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Blesse-moi encore [Roy & Avalon]

Avalon Calder
Avalon CalderChef de la milice
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Blesse-moi encore [Roy & Avalon] Icon_minitimeDim 21 Aoû 2022 - 18:32
30 janvier 2012

Le mois de janvier approchait dangereusement de sa fin. A Bristol, le temps était pourtant étonnement clément. Le soleil brillait et, si le froid était vif, il n’était pas mordant pour autant. Dehors, dans les parcs qui jouxtaient l’immeuble, les enfants s’amusaient sous le regard attentif de leurs parents. Il y avait un monde fou dans les rues – c’était le dernier jour des soldes, et tous cherchaient à trouver la perle rare avant que les stocks ne soient épuisés. Le relatif beau temps – qui ne cessait de surprendre les anglais – avait poussé les familles à sortir de l’hibernation caractéristique des mois d’hiver. On avait troqué les plaids et les bouillottes contre une belle écharpe et on avait abandonné son canapé pour un banc public ou la terrasse (chauffée) d’un café.

Avalon avait également quitté son appartement dans la matinée, le temps de déposer Vivianne chez Fergus. Ce dernier avait la garde de Laoise pour le weekend et les deux filles avaient demandé à passer du temps ensemble, ce qu’Avalon et Fergus leur avaient accordé bien volontiers. Elle avait esquivé l’invitation à déjeuner de son ami visiblement soucieux, prétextant une montagne de travail. En réalité, ce n’était pas une fausse excuse : Avalon était bel et bien enfermée dans son bureau depuis le début de l’après-midi, les yeux rivés sur l’écran d’un PearPro qui affichait des tableurs et des graphiques. Elle s’échinait depuis une heure à organiser le planning des prochains mois, sachant pertinemment que plusieurs éléments risquaient de mettre à mal la cohésion de son service. Leonard venait de quitter définitivement l’agence et avait été remplacé par Thomas Jefferson, désormais promu lieutenant. Même s’il avait déjà secondé Leonard sur plusieurs de ses missions lorsque ce dernier avait réduit son temps de travail, il devait encore prendre ses marques. Il était moins à l’aise avec les agents que pouvait l’être Lenny, en dépit de son jeune âge ; en revanche, Avalon savait qu’il était un excellent stratège et que c’était un homme juste.

L’autre élément majeur à prendre en compte, dans la réorganisation de l’agence, était qu’elle n’en ferait bientôt plus partie non plus. Elle était entrée dans son sixième mois de grossesse et devait accoucher au milieu du mois d’avril – dans trois mois, donc. Elle devait, d’ici là, trouver son remplaçant le temps de son congé maternité et le former – une tâche sur laquelle elle ne s’était penchée que très récemment et qui lui valait des heures supplémentaires à examiner divers profils et faire passer des entretiens. Ses journées au ministère avaient été particulièrement longues cette semaine et elle commençait à en ressentir les effets. Elle était fatiguée – d’autant plus qu’elle dormait toujours mal la nuit – et avait parfois des vertiges qui l’étourdissait un peu. Le médecin n’avait pas paru particulièrement inquiet.

Sa grossesse semblait bien se dérouler. Le bébé avait pris du poids – cela se voyait – et elle le sentait désormais bouger régulièrement. Elle ne pouvait s’empêcher de tressaillir lorsque cela survenait, pas complètement à l’aise avec ces mouvements qui survenaient dans son corps, alors qu’elle ne les initiait pas. Dans ces moments-là, elle posait parfois sa main sur son ventre, sans savoir si elle ressentait de la fascination ou une sensation d’étrangeté, mêlée à une pointe de répulsion. Peut-être les deux.

Car Avalon n’avait toujours pas fait la paix avec son corps, ni avec le petit être qui y avait élu domicile. Ses sentiments demeuraient ambivalents, elle oscillait souvent entre deux états. Cela la laissait évidemment à fleur de peau, sensible aux reproches et à la pression de son entourage. Pression qui se faisait de plus en plus forte, maintenant que leurs proches étaient au courant. Les parents de Roy multipliaient les invitations que le couple déclinait poliment. Les collègues d’Avalon la félicitaient et la questionnaient dès qu’elle croisait leur chemin. Elle sentait bien qu’on attendait d’elle qu’elle affiche cet air épanoui des futures mères, la main posée sur son ventre arrondi, qu’on voulait l’entendre parler des prénoms, des projets qu’ils avaient autour de la naissance et des premiers mois de leur fille.

Le souci, c’était qu’ils n’avaient rien. Pas de prénom, pas de projet. Seule la chambre du bébé prenait forme, parce que Roy dirigeait la plupart des aménagements. Avalon, elle, esquivait. Elle esquivait les questions et les longues discussions, se montrant parfois véhémente. L’atmosphère entre Roy et elle s’était inévitablement tendue, les menant parfois à des disputes qui n’éclataient jamais vraiment mais qui les éloignaient petit à petit. Dans ce grand océan dans lequel ils avaient été jeté, ils ne nageaient pas dans la même direction. Cela se ressentait de plus en plus.

Et c’était sans compter que leurs emplois du temps respectifs n’aidaient en rien : les journées d’Avalon au ministère la faisaient souvent terminer tard. Quant à Roy, il jonglait entre les Folies Sorcières et ses nombreux voyages aux Etats-Unis. La fatigue – qui commençait à s’accumuler pour les deux – les rendait irascibles.

Aussi, ce samedi studieux était une opportunité pour Avalon pour faire le plein d’un calme qui se faisait de plus en plus rare autour d’elle. De plus, le travail gardait son esprit occupé et l’obligeait à se concentrer sur des problèmes qu’elle pouvait résoudre – ou, tout du moins, qu’elle essayait de résoudre.

Plongée dans l’étude d’un dossier depuis une vingtaine de minutes, Avalon tressaillit lorsque la porte du bureau s’ouvrit sur le visage de Roy. Lorsqu’il la vit, installée devant le large écran allumé, une expression d’incompréhension passa sur son visage.

« Ah bah je te cherchais. Qu’est-ce que tu fais là ? Tu bosses ?
-Ouais, répondit Avalon en levant les yeux de l’écran. J’essaie de m’avancer un peu, sait-on jamais que ça m’évite de finir à vingt-heures toute la semaine… Elle consulta sa montre et fronça les sourcils. T’es pas aux Folies ?




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Blesse-moi encore [Roy & Avalon] Icon_minitimeDim 21 Aoû 2022 - 20:57
Décembre avait été un mois merveilleux, Roy l’avait traversé en flottant sur un petit nuage. La chute en avait été d’autant plus rude sur le mois de janvier, qui s’avérait beaucoup plus compliqué et tendu. Il se sentait épuisé nerveusement et physiquement. Entre ses nuits de travail aux Folies, ses voyages répétés aux Etats-Unis, le décalage horaire qui en résultait, il tenait un rythme assez éprouvant. A cela s’ajoutait évidemment la grossesse imprévue d’Avalon, une épreuve dont il avait clairement sous-estimé la difficulté. Il ne regrettait pas leur décision de mener cette grossesse à bout, il s’efforçait de se concentrer sur les sentiments positifs que lui procurait l’arrivée de ce deuxième bébé mais il avait l’impression que tous les obstacles se dressaient sur son chemin vers une paternité sereine.

Tout d’abord, Joséphine était fortement contrariée de cette situation trop proche à son goût de la naissance de Teresa, elle lui faisait le reproche de passer déjà à autre chose, elle prédisait qu’il n’aurait plus assez de temps pour Teresa quand Avalon aurait accouché. Leurs échanges en devenaient forcément tendus alors que leur co-parentalité avait si bien démarré. Elle lui avait tant répété qu’il ne pourrait pas assumer d’avoir deux bébés en même temps que Roy commençait à douter de lui-même, même s’il affirmait tout le contraire face à elle. Il sentait que ses moments avec Teresa se teintaient de cette peur de mal faire ou de ne pas assez faire. 

