La fin du mensonge [James, Clara & Emma]

Une fois n'était pas coutume, Clara pestait. Elle aurait du être contente, pourtant. Stefan venait de lui envoyer une lettre lui confirmant qu'ils avaient été sélectionnés pour la finale du concours du Fil d'Or, qui se déroulerait mi-juin. Sa mère lui avait aussi écrit, une longue lettre pleine de superlatifs flatteurs, contenant le mot "fière" une bonne dizaine de fois. Elle lui promettait de bien la représenter si elle gagnait, puisqu'elle était coincée à Poudlard. Sauf que voilà, Clara ne voulait pas que sa mère vienne prendre le trophée à sa place lors de la cérémonie. C'était Stefan qui avait créé la robe, c'était à lui de venir prendre ce qui lui revenait de droit. Elle devait le dire à sa mère, mais elle avait trop peur de sa réaction. La lettre qu'elle avait reçu l'avait touchée en plein coeur. Jamais Elisabeth ne lui avait témoigné autant de reconnaissance, et Clara ne voulait pas détruire cela d'un coup...

Elle était donc en plein dilemne et aurait voulu s'en ouvrir auprès de James. Sauf qu'autre chose contrariait ses plans, et cette chose, où plutôt ce quelqu'un, c'était Emma Blackbonnes. Clara avait servi un mensonge à tout Poudlard pour protéger son amies des rumeurs qui courraient sur son compte après la venue des Aurors la veille, mais celle-ci l'avait scrupuleusement évitée depuis. Elle l'avait fait tant et si bien que Clara n'avait même pas pu la mettre au courant du mensonge qu'elle avait inventé. Bien sûr, la jeune Guipure aurait pu croiser Emma dans le dortoir, et la réveiller pour qu'elle lui explique tout. Mais elles n'étaient pas seules, et la désagréable présence de Cécilya Richardson l'avait dissuadée d'agir ainsi.

Ce matin, Emma s'était encore éclipsée trop tôt, et entre ça et la réception des lettres, Clara ne savait plus où donner de la tête. Comme elle était incapable de faire un choix, elle se décida à chercher James, qui saurait lui dire quoi faire. Elle se reposait beaucoup sur lui ces derniers temps. Elle faisait enfin confiance à quelqu'un et cela lui faisait beaucoup de bien.

"James!" cria-t-elle en le rattrapant à la sortie de la Grande Salle. "Faut que j'te parle. Ca va, au fait?"

Elle l'accompagna vers son premier cours de la journée, ne sachant par quoi commencer, et allait lui tendre la lettre de sa mère lorsqu'ils percutèrent presque Emma à l'angle d'un couloir.

"Ah! Emma! On te cherchait!"

Enfin, elle la cherchait, mais James allait bientôt la chercher aussi, de toute façon. Clara était une jeune demoiselle très compréhensive, diplomate même: elle n'avait pas pressé Emma de lui dire la vérité au sujet du professeur Sorden, elle ne s'était pas jetée sur elle devant Cécilya pour savoir ce qu'il se passait. Mais après avoir menti à la totalité de l'école pour sauver sa réputation, elle estimait normal d'avoir au moins un début d'explication. Elle n'exigeait même pas qu'Emma lui dise tout, elle-même gardait beaucoup de choses par devers elle. Juste quelque chose, qu'elle arrête de l'éviter, ne serait-ce que le temps qu'elle lui explique la situation. Heureusement, son amie semblait avoir compris car elle les entraîna dans une petite salle que Clara ne connaissait pas. Elle avait l'air particulièrement confortable, et si elle n'avait pas été si curieuse de savoir ce qu'il se tramait, elle aurait bombardé Emma de questions: comment connaissait-elle cette salle? Pourquoi ne leur avait-elle jamais rien dit? Au lieu de cela, Clara se contenta de s'enfoncer dans l'un des fauteuils moelleux.

