Je crois que j'ai fait une bêtise [Margot & Emma]

30 mai 2007

Emma faisait tourner sa fourchette dans sa purée sans en avoir avalée la moindre bouchée. Cela faisait presque deux semaines qu'elle avait perdu l'appétit, ses problèmes de sommeil était résolu puisqu'elle s'était obligée à aller voir l'infirmière après sa conversation avec Clara. Elle ne voulait pas que son amie s'inquiète pour elle. Elle ne voulait pas qu'elle soit mêlée à toute cette histoire. Elle aurait tellement voulu ne pas savoir, elle était mieux finalement avant. Lorsqu'elle s'interrogeait mais qu'elle ne savait pas avant qu'elle ne prenne une potion sans rêves pour dormir. Elle avait retrouvé le sommeil sans aucun problème, avait passé de très bonnes vacances sans soucis, avait soigneusement caché la potion aux yeux de ses parents et avait fait comme si tout allait bien. Et tout allait bien, elle n'avait plus de flashs étranges puisque plus de rêves, elle en avait donc conclue qu'elle s'était inquiétée pour rien, qu'elle n'avait rien fait et que sa fatigue l'avait légèrement rendu paranoïaque et l'avais plus déboussolée qu'elle ne l'avait pensé.

Cependant la trêve ne dura pas longtemps, la rentrée fut bientôt là et les flashs se firent plus violents. Mais ils n'avaient plus lieu la nuit, désormais elle voyait des images de brasier pendant les cours, lorsque son esprit vagabondait vers autre chose. Elle entrevoyait avec plus de netteté certaine scène, le visage d'Ana Sorden revenait régulièrement, les flammes, une fiole, des cris. Mais personne ne semblait avoir remarqué ses légers regards un peu perdu après ses visions. De toute manière personne ne prêtait attention à elle et dans la situation présente, elle trouvait ça plutôt arrangeant. Elle n'aurait pas voulu être prise pour une folle. Elle voulait juste être normale et elle ne comprenait pas ce qu'il lui arrivait. Elle n'était pas allé voir l'infirmière, elle se serait inquiétée, l'aurais sûrement jugée folle et envoyée à Sainte Mangouste mais elle n'était pas folle, elle en était sûre. Il y avait juste quelque chose qu'elle n'était pas encore capable de désigner.

Et pour cause, le mois de mai était déjà bien entamé, elle étudiait sous un arbre à l'abri du vent, Belzébuth sur les genoux lorsque d'un coup, elle revécu la sortie à Pré-au-Lard. Elle revit son rêve dans les moindres détails, sa rencontre avec Flora, l'attente, la dispersion de la potion au sol, l'embrasement, les cris, sa panique, son retour au château et Ana Sorden. Ses paroles, la prise de conscience de s'être fait manipuler, d'avoir commis un crime, la honte, la peur. Les larmes roulaient sur ses joues, elle était devenue un monstre, elle avait subi un sort d'Amnésie mais maintenant elle se rappelait. Mais elle ne pouvait pas parler. Elle ne voulait pas être un monstre aux yeux des autres, aux yeux de ses parents. Elle voulait redevenir la Emma d'avant, celle qui n'avait tué personne, celle qui n'avait pas écouté une horrible bonne femme, celle qui n'avait pas cru une dame en rouge dans un rêve, celle qui n'avait jamais pris de potion de sommeil, celle qui était encore joyeuse et insouciante.

Elle vivait avec cette honte depuis deux semaines, elle dormait parce qu'elle prenait la potion de Miss Bloomwood, elle faisait semblant de rien pour ne pas attirer l'attention, suivait en cours du mieux qu'elle pouvait, se concentrant sur les paroles des professeurs pour ne pas revivre encore et encore cette horrible journée. Pour oublier la culpabilité mais la veille, elle avait eu quinze ans et elle ne se voyait pas vivre comme ça toute sa vie, elle ne se voyait pas vivre avec cette culpabilité. Elle ne pourrait pas continuer comme ça. Et ce matin, elle était tombée sur un vieil article de journal soupçonnant Margot Adamson du meurtre de la petite Flora. Emma releva la tête vers la table des professeurs et son regard se posa sur Ana Sorden qui trônait au centre de la table, fière d'être la nouvelle directrice des Gryffondors, fière d'être peut-être la future directrice de l'école. Un frisson d'effroi parcourut la petite Serpentard, il ne fallait pas, il ne fallait surtout pas qu'elle devienne directrice. Ce serait la fin de Poudlard, ce serait sa fin à elle.

