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Reste au moins jusqu'à l'aube [ Laoise/Fergus]

Fergus Avner
Fergus AvnerChef de la mafia
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Reste au moins jusqu'à l'aube [ Laoise/Fergus] Icon_minitimeSam 19 Sep 2020 - 23:14

15 Avril 2011

C’était une victoire inespérée et exceptionnelle dont Fergus n’acceptait pas encore tout à fait la réalité. La bataille, comme toujours, avait été avilissante et longue, l’avait laissé dans un état de frustration nerveuse qu’il avait refoulé profondément mais dont les marques s’ajoutaient au reste de ses scarifications internes, celles dédiées à Grace. Il était sorti de cet état en se focalisant sur le résultat de sa situation, résultat qui lui semblait encore parfaitement irréel au moment où il avait composé un message à l’intention de Toni pour l’informer que sa demande, celle de récupérer Laoise le temps d’un weekend exceptionnel, s’était soldé par la certitude de l’accueillir deux semaines entières : Grace effectuait une tournée en Grande Bretagne à l’occasion d’une œuvre de charité et lui avait apposé l’argument « deux semaines ou rien. »

Fergus avait répondu deux semaines.

Plusieurs questions se posaient à lui désormais, et de taille. Pris au dépourvu par une proposition qu’il n’imaginait pas encore concevable et qu’il avait dû relire plusieurs fois pour s’assurer qu’il ne rêvait pas les mots qui s’imprimaient sur son pear, il avait nerveusement répondu en écoutant le désir intense qu’il avait eu de pouvoir passer autant de temps avec sa fille. Son pragmatisme, sa raison, s’étaient révoltés un peu trop tard contre un coup d’instinct qui ne lui ressemblaient pas du tout, et il s’était retrouvé prostré un long moment à s’interroger sur la manière dont il allait gérer pendant deux semaines une petite fille de huit ans, entre son travail, sa famille, son travail… Et sa famille. La confier à Damnhait était une option, mais quel intérêt alors de la garder près de lui ? Il craignait qu’environnée en permanence de ses petits cousins, de ses oncles et tantes activement bruyants – Donagh et Moreen passaient beaucoup de temps à se hurler dessus depuis leurs chambres respectives, - sans lui pour la rassurer sur toute cette agitation à laquelle elle restait malgré tout sauvage, elle ne vive mal ce temps passé chez sa grand-mère. Seulement il était hors de question de l’emmener aux folies sorcières, encore moins traiter des échanges ou remplir des containers de tonnes de drogues magiques.

L’autre question moins évidente que se posait Fergus depuis cet échange, et alors qu’il attendait l’arrivée de Grace et Laoise en arpentant machinalement la taille démesurée de son salon, se résumait en quelques mots : allait-il être gêné de passer autant de temps en tête-à-tête avec sa fille ? Il avait pour habitude de la recevoir deux ou trois jours dans les grandes occasions, et souvent ces rencontres impliquaient le passage de Toni, ainsi qu’une ou deux visites à la famille élargie. Autant dire qu’il n’avait pas eu beaucoup d’occasions de se projeter dans de longues soirées partagées à deux, au beau milieu de cette énorme maison vide dans laquelle Laoise n’avait jamais vécu alors qu’elle avait été pensée, entre autres chose, pour l’arrivée éventuelle d’un enfant.

Fergus ne se l’avouait qu’avec une difficulté pénible, mais il ne se sentait pas à la hauteur. Allait-il parvenir à s’occuper correctement de sa fille ? Allait-elle s’ennuyer ? Réclamer sa mère ( Fergus gardait encore un traumatisme assez profond de cette période où Laoise ne supportait pas d’être séparée de Grace et ne reconnaissait quasiment pas son père pour l’avoir à peine vu.)

Trois jours après le départ de Grace et l’arrivée de Laoise, Fergus laissait encore ces questions tourner en boucle dans son esprit. Simplement, de probabilités terrifiantes ces scénarios s’étaient transformés en une peur concrète et continue, celle que Laoise garde de son séjour un très mauvais souvenir et ne veuille plus le réitérer si seulement Grace le permettait. Plusieurs fois il avait été obligé de la confier à Damnhait, Elva ou Toni, et si cette solution l’avait inquiété la demoiselle ne semblait pas revenir de ses expéditions traumatisées outre mesure. Toni l’avait évidemment couverte de cadeaux – Fergus cherchait un moyen de lui faire comprendre qu’il était urgent qu’il répartisse ses accès de générosité en fonction du temps de séjour de la petite fille pour ne pas rendre la maison absolument impraticable. – Il l’avait apporté une fois avec lui aux Folies ou elle avait pu passer un peu de temps avec Jayce et Roy, puis s’était fait dorloter par les filles de l’aile ouest pendant qu’ils réglaient quelques affaires.