Emma n'avait vraiment pas l'air dans son assiette. Clara savait que son amie était souvent honteuse pour des choses qui n'avaient pas lieu d'être, aussi n'était-elle pas trop anxieuse. En fait, elle voulait juste avouer son mensonge à James avant qu'Emma ne leur explique la situation, mais cette dernière ne lui en laissa pas le temps. Et son récit était tel que Clara oublia bien vite ses propres péchés. Le professeur Sorden l'avait empoisonnée en lui donnant une potion illégale! Elle lui avait fait croire que des esprits lui parlaient pour lui faire commettre un crime à sa place. C'était odieux! C'était vil! C'était dangereux! Pourquoi avait-elle fait ça? Pourquoi vouloir tuer une innocente petite fille, après tant d'horribles machinations? Emma n'avait pas terminé son récit depuis deux secondes que Clara, oubliant tout masque et toutes convenances, bondissait de son fauteuil pour s'agenouiller devant elle.

"Oh mon Dieu, ma pauvre Emma!" s'écria-t-elle, complètement horrifiée devant ce que le professeur avait fait à son amie. Elle les mains pour la réconforter. Elle ne savait pas quoi dire, ne réalisant pas l'ampleur de la chose ni ce qu'Emma devait ressentir. Son instinct et sa raison lui soufflaient juste que ça devait être affreux, mais affreux comment, elle était bien en peine de l'imaginer. Tous ces cauchemars, pour finalement découvrir qu'elle avait été obligée de tuer la petite Flora! Et devoir avouer ça trois fois de suite, au professeur Adamson, aux Aurors et maintenant à eux. Clara n'aurait pas été capable d'en faire le millième. "C'est... c'est courageux ce que tu as fait. Tu devrais être à Gryffondor!" s'exclama-t-elle maladroitement, ne sachant pas quoi dire pour consoler son amie. "Je ne vois pas pourquoi on ne voudrait plus être tes amis, hein, James?"

Elle jeta un oeil au Poufsouffle avant de réaliser un petit détail. Elle avait cours d'Arithmancie ce matin et elle avait vu Ana Sorden parfaitement sereine prendre son petit déjeuner à la table des enseignants... Réalisant qu'elle avait passé trois jours avec une meurtière dans un pays étranger, Clara frissonna. Et si elle l'avait forcée elle aussi à faire des choses horribles, puis à oublier? Si elle avait mieux lancé son Oubliettes? Effrayée, elle se releva et couina:

"Mais pourquoi ils ne l'ont pas arrêtée tout de suite?! Elle devrait déjà être à Azkaban!"

« T’as déjà terminé ? » s’étonna un de ses camarades de dortoir, en le voyant se lever.

« Ouais ! Et crève pour que je t’attende. » répondit James en contemplant l’assiette encore remplie de son ami, qui mangeait définitivement bien trop lentement.

« Et tu comptes faire quoi ? »

Le regard du jeune homme s’égara vers les tables des Serpentard et des Serdaigle, tandis qu’il réfléchissait.

« Va donc retrouver tes copines, lâcheur ! » plaisanta-t-il, s’attirant un regard faussement noir de James, alors qu’il s’éloignait.

Il retrouvait les personnes qu’il voulait, non mais, songea-t-il en prenant le chemin du hall, et il avait bien envie de retrouver Amely ou Clara. Il avait passé toute la journée d'hier avec Ashley, afin de déterminer les détails de la fête de fin d’année. Le thème était trouvé, et ils ne leur restaient plus qu’à régler quelques petites choses pour que tout soit en place. Le Poufsouffle espérait réellement que la soirée aurait du succès, vu le temps qu’il avait passé avec le Gryffondor à définir le thème… Il fallait dire qu’ils s’étaient retrouvés de nombreuses fois sans parvenir à trouver quelque chose. Mais finalement, il en était assez fier. C’était sympa, léger, et accessible à tous. Reste à savoir si cela plairait… Plongé dans ses pensées, il ne sentit pas Clara s’approcher de lui et sursauta lorsqu’elle le salua.