Elle sentit son estomac se retourner et elle dut quitter la table rapidement, elle courut le plus vite qu'elle put aux toilettes les plus proches et vomit le peu qu'elle avait mangé, les larmes roulant sur ses joues. Il fallait qu'elle parle de tout ça à quelqu'un, quelqu'un qui ferait renvoyer cette sale bonne femme. Emma se redressa lentement et se rinça rapidement la bouche au robinet. Elle se rendit à son dortoir pour se laver rapidement les dents et se rendre un peu moins misérable. Puis inspirant profondément prit le chemin des cachots. Le professeur Adamson semblait la plus indiquée pour régler cette affaire et elle aurait sans doute moins de mal à se confier à sa directrice de maison.

Lorsqu'elle arriva devant le bureau de son enseignante, le jeune fille hésita un moment avant de frapper contre la porte de bois. Elle n'était pas certaine d'être prête à tout raconter. Elle n'était pas sûre de vouloir. Elle allait être jugée, peut-être irait-elle en prison. Elle décevrait ses parents, c'était certain, peut-être même qu'ils la renieraient. Elle sentit ses larmes remonter et menacer de couler. Elle ferma les paupières et ravala sa tristesse et ses doutes pour frapper timidement contre le battant de bois. Elle attendit qu'on lui donne l'autorisation d'entrer et poussa la petite porte qui laissa apparaître le bureau de son professeur et Margot Adamson en personne.

"Bonjour professeur. Je suis désolée de vous déranger mais il faut... il faut que je vous parle de quelque chose. C'est... c'est au sujet de... de l'incendie de Pré-au-Lard."

Emma sentit ses mains trembler alors qu'elle plongeait son regard dans celui de sa directrice. Elle baissa presque immédiatement la tête de honte, ne sachant pas trop comment aborder le reste de l'histoire. Elle releva la tête et fixa les mains du professeur Adamson, c'était plus simple ainsi, elle la regardait sans vraiment la voir, c'était plus facile.

"Ce... c'est moi... C'est moi qui ait mis le feu à la ferme."

Elle ferma les paupières de honte, les larmes qu'elle avait tenté de retenir coulaient librement sur ses joues. Elle ne rouvrit pas les yeux, elle ne voulait pas voir le visage de son enseignante, elle ne voulait pas voir l'horreur, puis la haine déformer ses traits. Elle ne voulait pas être là, elle ne voulait pas avoir dit ça. Et pourtant, il allait bien falloir qu'elle assume ses actes un jour ou l'autre.

Emma rouvrit les paupières lorsqu'elle sentit une pression sur ses épaules, elle releva la tête mais ne put pas soutenir le regard de sa directrice de maison. C'était juste au dessus de ses forces. Sa culpabilité se fit encore plus forte lorsque cette dernière s'adressa à elle d'une voix douce. Elle ne méritait pas autant de douceur, elle ne méritait pas tout ça, elle aurait voulu s'éloigner, se soustraire au regard du professeur Adamson mais elle ne pouvait pas et elle savait qu'il fallait qu'elle parle. Elle prit donc une grande inspiration et planta son regard effrayé dans celui de son enseignante.

"C'est une longue histoire, commença-t-elle d'une petite voix. En début d'année, j'ai eu des soucis de sommeil.... et le... le professeur Sorden m'a donné une potion pour m'aider à dormir. Elle m'avait convoqué dans son bureau parce que j'avais échoué à un devoir et... elle a voulu savoir pourquoi alors.... j'ai dû parler de mes insomnies inexpliquées. Et puis, elle m'a dit que la potion s'appelait une dormeuse et que je pourrais faire des rêves étranges et qu'il fallait que je fasse ce que le rêve me dirais de faire que ça m'aiderais à être plus... moins, enfin bref... J'ai pris la potion et mes insomnies ont cessés. Je croyais que tout était réglé mais j'ai fait un rêve une nuit, au début, je ne croyais pas vraiment mais il y avait l'objet sous mon lit et puis l'énigme alors malgré moi, j'y ai cru alors quand il y a eu le deuxième rêve, pour moi c'était comme pour le premier, un objet et une personne à qui donner l'objet. Mais le rêve était plus étrange encore, à chaque fois la même dame rouge et cette fois, elle me demandais d'aider une petite fille. Je ne savais pas si je devais, j'ai eu des doutes mais le parchemin sur mon lit... Alors j'ai suivi les instructions."

La jeune fille fit une pause, elle ne regardait pas son professeur de potion dans les yeux, elle avait honte, si elle n'avait pas cru une potion, un simple rêve rien de plus. Elle n'aurait jamais tué personne. Elle n'aurait pas été entraînée dans cette histoire. Elle serait restée l'insignifiante Emma Blackbonnes, aujourd'hui, elle était devenue l'assassin Emma Blackbonnes alors finalement mieux valait rester insignifiante. Elle avait conscience que son histoire était assez décousue mais elle n'arrivait pas à se calmer pour la rendre plus compréhensible.

