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Ho she's sweet but a psycho [Grace]

Fergus Avner
Fergus AvnerChef de la mafia
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Profil Académie Waverly
Ho she's sweet but a psycho [Grace] Icon_minitimeLun 8 Mar 2021 - 19:47

26 Avril 2011

Grace a une maison qui ressemble encore plus au domaine ultra-sécurisé d’un mafioso paranoïaque. Pour arriver jusqu’au porche, il faut passer par le contrôle d’une double porte blindée verouillées par signatures magiques, puis marcher le long d’un large chemin de terre aménagé encadré par un jardin luxuriant qui n’a rien à envier à une mini jungle domestiquée. Le long de ce chemin il y a des types, évidemment, et des artefacts de surveillances et de traçage pour s’assurer que l’identité du visiteur ne change pas et se stocke correctement dans la base de données technomagique, installée quelque part dans la villa. Des yeux scrutent partout, prêt à déclencher les pièges, l’alarme, n’importe quoi capable de griller sur place les intrus, et tous ces mécanismes sont destinés à la tranquillité de Grace Washington.

C’est le trajet que Fergus a fait. Son ex-femme n’a pas encore décidé de le mettre sur liste noire c’est pourquoi il a pu faire sa balade presque les mains dans les poches et s’immobiliser devant la superbe porte aux montants Art nouveau d’inspiration Française avec un semblant d’attitude détachée. Il surveille tout de même du coin de l’œil que personne ne cherche à le plaquer au sol par derrière.

Simple précaution.

Et puis, bon. L’air détaché, c’est une façade. Fergus est extrêmement nerveux. Il a remarqué, depuis le temps, qu’il est incapable de ne pas se laisser écraser par une tension déroutée lorsqu’il rencontre Grace. En fait, ce n’est même pas vrai. Un simple message pear suffit à dérégler sa tension. Il a le sang qui s’électrifie, et vraiment, peut-importe que ce soit une bonne ou une mauvaise nouvelle. Il lui suffit de voir son nom sur l’écran.

Alors en vrai, c’est pire.

Et aujourd’hui, c’est pire encore.

Laoise ne s’est rien fait de grave, heureusement. Digérer la terreur qui l’a pris aux tripes en entendant le cri de sa fille et en découvrant son petit corps chiffonné contre le sol de son salon a été une étape difficile et y penser lui retourne encore l’estomac. Confronter Grace qui le fait déjà trembler sans qu’il soit question de Laoise, c’est trop pour lui. Mais il n’a pas le choix. Fergus est un homme, il doit faire face, et ne pas se laisser intimider.

On le fait pénétrer dans le hall puis on le guide avec beaucoup de politesse, et un peu de condescendance -il n’est pas exactement le bienvenu chez Grace Washington- jusqu’au gigantesque salon principal de la villa. Grace a des goûts dont le luxe et l’immodération dépasse largement les sien. Elle n’est pas vraiment du genre mobilier rectangulaires aux angles minimalistes. Elle aime assez les fioritures, les entrelacs, un petit côté baroque qui frôle le rococo. Tout ce que Fergus détesterai en temps normal si ça n’était pas paré du goût esthétique de Grace qui trouve dans le trop une sorte d’équilibre magique qui rend son choix décoratif de bon goût, malgré tout. Dans son horloge en cristal, une bulle rose pâle descend et monte au rythme des secondes. Les grandes aiguilles s’agitent du bruit incessant du temps et laisse Fergus seul dans le silence de la pièce. Il n’ose s’assoir sur le canapé de cuir crème. Il préfère regarder par la baie vitrée en arceau les équilibres des plantes faussement sauvages qui encombrent le jardin d’hiver. Cette maison est délirante et aussi magnifique que sa propriétaire, se dit Fergus avant de se reprendre mollement. Il a tenté tellement longtemps de s’interdire ce genre de pensée, étonnement, au vu de sa discipline, sans y parvenir que désormais il n’y fait plus attention.

Il a les mains crispées dans les poches de son pantalon et meurt d’envie d’allumer une cigarette. Sauf qu’il ne se sent pas chez lui et n’envisage pas de poser ses cendres là où Grace ne le lui aurait pas permis – il ne sait pas pourquoi.- Il lui est toujours étrange aussi d’être confronté à ce grand salon. Les autres pièces de la maison, les chambres, la cuisine, il ne les a jamais vues, lui semble-t-il. Grace le reçois toujours ici. Comme s’il était une sorte de visiteur délégué par un parti politique venu régler une question professionnelle et qu’il fallait qu’il se tienne à l’écart de la vie intime de sa cliente. Pourtant tout porte l’empreinte de Grace. Tout charrie son odeur. Son tempérament, son caractère, sont dans tous les objets et leur disposition. L’ambiance qu’il ressent sert le cœur de Fergus. Il respire lentement et profondément en tâchant d’ignorer le mélange d’anxiété et d’impatience qui l’agite. Des émotions fortes dont il n’a pas l’habitude.