« Salut Clara ! Ouais ça va, et toi ? » demanda-t-il en retour avant de jeter un regard curieux : « Qu’est-ce que tu veux m’dire ? »

Commençant à marcher à ses côtés en direction de son premier cours de la journée – à savoir Divination – le jeune homme glissa un regard vers la Serpentard, se demandant ce qu’elle pouvait bien vouloir lui confier. Interrogateur, il allait lui reposer la question, lorsqu’ils croisèrent Emma, et que Clara s’exclamait qu’ils la cherchaient. Il fronça les sourcils. Ils cherchaient Emma ? Pourquoi avait-il l’impression de ne rien comprendre à la situation ? Il salua toutefois la jeune fille et répondit à sa question par l’affirmative avant de lui retourner la question. Il avait été désolé d’apprendre qu’elle avait été victime d’un cambriolage, mais n’avait pas pu lui témoigner sa compassion depuis. Aussi il comptait bien profitait de l’occasion pour le faire ! Cependant, Emma semblait plutôt vouloir leur parler, et à l’écart de préférence. Se laissant entraîner à la suite de Clara, James entra dans une petite salle, et fronça les sourcils en découvrant l’intérieur. Cependant, il ne pu pas y réfléchir bien longtemps, et se laissa tomber sur un fauteuil à côté de Clara.

« Tu veux parler du cambriolage ? » demanda James, perplexe.

Ce n’est qu’une fois qu’elle prit la parole, qu’il comprit. Il n’y avait jamais eu de cambriolage, rien de ce que Clara avait pu lui raconter n’était la vérité… La vérité était toute autre. Toute autre, et horrible. Abominable, monstrueuse, même. Il observa Emma, incrédule, alors qu’il pâlissait. Comment était-ce possible ? Non ! Non, il ne pouvait pas y croire ! Comment pouvait-on faire ça à Emma ? Comment le professeur Sorden pouvait-elle avoir fait ça ? Mais c’était impossible ! Ce n’était pas digne d’un professeur, ce n’était pas digne d’un être humain, même d’une espèce comme Sorden ! Et Emma ? Et la petite fille qui avait trouvé la mort dans cet incendie ? Il se prit la tête dans les mains, et ferma les yeux. Comment cela pouvait être réel ? Ce n’était pas juste, pour personne ! Pourquoi tant de machinations, de complots ? Et Emma, qui avait été obligée de tuer cette Flora, cette enfant dont tous les journaux parlaient ! On l’avait obligé à la tuer, à quinze ans ! Quinze ans.

Il resta étrangement immobile, alors que Clara se précipitait vers leur amie. Mais comment réagir ? Mais que dire, mais que faire ? Comment pouvait-il prétendre imaginer ne serait-ce qu’une seule seconde ce qu’Emma pouvait bien ressentir en cet instant précis ? Il ne pouvait pas, il ne pourrait jamais. Et ça le rendait malade de rester là, à ne rien faire, alors que son amie souffrait. Et il en était malade, et il en aurait hurlé de rage. Il déglutit, avant de se lever pour rejoindre les deux filles, au même moment où Clara vantait le courage d’Emma. Mais comment la consoler – si encore cela était possible ? Il resta là, à l’observer. Emma, si petite, si fragile. Pourquoi lui infliger ça ? Pourquoi elle ? Il ressentit une vague de haine à l’encontre du professeur Sorden, et serra les poings. Ce n’est que lorsqu’il croisa le regard de son amie qu’il se détendit. Parce qu’hurler ne servirait à rien, parce que s’indigner non plus. Il se sentit impuissant, et prit place à côté d’elle. Hésitant, il finit par passer un bras par-dessus son épaule pour l’attirer contre lui.

« Ce n’était pas ta faute. » finit-il par déclarer. « Et bien sur, que je reste ton ami, Emma ! »

Il la contempla gravement, avant de renchérir les dernières paroles de Clara :

« Je suis d’accord, qu’est-ce qu’elle fait là, Sorden ? »

Il sentit un frisson le parcourir, alors qu’il croisait le regard de sa meilleure amie. Et s’ils n’étaient même plus en sécurité, dans l’enceinte de Poudlard ?