Ainsi jusqu’à présent, tout allait à peu près bien. Fergus gardait sur sa fille un œil alerte, dissimulait avec une parfaite pudeur les débordements de ses émotions, et faisait des efforts pour rééquilibrer sa concentration pour ne rien laisser paraître ni de sa nervosité, ni de ses inquiétudes. Enfin, il commençait à apprivoiser la réalité du temps que Laoise allait passer avec lui, et prenait plaisir à la voir s’approprier la maison pour la transformer en vaste terrain de jeu.

Il était sept heures du soir. Fergus était rentré tôt, avait récupéré Laoise chez Damnhait où elle avait passé l’après-midi avec ses cousins, et l’avait laissé monter jouer dans sa chambre pendant qu’il lui préparer à dîner – Fergus cuisinait peu mais faisait du fait de nourrir sa fille lui-même un principe inaltérable. – Il venait de mettre à cuire un gâteau individuel pour le dessert de Laoise et envoyait son patronus prévenir la petite fille occupée à vagabonder quelque part. L’alces parti à sa recherche sans se presser et revint avec elle. Fergus servit sa fille sur le bar où elle aimait manger. « Qu’est-ce que tu faisais ? » Demanda-t-il, curieux de prendre connaissance des jeux auxquels s’occupaient Laoise lorsqu’il ne pouvait la voir. Puis poussant les couvertes et remplissant son verre d’eau pétillante d’un coup de baguette, il s’appuya sur le montant de bois et ajouta : « ça s’est bien passé cette après-midi ? Et après une hésitation qui se vit à peine : ça ne t’ennuie pas de passer du temps là-bas ? »


   
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Reste au moins jusqu'à l'aube [ Laoise/Fergus] Icon_minitimeJeu 15 Oct 2020 - 22:12
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Laoise Avner, 9 ans

Laoise n’avait pas l’habitude de composer avec la présence de plusieurs enfants. Elle n’avait toujours vécu qu’avec sa mère, qui voyageait régulièrement pour ses tournées, ses clips, ses spots publicitaires. La plupart du temps, elle la suivait dans ses pérégrinations et rencontrait énormément d’adultes, qui prenaient toujours beaucoup soin d’elle : avec son jeune âge et sa jolie bouille blonde, elle était la mascotte des plateaux, celle à qui tout le monde venait faire un petit cadeau ou disait de gentilles choses. Le monde des adultes lui paraissait accueillant, fascinant, rassurant, car il y était toujours la plus jeune, celle à qui on faisait attention, celle qu’on dorlotait.

A l’inverse, le monde des enfants, lui paraissait bien plus hostile. Puisqu’elle suivait le rythme de vie de sa mère, le manque de stabilité dans son quotidien l’empêchait de suivre son éducation dans une école. Sa mère avait fait le nécessaire pour qu’elle soit instruite par des professeurs particuliers, à la maison, ce qui se passait très bien : Laoise avançait à son rythme, apprenait beaucoup, certainement plus vite que la plupart des enfants puisqu’elle avait plusieurs professeurs pour se consacrer entièrement à son éducation. Le pendant de ce mode de vie était qu’elle n’avait pas souvent accès à des cercles composés d’enfants : parfois, les enfants des amis de sa mère, pendant des soirées. La famille Avner également, bien sûr, où elle avait quelques cousins de son âge. Les filles de tonton Jayce. Il s’agissait toujours de rencontres ponctuelles, dans des groupes parmi lesquels elle s’était fait des amis mais auxquels au fond, elle ne se sentait pas complètement appartenir. Il y avait toujours un moment où Laoise s’apercevait qu’elle n’était pas totalement comme eux, qu’elle n’avait pas leurs codes. Qu’elle se laissait trop faire ou qu’au contraire, elle se braquait trop vite et dans tous les cas, elle avait l’impression de passer pour la fille bizarre.

Ces rencontres sociales pouvaient devenir de grandes sources de stress pour elle, parce qu’elle faisait de son mieux pour s’adapter mais les efforts qu’elle avait à fournir pour ne pas se sentir à part des conversations lui semblaient parfois trop grands. Elle n’avait pas du tout les mêmes choses à raconter que les autres enfants, qui parlaient de leurs jeux en cours de récréation, de leurs copains, de leurs maîtresses à l’école, de leurs parents, de leurs frères et soeurs, de leurs sorties de famille. Laoise avait une vie exceptionnelle, des rencontres exceptionnelles, des parents exceptionnels.