Evidemment, il n’osait en parler à personne. Qui pourrait le soutenir ? Sa famille avait beau lui avoir montré leur soutien, une fois la sidération passée, Roy se sentait parfois un peu jugé. Il avait eu quelques remarques, des reproches ou des boutades qui n’étaient pas très bien passées, pour souligner le fait que oui, encore, il avait mis une femme enceinte sans le prévoir. Sa mère lui avait clairement exprimé son inquiétude sur ses capacités à être présent sur les deux fronts : comment allait-il s’organiser avec Joséphine quand l’autre bébé serait né ? Est-ce qu’il pourrait toujours faire le voyage sur des week-ends entiers et laisser Avalon seule avec leur bébé ? Ne valait-il pas mieux qu'il trouve un autre mode de garde avec Joséphine ? Qu'il ramène Teresa en Angleterre par exemple ? Elle le bombardait de questionnements qui ne faisaient que rendre Roy plus anxieux. Quant son père, la solution était simple à ses yeux, il lui avait balancé qu’il fallait qu’il « prenne ses responsabilités en main » et qu’il épouse Avalon car il n’était pas question d’avoir « deux bébés dans la nature ».

Autant dire qu’ils n’étaient pas d’une grande aide pour soulager la pression qui augmentait de jour en jour sur ses épaules. Ses discussions avec ses amis l’aidaient un peu, sans le réconforter tout à fait. Roy savait de la part de qui il souhaitait être soutenu et rassuré. Plus que jamais, il avait besoin de sentir Avalon à ses côtés. Mais il ne pouvait rien lui en dire. Elle n’était pas dans les bonnes dispositions pour le recevoir, il le savait. Elle peinait déjà suffisamment à accepter et avancer dans cette grossesse sans qu’en plus il ne vienne lui confier ses propres doutes.

Alors Roy se blindait et s’efforçait de s’impliquer, pour ne plus entendre cette petite voix intérieure qui lui répétait qu’il n’allait pas y arriver. Il avait commencé à faire une liste de fournitures à acheter, il avait cherché des meubles, regardé des listes de prénoms, commencé à transformer l'une des chambres. Mais quand il partageait ses avancées avec Avalon, soit elle promettait de regarder elle aussi de son côté soit elle esquivait la conversation, arguant qu’ils pourraient en parler plus tard. Au début, Roy s’était montré patient, songeant qu’elle avait encore besoin de temps, qu’ils pourraient effectivement s’en occuper plus tard. Mais ces derniers jours, il avait changé de discours, il essayait de lui faire comprendre que faire toutes ces petites choses étaient précisément ce qui pouvait les aider à s’emparer de cette grossesse et s’en réjouir ensemble. Avalon ne l’entendait pas de cette oreille. L’épais mur d’incompréhension s’épaississait entre eux, installant une distance dont ils n’avaient pas l’habitude.

Une distance qui se percevait aussi dans un autre détail, qui avait son importance pour Roy. Ils n’avaient plus la même intimité qu’avant. Ils se touchaient moins, se câlinaient moins, faisaient moins l’amour. Roy sentait une distance irrémédiable se creuser entre eux, sans savoir comment la combler. Il sentait Avalon à fleur de peau, fermée comme une huître quand il essayait de savoir ce qu’elle ressentait, plus réticente à certains contacts et il ne savait pas quoi faire pour retrouver leur complicité.

Pour cette longue liste de raisons, donc, Roy se sentait tendu et irascible. Exceptionnellement, il avait décidé de s’accorder une soirée de pause, en prévenant ses acolytes qu’il les laissait tout gérer pour cette fois. Il quitta la Voie des Miracles en fin d’après-midi, après avoir envoyé un message à Avalon pour l’informer qu’il rentrait. Il ne reçut pas de réponse en retour et crut d’abord qu’elle faisait une sieste : sa grossesse la fatiguait plus vite que d’habitude alors parfois, elle se laissait aller à une sieste pour récupérer.

Mais il n’eut pas le plaisir de la trouver dans leur chambre, où il aurait pourtant été ravi de la rejoindre dans cette hypothétique sieste. A la place, ses investigations dans l’appartement le menèrent dans la dernière pièce où il aurait voulu la trouver : le bureau où elle avait son PearPro, face auquel elle semblait absorbée.

« Non, pas pour aujourd’hui, répondit-il au sujet des Folies Sorcières. Je prends une pause. »

Roy s’approcha d’Avalon pour se positionner derrière elle. Il ne savait pas ce qu’était cet énorme tableau sur son écran, un planning très compliqué, certainement, mais il songea qu’il était bien cruel d’attendre d’une femme enceinte qu’elle s’en occupe un samedi. Il posa ses mains sur les épaules en faisant de légers gestes de massages, pour attraper son attention.

« T’as pas besoin de repos, toi ? T’en fais beaucoup en ce moment… »

Les médecins avaient insisté sur l’importance du repos pour elle et pour le bébé, après tout. Il le rappela, en tentant un trait d’humour :

« Tu veux pas venir te vautrer sur le canapé avec moi ? Si même porter un bébé ne t’autorise pas à faire des siestes le samedi après-midi, où va le monde… ? »


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Blesse-moi encore [Roy & Avalon] Icon_minitimeLun 22 Aoû 2022 - 18:01
Lorsque Roy s'avança vers elle, lui confiant avoir pris la soirée, Avalon se redressa légèrement pour croiser son regard. Il était épuisé, cela se voyait. Entre ses allers-retours aux Etats-Unis pour aller voir Teresa et la charge de travail qui lui incombait auprès des Veilleurs, Avalon sentait bien qu'il avait de plus en plus de mal à donner le change. Au point d'ailleurs de se dégager une soirée entière, alors que le samedi soir était le moment où le taux de fréquentation des Folies Sorcières était le plus élevé.

"Ça va." répondit-elle dans un souffle après qu'il se soit glissé derrière elle pour la questionner à son tour.

Néanmoins, il n'avait pas tort. Elle travaillait effectivement beaucoup depuis quelques jours et avait vu ses journées au ministère s'allonger de manière drastique. Ce n'était pas étonnant : au mois de janvier, elle avait eu beaucoup de choses à gérer. Déjà, elle avait dû annoncer publiquement sa grossesse, en informer à la fois ses supérieurs et ses agents. Elle avait choisi de passer sous silence son déni, justifiant cette annonce tardive comme une volonté de sa part de ne pas perturber davantage son service. La mort de Leopold avait bouleversé beaucoup de choses et elle avait préféré attendre que les choses se tassent un peu, avait-elle affirmé. Elle avait été aidée par la période hivernale qui lui permettait de cacher son ventre arrondi sous de larges pulls, avait-elle ajouté. Avalon ne savait pas si cette nouvelle avait soulevé des questions - sa supériorité hiérarchique avait en tout cas empêché ses agents de se montrer trop curieux. Mais son nouveau statut de femme enceinte avait irrémédiablement changé quelque chose. Pas au sein de l'agence, où elle avait déjà gagné le respect de ses hommes. Non, Avalon était surprise de la familiarité avec laquelle certains collègues, souvent plus âgés, s'adressaient désormais à elle. Jeudi dernier, Josie - qui était venue l'entretenir pour un problème de comptabilité - avait, sans crier gare, poser ses deux mains sur son ventre. "Avec un ventre aussi rond, c'était forcément une petite fille" avait-elle gloussé face à une Avalon interdite et profondément mal à l'aise.

Puis, il fallait qu'elle organise son congé maternité, qu'elle prévoit son remplacement, celui de Leonard... En plus de toutes ses tâches habituelles. Ces quelques heures supplémentaire qu'elle s'imposait aujourd'hui n'étaient pas superflues ; elles lui permettraient peut être d'envisager plus sereinement la semaine à venir. Aussi, devant la proposition de Roy, elle grimaça légèrement.