"Rassembler des preuves? Encore! Voir tes souvenirs ne suffit pas?! Ils sont complètement in-con-scients!"

Clara était scan-da-li-sée. On ne laissait pas une tueuse en série dans une école, et encore moins quand elle fréquentait quotidiennement l'une de ses victimes par ricochet. D'ailleurs, le professeur Sorden n'était pas aussi maligne qu'elle ne le croyait. Elle aurait été à sa place, elle se serait arrangé pour qu'Emma n'ait jamais l'occasion de parler, au lieu de prendre le risque que son sortilège fonctionne mal et qu'elle se retrouve avec les Aurors sur le dos. Cette pensée la fit frissonner. Dans le genre manipulatrice, Clara se débrouillait aussi plutôt bien. Heureusement qu'elle avait un bon fond, se félicita-t-elle intérieurement, sinon elle aurait pu devenir comme Sorden. Tous les Serpentards étaient de chouettes gens innocents, comparé à elle. Emma leur confia alors qu'elle avait peur que l'enseignante apprenne tout ce qu'elle avait dit.

"Ne t'inquiète pas, on sera toujours avec toi."

Clara comprenait parfaitement la peur de son amie, c'était pour ça qu'elle venait de lui dire qu'il ne faudrait plus la laisser toute seule jusqu'à ce qu'ils soient débarassés de cette horrible bonne femme. Les aurors n'avaient pas fait preuve de jugeotte en embarquant Emma devant toute la grande salle, sous les yeux du professeur Sorden. Franchement, les gens du ministère manquaient de tact et de délicatesse. Restait à espérer que le contenu de l'entretien resterait secret jusqu'à l'arrestation de l'arithmancienne. Car Clara était certaine qu'ils l'arrêteraient. Sinon, le professeur Adamson la virerait quand elle serait élue directrice, c'était certain. Il ne restait plus beaucoup de temps à passer dans le même bâtiment qu'Ana Sorden, c'était ce qu'il fallait se dire. Et peut-être que pour une fois, un mensonge de Clara s'avérerait utile...

Son sourire fadit légèrement lorsqu'elle se décida à expliquer ce qu'elle avait fait. Elle avait promi à James qu'elle ne lui mentirait plus, et elle l'avait fait devant toute l'école. Belle façon de tenir ses engagements! Mais le bien-être d'Emma passerait avant le sien, décida Clara. Elle ne pouvait cependant pas cacher son appréhension et elle se releva légèrement, se dégageant de l'étreinte de James et Emma. Elle avait peur qu'il la repousse.

"Justement, en parlant de Sorden qui apprend la vérité... J'ai peut-être fait quelque chose qui pourrait t'aider, Emma, si... euh, si les aurors sont discrets. Voilà, en fait hier, James, quand je t'ai dit ce qu'il arrivait à Emma, j'ai... menti."

Enfin, ça, il devait déjà s'en douter. Elle joignit ses mains, fixant plus James qu'Emma et commença son récit.

"Tout le monde se demandait pourquoi ils étaient venus te chercher, et ils imaginaient plein de choses... farfelues. Je n'aimais pas ce qu'ils disaient et les rumeurs, ça peut aller loin alors... enfin je suis venue te voir, James, et je t'ai dit cette fausse histoire pour que tout le monde l'entende et arrête de dire des bêtises... Emma, j'ai raconté que ta maison avait été cambriolée pendant les vacances et que tu étais la seule à avoir vu les cambrioleurs, et qu'ils t'emmenaient pour que tu reconnaisse un suspect... Vous ne m'en voulez pas?"

Clara avait pris une toute petite voix à la fin de son récit, et se tordait les mains, mal à l'aise, sautant d'un pied sur l'autre, espérant qu'ils ne lui comprendraient. Elle n'avait pas honte de ses actions, et elle le referait, mais elle préférait tout de même avoir la bénédiction des concernés.

« Evidemment qu’on sera toujours là pour toi. » répéta James, faisant écho aux paroles de Clara.