"C'était le jour de la sortie à Pré-au-Lard, il fallait que je me rende dans une forêt près d'une cabane à la sortie du village. Une petite fille devait m'y retrouver, alors j'ai attendu et je l'ai vu professeur. Flora, la petite fille qui est morte, c'était-elle. Elle était devant moi et elle me demandait si j'allais l'aider, elle m'a dit que des démons venaient la hanter. Et... et moi, je ne savais pas pourquoi je restais à l'écouter, je ne savais pas pourquoi j'étais là, c'était pas à moi d'être là mais... mais elle m'a tendu une potion et m'a demandé de la répandrez tout autour de la maison quand il ferait nuit et de l'enflammer pour chasser les mauvais esprits et elle est partie. Elle m'a supplié, je pouvais pas partir, elle semblait apeurée et elle a assuré que c'était sans danger. Alors moi.... j'ai fait ce qu'elle m'a demandé."

Emma baissa la tête, elle se rendait compte désormais que tous ses événements auraient pu être évités, si elle était rentrée au château, si elle avait été voir un professeur et lui avait expliqué le problème avec la petite du village. L'incendie, le meurtre n'aurait pas eu lieu. Les larmes continuaient de couler sur ses joues et la honte, lui faisait battre le coeur plus fort. Mais elle continua son histoire comme une automate, elle ne devait pas s'arrêter, l'histoire n'était pas terminée.

"Je... J'ai attendu la nuit et j'ai répandu la potion autour de la ferme et je l'ai enflammé. Mais la maison a commencé à brûler, ça ne devait pas se passer comme ça normalement, elle m'avait promis qu'il n'arriverait rien de mal à personne. Et... j'ai entendu.... entendu les cris... c'était horrible..."

La voix d'Emma s'éteignit, elle était incapable de continuait, le souffle lui manquait, elle hoqueta silencieusement, légèrement étouffée par les larmes. Elle n'arrivait pas à se calmer suffisamment pour reprendre son récit. Elle entendait les cris, elle revoyait les flammes, elle était retournée sur place, tétanisée par la peur, incapable d'esquiver le moindre mouvement, trop faible, tellement faible. Elle reprit doucement son souffle, il fallait qu'elle continue, elle le devait, sa voix comme un souffle, à peine un murmure.

"Je ne pouvais rien faire, j'étais incapable de bouger. Et puis, je ne sais pas pourquoi, j'ai décidé de rentrer au château, les flammes, les cris, c'étaient trop, je ne pouvais plus... alors je suis rentrée et le professeur Sorden m'attendait. Je ne sais pas comment mais elle savait ce que je venais de faire, elle était devenue froide, cassante. Elle m'a dit des choses.... et m'a lancé un sortilège d'amnésie. Je ne me souvenais plus de rien au début et puis, j'ai commencé à faire des rêves étranges avant les vacances. J'ai cru que ce n'était rien que ça passerait et il y quelques semaines mes souvenirs sont revenus. Je... je ne pouvais pas en parler, j'avais peur... et honte aussi."

Emma releva la tête et essuya ses larmes avec la manche de sa robe, elle osa finalement regarder son enseignante dans les yeux avant qu'une nouvelle chute de larmes ne la prenne.

"Je suis dé... désolée. Je ne voulais pas."

Emma se crispa légèrement lorsqu'elle sentit le professeur enlever ses mains de ses épaules, son geste était tellement horrible que son enseignante ne voulait même plus la toucher. Elle allait devenir une paria, on allait la dévisager avec horreur, on allait la traiter de monstre. Et ils auraient raison, elle était devenue un monstre. Elle avait causé la mort d'une petite fille, elle avait écouté sans se méfier, elle avait cru naïvement tout ce qu'on lui avait raconté et à aucun moment, elle n'avait fait fonctionner son esprit critique.

Elle vit alors sa directrice de maison se rapprocher légèrement d'elle et lui affirmer qu'elle avait bien fait de lui en parler, elle essaya de lui expliquer qu'elle avait été manipulée par le professeur Sorden et qu'elle aussi n'était qu'une victime mais Emma n'arrivait pas à voir ce qui faisait d'elle une victime, elle avait déclenché l'incendie c'était elle la coupable, alors oui peut-être qu'elle s'était faite manipulée mais ça n'excusait pas tout. Alors, le professeur Adamson avait peut-être raison tout ceci était peut-être beaucoup trop difficile à comprendre.