"Il faut absolument que je finisse un truc pour le boulot, contra-t-elle. J'avais prévu de bosser au moins deux heures encore..."

Elle sentit que Roy, dans son dos, suspendait son massage improvisé. Levant les yeux vers elle lui, elle soupira :,

"Il y a tellement de trucs à faire, franchement, ça me rend dingue. Je crois que je comprends mieux pourquoi Danielle gardait un lit de camp dans son bureau." Ses lèvres s'étirèrent en un sourire désabusé.


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Blesse-moi encore [Roy & Avalon] Icon_minitimeLun 22 Aoû 2022 - 20:05
« Ça va » était devenue la phrase préférée d’Avalon ces derniers temps. A chaque fois que Roy l’interrogeait, pour savoir où elle en était, ce qu’elle ressentait, s’il pouvait faire quelque chose pour elle, c’était ce qu’elle lui répondait, si bien que Roy commençait à interpréter cela comme une volonté de mettre de la distance entre eux. « Ça va » pour « je n’ai pas envie d’en parler » ou pour « laisse-moi tranquille ». Peut-être qu’elle n’en était pas consciente, mais c’était indéniablement le résultat. Elle se fermait à lui, plutôt que de lui avouer le fond de ses pensées, en prétendant que tout allait bien alors que Roy voyait bien que ce n’était pas le cas. Il voyait bien les traits tirés sur son visage, le souci dans son regard quand elle regardait dans le vide, la tension dans ses sourires forcés, la fatigue de son corps, la fragilité de son mental.

Avec le temps qui passait, l’inquiétude qu’il avait pour elle se teintait de frustration. Pourquoi ne voulait-elle pas lui parler, se reposer sur lui ? Pourquoi se tenait-elle à l’écart dans cette épreuve qu’ils devaient pourtant affronter à deux ? Il n’avait pas imaginé que cette grossesse se déroulerait de la sorte. Il avait pensé que, comme toutes les épreuves qu’ils avaient vécues jusqu’à maintenant, ils se souderaient autour d’elle, pour se donner mutuellement de la force et du courage. Leur couple avait toujours fonctionné de cette manière. Il ne comprenait pas pourquoi les choses étaient si différentes, cette fois.

Il voyait de plus en plus Avalon s’enterrer dans son travail, plutôt que de tisser ce lien qu’il attendait si désespérément se recréer entre eux. Elle le faisait encore, en plein week-end, plutôt que de profiter d’un repos dont elle avait de toute évidence besoin. Roy eut du mal à masquer une certaine contrariété sur son visage. Il arrêta le massage qu’il avait entamé pour détendre Avalon, en répliquant :

« Mais Danielle n’avait pas de vie en dehors de son boulot. »

Toi, si, il y a Vivianne, il y a moi. Il y a notre bébé, se retint-il de dire abruptement. A la place, il insista :

« Ça peut pas attendre lundi ? Si c’est pas le week-end que tu te reposes, tu le feras jamais. Et les médecins ont insisté sur l’importance du repos, pour toi… et pour le bébé. » rappela t-il.


Roy Calder

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Blesse-moi encore [Roy & Avalon] Icon_minitimeMar 23 Aoû 2022 - 19:52
Roy était contrarié, constata Avalon non sans ressentir elle-même une pointe agacement. C’était la même chose depuis quelques jours maintenant ; Roy insistait pour qu’elle se « repose » à chaque fois qu’elle avait le malheur de faire autre chose que de fixer son ventre arrondi d’un air béat. Il ne se rendait pas compte, songeait-elle, de tout ce qu’elle avait à faire et de toutes les informations qu’elle devait traiter. Son congé maternité à prévoir, ses rendez-vous médicaux, ses examens… Evidemment, qu’elle était fatiguée, mais avait-elle réellement le choix ? Cette semaine, elle avait réalisé la plupart des examens biologiques demandés par les médecins – urinaires et sanguins, du moins – ce qui l’avait obligé à quitter le ministère plus tôt ou à y arriver plus tard. Alors oui, elle travaillait exceptionnellement aujourd’hui, jour béni où elle n'avait pas à aller uriner, à jeun, dans un flacon en plastique et où elle pensait pouvoir rattraper tranquillement son retard accumulé.

La remarque de Roy lui fit lever les yeux au ciel et elle se retint de justesse de lui répondre sur le même ton excédé. Oui, comme il le soulignait, elle avait une vie en dehors de son boulot, une vie qu’elle essayait de mener au mieux, malgré tous les obstacles des dernières semaines. Et puis, c’était un peu gonflé de la part de Roy de la sermonner sur ce sujet, alors qu’il passait des heures aux Folies Sorcières ou sur la Voie des Miracles, parfois jusque tard dans la soirée.

Devant son insistance, Avalon se retourna vers lui. Son commentaire sur le bébé lui fit froncer les sourcils. Evidemment, c’était l’élément qu’il choisissait d’employer pour la faire céder, songea-t-elle, agacée.

« Roy, c’est bon, je suis assise sur une chaise, lâcha-t-elle. A t’entendre je suis en train de courir le marathon de Londres. »

A l’écouter, elle en faisait toujours trop. Pourtant, elle avait cessé ses missions extérieures à la minute où elle avait appris qu’elle était enceinte, elle ne travaillait plus que depuis les murs du ministère. Elle essayait de se ménager du temps pour se reposer, elle faisait des siestes… Mais elle ne pouvait pas non plus cesser toute activité du jour au lendemain. Elle ne comprenait pas ce qu’il attendait de plus de sa part.

« Et non, ça peut pas attendre lundi parce que je dois me faire dépister pour le diabète gestationnel, figure-toi, lança Avalon d’un ton un peu abrupt. Donc je vais quitter le boulot à quinze heures et je dois avoir fini ça avant. »


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Blesse-moi encore [Roy & Avalon] Icon_minitimeMer 24 Aoû 2022 - 18:56
Avalon-la-mauvaise-foi-Davies était de retour. Roy se fit violence pour se retenir de lever les yeux au ciel face à son explication. Evidemment, avec Avalon, il n’y avait jamais de demi-mesure. Soit elle courait un marathon, soit elle était au repos. Comme si le fait d’être assise suffisait. Il ne lui parlait pas uniquement de repos physique, il savait qu’elle bougeait moins qu’avant, cela aurait été difficile avec le ventre rond qu’elle devait porter tous les jours désormais. Mais il savait aussi qu’elle ne se ménageait pas sur les autres plans. Elle était toujours en train de se soucier de quelque chose, de travailler deux fois plus pour compenser ses absences. Sur le terrain avec une baguette magique ou assise derrière un écran PearPro, le résultat était le même : il lui restait toujours peu de temps pour prendre soin d’elle à la fin.

Si Roy manifestait de l’agacement, c’était surtout une manière d’exprimer sa forte inquiétude pour elle. Ce surmenage ne datait pas seulement du moment où on lui avait annoncé sa grossesse et ils le savaient très bien tous les deux. La raison précise pour laquelle ils n’avaient pas pu déceler cette grossesse plus tôt, c’était que depuis la fin de l’été dernier, Avalon s’était tellement démenée, entre le procès de ses parents, la garde de Vivianne, leur déménagement, le travail, les retombées de la mort du Ministre, la réorganisation de la Milice, que son corps et son esprit s’étaient entièrement consacrés à ces tâches, en lui cachant le petit être qui grandissait en elle, pour ne pas avoir à lui rajouter un autre gros dossier sur sa pile déjà infinie. Ses épisodes de migraine avaient été leur seul indice mais ils avaient aussi participé à rendre Avalon moins efficace. C’était un cercle vicieux, elle allait mal, alors elle prenait du retard dans son travail et elle allait encore plus mal en s’efforçant de le compenser.

Ne voyait-elle rien de tout ça ?

Il s’apprêtait à répliquer quelque chose dans ce sens, mais Avalon ajouta une information qui le fit sursauter.

