulte ! » L’adolescent fit quelques pas dans la pièce pour retrouver son calme.
Alors tu vois, c’est ce que je fais, reprit-il un ton plus bas,
Je vais suivre la route que je me suis choisie et je ne vais pas me laisser dicter mes choix par qui que ce soit. Il laissa passer un instant de silence et ajouta :
Même pas par toi. » Virgil attrapa la télécommande sur l’accoudoir et pressa le bouton pour éteindre la tv. Il jeta mollement l’appareil sur le canapé et il se dirigea vers le couloir qui desservait le reste de la maison. Là, vêtus de leurs pyjamas bariolés et tapis dans la pénombre du couloir, Casey et Gabriel se figèrent en voyant débarquer leur frère. Ils levèrent des yeux anxieux vers lui mais ce dernier ne leur accorda pas un regard. Il passa entre eux, pénétra dans sa chambre et referma la porte derrière lui sans la claquer.
Virgil fit quelques pas dans l’obscurité et s’arrêta au milieu de la pièce. Aucune larmes ne franchirait ses paupières, se promit-il en ravalant difficilement la boule qui s’était formée dans sa gorge. Il ne ferait pas ce plaisir à son père. Il allait décrocher ce putain de stage et même mieux : Devenir indispensable à Skye.
OS terminé