Puis entre Grace. Il se retourne au son de ses talons qui claquent, d’abord sur le marbre du hall (dont le grand escalier qui mène à l’étage occupe le centre) puis sur la moquette qui a étouffé ses pas et l’a immobilisé. Elle demeure loin de lui, et il s’est retourné pour lui faire face. Comme toujours, sa vision lui coupe le souffle et mue dans sa gorge une boule douloureuse. Elle a l’air épuisée, et franchement peu ravie de le voir. Ça, il connaît, alors il tente de rester dur et froid. Mais il se sent tout petit face à elle.

- Tu vois, elle va bien, amorce-t-il, c'était pas la peine de m’engueuler au téléphone.

Ce n’était pas du tout ce qu’il aurait voulu dire, en fait, il a terriblement honte de ce qui s’est passé, et ça ne concerne pas que Laoise, mais la sensation de culpabilité habituelle est décuplée par les récents évènements. Pour une fois, il a conscience de faire le brave mais d’avoir face à lui quelqu’un de beaucoup plus fort.

En plus, il n’a pas du tout envie de se fâcher avec Grace. Mais il ne sait pas ce qui les pousse tous les deux à n’avoir jamais de trêves. C’est comme ça. Il la provoque sans doute pour se sentir moins merdeux.


   
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Ho she's sweet but a psycho [Grace] Icon_minitimeLun 8 Mar 2021 - 22:33
Ho she's sweet but a psycho [Grace] Avagra10
Grace Washington, 31 ans, pop star et mère de Laoise

Quand on regarde la pile de boite de médicaments éparpillés à côté du lavabo, on pourrait croire que je suis une de ces stars de la pop junkie, accros aux médocs, occupée à se faire planer après une tournée éprouvante, pour survivre à l’espèce de descente qui suit les retombées d’adrénaline. Je ne le suis pas. Chacune de ces boîtes est prescrite par mon médecin, pour des usages bien précis que je respecte. C’est un traitement que je suis scrupuleusement depuis neuf ans, maintenant. J’avale simplement un cachet d’aspirine en plus, pour lutter contre la migraine qui suit systématiquement toutes mes tournées, comme si mon corps confronté au silence après avoir été surexposé au bruit essayait de se réadapter en emplissant ma tête de bruits imaginaires.

En avalant mon verre d’eau, je range soigneusement toutes mes boîtes dans l’armoire à pharmacie fermée à clé -c’est ma salle de bain mais on ne sait jamais que Laoise y entre, je ne veux pas laisser ça à sa portée. Dans l’apparent fouillis d’objets et de décoration de chacune des pièces, tout reste adapté à des enfants, tout ce qui pourrait être dangereux est hors de portée ou protégé par des sortilèges. J’ai développé des réflexes que certains qualifieraient de maniaques, mais j’essaye simplement de protéger ma fille. Cette maison est ce qu’il y a de plus sécurisé pour moi et surtout pour elle. Les accidents, les paparazzis, les psychopathes, les fans envahissants, tous ces dangers me suivent à la trace depuis des années, et je dépense toute mon énergie disponible à faire en sorte que Laoise les côtoie le moins possible.

Fergus y est attentif aussi, je le sais. Je pourrais dire beaucoup de choses de cet homme qui a été mon salut et ma descente aux enfers à la fois, mais je ne peux pas l’accuser d’être un mauvais père. Il tient à Laoise probablement aussi fort que moi, je le perçois à travers le regard de ma fille que je connais par coeur.

Cela étant dit, Laoise a frôlé la commotion cérébrale après trois jours passés chez lui. Alors il a vraiment intérêt à avoir de bonnes explications.

Je soupire d’épuisement en passant de l’eau sur mon visage, dans une vaine tentative de me réveiller un peu. J’espère au fond que cette conversation que j’ai réclamé à mon ex quand il a déposé Laoise le matin même se réglera rapidement. Ma seule envie est de me glisser sous mes épaisses couvertures et sombrer dans le coma jusqu’à demain matin, et pas vraiment d’affronter la mauvaise foi et la fierté mal placée de Ferguson Avner. Je sais déjà ce qu’il va dire. Il trouve toujours que je suis excessive. Certaines choses ne changent jamais, même après dix ans.

Mon reflet dans le miroir trahit ma fatigue. Tant pis. Je n’ai ni le temps ni l’envie de camoufler mes cernes avec du maquillage. Cela fait des années que je ne me donne plus aucune exigence sur moi-même quand il s’agit de rencontrer Fergus. Il aura face à lui la Grace claquée, aux cernes violettes, en t-shirt rentré dans son jean, avec ses cheveux vaguement ramassés en chignon.

En repassant dans le couloir de l’étage, je m’approche par réflexe de la porte entrouverte de la chambre de Laoise, légèrement éclairée par sa veilleuse en forme de licorne, dont elle ne s’est jamais séparée depuis qu’elle a deux ans. J’ai toujours respecté chacun de ses rituels qui participent à la rassurer ou à la faire sentir bien, sans émettre de jugement là-dessus, peu importe ce qu’en disent les autres, toujours prompts à juger sans savoir ce que devrait faire ou ne plus faire une enfant de neuf ans. J’ai toujours trouvé ce genre de règles stupides, de toute manière, et destructrices de toute forme d’imagination ou de toute personnalité un peu en dehors du cadre. Je sais ce que c’est, d’être la fille différente, marginale, loufoque. Je n’en ai jamais eu honte et je préfère que ma fille apprenne à être fière de ce qu’elle est également. Alors si elle veut dormir avec une veilleuse et un doudou jusqu’à ses trente ans, ainsi soit-il.