« Attends quoi ? Ils t’ont dit qu’il fallait faire le dépistage, finalement ? »

Il se souvenait de ce terme un peu barbare et effrayant de « diabète gestationnel » que la gynécologue avait prononcé lors des premières visites. Si sa mémoire était bonne, elle le leur avait présenté comme un des risques possibles d’une grossesse en général, en particulier celles qui résultaient d’un déni, un risque qui impactait la santé de la mère et de l’enfant. Pendant plusieurs mois, Avalon s’était nourrie et comportée sans savoir qu’elle était enceinte et donc sans respecter les restrictions nécessaires. Le médecin leur avait toutefois dit qu’ils verraient plus tard si l’examen était nécessaire. Roy s’écarta légèrement d’Avalon, alarmé.

« Pourquoi tu m’as pas dit ? » Elle lui annonçait ce fait sans l’avoir prévu, en plein milieu d’une conversation qui n’avait rien à voir. Ce constat appuya sur un sentiment déjà présent chez Roy qu'elle le tenait à l'écart des choses importantes, en ce moment. Il fronça les sourcils. « Les médecins sont inquiets finalement ? T’aurais dû me dire, tu vas pas aller faire ça toute seule ! »


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Blesse-moi encore [Roy & Avalon] Icon_minitimeVen 26 Aoû 2022 - 17:41
La surprise de Roy étonna Avalon, qui fronça les sourcils face à ses questions. Elle était persuadée de le lui avoir dit, pourtant. Ses dernières analyses urinaires n’étaient pas excellentes – pas préoccupantes, mais pas parfaites, lui avait expliqué le docteur Perez. Et, avec sa grossesse découverte tardivement, elle préférait ne prendre aucun risque. L’hyperglycémie provoquée n’était pas un test invasif et les risques étaient minimes – contrairement à l’amniocentèse, par exemple. Il fallait seulement qu’elle prenne rendez-vous au laboratoire – en veillant d’être bien à jeun depuis huit heures, lui avait précisé le docteur Perez. Avalon avait bataillé pour obtenir un rendez-vous en fin de journée plutôt que sur les premières heures de la matinée, ces dernières étant toujours plus chargées au ministère pour elle. Elle avait donc rendez-vous lundi premier février, à quinze heures – comme le lui avait rappelé l’agenda électronique de son PearTwo.

Et l’avait-elle rappelé à Roy ? Face à lui, sa certitude commençait à se fissurer. Avait-elle oublié de le tenir informé ? Elle avait eu son dernier rendez-vous médical samedi dernier et s’y était rendue seule puisque son compagnon avait pris un portoloin pour les Etats-Unis quelques heures plus tôt. Ce n’était pas un rendez-vous très important, elle y allait juste pour récupérer des résultats. Oui, le docteur Perez lui avait conseillé de faire le dépistage du diabète gestationnel, mais elle lui avait surtout longuement parlé des prochaines étapes de cette grossesse. Cette conversation, Avalon l’avait rapporté à Roy, elle en était certaine. Quant à l’examen… Elle se mordit la lèvre. Visiblement, cela lui était sorti de la tête.

La réaction de son compagnon, cependant, la piqua davantage qu’elle ne ressentit de la culpabilité vis-à-vis de cette information qu’elle avait manqué de lui transmettre. Il agissait comme si elle lui avait volontairement caché quelque chose, réalisa-t-elle avec agacement lorsqu’il lui reprocha de ne lui avoir rien dit. Elle commença par répondre, croisant les bras sur sa poitrine :

« Bah pourquoi ? contra-t-elle en haussant les sourcils. Tu veux faire le test à ma place ? Boire leur truc immonde et poireauter deux heures dans la salle d’attente ? »

Elle se leva de son fauteuil, préférant se trouver à hauteur de Roy pour ne pas avoir à lever la tête vers lui pour lui parler.

« J’ai pris le rendez-vous samedi dernier quand t’étais aux Etats-Unis, je sais pas, j’ai juste oublié de te le dire, se défendit-elle, butée. Elle ajouta cependant, peu désireuse d’alarmer son compagnon : Le docteur Perez n’est pas vraiment inquiète, elle m’a juste dit qu’elle préférait faire preuve de prudence. Et comme le test n’est pas invasif… » Elle haussa les épaules.


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Blesse-moi encore [Roy & Avalon] Icon_minitimeSam 27 Aoû 2022 - 14:02
Face à la réponse de sa compagne, Roy haussa clairement les sourcils, l’air de dire un « t’es sérieuse, là ? ». Il parlait sérieusement et elle, elle répondait par du sarcasme. Insupportable. Piqué, il reprit le même ton ironique :

« Bah désolé de m’inquiéter pour toi et le bébé, hein. »

Puisque, visiblement, ce n’était pas une raison suffisante pour l’accompagner à ses examens. Il savait très bien que ce n’était pas lui qu’on allait ausculter, cela ne voulait pas dire qu’il n’avait aucun rôle à jouer pour autant. Mais plus les jours passaient et moins Avalon lui laissait l’opportunité de se préoccuper d’elle, de se laisser aider, écouter, soutenir. Elle coupait court aux conversations sérieuses qu’il essayait d’engager avec elle. Dès qu’ils ne parlaient pas de choses très factuelles, comme ce que les médecins pouvaient lui dire ou lui recommander, Avalon s’esquivait, comme si elle ne voulait pas que Roy creuse trop loin non plus. Il ne savait pas pourquoi elle lui avait caché ce dépistage qu’elle devait faire, mais connaissant Avalon, il avait quelques hypothèses en tête. Peut-être qu’elle se sentait inquiète vis à vis de cet examen, plus lourd de conséquences que les autres, et qu’elle avait préféré ne rien en dire tant qu’elle n’avait pas les résultats. Cela lui ressemblait bien après tout, elle avait tendance à ne pas vouloir dévoiler ses faiblesses, et vis à vis de cette grossesse éprouvante, Roy sentait bien qu’elle ne voulait pas baisser sa garde face à lui.

Mais ce ne fut pas l’explication qu’elle lui donna. Elle déclara qu’elle avait oublié de lui en parler, tout simplement, en faisant au passage une petite référence à ses déplacements aux Etats-Unis qui piqua légèrement Roy. Quoi, maintenant c’était de sa faute à lui, il n’avait pas été présent ce jour-là donc elle n’avait pas pu lui dire sur le coup, ce qui l’avait menée à oublier ? Il rétorqua pour se défendre :

« T’aurais pu m’envoyer un message quand t’es sortie. »

Finalement, il se trompait peut-être, elle ne devait pas se sentir inquiète pour cet examen, vu le haussement d’épaules qu’elle fit. Roy ne sut comment interpréter cette attitude. Est-ce qu’elle faisait semblant pour ne pas l’inquiéter lui ? Il ne savait plus quoi croire, tant Avalon ne lui disait pas grand-chose de ce qu’elle ressentait. Les seules informations qu’elle partageait sans rechigner avec lui étaient purement factuelles.

« Ok mais… toi t’es pas inquiète ? » A moins qu’elle était plus préoccupée pour ce planning, affiché sur son écran, qui attendait qu’elle y passe deux heures pour le terminer ? se retint-il de dire. Il lâcha un soupir excédé. « C’est quand même un examen important et t’as même pas pensé à m’en parler. T’as oublié parce que ça t’inquiète pas ou… parce que t’as beaucoup trop de trucs en tête en ce moment ? »

Un regard instinctif vers l’écran de PearPro le trahit.


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Blesse-moi encore [Roy & Avalon] Icon_minitimeDim 28 Aoû 2022 - 10:28
« Mais je t’ai envoyé un message en sortant ! » rétorqua-t-elle, immédiatement sur la défensive.  

Elle avait simplement oublié de lui parler de l’examen. Mais elle lui avait rapporté la longue conversation qu’elle avait eu avec le docteur Perez, au sujet des cours de préparation à l’accouchement et des consultations liées à une potentielle anesthésie le jour J. Pourquoi lui cacherait-elle quelque chose comme ça ? A écouter Roy, elle avait agi sciemment, pour le tenir à l’écart de cet examen. Elle s’apprêtait à le confronter à ce qu’elle considérait être un non-sens dans son discours, lorsqu’il enchaîna, la questionnant sur son inquiétude.