Il posa sur Emma un regard inquiet. Son amie avait vécu une année terrible, sans que personne ne s’en rende compte. Comment avaient-ils pu ne pas le remarquer ?! Ils auraient dû se douter de quelque chose, qu’elle n’allait pas bien, qu’elle dormait mal, qu’elle allait souvent voir le professeur Sorden… Mais non, rien. Rien. Il avait tellement été obnubilé par son année, sa dispute avec Clara, la préparation de la soirée de fin d’année avec Ashley, qu’il ne s’était même pas soucié de ce qu’il pouvait arriver à Emma. Intérieurement il se maudit. Stupide, il avait été stupide ! Mais le mal était fait, et ce n’était pas en se morigénant que ça allait changer. Il se reprit, releva la tête, et serra la jeune fille contre lui, avant de passer son bras par-dessus ses épaules. La peur qu’elle avait dû ressentir, la honte aussi… C’avait dû être horrible, tout bonnement horrible. Et il n’était même pas capable de se l’imaginer, tant cela lui semblait grand, immense. Il soupira. La situation le dépassait. Mais il savait qu’il devait être là pour son amie, et qu’il devait l’aider à surmonter tout ça.

Mais, pouvait-on surmonter cela, un jour ? Il n’en savait rien, mais l’espérait de toutes ses forces. Emma était une fille adorable, gentille, pas du genre à se faire remarquer. Pourquoi cela lui était arrivé, à elle ? Sorden l’avait-elle choisi en particulier, ou cela aurait pu être aussi bien Clara, qu’Amely, ou bien Ashley, ou encore lui ? Il frissonna, alors qu’une flopée de jurons lui traversait l’esprit à l’encontre du professeur Sorden. S’énerver ne servirait à rien, songea-t-il en se calmant. Son rôle à lui était de soutenir Emma, pour l’instant. Il s’insurgerait avec Clara plus tard, décida-t-il. D’ailleurs, cette dernière venait de prendre sa parole, lui avouant son mensonge. Son mensonge ? Il fronça les sourcils, avant de se souvenir de cette histoire de cambriolage. Il avait complètement oublié, après tous ces aveux. Il reporta son attention sur Clara, qui commençait son récit.

Il sourit devant le ton timide de sa meilleure amie, et resta silencieux quelques instants. Il lui avait fait promettre de ne plus lui mentir, quelques mois auparavant. Mais comment pouvait-il lui en vouloir, songea-t-il en posant sur la jeune fille un regard affectueux. Ce qu’elle avait fait partait d’une bonne intention, elle voulait éviter à Emma les rumeurs qui auraient pu courir sur elle. De son bras libre, il attrapa le poignet de la jeune fille et se pencha vers elle pour l’embrasser sur la joue en riant.

« Je ne t’en veux pas, pour ma part, Clara ! » s’exclama –t-il en redressant.

Il haussa les épaules avant de se justifier :

« Ça partait d’une bonne intention. Je dirais même que tu as bien fait, de faire ça. » avoua-t-il.

Certes, il n’était pas toujours pas pour le mensonge. Mais Clara avait bien agit, et c’était le plus important, n’est-ce pas ? C’était pour le bien d’Emma, et c’était un acte honorable. Lui aussi savait que, si on venait lui poser la question à propos de l’entrevue de son amie avec les Aurors, il répéterait sans ciller cette histoire de cambriolage. Tant pis si c’était un mensonge, tant pis s’il détestait mentir. C’était pour Emma, une des ses amies. Il y avait bien des valeurs qu’il pouvait oublier, pour venir en aide à quelqu’un.

« Mais toi Emma… Ça va aller ? » demanda-t-il ensuite, un peu maladroitement.

James ne lui en voulait pas. James ne lui en voulait pas. James ne lui en voulait paaaas! Une fois l'information assimilée, Clara pu réagir, fermer la bouche et arrêter de fixer bêtement le Poufsouffle. Un sourire de soulagement se dessina sur ses lèvres, et comme le garçon lui expliquait succintement les raisons de son pardon, elle se détendit d'un coup. Elle savait qu'elle avait eu raison d'agir de la sorte, elle le savait depuis le début. Mais depuis que James était au courant de sa vraie nature, elle s'interrogeait en permanence sur l'opportunité, le sens moral, l'endroit où étaient les limites. Elle savait qu'elle-même les plaçait très loin, et James très près, et trouver le bon équilibre était un exercice délicat. Aussi, heureuse de voir que pour une fois elle avait agit en accord avec le sens moral commun.