« Maman ? » résonne sa voix dans la semi obscurité de sa chambre.

Je m’approche aussitôt, à pas légers.

« Tu ne dors pas encore, ma puce ? Tu as mal quelque part ?
-Non, je… »

Je m’assieds sur le rebord de son lit, en posant doucement ma main sur ses cheveux blonds. Elle arbore cet air préoccupé qui la fait toujours ressembler à son père, et d’ailleurs c’est lui qu’elle évoque, d’une petite voix :

« Tu n’es pas fâchée contre papa, hein ? »

L’inquiétude transparente dans ses yeux bleus me peine un peu, je m’efforce de rester calme, rassurante, en demandant doucement :

« Pourquoi tu dis ça ?
-Je sais pas, tu… avais l’air fâchée tout à l’heure. C’est parce que je suis tombée ?
-Ne t’inquiète pas de ça, ma chérie. Tout va bien. » J’hésite un peu. Quelque chose dans le regard de Laoise, une espèce de prière que je perçois, me pousse à ajouter : « Je ne suis pas fâchée, j’étais juste inquiète pour toi.
-Ça va, tu sais. Le médicomage il a dit que j’avais très bien géré et que mon bras serait bientôt comme neuf !
-Je sais, mon bébé. Tu es une fille très forte. »

J’appuie mes paroles d’un baiser sur son front et je laisse Laoise venir contre moi comme elle peut, un peu entravée par son bras en écharpe. Un temps indéfini s’écoule, celui nécessaire à ce que ma fille s’endorme dans mes bras, et à ce que de mon côté, je mette dans l’ordre dans mes pensées nourries des recommandations de mon psychomage. J’essaye de ne pas mettre Laoise dans des conflits de loyauté entre son père et moi. C’est difficile, parce qu’au fond, je crois que j’aime l’idée de la sentir de mon côté. Je n’ai plus qu’elle, moi. Mais je n’ai pas envie qu’elle se sente responsable non plus, si d’aventure je suis en colère contre Fergus.

Je suis souvent en colère contre Fergus. Moins qu’avant. Beaucoup moins qu’avant. Et mes émotions ont eu le temps de redescendre un peu depuis ce matin en voyant que Laoise semblait aussi insouciante et énergique que d’habitude. J’apparais donc probablement plus éreintée que contrariée en descendant un peu plus tard retrouver Fergus au rez-de-chaussée, alertée de sa présence par une notification sur mon Pear, via mes applications de sécurité. Son habituelle fierté bravache remet toutefois un peu de sécheresse dans ma voix quand je réponds tout en prenant place sur un fauteuil, face à lui, jambes et bras croisés :

« Fergus, je suis fatiguée. Explique-moi juste comment Laoise a failli avoir une commotion cérébrale et a eu la chance de n’avoir à la place qu’un bras cassé. »

Je ne fais pas l’effort de masquer mon ironie dans la dernière partie de ma phrase et mon regard sur lui est inquisiteur. Autoritaire, même, je n’ai jamais hésité à exiger ce que je considère me revenir. J’espère des explications, et surtout des solutions pour ne plus voir ce genre de situation se reproduire.
Fergus Avner
Fergus AvnerChef de la mafia
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Ho she's sweet but a psycho [Grace] Icon_minitimeMar 9 Mar 2021 - 14:44
Le truc avec Grace, c’est qu’elle n’a pas du tout conscience de sa beauté. Enfin, quand elle est maquillée, habillée, perchée sur des talons qui haussent sa silhouette de douze centimètres et qu’on a collé sur ses yeux des cils immenses – Fergus a déjà vu faire un nombre incalculable de fois – là, elle se trouve un style mais sinon, ça manque de classe. Selon elle. Ça a toujours été : ne fais pas attention, je n’ai pas pris le temps de me coiffer correctement, et elle le pense, rien n’à voir avec Aisling qui se farde et joue les fausses humilité pour faire croire qu’elle ne fait aucun effort. Grace est belle, même la peau éreintée, les yeux cerclés de noirs, les cheveux tressés de folie à la va-vite, avec un tee shirt et des baskets élimées. Et pourtant Fergus a un gout du standing qui ne se perd jamais, plutôt du genre à apprécier une mise en plis et deux secondes de travail sur sa silhouette. Il attend ça des femmes, lui-même fais attention à ce qu’il porte. Mais Grace, elle a quelque chose d’intrinsèque qui lui permet de ne faire aucun effort, et d’être belle. En jogging, en jean, en costume de scène. Maquillée, démaquillée, éblouissante, épuisée.

Fergus ne vois pas ses épaules basses, ses yeux enfoncés, son teint livide. Il voit des gestes nerveux qui dissimulent une insécurité et une tendresse seulement visible lorsqu’elle ne se surveille plus. Un regard perçant et vif et la transparence aiguisée d’une intelligence à fleur de peau. Un charme indémodable dans l’abandon de cette chevelure éparse dans laquelle il a glissé ses doigts tellement de fois.