Le docteur Perez n’avait pas eu l’air particulièrement alarmée, aussi Avalon n’avait pas ressenti une urgence particulière vis-à-vis de ce test. Pas comme les premiers qu’elle avait passé, au moment où un risque de retard de croissance ou de malformation planait réellement au-dessus d’eux. Non, elle n’était pas très inquiète, elle mettait cet examen sur le même pied que les – très – nombreux qu’elle avait déjà passé. Pour l’instant, tous étaient revenus négatifs, alors elle se disait que celui-ci serait sûrement semblable aux autres. Mais c’était un examen important, soulignait Roy, non sans heurter avec justesse une sensibilité chez elle. C’était un examen important et elle agissait comme si elle s’en fichait parfaitement.

Le regard qu’il jeta à son écran professionnel n’échappa pas à Avalon. Son visage se referma instantanément.

Peut-être qu’Avalon, si elle avait été dans de meilleures dispositions, aurait pu saisir cette remarque pour ce qu’elle était vraiment : un signe de l’inquiétude de son compagnon quant à sa santé. Mais ce fut à un endroit que son commentaire la frappa, à un endroit où elle était inévitablement beaucoup plus fragile.

« Tu sous-entends quoi, au juste ? l’interrogea-t-elle froidement. Que je me préoccupe plus de mon boulot que de la santé du bébé ? »



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Blesse-moi encore [Roy & Avalon] Icon_minitimeDim 28 Aoû 2022 - 22:15
Impossible de manquer la manière dont le visage et le regard d’Avalon se voilèrent à l’instant où Roy lui posa une question qu’il savait sensible. Une part de lui ne put s’empêcher de se sentir satisfait de cette réaction, parce que enfin, il avait une réaction sur laquelle il pouvait s’accrocher. Enfin, le mur qu’elle dressait entre eux se fissurait un peu, lui laissant une chance de taper encore un peu dedans pour atteindre Avalon là où elle se trouvait en ce moment, à savoir loin de lui. Alors Roy n’évita pas du tout le conflit, bien au contraire : il fonça droit dedans.

« J’en sais rien, Av’, rétorqua t-il, le regard ancré dans le sien. A toi de me le dire. Tu me parles à peine ces derniers temps. »

Pourtant il mourait d’envie de ressentir leur connexion habituelle, de retrouver la femme expansive, sincère, expressive qu’il aimait. Il voulait désespérément savoir ce qui se cachait derrière son silence et son regard soucieux. Parfois, les pires hypothèses le saisissaient quand il prenait le temps d’y réfléchir. Il se disait que peut-être, Avalon regrettait la décision qu’ils avaient prise et que c’était exactement ce qu’elle n’osait pas dire, alors elle le tenait à distance, pour qu’il ne le devine pas. Cette pensée faisait toujours naître une affreuse culpabilité au fond de son estomac. La peur qui se nichait en-dessous de toutes les autres, était celle d’avoir mal fait les choses, d’avoir embarqué Avalon dans un projet dont elle ne voulait pas, au fond d’elle, et d’avoir ainsi pris le risque de briser leur complicité. Voire de tout briser entre eux.

Si c’était le cas, il préférait le savoir maintenant. Ses angoisses tapies au fond de lui lui firent adopter une posture défensive et parler d'une voix plus ferme que nécessaire :

« Je sais pas ce qui se passe dans ta tête, enchaîna t-il, les bras croisés sur sa poitrine. Si c’était juste à propos de ce foutu examen, je m’en ficherais. Mais y a plein de choses dont tu veux pas qu’on parle, quand ça concerne le bébé. Ou ton boulot d’ailleurs ! Dès que j’essaye de te dire quand t’en fais trop, tu te braques. Alors que putain ! Ça fait pas un mois que tu te surmènes, ça en fait six et tu le sais. »


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Blesse-moi encore [Roy & Avalon] Icon_minitimeJeu 1 Sep 2022 - 12:20
A la question d’Avalon, il n’y avait qu’une seule réponse satisfaisante. Quelque chose comme « Mais bien sûr que non, je n’ai jamais dit ça, je suis simplement inquiet. » Evidemment, Roy ne s’engagea pas dans cette direction – cela aurait été trop simple – mais la provoqua en retour, sans détourner le regard.

Pourtant, il n’avait pas complètement tort ; Avalon lui parlait peu ces derniers temps. Leur complicité n’était plus la même et leur lien était assombri par les tensions qui émaillaient leurs journées. Ils se confiaient moins franchement l’un à l’autre, passaient moins de temps ensemble. Roy se montrait très entreprenant vis-à-vis de cette grossesse. Il en parlait beaucoup, se projetait déjà dans leur future parentalité et attendait sûrement qu’elle l’accompagne sur ce chemin. Or, plus il amenait le sujet et plus Avalon se braquait. Elle étouffait, donc elle fuyait.

Elle n’était plus autant sidérée qu’au mois de décembre, lorsqu’on lui avait annoncé sa grossesse. Avec le temps, elle s’accoutumait un peu à l’idée – les rendez-vous médicaux l’aidaient à rendre ça plus réel, plus tangible. Mais elle ne parvenait pas pour autant à se sentir entièrement connectée au bébé qu’elle portait. Une sensation d’étrangeté persistait et elle ne parvenait pas à passer au-dessus. Elle se sentait toujours dépossédée de son corps et ne savait pas comment se le réapproprier.

Alors oui, peut-être qu’elle avait choisi de se plonger dans ce qui lui semblait être un quotidien « normal » pour, justement, retrouver un peu de normalité dans sa vie. Elle tâchait non pas de mener sa vie comme si de rien n’était mais de retrouver sa vie, ou tout du moins une partie. Alors, oui, elle travaillait, n’en déplaise à Roy qui persistait à lui dire qu’elle devait se reposer à chaque fois qu’ils se croisaient. Quoiqu’elle fasse, ce n’était jamais assez, songea Avalon alors que Roy reprenait la parole.

Le reproche à peine voilé qu’il lui fit la heurta de plein fouet et son regard se fit plus dur. C’était donc ça ? Il lui reprochait la découverte tardive de cette grossesse ? L’indignation qu’elle ressentit ne suffit cependant pas à masquer la culpabilité qu’il avait réveillé en elle et qui n’avait cessé de grandir depuis le jour où on lui avait annoncé qu’elle était enceinte.

« Ah, ça y est ? ironisa-t-elle pour masquer qu’il l’avait blessé. C’est aujourd’hui qu’on commence à me blâmer pour la grossesse ? »

L’air s’était brusquement chargé d’une électricité presque perceptible entre eux. Le visage sombre d’Avalon trahissait largement ses pensées agitées et peu amènes.

« Le problème, c’est que tu peux pas lâcher cinq minutes mon utérus, en fait. Si je t’écoutais je devrais passer mes journées allongée sur un putain de canapé à attendre d’accoucher. Excuse-moi d’avoir une vie. » lâcha-t-elle d’une voix dure.