Elle n’avait pas non plus les comportements attendus, les conflits la paralysaient, l’agressaient, la marquaient profondément, la faisaient se sentir en danger aussitôt. Elle ne comprenait pas cette faculté qu’avait la plupart des enfants à se crier dessus, se griffer et redevenir meilleurs amis quelques minutes plus tard. Aussi quand son cousin Ciaràn se mit à la chahuter en gribouillant sur le dessin qu’elle faisait calmement sur sa petite table, Laoise avait été aussi heurtée que contrariée et sans réfléchir, l’avait poussé brutalement. Ainsi démarra une petite bagarre ponctué de cris stridents de Laoise, qui avait alerté sa grand-mère. Damnhait, qui croyait en l’exemplarité de la petite fille face à ses cousins réputés bien plus turbulents, avait plutôt pris son parti et puni le garçon. Ciaràn lui avait lancé un regard meurtrier qui lui remuait encore l’estomac.

Entre les murs de sa chambre, chez son père, Laoise ramassait ses émotions et retrouvait sa sérénité perdue. Ici, elle se sentait autant en sécurité que chez sa mère. Mais chez les Avner quand elle y était seule, ou tout autre terrain qui ne plaçait pas l’un de ses parents en protecteur, elle se sentait toujours un peu alerte, sur le qui-vive, anxieuse malgré elle.

Elle ne disait rien de tout cela, parce qu’elle ne voulait inquiéter personne. Son tempérament, qui la poussait naturellement à faire attention à son entourage et à rechercher leur approbation, la retenait bien souvent d’exprimer des émotions ou des pensées qui pourraient les heurter. Elle voyait bien dans le regard préoccupé et attentif de son père qu’il voulait qu’elle soit heureuse, à l’aise, qu’il s’en voulait un peu de devoir la déposer chez différentes personnes pendant qu’il allait travailler. Elle ne souhaitait pas lui causer du souci supplémentaire.

Et puis, elle n’allait pas si mal. Ces derniers jours s’étaient même plutôt bien passés, globalement. Elle était toujours ravie de passer du temps avec ses tontons, Toni l’avait emmenée faire des manèges, Jayce lui avait appris des nouveaux signes pour pouvoir parler à Chandra, Roy en les voyant faire, lui avait enseigné les mêmes mots en espagnol et elle s’était beaucoup amusée à répéter. Elle aimait bien passer du temps avec sa mamie aussi, qui l’entraînait dans tout ce qu’elle faisait pour lui apprendre, alors elle se sentait très grande. Elle aimait monter dans la chambre de Donagh quand il voulait bien la laisser y rentrer et ils jouaient ensemble à des jeux vidéos. Elle attendait avec impatience le début des vacances de Pâques pour pouvoir voir Moreen, qui lui avait promis de l’emmener faire des friperies avec elle.

Elle était impatiente de passer du temps avec ses oncles et tantes mais surtout, elle était très impatiente de partager des moments avec son père. Passer deux semaines en sa compagnie était une espèce de cadeau de Noël avant l’heure, elle n’avait pas pu s’empêcher de sauter de joie et remercier mille fois sa mère de la laisser rester. Elle avait vu dans le regard de cette dernière une lueur d’inquiétude se transformer en tendresse, en la voyant si heureuse.

Ici, Laoise n’était pas aussi expansive toutefois, s’adaptant au caractère plus calme et contenu de son père. Accompagné par son patronus, elle finit par trouver sa grande silhouette penchée sur le bar, occupé à poser les couverts. Elle se hissa toute seule sur la haute chaise -car maintenant elle était assez grande pour le faire- et prit place en balançant légèrement ses pieds sous la table.

« Je faisais un dessin pour l’offrir à tonton Toni, parce que c’est bientôt son anniversaire ! » Laoise dessinait tout le temps, à chaque fois qu’elle le pouvait. Cette activité lui permettait de se focaliser sur des choses agréables, plutôt que sur les nombreux sujets d’anxiété qu’elle avait. Elle dessinait parce que c’était son moyen d’évasion à elle. Elle dessinait tant et si bien qu’elle commençait à y développer un vrai talent pour son âge, qu’un oeil un peu expert aurait pu remarquer. Ses traits s’affinaient, se précisaient, ses personnages se diversifiaient. « On pourra acheter un cadre pour le mettre dedans, comme ça, ça sera plus joli ? » demanda t-elle car elle tenait à ce que ce dessin soit spécial.

Face à elle, Fergus lui servait son plat en lui posant cette question que posaient tous les parents quand ils retrouvaient leur enfant le soir. Laoise haussa légèrement les épaules.

« Non… C’était bien. Mamie m’a montré comment on cuisine le colcannon » raconta t-elle les yeux baissés, en omettant volontairement ses chamailleries avec ses cousins. « Et tu sais, y a beauuuuucoup de beurre, expliqua t-elle d’un ton docte. Mamie a dit que c’était pour ça que c’était bon. Elle a bien voulu faire le mien sans jambon mais elle a dit que c’était meilleur avec. »

Sur ce dernier point, Laoise ne l’avait pas écoutée car elle ne voulait pas penser que c’était une meilleure chose de manger des petits animaux. Depuis quelques temps, elle boudait tous les plats qui contenait de la viande et du poisson, depuis qu’elle avait appris, en fait, que le poulet c’était une petite poule, que le porc c’était un petit cochon, et que le veau c’était le bébé de la vache. L’adaptation était plus ou moins acceptée par son entourage. Son père, lui, ne lui faisait aucune remarque, ce qui lui ôtait clairement un poids en moins sur les épaules quand elle venait manger chez lui.