Mais c’est vrai, elle a l’air épuisé. Il ne conteste pas d’ailleurs, son entrée en matière le surprend ; elle était tellement en colère au téléphone, Fergus s’est préparé à recevoir une gifle, ou une insulte, au moins. Il est presque rassuré de percevoir le fiel dans la fin de sa phrase, ça veut dire qu’elle n’est pas totalement morte. Ni déprimée, ce qui est important. Il est toujours sur le qui-vive avec ça, comme s’il n’arrivait pas à se faire à l’idée que Grace suit un traitement et qu’il n’est plus dans les parages depuis neuf ans pour contrôler ce qu’elle absorbe et l’empêcher d’être dangereuse pour elle-même quel que soit ses phases. D’ailleurs quand il ose poser une question à ce sujet il est généralement mal reçu. Ça le blesse, évidemment. Il n’a jamais arrêté de se sentir responsable d’elle sans comprendre qu’une grande partie des problèmes de leur relation prenait justement racine là-dedans. Du coup, il s’en veut encore plus de l’avoir abandonnée.

Il la fixe un instant sans répondre, assez mal à l’aise. Ce n’est pas que son esprit n’est pas concentré sur elle, ou sur ce qu’elle lui demande, simplement il ne peut pas s’empêcher de se poser des questions en même temps du genre : est-ce qu’il y a quelqu’un en ce moment à l’étage – pas sa fille, il pense plutôt à un homme, - est-ce qu’un jour elle arrêtera de le traiter comme une sorte d’étranger dérangeant ? C’est lui qui est parti mais elle qui a pris la décision de garder cette enfant qu’il ne savait même pas lui avoir fait. Alors.

Fergus ne dit rien, évidemment. Il a une certaine dignité. Il jette un coup d’œil au canapé immaculé et se révolte un peu contre cette gêne insupportable qu’elle est capable de lui faire ressentir instantanément. Il ne se sent déjà pas tout à fait légitime dans son rôle de père, et ça sert bien la cause de Grace quand il s’agit de le déstabiliser, mais il n’a jamais eu l’intention de se laisser faire. Il s’assoit donc de biais pour lui faire presque face, les avant-bras posés sur les genoux et les mains jointes. Grace a croisé tout ce qu’elle pouvait croiser et comme Fergus la connaît par cœur, il lit très bien le message qu’elle veut lui faire passer : parle vite, dépêche-toi, et va-t’en.

Elle aurait quand même pu lui proposer un verre ou quelque chose. Le strict minimum de la politesse. Ça fait neuf ans, après tout.

- Elle est allé chercher un plaid dans sa chambre et elle s’est pris les pieds-dedans en descendant les escaliers. » Évidemment, son ton est froid en réponse à l’ironie amer de Grace. « Qu’est-ce que j’aurais dû faire, la porter pour être sûr qu’elle ne tombe pas ? Elle a neuf ans. » Ajoute-t-il, un peu dur. C’est une réflexion directe au caractère que Fergus juge trop protecteur de Grace. « C’était un accident, elle n’a rien eu de grave, ça arrive. » Puis malgré lui, il ajoute, parce qu'il ne supporte pas son regard inquisiteur sur lui : « J'apprécierai que tu ne tournes pas ça en interrogatoire.»


Ça arrive, mais Fergus entend encore distinctement le cris de sa fille au moment où elle a dégringolé l'escalier, le bruit de son corps qui frappe le coin des marches les unes après les autres. Il a une conscience extrême du froid dans son corps à ce moment-là, des tremblements compulsifs de ses mains alors qu’il appelle les secours, du vide incongru de son cerveau qui tourne pourtant à pleins régime. La vision le terrorise encore, s’il était arrivé quoi que ce soit de pire, il ne s’en serait jamais remis. Il le sait. Il sait que Grace voit sûrement en lui parce qu’elle le connaît très bien, qu’elle connaît ses faiblesses et ses faux semblants. Elle doit bien percevoir que derrière sa rigueur, son ton froid, il y a encore la terreur et la culpabilité qu’il refuse d’assumer à voix haute.

Il ne peut plus se confier à elle, de toutes façons, alors pourquoi reconnaître que tout le temps passé à l’hôpital a été un calvaire d’angoisse ? Fergus n’oublie pas les premiers mois : il les vit comme un continuum de ce que Grace voit de sa relation avec Laoise. Elle serait surement beaucoup plus à l’aise s’il ne s’imposait pas et qu’elle pouvait l’élever seule. Ça il le ressent très fort, et c’est déjà assez difficile de devoir faire ses preuves au quotidien. Naturellement, il refuse de lui donner raison.


   
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Ho she's sweet but a psycho [Grace] Icon_minitimeDim 4 Avr 2021 - 11:28
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Grace Washington, 31 ans, pop star et mère de Laoise


Fergus a toujours eu cette attitude d’homme impossible à atteindre et droit dans ses bottes, qui m’a autant charmée que rendue folle à une époque. Quoiqu’il arrive, il trouve le moyen de produire un discours plein de rationnalité, avec un soupçon de donneur de leçons, en énonçant des faits. Enoncer des faits, c’est ce qu’il sait faire de mieux. Il aurait pu dire « j’ai manqué de vigilance », « j’ai eu peur aussi », « je suis désolé », toutes ces phrases que j’ai l’impression de deviner dans la ligne courbée de ses épaules et l’affaissement du coin de ses lèvres. Mais je peux crever pour ça. L’immense fierté de Fergus Avner se dresse en obstacle entre lui et l’expression de ses faiblesses. Il y a des choses qui ne changent pas, en neuf ans.