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Blesse-moi encore [Roy & Avalon] Icon_minitimeLun 5 Sep 2022 - 18:16
Un mouvement de recul saisit Roy à l’accusation que formula sa partenaire. La blâmer pour sa grossesse ? Quand est-ce qu’il avait dit ça ? Il n’y avait personne à blâmer pour cette grossesse et il en était conscient, ils s’étaient protégés de cette éventualité avec une contraception mais il n’y avait jamais 100% de réussite, c’était une pure malchance. Certes, ensuite, ils n’avaient rien vu mais sur ce point, Roy blâmait davantage les médecins de n’avoir pas exploré cette piste plus tôt. A ses yeux, il n’y avait rien dans ses paroles qui pouvaient suggérer qu’il rendait Avalon responsable de la grossesse. Il commença à protester :

« Quoi ? Mais j’ai pas d… »

Elle le coupa en plein élan. Et la suite de son discours raviva l’agacement de Roy. Il protesta, du tac au tac :

« Y a jamais de demi mesure avec toi, hein. Je te dis pas d’arrêter ta vie mais quand même, y a un juste milieu entre ça et passer tes week-ends à bosser ! »

Mais un peu de mesure était trop demander à la mauvaise foi d’Avalon, il le savait bien. Dans d’autres circonstances, par le passé, il avait pu en rire, voire trouver que cela faisait partie de son charme. Mais quand il s’agissait d’un sujet aussi sérieux que sa santé à elle et celui de leur bébé, Roy trouvait sa mauvaise foi beaucoup moins drôle, tout à coup. Il aurait pu choisir d’autres mots pour lui faire comprendre que tout ce qu’il essayait de lui dire, c’était qu’il s’inquiétait pour elle. Mais à cet instant où la colère et la frustration prenaient possession de lui, il ne parvint pas à choisir les mots justes. A la place, il laissa s’écouler tout ce qu’il contenait enfermé en lui, que sa patience -assez réduite de manière générale- commençait à ne plus pouvoir contenir. Il déversa ses inquiétudes et ses doutes par la même voie du reproche, sur un sujet plus sensible encore pour lui comme pour elle :

« Et ça veut dire quoi, que je lâche pas ton utérus cinq minutes ? C’est quoi le problème, ça te soûle à ce point que je vienne te parler du bébé ? Notre bébé ? Parce que c’est ça qu’il y a ton utérus, Av’, rien de plus ni moins que notre bébé dont tu veux tellement pas parler que la simple idée de réfléchir à des prénoms te fait tirer la tronche. »

Il avait évoqué le sujet en début de semaine. Elle avait esquivé, prétendant n’avoir pas le temps, avec une espèce d’embarras qu’elle avait mis sur le compte de prétextes vaseux. Roy n’avait rien dit, il avait ravalé sa contrariété, sa préoccupation, il avait laissé le sujet couler comme elle le demandait. Tout comme il avait laissé couler le sujet de la chambre à préparer, et de manière générale, tous les sujets ce qui concernaient la future vie de leur bébé, en dehors de sa santé actuelle. Toutes ses tentatives pour apporter un peu de positif dans leurs échanges sur leur parentalité à venir se soldaient par un échec. Avalon n’avait l’air de n’avoir aucune envie de rêver avec lui sur leur enfant, elle leur refusait tous ces moments un peu sympathiques de la grossesse, entre le choix du prénom, la décoration de la chambre, les contacts avec leur fille qui bougeait dans son ventre, les discussions sur la personnalité qu’elle pourrait avoir en grandissant. Elle ne voulait pas s’impliquer de cette manière et Roy ne savait pas ce qu’il était sensé en comprendre.  


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Blesse-moi encore [Roy & Avalon] Icon_minitimeLun 5 Sep 2022 - 19:38
« Tous mes weekends ? repris Avalon d’une voix forte. Mais c’est toi qui es dans l’abus, je t’ai demandé deux heures sur un samedi ! »

Mais un peu de mesure était trop demander à la mauvaise foi de Roy, de toute évidence. Il lui parlait comme si elle passait ses nuits au ministère ! Elle était peut-être rentrée un peu tard cette semaine mais, sinon, elle se débrouillait toujours pour aller récupérer Vivianne à la garderie, après l’école. Elle travaillait beaucoup moins depuis qu’elle avait obtenu la garde de sa sœur mais, ça, Roy était incapable de le voir. Il pointait seulement ses manquements, avec le ton de celui qui savait mieux.

Mais ce n’était pas sa charge de travail qui était au cœur de leurs tensions. Ce n’était pas les heures qu’Avalon passaient au ministère, c’était celles qu’elle ne passait pas auprès de lui, à préparer l’arrivée de leur fille. Le sujet, s’il ne faisait que planer entre eux depuis le début de leur conversation, fut brusquement ramené sur le devant de la scène par les reproches que Roy verbalisa enfin.

Il y avait, dans sa tirade, de vives inquiétudes qu’Avalon aurait pu saisir si elle ne les avait pas accueillies avec tant de colère. Dans son discours, elle ne perçut que des accusations qui vinrent la heurter avec violence. Pour parer à sa fragilité, les paroles de Célice lui revinrent en tête et son visage blême se durcit à nouveau. Roy lui reprochait son manque d’investissement dans cette grossesse alors qu’il n’avait aucune idée de ce qu’elle ressentait. Il attendait qu’elle soit capable de se réjouir, comme lui, de la venue de leur fille, alors qu’ils ne vivaient pas du tout la même expérience. Evidemment qu’il trouvait ça réjouissant de choisir un berceau, songea-t-elle avec aigreur, il n’était pas celui qui devait apprendre à cohabiter avec un autre humain.

L’injustice de ses propos sauta aux yeux d’Avalon, sans toutefois la dégager de celle culpabilité sur laquelle il venait si soigneusement d’appuyer. Plutôt que d’essayer d’apaiser la situation, elle réagit tout aussi vivement que lui :

« Mais putain, t’es sérieux ? Tu veux quoi ? Que je m’excuse de pas avoir encore réfléchi à un prénom ? Pardon, pardon, d’être celle qui doit faire grandir notre fille dans mon utérus. Pardon d’avoir autre chose en tête que de choisir la couleur de son berceau. » Ses yeux lançaient des éclairs. « Vraiment, c’est dommage que tu puisses pas la porter, hein. T’aurais géré ça sans problème, c’est sûr. Elle aurait eu une chambre, un prénom, et un avenir tout tracé dans la semaine. » Elle ajouta, en reculant légèrement : « Je sais pas ce que tu veux que je fasse de plus, bordel ! »  


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Blesse-moi encore [Roy & Avalon] Icon_minitimeMar 6 Sep 2022 - 19:59
Roy avait déjà vécu une première grossesse. Mais elle ne s’était pas tout à fait déroulée comme il aurait aimé qu’elle se déroule, et ce, pas seulement parce qu’il n’avait pas prévu à ce moment là de mettre une femme enceinte. Le contact avec Joséphine n’avait pas toujours été facile. Ils s’entendaient plutôt bien jusque là, heureusement, Roy ne pouvait pas trop se plaindre non plus, pour le moment, ils avançaient dans leur co-parentalité et les choses auraient pu être bien pires compte tenu des circonstances. Mais Joséphine avait eu -et avait toujours- cette tendance à placer sa position de mère au-dessus de tout, à lui faire sentir que lui, il n’était que l’homme dans cette histoire, l’homme qui ne faisait pas grand-chose, celui qui n’était pas si utile dans une grossesse, le deuxième parent dont on pouvait se passer, au fond. Elle avait posé les choses ainsi dès le début, d’ailleurs, elle lui avait clairement dit qu’elle n’avait pas besoin de lui et ce n’était pas seulement une manière de marquer son indépendance de mère célibataire. C’était un peu plus vicieux que cela. Roy n’avait jamais senti qu’elle le considérait comme aussi important qu’elle-même dans la vie et l’épanouissement de leur fille. S’il était là, tant mieux, Joséphine en était heureuse pour Teresa. Mais s’il n’était pas là… eh bien ce n’était pas si grave.

Roy avait donc démarré sa paternité sur des bases où il avait l’impression de n’être là qu’à titre facultatif, comme s’il était sur un siège éjectable, pendant que Joséphine, elle, trônait sur son siège sacro-saint de mère contre lequel il ne pourrait jamais rivaliser. Et quelque part, les circonstances ne l’aidaient pas non plus. De fait, il serait moins présent dans la vie de Teresa, puisqu’elle allait passer beaucoup plus de temps avec sa mère qu’avec lui, c’était la garde dont ils avaient convenu, pour le bien et l’équilibre de leur bébé.