Elle planta sa fourchette dans le gratin de choux-fleurs qu’il avait préparé et accompagné d’une salade. A vrai dire, elle avait aimé sa journée chez ses grands-parents, mais elle savait très bien ce qui lui avait manqué pour que cette journée la satisfasse totalement. Trois jours étaient déjà passés depuis qu’elle était arrivée chez son père et pour le moment, Laoise n’avait pas eu le plaisir de partager toute une journée, ou même seulement une après-midi avec lui. Sans oser le regarder, le regard planté dans son plat, elle demanda un peu timidement :

« Est-ce que tu vas travailler demain aussi ? »
Fergus Avner
Fergus AvnerChef de la mafia
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Reste au moins jusqu'à l'aube [ Laoise/Fergus] Icon_minitimeVen 13 Nov 2020 - 20:49
Si ça n’avait tenu qu’à lui, Fergus aurait dépensé chacune des minutes qui composaient ses journées auprès de Laoise. Il se surprenait, lorsqu’il s’agissait d’elle, à envisager des activités, des méthodes, des projets que jamais en temps normal il n’aurait trouvé naturel de mener, même pour un enfant. Il se découvrait l’envie de l’accompagner marcher dans n’importe quel parc de Bristol, voir les écureuils et nourrir les canards. Il aurait voulu suivre Toni jusqu’au manège pour la voir choisir le cheval le plus scintillant, le plus harnaché de tous, s’y glisser à califourchon et prendre des airs guerriers comme elle savait le faire, les sourcils froncés, lorsqu’elle s’échappait dans son monde intérieur rempli d’aventures et de quêtes épiques. Il aurait voulu lire près d’elle en écoutant d’une oreille le grattement méthodique des crayons et des feutres qu’elle avait reçu pour son anniversaire, quelques semaines auparavant.

Il se demandait à quoi la fête avait pu ressembler. Laoise lui en avait raconté quelques détails mais avec une sorte de pudeur respectueuse, comme si une partie d’elle craignait de le blesser en lui narrant un évènement heureux dont il ne pouvait pas faire parti. Il espérait du fond du cœur avoir mésinterprété son ton évasif, inquiet de savoir sa fille de neuf ans se responsabiliser inconsciemment de leur bonheur. Il se rassurait, la sachant anxieuse, de la trouver égale, souriante, calme toujours mais avec dans le regard une petite étoile qui grandissait en se nourrissant de sa curiosité. Fergus appréciait le choix de Grace de lui avoir trouvé tout un panel de professeurs particuliers. Il n’avait jamais considéré l’école avant Poudlard adaptée aux enfants différents. Et s’étant toujours lui-même senti à part des petits camarades de son âge, la savoir prise en charge, suivie et écoutée, le rassurait profondément.

Il avait tendance à oublier la contrepartie difficile du manque de sociabilité qui en découlait. Fergus n’étant pas un être sociable, il ignorait à quel endroit cela pouvait poser problème.

En regardant sa fille s’assoir, en considérant qu’elle n’avait plus besoins de lui pour le faire, il eut un sourire attendrit. Fergus était terrorisé par la rapidité avec laquelle Laoise grandissait. Elle devenait tout à coup l’incarnation physique, évidente, du temps qui s'en va dans un souffle. Et Fergus avait souvent l’impression de passer à côté d’elle, en permanence. Il était avide de moments avec elle. Avide de la voir grandir chaque jour. Avide de partager tous les aspects de son quotidien. Cette avidité demeurait frustration, douleur, manque. Il s’y était habitué avec le temps, et rangeait cette peine constante dans sa poitrine, l’emportait partout avec lui, la chérissait parce qu’il savait qu’elle était le témoin inébranlable de l’amour sans concession qu’il portait à sa fille.

- Tu te souviens de son anniversaire ? »

Fergus s’était appuyé sur le bar, un bras posé dessus et se servait un verre de vin de l’autre. Son assiette ressemblait à celle de Laoise, pour ne pas la contrarier et respecter une décision qu’elle prenait en toute conscience, ce que Fergus encourageait de sa part, il évitait lorsqu’il le pouvait de consommer de la viande sous ses yeux et lui promettait ainsi son soutien. Il était primordial pour lui que Laoise développe des convictions, adopte des valeurs. Qu’elle les choisisse et s’y investisse. Ce nouveau régime alimentaire était un premier pas dans l’affirmation de ce en quoi elle croyait. Fergus voulait à tout prix qu’elle puisse croire dans la validité des choix moraux qu’elle adoptait.