Pourtant, il n’a pas tort dans ce qu’il dit, je le sais au fond de moi et comme toujours, ça m’irrite. A une époque, je me battais férocement contre cet insupportable état de fait que Fergus avait toujours raison. Cela me faisait passer pour une hystérique, j’en avais conscience et j’en devenais plus folle encore. Je ferme brièvement les yeux pour éteindre les souvenirs de violentes disputes passées et me recentrer sur le débat actuel.

« Et moi j’apprécierais que tu ne me parles pas comme si j’étais conne. » Ou folle, je me retiens de dire. J’ai bien compris ce que sa remarque chargée d’ironie sous-entend : j’en fais trop, comme d’habitude. « Je sais que c’était un accident. N’empêche que si tes escaliers étaient plus sécurisés, on n’en serait pas là. » En tout cas, je considère que les chances auraient été moindres, même s’il peut toujours pinailler à dire que ça n’aurait pas empêché Laoise de se prendre les pieds dans son plaid. « Si, par exemple, tu avais la bonne idée de mettre, je ne sais pas, un garde-corps ? »

C’est à mon tour de me montrer ironique et dure. En même temps, la maison de Fergus me semble être un nid de dangers pour une enfant, entre les tables en verre, la décoration fragile et surtout cet escalier qui se passe de garde-corps pour un aspect plus design. Je n’ai rien contre l’extravagance -ce serait mal me connaître- mais j’aurais préféré que Fergus dépense sa fortune à allier sécurité pour sa fille et gonflement de son énorme ego. Ici, on a seulement le deuxième point. Il peut me reprocher d’être trop protectrice avec Laoise, il ne sera pas le premier et je m’en fiche. Ma fille est ce que j’ai de plus précieux au monde, c’est un sujet sur lequel je ne fais pas de concession, même si ça doit piétiner l’orgueil de Fergus Avner parce qu’il déteste qu’on lui donne des leçons et préfère en donner. Dommage pour lui, je n’ai pas fini :

« Ta maison, ça ne va pas du tout, je te l’ai déjà dit. Il va falloir que tu fasses quelque chose à ce sujet. »

J’espère qu’il n’aura pas l’audace de me contredire, alors que les faits sont là, lui qui aime tant les faits : Laoise s’est blessée, pas gravement, mais ça aurait pu.
Fergus Avner
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Ho she's sweet but a psycho [Grace] Icon_minitimeDim 4 Avr 2021 - 13:11
Quelque fois, pas souvent, le moins possible, Fergus se demande si ça aurait pu se passer autrement entre eux. S’ils auraient pu tenir, ou survivre, ou s’il aurait dû ne pas partir. Peut-être que s’acharner encore aurait fini par payer, que les relations se seraient assouplies. Après ça il repense à Toni et se dit que non, que c’est absurde, et de toutes façons ça ne sert à rien de redessiner le passé.

Donc il assume.

Pas très bien, en fait, parce qu’il a des problèmes de remise en question qu’il ne perçoit pas du tout. Un peu comme cette affection débordante qu’il a pour Grace et sur laquelle il ne s’interroge pas. Tout ce qu’il perçoit clairement, c’est qu’elle a le pouvoir terrible, en trois mots, de le faire se sentir aussi misérable que stupide, et en quatre de le rendre fou de rage. C’est incongru. Personne ne lui donne ces émotions. Personne, hormis ses parents, parce que c’est différent, et normal pour des parents d’avoir ce pouvoir sur leur fils. Mais Grace, ça ne fait pas sens. Alors il constate mais évite surtout d’en parler pour ne pas se sentir encore plus misérable et stupide. Quand il est en colère, il aimerait en parler à Toni, mais Toni est trop prompte à la haine et ça ne lui fait pas forcément du bien. « Et moi j’apprécierais que tu ne me parles pas comme si j’étais conne.
- Je n’ai pas…
- Je sais que c’était un accident. N’empêche que si tes escaliers étaient plus sécurisés, on n’en serait pas là. » Le coupe t-elle.

C’est un classique, depuis qu’ils se sont séparés. Grace lui reproche beaucoup ce qu’elle lui fait ressentir et franchement c’est perturbant, parce qu’il ne cherche pas particulièrement à la rabaisser. Il a juste l’impression d’exprimer normalement quelque chose d’évident auquel elle n’a pas pensé, sans adopter de ton particulièrement insultant, mais elle le prend systématiquement mal. Pourtant vraiment il est loin de la trouver idiote, il n’en serait jamais tombé amoureux, sinon. « Si, par exemple, tu avais la bonne idée de mettre, je ne sais pas, un garde-corps ? » Reprend-elle en adoptant elle-même un ton que Fergus ne supporterait dans aucune autre circonstance. Ses lèvres se pincent tout à fait pour se transformer en ligne et automatiquement son regard s’assombrit comme si Grace venait de l’insulter.
- Tu peux te convaincre qu’elle en a encore besoins à son âge et que ça la protégera de continuer à mettre des protections magiques partout, Grace, mais dès qu’elle sortira pour s’adapter à la réalité, y aura plus de garde-corps, réplique-t-il en l’attaquant plus largement parce qu’il culpabilise. Elle pourra pas toujours grandir accroché à tes costumes de scènes. »