Alors quand Avalon décréta qu’elle était celle qui faisait grandir leur bébé dans son utérus et qu’elle n’avait pour conséquent pas le loisir de choisir la couleur de son berceau, elle appuya exactement à cet endroit un peu douloureux chez Roy. Il eut l’impression qu’elle le renvoyait à sa place de père qui pouvait s’occuper de choses futiles pendant qu’elle, la mère, faisait le gros du travail. Il prit sa remarque comme un « va jouer ailleurs et ne me prends pas la tête pendant que moi je m’occupe des choses sérieuses ».

Et il le prit plutôt mal. Cela l’empêcha d’entendre le réel fond de ce qu’elle disait, la faiblesse qu’elle laissait légèrement voir en raillant qu’il aurait sûrement mieux fait qu’elle, à sa place, et derrière toutes ces couches de colère et d'ironie, le début d’aveu qu’elle se sentait dépassée.  

« Et moi, tu veux que je fasse quoi, au juste ? s’écria t-il. A t’entendre, je suis bon qu’à m’occuper de trucs de merde pour lesquels t’as pas le temps. Non, je porte pas ce bébé, mais qu’est-ce que tu veux que j’y fasse ? Je fais de mon mieux, là ! Je fais tout ce que je peux ! »

Il eut un mouvement ample de ses bras, désignant sa propre impuissance. Puis il inspira un coup et lâcha d'un ton brut :

« Je veux juste… Je sais pas, qu’on commence un peu à se projeter, c’est pas si délirant que ça comme demande ! Ça fait plus d’un mois qu’on sait, maintenant ! Et elle arrive dans trois mois, ça va passer vite. Alors j'en sais rien, peut-être que t'as pas envie de faire ça mais… » Comment faire comprendre les choses à Avalon ? Il songea qu’une analogie serait sans doute parlante. « Moi aussi, ça me faisait bizarre avec Teresa, au début, de me dire que j'avais fait un gosse qui allait bientôt débarquer. Et ça m’a aidé de faire toutes ces petites conneries là, le choix du berceau et la couleur des murs de la chambre, parce que… Je sais pas, ça rend le truc plus réel et plus agréable, aussi. »


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Blesse-moi encore [Roy & Avalon] Icon_minitimeMar 13 Sep 2022 - 19:33
Le ton était monté rapidement mais leur dispute franchit un nouveau cran lorsque Roy éleva la voix plus franchement, manifestement en colère contre elle. Avalon eut un mouvement de recul alors qu’elle se défendait du tac-au-tac :

« Mais j’ai jamais dit ça ! »  

Il déformait complètement ses propos. Elle n’avait jamais sous-entendu qu’il se chargeait des choses futiles, elle lui confiait plutôt qu’elle ne se sentait pas capable de gérer tout ce qui concernait la naissance du bébé, étant déjà occupée à appréhender sa présence. Mais, dans cette conversation où chacun interprétait les propos de l’autre sous le prisme de ses propres peurs, ils ne parvenaient ni à se comprendre, ni à s’apaiser. Ils déversaient du sel sur leurs plaies ouvertes, s’étonnant ensuite d’être blessés.

Et ce fut une nouvelle remarque qui piqua Avalon lorsque Roy, sur un ton presque désinvolte, lui asséna que cela faisait déjà plus d’un mois qu’ils avaient appris sa grossesse. Mais justement, eut-elle envie de lui répliquer, ce n’était rien, un mois ! Cependant, il enchaîna immédiatement, sur un sujet qui la révolta encore davantage. « Moi aussi » disait Roy comme s’il savait, comme si sa grande expérience de la maternité pouvait la guider sur le chemin obscur et semé d’embuches qu’elle arpentait depuis quelques semaines. Cette comparaison fut la goutte d’eau qui fit déborder le vase déjà trop plein d’Avalon. Elle souffla du nez, dans un rire sans joie, tout en secouant la tête.

« Mais arrête avec ça ! Ça n’a rien à voir ! »

Ce n’était pas la première fois que Roy lui servait une analogie similaire. Peut-être cherchait-il ainsi à la rassurer mais ce n’était pas du tout l’effet que ses paroles avaient sur Avalon. Au contraire, elle se sentait frustrée de ne pas parvenir aux mêmes conclusions que lui, agacée que sa grossesse soit sans cesse comparée à celle de Joséphine alors qu’elles étaient radicalement différentes. Elle n’attendait pas sa troisième fille, elle. Elle attendait son premier enfant et elle avait découvert cette grossesse bien trop tard pour se faire à cette idée. Elle n’avait pas eu le premier trimestre pour appréhender la nouvelle, faire passer le choc de l’annonce. Non, elle était entrée dans cette maternité au milieu du deuxième trimestre et devait gérer la sidération liée à cette nouvelle, les transformations radicales de son corps, l’impact de cet évènement sur sa vie, son couple, sa profession, tout en naviguant dans un milieu qui ne lui était pas familier, avec un jargon qu’elle peinait encore à comprendre.

Mais tout allait bien, elle avait eu un mois pour s’y faire.

Après tout, il suffisait qu’elle achète quelques pyjamas pour rendre l’expérience un peu plus agréable.

« Putain mais t’es gonflé de venir me faire la morale alors que t’as eu quoi ? Sept mois pour accepter la naissance de Teresa ? Ça fait un mois que j’ai appris que j’étais enceinte, Roy ! Trente putains de jours ! Mais c’est bon, t’as décidé que c’était assez parce que pour toi c’est assez. Mais tu m’as demandé si c’était assez ? Son ton était aussi brut que le sien lorsqu’elle lâcha : T’es là, à me dire que toi, quand Joséphine était enceinte de Teresa… Mais merde, je suis pas Joséphine ! Le bébé qu’on attend, c’est pas Teresa ! Alors arrête de faire comme si les choses étaient pareilles ou comme si on vivait la même chose. »

Le cœur d’Avalon s’était drastiquement accéléré dans sa poitrine. Depuis quelques jours, elle était aussi plus essoufflée alors elle prit une seconde pour inspirer avant de poursuivre :

« T’es là, à m’expliquer avec tes grosses couilles ce que je dois ressentir ou ce que je dois faire. Mais c’est toi qui te lèves tous les matins avec un humain qui grandit littéralement dans ton corps ? Et pas un humain que t’aurais eu le temps de voir grandir, oh non, un bébé qui n’existait pas et qui, du jour au lendemain, avait cinq mois ! Non. Non, c’est moi qui me tape le corps brusquement déformé, les douleurs soudaines et les touchers vaginaux tous les quatre matins. Mais c’est sûr que choisir la couleur de la chambre, ça va tout régler. »


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Blesse-moi encore [Roy & Avalon] Icon_minitimeJeu 15 Sep 2022 - 19:04
Finalement, Avalon explosa. Elle exprima plus de choses en une poignée de secondes, dans ce bureau, le regard luisant de colère, sur un ton excédé, qu’elle ne l’avait fait en cinq semaines. Roy aurait du s’en sentir soulagé. Après tout, c’était tout ce qu’il attendait, tout ce qu’il avait espéré provoquer au début de cette conversation. Il avait quelques réponses, dans tout ce discours brutal, quelques éléments de compréhension sur le comportement d’Avalon qu’il ne reconnaissait plus. Mais il n’y eut aucun soulagement chez lui. Seulement un violent choc qui coupa net sa colère à lui et éteignit sa voix tempétueuse pour laisser toute la place à celle d’Avalon.