Mais son soulagement fut de courte durée, car même si Emma assura être heureuse de ce mensonge, la suite de son discours mit Clara profondément mal à l'aise. La jeune Blackbonnes violait les directives des Aurors parce qu'elle ne voulait pas leur mentir, leur dissimuler des choses. Elle le faisait perpétuellement et jusqu'à récemment, n'avait jamais eu de scrupules. Encore aujourd'hui, ce n'était que lorsque James la rappelait à l'ordre qu'elle concevait du remord ou de la culpabilité pour ces mensonges. Et Emma, qui avait légitimement caché quelque chose, s'en voulait à ce point de l'avoir fait? Mais que fichait-elle à Serpentard?

Non, la situation n'avait rien à voir, décida Clara, qui souhaitait se dédouaner et non s'ajouter un énième dilemme éthique. Emma avait été manipulée, elle avait caché des choses par honte, cela avait failli lui coûter la liberté - peut-être la vie, si elle n'avait pas réagi à temps! Elle était marquée, traumatisée par son expérience et le mensonge l'avait enfermée dans une spirale de solitude. Clara était tout le contraire: ses affabulations la rendaient populaire, sociable, contruisaient sa vie au lieu de la détruire. Le malaise d'Emma n'avait rien à voir avec ses propres dissimulations, c'était incomparable.

Ce problème réglé, le rythme cardiaque de Clara retrouva un rythme normal, et elle pu se concentrer sur autre chose que sa petite personne. Emma commença par dire que oui, ça allait aller, et Clara n'en cru pas un mot. Elle avait raison, d'ailleurs, puisqu'Emma parlait d'affronter ses parents. Affronter? Mais quel genre de parents avait-elle? Certes, Elisabeth et Erik Guipure n'étaient pas des parents modèles, mais leur fille était raisonnablement sûre de pouvoir compter sur leur soutien. Pourquoi les parents d'Emma ne feraient-ils pas de même? Surtout qu'elle était leur unique fille! Clara fronça les sourcils et s'approcha à nouveau de son amie, reprenant sa position à genoux du départ.

"Tes parents seront là pour toi, Emma, ce sont tes parents. Ils ne vont pas t'accuser, voyons."

Du moins, elle espérait que c'était le cas. Clara voyait les obstacles qui attendaient Emma, qui l'empêcheraient de reprendre une vie normale. On allait l'interroger, sans prendre de gants, l'accuser, la disculper, la forcer à affronter une fois de plus la terrible Ana Sorden durant le procès - si procès il y avait, puisque les Aurors ne semblaient pas pressés de l'arrêter, cette horrible bonne femme. Son secret allait être dévoilé dans la presse - le mensonge ne ferait pas long feu - et pendant des mois, elle devrait affronter les autres et les journalistes. Et si ses parents n'étaient pas là pour l'aider... Clara était dépassée par toutes les implications des actes de sa camarade.

"On est là pour toi, Emma, et on sera là tout le long."

Clara pensait ce qu'elle disait, tout en se demandant si elle serait capable de rester à ses côtés sans faillir. Elle s'engageait pour de longs mois et malgré toute sa bonne volonté, elle se savait versatile et peu apte à supporter une pareille pression. Elle ferait des efforts, pourtant. Tout ce qu'elle pourrait. Un instant, Clara oublia les difficultés qui l'attendaient chez elles, tapies dans l'ombre de la famille Guipure. Elle se donna pour mission de protéger Emma, de ne jamais la laisser seule jusqu'à ce que tout soit terminé. Son amie n'aurait pas une seule occasion de ruminer, se promis-elle. Restait à espérer que cette promesse puisse être tenue.

"Toujours, promis juré."