Elle hocha lentement la tête lorsque son enseignante l'informa qu'il fallait qu'elle avertisse les Aurors, elle s'en doutait, comment aurait-il pu en être autrement ? Elle devait se remettre aux autorités, elle savait qu'elle ne pouvait plus faire machine arrière mais il fallait que Ana Soreden paye alors s'il fallait qu'elle se sacrifie, elle le ferait de toute façon, elle n'avait plus rien à perdre, sa culpabilité était telle qu'elle ne savait même pas si elle aurait la force de continuer comme ça. Se rappeler était tellement plus difficile que d'oublier mais elle ne pouvait pas se permettre d'oublier, elle n'en avait pas le droit, elle devrait vivre avec sa faute le reste de sa vie afin de na pas répéter les mêmes erreurs. Margot Adamson la rassura alors sur le fait qu'elle ne serait pas arrêtée, qu'elle aurait juste à raconter toute l'histoire aux aurors et qu'ils comprendraient qu'elle avait été manipulée et que quoi qu'il arrive, son enseignante serait là pour la soutenir parce qu'elle était sa directrice de maison.

Emma sentit alors léger reproche dans la voix de son professeur, elle aurait dû venir lui en parler avant mais avant, elle ne trouvait pas tout ceci vraiment inquiétant, elle pensait qu'elle allait devenir quelqu'un de bien, qu'elle allait devenir importante, qu'elle allait elle aussi avoir le droit à un peu d'attention et d'admiration. Malheureusement, elle s'était fourvoyée, elle allait être projeté sur le devant de la scène, ça oui, mais pas pour les raisons qu'elle avait espéré. Elle baissa donc la tête honteuse sous le reproche alors que ses larmes inondaient toujours autant ses joues. Il y avait bien longtemps qu'elle avait arrêté de les retenir de toute manière ça n'aurait rien changé alors autant les laisser sortir. Elle sentit alors deux bras l'enserrer et elle se laissa aller, profitant de l'étreinte rassurante que lui offrait le professeur Adamson.

Elle entendit le léger murmure lui promettre que ça irait qu'il ne fallait pas qu'elle pleure, elle resserra ses bras autour de son enseignante. Elle aurait voulu que ce soit sa mère qui lui dise ces mots, elle aurait voulu être chez elle, dans les bras de sa mère, pouvoir tout oublier, redevenir la petite fille qu'elle avait été, elle aurait voulu avoir à nouveau l'âge de son frère, pouvoir être insouciante comme avant mais c'était impossible. Elle se recula légèrement mettant fin au câlin en essyant ses joues.

"Et... pour mes parents ? Ils vont... Ils vont être prévenus ?"

Elle avait peur de leur réaction, peur du regard qu'ils poseraient sur elle, elle ne voulait pas qu'ils sachent et pourtant, il semblait impossible qu'ils ne soient pas avertis.

Emma baissa légèrement la tête lorsque son enseignante répondit qu'elle allait prévenir ses parents dans la journée. Elle devait s'y attendre, elle était mineure, les Aurors allaient être convoqués, elle ne pouvait pas faire face à ça toute seule même si au final, elle serait seule quand même, que pouvait bien faire ses parents ? Il n'allait pas raconter ce qu'il s'était passé à sa place, ils n'étaient pas dans sa tête, ils n'avaient aucune idée de ce qu'elle ressentait, ils n'avaient rien vu de toute façon, ce n'était pas maintenant que ça changerait mais elle comprenait que le professeur Adamson n'ait pas le choix.

"Ce n'est pas de votre faute... C'est moi qui aurait dû faire plus attention. Je suis désolée de vous mettre dans cette situation."

La jeune fille baissa les yeux sur ses mains et se mordilla la lèvre inférieure, quoique puisse dire sa directrice de maison, elle était tout aussi coupable qu'Ana Sorden. Si elle n'avait pas manqué de jugement, si elle n'avait pas été aussi faible tout ceci ne ce serait jamais produit. Et Margot Adamson ne la remercierait pas pour avoir avoué une action qui n'aurait pas eu lieu. Elle aurait tellement voulu pouvoir revenir en arrière, n'avoir jamais pris cette potion.

Elle rendit un sourire timide à son professeur qui ajouta qu'elle allait maintenant avertir les Aurors, elle hocha la tête, elle n'avait pas le choix de toute façon, c'était la meilleure option qui s'offrait à elle. Garder le silence aurait voulu dire laisser gagner Sorden et s'était impossible.

"Oui, ça va aller merci pour tout professeur Adamson."

Elle se retourna donc avec un dernier faible sourire et se dirigea vers la porte du bureau pour rejoindre son prochain cours qui allait commencer d'un moment à l'autre.