Non, il ne lui avait jamais demandé si c’était assez pour elle, un mois pour appréhender et accepter la grossesse qu’elle était en train de vivre. Oui, lui, il avait mis davantage de temps à faire ce chemin quand il s’agissait encore de Joséphine, l’année dernière. Mais ce n’était pas tout à fait la même situation, se défendit une voix intérieure. Joséphine et lui n’avaient pas du tout le même lien. Ils ne s’étaient jamais aimés, leur relation n’avait été que courte et passagère, sans le moindre engagement, ils s’étaient oubliés aussi vite qu’ils s’étaient connus, ils ne se seraient probablement jamais revus s’il n’y avait pas eu un bébé pour les rappeler l’un à l’autre. Ils n’avaient tellement pas de lien que Joséphine avait même préféré ne rien lui dire, au début. Avec Avalon, ce n’était pas pareil. Ils étaient en couple, ils vivaient ensemble, ils s’aimaient plus que tout, ils avaient des projets ensemble, dont celui de faire un enfant à eux, un jour. Sans vraiment qu’il ne se le formule, Roy avait cru que c’était suffisant pour faciliter et accélérer le chemin d’Avalon, en comparaison de ce qu’il avait vécu avec Joséphine.

Sauf qu’il y avait plein d’autres points sur lesquels leurs situations n’étaient pas similaires et qu'il n'avait pas voulu voir. Elle et lui ne traversaient tout simplement pas la même chose. Ce qu’elle avait voulu dire en invoquant son utérus, quelques instants plus tôt, apparut à Roy sous un angle un peu différent. En effet, il n’était pas celui qui portait un bébé, qui en voyait son corps déformé, douloureux, touché par un tas de personnes qu’il ne connaissait qu’à peine. Présenté ainsi, il ne pouvait pas dire qu’ils passaient par la même chose, c’était sûr.

Abasourdi face à ce déversement brutal d’informations, Roy commença à percevoir un peu des émotions et des questionnements que sa partenaire avait refusé de lui montrer jusqu’à maintenant. Il fut touché, perturbé par cette longue tirade qu’il n’avait pas vue venir et un peu piqué par sa dernière remarque. Son ton avait perdu de sa fureur mais il était toujours tendu et agité quand il balbutia :

« Mais… Tu… Comment tu voulais que je comprenne tout ça, au juste ? Je t’ai posé des questions pourtant, se défendit-il. Ok, je t’ai pas exactement demandé s’il te fallait plus de temps mais… Je t’ai demandé tellement de fois ce que tu ressentais, si ça allait, si je pouvais faire quelque chose. »

Beaucoup trop de fois pour Roy Calder, d’ailleurs, il s’était à peine reconnu parfois, il n’était pas tout à fait le genre à lancer des grandes conversations sentimentales, à demander à sa chérie de lui dire tout ce qu’elle avait sur le coeur, comme s’il était une espèce de psy.

Cela étant dit, Avalon n’était pas non plus le genre à répondre à ce type de sollicitations.

Un soupir échappa à Roy, autant parce qu’il se sentait dépassé à cet instant que pour tenter de relâcher un peu la pression qui tendait tous ses membres. Il passa une main nerveuse dans ses cheveux, son regard fuyant vers le sol, tandis qu’il réfléchissait. Avalon avait besoin de plus de temps, voilà ce qu’il comprenait de cet échange houleux. Le mois qui s’était écoulé ne lui avait pas permis de s’ajuster à son nouveau corps, c’était la barrière qui l’empêchait de se projeter plus loin avec lui. Là-dessus, Roy n’avait en effet aucune expérience, il voulait bien la croire quand elle affirmait que ce n’était pas assez de temps. Mais une part de lui restait toujours inquiète. Est-ce que les trois mois qu’il leur restait allaient lui suffire ? Allait-elle s’y faire un jour ? Ou est-ce qu’elle resterait dans ce mal-être et ce malaise jusqu’à la naissance de leur fille ? Voire même après ? Un gouffre d’incertitude et d’appréhension s’ouvrit sous ces pieds, face à cette nouvelle donnée. Et si le temps ne permettait toujours pas à Avalon de se connecter avec ce bébé qui grandissait en elle ?

A cet instant, Roy commença à paniquer intérieurement. Il lâcha, la voix moins forte que tout à l’heure mais surtout plus inquiète :

« Je peux pas savoir comment t’aider si tu me dis pas où t’en es, Av’. Là, tu me dis que t’as besoin de plus de temps, bah… Ok, moi j’ai rien contre le principe. Mais ça veut dire quoi, du coup, juste on se contente d'aller aux rendez-vous à l'hôpital, on attend et… On voit ce qui se passe ? »

Il priait pour qu’elle sache mieux que lui ce dont elle avait besoin, qu’il ait une espèce de mode d’emploi, une liste d’actions qu’il pourrait suivre dans les temps à venir car il ne supportait pas l’idée de se retrouver impuissant.


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Blesse-moi encore [Roy & Avalon] Icon_minitimeJeu 22 Sep 2022 - 16:16
Avalon n’avait pas réfléchi ; sa colère et ses doutes s’étaient déversés sans qu’elle ne puisse les retenir dans sa longue tirade qui la laissa silencieuse et essoufflée. Elle n’avait décoloré pour autant ; son regard était toujours sombre, sa mine fermée, ses bras croisés sur sa poitrine. Roy et elle n’avaient jamais parlé aussi sincèrement depuis qu’elle avait découvert sa grossesse. Cela faisait un mois qu’ils entretenaient une relation teintée par le malaise. Cette dispute venait de les faire rompre avec le silence qui s’était installé entre eux. Au fond, ce n’était pas plus mal. La colère était quelque chose qu’ils connaissaient et qui, bien que malsaine, leur permettait de retrouver une dynamique plus familière. Leurs regards noirs s’affrontaient alors qu’ils refusaient tous les deux de baisser leurs gardes, ils s’énervaient, criaient et – bornés comme ils l’étaient – refusaient de lâcher l’affaire avant d’avoir obtenu gain de cause.

Néanmoins, Avalon et Roy ne s’étaient pas disputés aussi sérieusement depuis plusieurs mois – une éternité, aux yeux Avalon, car tant de choses s’étaient écoulées depuis ce moment-là. Elle se souvenait pourtant des mots durs qu’ils avaient échangés alors qu’elle était venue le trouver aux Folies pour régler une sombre affaire entre les Veilleurs et la Milice. Depuis, ils se chamaillaient souvent et, même si le ton montait très vite entre eux, ce n’était jamais vraiment sérieux et ils redescendaient tout aussi rapidement. Aujourd’hui, cependant, ce n’était pas pareil. Cela se sentait dans l’atmosphère lourde qui semblait crépiter autour d’eux.

« J’avais pas envie d’en parler. » répondit-elle durement aux remarques de Roy.

Désormais, c’était trop tard. Si Avalon n’avait pas tout dit des peurs qui serraient son cœur, elle sentait bien que Roy en avait saisi la plupart. Cela se voyait aux questions qui dansaient dans son regard, à son visage qui pâlissait alors qu’il prenait conscience de l’ampleur de sa détresse. Lorsqu’il reprit la parole, d’une voix inquiète, Avalon sentit son estomac se serrer. Elle n’avait aucune réponse à offrir à ses questions. Aucune piste, aucun manuel à lui donner. Elle était perdue et, si elle n’avait pas oublié le conseil de Célice, elle commençait à penser que ce ne serait pas assez.

Et si ce n’était pas de temps, dont elle avait besoin ?

« Je… Je sais pas, balbutia-t-elle à son tour. J’en sais rien. »

La boule qui venait de se loger dans sa gorge l’empêcha d’ajouter quoique ce soit. Sa colère était retombée mais la raideur n’avait pas quitté son corps. Les muscles de son dos étaient tendus, si bien qu’elle en avait mal. Reculant d’un pas, Avalon vint s’appuyer contre le bureau. Ses yeux trouvèrent ceux de Roy mais soutenir son regard et ses questions silencieuses lui sembla insupportable.

« On… On a qu’à y réfléchir chacun de notre côté. » proposa finalement Roy, rompant avec ce silence qui s’éternisait.

Avalon hocha la tête.

« Ouais, lâcha-t-elle du bout des lèvres. Si tu veux. »

[RP TERMINE]



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Blesse-moi encore [Roy & Avalon] Icon_minitime