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Leopold Marchebank
Leopold MarchebankMinistre de la Magie
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Profil Académie Waverly
Mourir peut attendre  Icon_minitimeDim 29 Mar 2020 - 13:26
17 janvier 2020


Une semaine s'était écoulée depuis son entrevue avec Joséphine Chevalier. Une semaine depuis cette prédiction qui avait tout changé. Depuis, Leopold vivait dans un espèce d'état d'alerte permanent, qui confinait au paranoïaque : chaque éclat de lumière dans la chevelure d'une femme faisait naître mille questions, mille suspicions dans son esprit malade. Il remettait en question la sincérité de chaque sourire, chaque acte de bonté, jusqu'aux gestes doux de son épouse enceinte. Merlin, ce qu'il pouvait se détester pour l'inquiétude qui le saisissait chaque fois qu'il tenait Rosaleen dans ses bras, mais c'était plus fort que lui : il n'était pas tranquille. Son épouse était une femme dangereuse, plus dangereuse que ne le laissaient paraître ses manières douces et avenantes. La Lestrange en elle n'était pas enfouie très loin et il le savait pertinemment.

Après quelques jours à ne pas dormir et à éviter toutes les blondes de son entourage comme on évite la peste, Leopold avait fini par conclure qu'il ne pouvait pas continuer ainsi. Il y avait certaines allégeances qu'il ne pouvait remettre en cause, au risque de se tromper d'ennemis... car c'était bien la menace qui le guettait. Des ennemis, Leopold en avait suffisamment y compris chez la gent féminine pour ne pas se mettre à douter de son propre entourage. L'étau venait de se resserrer un peu plus sur le ministre, qui allait avoir besoin, plus que jamais, de pouvoir compter sur ses proches et ses alliés.

Voilà pourquoi il se dirigeait, son visage dissimulé sous le rabat d'un large capuchon vert bouteille, dans une ruelle isolée du Londres moldu. La nuit était tombée, blafarde et glaciale, sur la capitale. Seuls les faibles halos de quelques lampadaires venaient éclairer les deux silhouettes encapuchonnées qui avançaient dans la rue.

"Tu veux bien arrêter de faire la tronche deux minutes ?", lâcha soudain Leopold d'un ton sec, exaspéré.

A ses côtés, son garde-du-corps tourna vers lui un visage renfrogné, puis esquissa un horrible sourire forcé. Le vrai visage d'un psychopathe, songea Leopold avec un mélange de répulsion et d'amusement.

"Non, je n'ai rien dit, c'est affreux, arrête ça tout de suite", lâcha-t-il avec un petit rire. Il aurait bien demandé à Alessandro ce qui pouvait bien le rendre aussi renfrogné, mais en réalité il se moquait bien des états d'âme de son garde-du-corps. Cette soirée était consacrée à lui, à une tentative pour regagner un brin de sérénité et de concentration avant de se désagréger complètement dans la peur et l'alcool... il savait exactement ce dont il avait besoin.

Parvenu devant un hôtel parfaitement anonyme, Leopold abandonna Alessandro à son triste sort, puis se rendit à l'accueil pour échanger quelques mots avec le réceptionniste. Il déposa quelques gallions à son attention, récupéra la clef de la chambre, puis se dirigea vers l'ascenseur. Quelques instants plus tard, il pénétrait dans une chambre double quelconque et silencieuse. Décorée dans des teintes de bleu turquoise, elle était meublée simplement : un lit double occupait la quasi totalité de l'espace, entourée de deux tables de chevet. Une télévision à écran plat était fixée au mur, au-dessus d'un bureau, et une petite penderie jouxtait la salle de bain. Ce n'était pas le luxe auquel Leopold était habitué, mais cela devrait bien faire l'affaire : depuis que sa romance avait été exposée à la vue et au sus de tous par la presse people italienne, il n'avait pas d'autre choix que de se montrer extrêmement discret...