- C’est bien, reprit-il en servant cette fois à sa fille un verre d’eau pétillante, il sera content de savoir que tu ne l’as pas oublié. » Content était un piètre mot. Chaque année Toni était ravie et exultait littéralement de redécouvrir que Laoise, qui au grand ravissement de Fergus, développait une nature généreuse, n’oubliait jamais de lui faire un cadeau. « Si tu veux, dit Fergus en regardant sa fille, on pourra aller voir ça chez un artisans samedi. Tu pourras lui demander le genre de cadre dont tu as envie, il te le fera sur mesure. »

Fergus était toujours surpris de découvrir à quel point la présence de sa fille, ses anecdotes, la façon dont elle racontait ses histoires, s’adressait à lui, l’apaisaient. Il avait toujours conscience de cet instinct éveillé, sur le qui-vive, prêt à surgir pour la protéger, inquiet de tout, en permanence. Mais il expérimentait aussi paradoxalement le sentiment profond d’être à sa place. Alors même qu’il craignait si fort son rôle de père et l’échec qu’il risquerait à tout moment d’endurer, alors qu’il tremblait de peur à l’idée qu’il n’arrive quoi que ce soit à Laoise, si innocente, si petite encore, passer du temps seul avec elle le faisait se sentir profondément, intrinsèquement bien. Il se sentait à sa disposition, totalement, ne réfléchissait plus à rien d’autre. Toutes ses autres préoccupations disparaissaient derrière celle de l’écouter, de lui répondre, d’être avec elle, présent, complétement. Il ne put s’empêcher de sourire un peu plus à l’explication docte qu’elle lui retransmit fidèlement, comme s’il n’avait pas lui-même été élevé par Damnhait et ne pouvait déjà avoir la connaissance de ce plat qu’il avait mangé des milliers de fois. Fergus adorait la façon totalement dénuée de mépris qu’elle avait d’expliquer quelque chose. Il la laissait croire, toujours, qu’il apprenait grâce à elle de nouveaux éléments.

- Ça peut pas être meilleur avec, puisque t’aime pas ça, le jambon. ça va la cuisine avec Damnhait ? Si elle te fait trimer toute la journée, je peux lui parler. » Fergus connaissait sa mère par cœur. Aucun enfant n’était trop jeune pour passer sa journée à effectuer des tâches ménagères, et s’il n’était pas contre leur apprendre tôt les rudiments de la cuisine notamment, il ne tenait pas à ce que Laoise rentre chez Grace en donnant l’impression d’avoir passé toutes ses heures à passer le balai.

Il allait ajouter une question mais la petite fille fut plus rapide. Il s’interrompit devant le nuage inquiet qui se posa sur son front blanc, devant ses yeux baissés sur son assiette, sa fourchette triturant nerveusement le gratin qui refroidissait doucement. Il s’attendait à la question qu’elle lui posa d’une petite voix. Tout, l’attitude, la frustration, le manque, qui étaient là, tapis, guettant, lui serrèrent le cœur d’une étreinte brutale dont il ne laissa rien paraître.

- Oui, Laoise… Mais. » Il lui adressa un sourire doux. « Pas demain après-midi. Pas samedi. Et pas dimanche non plus. » Il chercha quelque chose à ajouter, pour lui dire combien le désir qu’elle lui montrait de vouloir passer du temps avec lui le touchait profondément. Il resta silencieux, les mots figés quelque part loin de lui. « On va pouvoir passer deux jours et demi ensembles. » Fini-t-il par dire, se maudissant de la pauvreté de ce qu’il transmettait. Gêné, il exécuta l’urgence de revenir sur la question qu’il s’était empêché de poser un peu plus tôt. « Et, ma puce… Damnhait m’a dit. Tu t’es embrouillée avec ton cousin. Est-ce que tu veux me raconter ? »


   
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Reste au moins jusqu'à l'aube [ Laoise/Fergus] Icon_minitimeSam 26 Déc 2020 - 12:26
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Laoise Avner, 9 ans

« Ah bah oui ! Je connais ton anniversaire, et celui de maman, de tonton Toni et aussi de Chandra parce qu’il y a eu une fête l’an dernier » énuméra t-elle avec un sourire à ce souvenir de cette fête où elle avait été conviée. Elle aimait bien faire plaisir à ses proches et elle avait vite compris que leur offrir des cadeaux était un bon moyen de le faire, tout comme elle adorait en recevoir. Toni, en l’occurrence, la gâtait toujours énormément, alors elle avait envie de lui faire plaisir aussi. Elle fut ravie de voir son père accepter de l’aider, sans surprise particulière sur le fait de pouvoir élaborer le cadre de ses rêves, sur mesure : c’était en quelque sorte son quotidien, une partie de sa garde-robe et de ses jouets avait été conçue spécifiquement pour elle, par les soins de sa mère. « Merci papa ! »

Elle était contente également que cette petite escapade soit l’occasion de passer plus de temps avec son père. Même si elle aimait beaucoup la compagnie de sa grand-mère, et ses tantes qui prenaient soin d’elle, Fergus était la personne qu’elle désirait le plus profondément voir quand elle venait en visite chez les Avner. Elle espérait au fond d’elle que ces vacances improvisées soient l’occasion de partager plus de moments avec lui.