Il sait d’avance que ça va la rendre dingue, par ce qu’elle estime certainement que ce n’est pas le sujet, qu’il était responsable de Laoise, qu’il aurait dû lui éviter l’accident au sein de sa propre maison, alors que lui tente de déplacer la querelle à un endroit qu’elle est aussi incapable de reconnaître que lui sa terreur. Il affecte un rictus heurté.

- Qu’est-ce que tu veux que je fasse ? C’est là que j’habite. Je vais pas la recevoir dans une chambre d’hôtel pour que tu sois sûre qu’elle puisse se tenir aux murs quand elle descend un escalier.

Parce qu’il sait très bien que Grace a conscience que dans n’importe quelle situation, le résultat aurait été le même. Laoise aurait glissé sur son plaid. Point. Les enfants se blessent, c’est normal. Mais il la connait. Il la voit venir. Et il craint le genre de décisions qu’elle commence à construire dans son esprit qui peut parfois, sincérement, être tordu.



   
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Ho she's sweet but a psycho [Grace] Icon_minitimeSam 10 Avr 2021 - 14:30
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Mille fois, j’ai vu cette ligne de colère contenue se former sur les lèvres de Fergus qui a cette mauvaise habitude de réprimer toutes ses émotions, jusqu’au moment où elles explosent violemment. Par le passé, c’était précisément ce que je cherchais, le faire sortir de ses gonds, parce que sa maîtrise me donnait l’impression d’être hystérique en comparaison et cela me rendait plus folle encore. J’avais ce désespérant sentiment de soulagement à le voir crier lui aussi et réduire ainsi mon sentiment de solitude. Cette tendance n’est pas complètement éteinte, chez moi, je le sens. J’essaye de contrôler mon appétence pour la provocation mais je me sens quand même plus à l’aise à gérer ce genre de conflits francs, brutaux, plutôt que de sournoises discussions de passive agressivité. En particulier, à l’endroit de Fergus, je sais au fond de moi que malgré tout le travail que j’ai mené sur des années avec mon psy, j’ai encore des fragilités qu’il pourrait réveiller de quelques paroles.

Pas cette fois, je ne suis pas assez en colère pour ça, malgré ses grossières tentatives de déplacer la discussion sur mes comportements à moi, plutôt que d’admettre ses erreurs à lui.

« Putain mais Fergus. Tu t’asphyxies pas avec ta mauvaise foi, à force ? » D’accord, je ne peux quand même pas m’empêcher d’être un peu provocante. Il m’agace profondément. « Je te demande de faire un truc aussi basique que poser un garde-corps sur ton escalier, genre, la base élémentaire de la sécurité, et toi tu me réponds qu’elle sera pas toujours protégée des dangers de la vie ? Bah vas-y, t’as qu’à la pousser d’une haut d’une colline directement, pour voir comment elle s’en sort, sinon. Tu me fatigues. » ll me fatigue vraiment mais en même temps, ça me réveille et m’anime un peu cette joute verbale, je dois le reconnaître. Dans les moments où je me sens comme une loque terrassée par la pression et endormie par mes médicaments du soir, ça a le mérite de me faire me sentir un peu vivante. « Et je te laisserai pas dire que je la protège trop. T’as vu les vies qu’on mène ? Bien sûr qu'on doit la protéger, plus que n'importe quel autre enfant ! »

Les autres enfants, les enfants lambda, aux parents lambdas, n'ont pas sa vie. Je sais que ma maison, en comparaison à celle de Fergus -ou même à n'importe quelle autre maison- peut paraître excessivement sécurisée, mais ce n’est pas tout le monde qui risque à tout moment de retrouver un fan excessif ou un voyeur pervers collé à sa baie vitrée. Je sais le genre de risque que ma vie implique pour ma fille, même si avant, j’avais tendance à ne pointer que Fergus, lui et sa mafia, lui et ses fréquentations pourries, lui et les risques qu’il prenait et dont j’aurais préféré totalement éloigner Laoise, si ça ne tenait qu’à moi. Mais c’est ainsi son père est un mafieux depuis le berceau, ou presque. J’ai appris à faire à peu près confiance à sa capacité à compartimenter les choses pour la préserver de dommages collatéraux ou de tout ce qu’elle ne devrait pas voir à son âge, parce qu’il m’en a fourni des preuves, au fur et à mesure des années. J’ai peur de plein de choses quand je confie Laoise à son père sur une période longue, j’ai peur qu’elle me manque, j’ai peur qu’elle préfère rester avec lui, mais je n’ai plus peur qu’il lui arrive quelque chose de grave.

Du moins, jusqu’à ce qu’un accident ne finisse par arriver et là, j’ai furieusement envie de rétropédaler. Je ferme les yeux, j'agite la main nerveusement, pour balayer mes propres mots qui ont laissé voir mes vulnérabilités. Je prends un ton plus dur, pour me blinder.