« Non ça va. J’aime bien apprendre à faire des choses » répondit t-elle au sujet des tâches que ne manquait jamais de lui donner Damnhait. Elle ne le savait pas vraiment, mais c’était sans doute le trait de sa personnalité qui la rapprochait le plus de son père : une grande curiosité et une envie d’apprendre. « Et puis quand j’en ai marre, elle me laisse aller jouer » conclut t-elle en haussant les épaules, ignorant le traitement de faveur que lui accordait Damnhait, qui n’avait jamais laissé ses enfants avoir ce luxe de refuser ses demandes.

Au fond, Laoise était toujours assez curieuse de ce mode de vie où elle voyait sa grand-mère prendre tout en charge : elle vivait très loin de ça, dans une grande maison où des domestiques assuraient leurs besoins et leur confort à elle et sa mère. Ici, non plus, elle n’avait jamais vu son père passer le balai. Mais passé la porte de la maison familiale des Avner, tout le monde devenait actif et cette grande agitation la fascinait un peu. Quand elle s’y retrouvait seule, Damnhait ne la chargeait pas d’assez de travail pour que cela devienne véritablement une corvée, c'était plutôt une distraction pour l’enfant qu’elle était et qu’on laissait faire des choses d'adulte. Au fond, Laoise prenait cela pour une forme de marque de confiance qui la valorisait : elle était assez fiable pour qu’on lui donne quelques responsabilités.

Mais après trois jours passés chez elle, Laoise commençait à rentrer dans une routine et sentir de plus en plus le manque de la présence de son père. Elle savait qu’il était très occupé et travaillait, elle ne s’était pas attendue à le voir toute la journée en pleine semaine. Mais elle ne pouvait masquer cet élan de demande d’attention, derrière ses questions timides et ses regards inquiets. La réponse de Fergus lui apporta une demi-satisfaction, car elle était contente de savoir qu’elle pourrait le voir demain et surtout une demi-déception, qu’elle tenta de contenir.

« D’accord… Hum… Et la semaine prochaine tu auras du temps libre aussi ? » Deux jours et demi sur deux semaines, ce n’était pas beaucoup, ne pouvait-elle s’empêcher de penser. « Peut-être que je peux aller au cabaret demain matin ? Et rester avec tonton Toni ou tonton Jayce en attendant l’après-midi ? » s’enquit t-elle timidement.

A quelques occasions, son père l’avait laissée venir et assister à quelques spectacles impressionnants qui se produisaient sur la scène des Folies Sorcières. Laoise était toujours très fascinée par ce lieu, qui semblait plein de choses étonnantes, dont elle sentait qu’on lui en cachait beaucoup. Elle avait l’impression d’accéder un peu au monde de son père qu’elle ne connaissait pas bien. A l’inverse, celui de sa mère n’avait pas de secret pour elle, elle l’emmenait avec elle dans la plupart de ses tournées, la laissait rester en coulisses pendant ses concerts, lui faisait partager chaque étape d’élaboration de ses disques. Elle ne partageait jamais ce genre de moments avec Fergus et sentait même une certaine résistance à cet endroit, qu'elle essayait de plus en plus de percer, en grandissant.

Sa question au sujet de sa dispute avec Ciaràn éveilla d’autres sentiments chez elle, plus confus, plus désagréables. Elle baissa le regard vers son assiette, en mâchouillant son gratin, avec le coeur serré d’une culpabilité dont elle ne parvenait pas bien à saisir l’origine. Cette histoire la confrontait à un sentiment d’avoir mal fait, de ne pas savoir comment s’y prendre correctement, de ne pas être comprise. D’être inadaptée, tout simplement.