« De toute façon, on parlait pas de moi, là, arrête de détourner la conversation. Je m’en fous de savoir si elle serait tombée quoiqu’il arrive, tout ce que je constate moi, c’est que tu peux mieux faire. Alors fais mieux. »
Fergus Avner
Fergus AvnerChef de la mafia
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Ho she's sweet but a psycho [Grace] Icon_minitimeDim 18 Avr 2021 - 20:05
Cette fois Fergus n’est plus qu’un peu irrité, il est franchement en colère. C’est vif et brutal, ça ressemble à une braise sur laquelle on souffle et qui s’embrase d’un seul coup pour mourir aussitôt. Ça grimpe, il se redresse, sert les poings, sert les dents, retrouve instantanément ce feu intérieur qu’il a connu quand ils étaient ensemble et pouvait le faire hurler, mais hurler littéralement, ce qu’il ne fait plus depuis. Sauf dans des moments comme celui-là où Grace le dévisage, atone, audacieuse, et l’insulte en face.

Il serait du genre à le noter dans un coin de sa mémoire, de toutes façons. C’est sûr qu’il ne laisserait personne lui parler de sa mauvaise foi sans s’assurer que ça se paye ou que ça change, mais Grace c’est différent. Ça le touche, en fait. Il aimerait avoir raison, il a vraiment du mal avec cette situation où elle le juge. Elle se moque, même, elle le raille. C’est dur parce qu’il a du respect pour elle, et quand elle fait ça il a l’impression qu’elle n’en n’a pas pour lui. Et qu’en plus, elle le hait. Ce qui serait compréhensible. Elle a toutes les raisons pour. Elle est méprisante, tous ses mots le sont de plus en plus, il sert les lèvres sur sa conclusion.

- Ça n’a aucun rapport.
- Et je te laisserai pas dire que je la protège trop. T’as vu les vies qu’on mène ? Bien sûr qu'on doit la protéger, plus que n'importe quel autre enfant ! »

Elle ne l’a pas écouté, de toutes façons. Il ferme les yeux et se pince l’arête du nez entre deux doigts. Pourquoi faut-il que toutes leurs discussions prennent ce genre de chemin ? Pourquoi sont-ils incapables de parler posément l’un avec l’autres sans s’agresser ou s’insulter au bout de trois phrases ? Merde, il y a pourtant une période où leur communication fonctionnait, parfois tellement bien qu’ils avaient à peine besoins de mots. Et maintenant ça ?

Ils en ont parlé des dizaines de fois et Fergus n’en a oublié aucunes. C’est peut-être ça aussi, qui lui scie les nerfs. De pouvoir énumérer toutes les circonstances qui les ont opposés sur ce genre de question le rend dingue. Déjà, ça lui renvoie un vieux goût d’injustice, parce que ça ne fait pas si longtemps que ça que Grace dit nous pour parler de leur train de vie. Ensuite parce qu’il ne voit vraiment pas, dans la circonstance actuelle, le rapport entre un escalier et les dangers liés à leurs métiers respectifs. Et c’est de ça qu’il parle, ou du moins, il en a l’impression. Pas des tournées, du cabaret, de la drogue ou du star système. Il parle scrupuleusement de leur vie en dehors de tout, de Grace systématiquement sur le dos de Laoise qui ne côtoie personne de son âge hormis ses cousins. Grace interromps la nouvelle bouffée d’irritation qu’il réprime pour lui intimer une injonction qui le fait littéralement sursauter de colère. Il se met à secouer la tête l’air de dire mais putain, et il a les lèvres tellement serrées maintenant qu’elles en sont devenues pâles.

- Tu plaisantes, lâche-t-il d’une voix qui tout au fond tremble un peu parce que Fergus n’a pas l’habitude de gérer les émotions qui le traversent. « Tu l’as fait dormir dans des hôtels sous la tutelle de types qui pourraient parfaitement être dangereux pour elle pendant que tu te prépares pour tes concerts, elle t’accompagne dans tes bains de foule et une fois sur deux sa photo se retrouve dans les vieux torchons qu’on édite sur ta vie de pop-star, et le problème c’est mon putain d’escalier ? » Il parle bas comme un grognement profond et contenu mais il s’est levé parce que son corps ne peut pas dissimuler la rage grandissante qui s’installe.

Elle est en train de faire de cette histoire un cas d’école gravissime alors qu’au fond c’est une question de malchance. Laoise aurait pu tomber chez elle. Elle aurait pu se briser n’importe quel os du corps pendant les innombrables tournées de Grace, où aucune des conditions ne sont réunis pour une petite fille, même si Grace pense différemment et fait tout son possible pour la protéger. Elle aurait pu courir dans le jardin, trébucher, tomber, s’ouvrir le crâne.

- Tu peux mieux faire aussi, si vraiment tu veux qu’on discute de ça. Je vais pas tolérer un sermon de ta part, Grace. Jusqu’ici t’as eu de la chance. Mais t’es pas exactement une mère modèle.

Il ne le pense pas totalement, il sait qu’elle fait de son mieux, qu’elle est attentive, et aimante avec Laoise. Mais il connaît aussi ses travers. Et elle l’a blessé plusieurs fois.