« Hum… C’est rien, dit-elle avec cette habitude qu’elle avait de toujours minimiser les choses pour n’inquiéter personne. C’est parce que Ciaràn ne me laissait pas tranquille pendant que je dessinais alors… On s’est fâché. » Elle passa sous silence le fait qu’elle l’avait poussé la première, assez consciente de son image de fille sage et plutôt désireuse de la garder. « Puis mamie nous a séparés et voilà. »
Fergus Avner
Fergus AvnerChef de la mafia
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Reste au moins jusqu'à l'aube [ Laoise/Fergus] Icon_minitimeJeu 18 Fév 2021 - 21:05
Sûrement c’est l’instant où Fergus devrait dire à Laoise qu’il l’aime. Sûrement c’est l’instant où il devrait la rassurer. Il est obligé de travailler : on ne met pas une affaire comme la sienne en pose n’importe comment. Et depuis qu’il n’est plus avec Grace, Fergus n’a pas pris les habitudes de Jayce : rentré à dix-neuf heures pour voir ses gosses, jamais dispo les week-end. Il sait qu’il ne pourra pas, ni la semaine prochaine, ni jamais tant qu’il n’aura pas quitté les veilleurs, passer tout le temps qu’il voudrait avec sa fille. Ça ne lui vient pas à l’esprit, qu’il pourrait apaiser la peine de cette mauvaise nouvelle avec un signe ou une parole affectueuse. Ce n’est jamais ce qui vient en priorité à l’esprit de Fergus, de toutes façons. Il ne peut que la dévisager attentivement pendant qu’elle parle et lui répondre comme s’il ne voyait pas la déception dans ses grands yeux bleus.

Des yeux qu’elle tient de sa mère, évidemment. Comme presque tout ce qu’elle est. À la voir on pourrait facilement douter que Fergus est le père : joues roses, peau pâle, cheveux clairs, sourcils en arc de cercle, sourire et douceur. Laoise peut-être du genre sauvage mais pas du genre fermé. Elle a une forme de tendresse innée qu’elle ne peut pas dissimuler totalement. Une fragilité attentive qui rappelle Grace. Fergus lui n’est rien de plus que la quintessence de la civilité ; glacial.

- D’accord, répond-il simplement. Lundi soir on ira chez Jayce, tu pourras voir Chandra et Meera.

Il ne dit rien de plus. Pour qui le connaît il est évident que le regard qu’il pose sur elle est profond et doux. Mais il est dur pour une enfant de se sentir aimée sans certitudes. Fergus ne s’en rend pas compte, évidement. Chez lui les marques d’affections ne sont pas légions passé un certain âge. Il ne sait plus si sa mère lui a déjà dit je t’aime. Il n’y pense pas tellement, du reste. Elva le lui a dit une fois, et s’il devait y réfléchir, ça l’a probablement touché. Mais gêné, aussi. Il y a des gens comme lui qui mettent trop de particularité dans les circonstances de ces mots et avec qui ça devient trop compliqué à dire.

Au fond il n’imagine même pas que ça puisse être important pour Laoise de l’entendre.

- Hm… Hume-t-il doucement sur la conclusion de sa fille. Il boit une gorgée de son vin en haussant un sourcil qui n’a rien de dramatique à l’intention de Laoise. « T’as bien fait de te défendre. La passivité ça se transforme vite en manque de respect. Et personne a le droit de te manquer de respect. »

Ça ne ressemblerait peut-être pas à ce qu’un gamin équilibré devrait apprendre. Mais l’environnement de Fergus n’a rien d’équilibré. Il est régi par le pouvoir, la domination, la loyauté. Ces valeurs, il les transmet à sa fille. Ses limites à elle avant tout. Son espace. Ses frontières. Son territoire, en quelque sorte. Qu’elle soit une fille n’y change rien. S’il avait eu un garçon, Fergus aurait sans doute été plus dur avec lui, plus intransigeant, comme il peut l’être souvent, avec Donagh. Il ne désire pas voir Laoise accorder un intérêt quelconque à ce qu’il fait dans la vie : peut-importe son choix de carrière, du moment qu’il la rend heureuse. Mais garantir aux autres qu’on ne se laissera pas écraser sans rien, pour Fergus, c’est une façon de vivre. Que ce soit son cousin, son voisin, un inconnu, n’a aucune importance. Si le gamin était en tors, Laoise a eu raison de ne pas se laisser faire. Et si ne pas se laisser faire signifiait mordre son adversaire, alors… Amen.

Fergus et Laoise terminent de dîner en discutant encore longuement. Le père toujours fasciné de constater la rapidité de réflexion de sa fille. Différente de la sienne, mais pas tout à fait, un étrange croisement entre lui et Grace. Parfois il a du mal à croire que cette petite fille à l’air intelligent porte une partie de lui en elle. C’est quelque chose de tellement évident et bizarre à la fois…

Vers vingt heures, Fergus débarrasse les assiettes vides. Le gâteau a plu à Laoise, qui ravie, est descendu de son tabouret. Fergus lui a proposé d’écouter quelques épisodes de Mable and the fantastical magical world à la radio. Une série pour enfant qui s’adresse aussi aux adultes et que Laoise affectionne particulièrement. Fergus en a déjà écouté une partie avec elle et a pris le temps de rattraper son retard lorsqu’elle lui a demandé s’ils pourraient écouter la suite ensembles. Ils s’apprêtent donc à se blottir l’un contre l’autre sur le canapé, Laoise avec un grand chocolat chaud et lui avec un whisky pur feu.