   
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Ho she's sweet but a psycho [Grace] Icon_minitimeLun 26 Avr 2021 - 18:15
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Grace Washington, 31 ans, pop star et mère de Laoise


Je n’avais pas prévu que la discussion s’oriente sur des chemins aussi pentus et en même temps, ça ne m’étonne pas vraiment. C’est devenu une triste habitude entre nous, sur les derniers mois de notre couple et c’est resté comme un vieux réflexe pourri et latent depuis, qui n’attend que les bons déclencheurs pour se réveiller. Fergus en tient un, juste entre ses mains, et il le compresse sans pitié. Il n’y a rien qui soit autant de nature à me mettre hors de moi que des critiques sur la manière dont j’éduque ma fille.

Peut-être que Fergus a le même et que j’appuie allègrement dessus aussi. Peut-être. Mais à mes yeux, mes critiques sont justifiées, quand celles de Fergus ne sont qu’une décharge de mauvaise foi. Il aurait pu se contenter de dire que c’était un accident et qu’il allait faire en sorte de réduire les chances que ça se reproduise, mais non. Il faut qu’il ramène sur le tapis mes tournées, mes concerts, tout ça simplement parce qu’il ne supporte pas d’être en tort. Alors il veut m’entraîner dans sa chute, juste pour ne pas être le seul à devoir reconnaître ses erreurs. Il n’a jamais su faire ça, lui. Reconnaître ses torts.

Non, tout est bien pensé, tout est rigoureux, tout est calculé chez Fergus Avner. Tout est raisonné et raisonnable. Tout est objectif, tout est logique et que peut-on reprocher à la logique ? Il me rend folle.

Je bondis à l’instant où il ose me reprocher de mettre Laoise sous la garde de personnes dangereuses pour elle, soufflée par son culot, en rage de le voir émettre des accusations aussi infondées.

« Pardon ? Pardon ?! Des types dangereux pour elle ? Mais t’as vu de qui tu t’entoures toi ? Ta clique de mafieux là ? Et tu me parles des gens qui travaillent avec moi ? » J’ai affreusement envie de casser quelque chose à cet instant et c’est assez fou qu’il me fasse atteindre un tel état de tension alors que j’ai pris mes anxiolytiques quelques dizaines de minutes plus tôt. « Je n’ai jamais mis Laoise sous la garde que qui que ce soit de dangereux ! »

Et encore ce n’est rien comparé à ce qu’il me fait ressentir avec ses dernières paroles. Ma voix, mon teint, tout devient blanc chez moi.

« J’ai eu de la chance… ? »

Avec ce simple mot il nie tout le travail que j’ai fait ces dernières années et que je continue de faire pour ne pas redevenir cette femme hors de contrôle et toxique que j’étais dans ma jeunesse. Il balaie avec sa suffisance insupportable tous ces efforts qui m’ont beaucoup coûté, et pire encore, il n’en reconnait les objectifs, ni les résultats. Laoise est presque la seule raison pour laquelle je me suis prise en main à un moment où j’étais abandonnée par tout le monde et en particulier par lui. J’ai tout fait pour elle, j’ai fait tout ce que je pouvais, et lui, tout ce qu’il en conclut c’est que je peux faire mieux et que je ne suis pas une mère modèle.

Je vais le tuer.

« Putain mais tu es sérieux ? » Ma colère bouillonne dans mon regard et je n’arrive pas à l’empêcher de transparaître dans mon ton et dans les agitations nerveuses de mes bras. « Moi je prétends pas être parfaite, contrairement à toi ! Je sais très bien que je suis pas une mère modèle mais je fais de mon mieux pour être la meilleure possible ! » J’ai les larmes aux yeux, maintenant, et je me déteste pour ça. Je ne suis même pas triste, je suis plutôt hors de moi, mais c’est une réaction de mon corps que je n’ai jamais réussi à empêcher. Quand les émotions sont fortes, elles ont tendance à se manifester sous cette forme qui me fait paraître comme une faible femme. « C’est pas de la chance, c’est du travail. »

Pourquoi je lui dis ça, en fait ? Pourquoi je me justifie ? Pourquoi je lui laisse voir mes fragilités ? Il ne mérite plus d’avoir cet accès à moi, la dernière fois que je l’ai laissé approcher aussi près, il m’a abandonnée. Il ne mérite rien du tout, avec son attitude pourrie d’homme qui croit tout savoir et qui se paye le luxe de ne jamais se remettre en question. Je sens que ce n’est pas seulement le sentiment d’injustice et d’indignation face à ces accusations qui me fait parler. Je sens qu’il y a une part de moi, enfouie, qui aimerait simplement que Fergus reconnaisse mes efforts et admette que j’ai changé, pour être quelqu’un de meilleur. Ça m’énerve. Je devrais n’en avoir plus rien à faire, de son regard sur moi ou de son avis.

Et pourtant ça m’atteint. Autant pour m’en protéger que pour réprimer cette part insécure de moi, je me retranche derrière une voix froide pour l’envoyer balader :  

« Tu sais quoi, laisse tomber. C’est bon, j’ai plus rien à te dire, tu peux partir. »
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