La petite fille a tenu à aller chercher un de ses plaids, alors en l’attendant, Fergus prépare la radio et la boisson. Le lait se met à bouillir lorsqu’il entend ses petits pas pressés emerger de sa chambre à l’étage.


   
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Reste au moins jusqu'à l'aube [ Laoise/Fergus] Icon_minitimeDim 7 Mar 2021 - 16:31
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Laoise Avner, 9 ans

La mention de Chandra et Meera fit renaître un petit sourire sur la figure de Laoise, qui commenta simplement :

« Trop chouette ! »

Elle était toujours heureuse de passer du temps avec les deux jeunes filles, surtout Chandra qui avait son âge et qu’elle connaissait depuis toujours. L’amitié entre leurs pères les avait naturellement rapprochées toutes les deux, dès leur jeune âge. Chandra était celle qui se rapprochait le plus d’une meilleure amie pour Laoise, le genre d’amie à qui on peut tout dire et avec qui on peut tout faire. Elle n’en avait pas beaucoup d’autres : elle était copine avec Vivianne aussi, qu’elle voyait quand par hasard elle venait voir sa grande soeur qui était une grande amie de son père. Elle était copine avec quelques autres enfants des amis de sa mère. Ce n’était pas des relations très proches, même si elle y tenait, car cela restait ses seuls liens avec des enfants de son âge, qu’elle n’avait pas beaucoup d’occasion de rencontrer par ailleurs : le pendant moins agréable au fait d’être éduquée à la maison, par des précepteurs.

Par conséquent, elle se sentait parfois en décalage avec les enfants, elle sentait qu’elle n’avait pas toujours les bons codes pour communiquer avec eux, aussi les conflits l’atteignaient beaucoup, malgré les attitudes très offensives qu’elle pouvait adopter sur le moment : c’était une simple réaction de défense face à ce qu’elle percevait comme un danger. Si elle avait été heurtée par son cousin sur le coup, elle espérait surtout qu’il ne lui en veuille plus, actuellement. Aussi, la réaction de son père eut ce double effet un peu étrange de la rassurer dans l’idée qu’elle avait fait ce qu’il fallait et de la rendre un peu plus inquiète des répercussions de son acte qu’elle n’avait jamais voulu lancer comme une tentative d'intimidation.

« Oui… murmura t-elle en se plongeant dans l’observation de ses légumes. J’espère que Ciaràn ne va pas rester fâché quand même. »

Assez vite, cette préoccupation quitta son esprit pour laisser davantage de place à tout ce qu’elle voulait partager avec son père : les derniers rebondissements de la bande dessinée qu’elle lisait en ce moment, la pièce de théâtre à Londres que Moreen lui avait promis d’aller lui faire voir, l’énorme glace que Donagh l’avait emmenée manger près du port de Bristol à midi, et tout ce qu’elle avait envie de faire cette semaine. Elle commença d’ailleurs cette liste en parlant d’écouter de nouveaux épisodes de Mable and the fantastic magical world à la radio, comme son père le lui avait promis. Ravie de le voir proposer de le faire dès ce soir, elle s’élança pour aller récupérer son plaid à l’étage. Laoise avait ses petites manies, et surtout, ses petits rituels, qu’elle respectait toujours scrupuleusement, pas tellement par superstition que parce qu’il s’agissait pour elle de points d’ancrage dans le quotidien fait d’événements, d'imprévus et de déplacements réguliers qu’elle vivait, entre ses deux parents.

Elle avait donc besoin d’étendre son plaid rose pailletté sur ses jambes -en laissant dépasser ses pieds emmitouflés dans de grosses chaussettes sinon elle avait chaud- et d’avoir une tasse de chocolat chaud pour occuper ses mains et sa bouche -une technique qui lui avait permis un an plus tôt d’arrêter enfin de sucer machinalement son pouce sur les moments qui précédaient le coucher. Empressée de rejoindre son père au rez-de-chaussée, elle s’élança vers les escaliers, sans prendre bien le temps de replier correctement son plaid.

Dans son enthousiasme, elle oublia cette consigne que son père lui répétait presque à chaque fois qu’elle venait chez lui : doucement dans les escaliers.

Trois marches plus bas, ses pieds s’empêtrèrent dans sa couverture qui pendait au sol et elle tomba la tête la première, en poussant par réflexe un cri strident. S’ensuivit une cascade de cognements, de bruits sourds et d’exclamations de douleur, après laquelle elle atterrit en travers des dernières marches, assommée par un coup plus brutal que les autres, sur la tempe.
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