Clara n'était pas encore arrivée. Le ministre ôta sa cape lourde d'hiver et l'accrocha dans la penderie avant de venir s'asseoir sur le rebord du lit. Un soupir de lassitude s'échappa de ses lèvres alors que ses pensées revenaient, inlassablement, vers une situation similaire quelques jours auparavant : une femme, un grand lit, et son destin dans la balance.

Pour la cinquantième fois de la journée environ, il plongea la main dans la poche de sa veste et en extirpa une enveloppe froissée. Deux photographies se trouvaient à l'intérieur, qu'il ne put s'empêcher d'observer à nouveau. Deux visages qu'il connaissait parfaitement. L'un, pour le voir chaque jour, dans le miroir, quoi que plus vieux. Quant à l'autre... comment ne pas le reconnaître ? Les années avaient beau passer sans que Leopold ne lui accorde une seule pensée, jamais il ne pourrait oublier le visage de son père Charles. Qui lui avait envoyé ces photos, et dans quel but ? Il n'en avait aucune idée. L'enveloppe était arrivée, anonyme, sans signature, jusqu'au Manoir. Seul son nom et son prénom avaient été inscrits sur l'enveloppe d'une écriture brouillonne.

Le son caractéristique de la carte que l'on passait sur son boitier fit sursauter Leopold et le tira de son examen pensif. Précipitamment, il enfouit l'enveloppe et les deux photographies dans la poche de son costume puis se redressa sur ses pieds. La porte s'ouvrit à cet instant sur la silhouette familière de Clara, enveloppée dans un manteau d'hiver bien chaud. La vue de ses traits souriants apaisèrent aussitôt le ministre, qui sentit son rythme cardiaque s'apaiser quasi instantanément. Merlin, ce qu'il avait besoin de la sentir contre lui, songea-t-il en traversant la pièce en trois enjambées. Sans plus de formalisme, il l'attira dans ses bras pour un long baiser, savourant l'agréable sensation de douceur qui l'enveloppait peu à peu.

"Bonsoir", souffla-t-il à son oreille, quand il la relâcha enfin. "Je suis heureux de te voir."
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Mourir peut attendre  Icon_minitimeJeu 2 Avr 2020 - 8:06
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Clara Lorgan - 48 ans - Fleuriste

Clara frissonna et resserra les pans de son manteau d’hiver autour d’elle pour se protéger du vent glacial. La fleuriste avait transplané à quelques dizaines de mètres de l’adresser donnée par Léopold et parcourut à pieds le peu de distance qui lui restait, en luttant contre le besoin de jeter en permanence un œil par-dessus son épaule. Depuis que leur relation avait été révélée publiquement, elle avait en permanence l’impression d’être suivie.

Le statut de maitresse officielle du ministre de la magie n’avait rien de très enviable et Clara avait traversé plusieurs semaines difficiles où il lui avait fallu s’habituer à être dévisagée –voire insultée- partout où elle allait. Elle avait souvent songé à tout arrêter, à retrouver un relatif anonymat et à oublier Léopold pour la seconde fois. Elle n’en avait pas eu le courage.

Cette relation venait avec son lot de contrainte mais elle lui apportait surtout de véritables moments de réconfort. Elle se sentait redevenir une jeune femme espiègle, dans les bras de son amant, et elle oubliait un peu ses problèmes quand elle était avec lui. Paradoxalement, il lui rappelait aussi Kelsey, cette fille qu’il n’avait jamais connue. Sans qu’elle ne parvienne à se l’expliquer, recommencer à fréquenter Léopold lui donnait l’illusion de maintenir un lien avec sa fille disparue, et celui lui faisait du bien. Alors elle faisait avec, elle composait avec les journalistes et leurs demandes d’interview, qu’elle refusait toutes sans exception. Elle respectait l’emploi du temps de ministre –littéralement- de Léopold et son manque de disponibilité. Elle se pliait aux consignes de sécurité, acceptait de ne jamais le contacter la première et de le rencontrer dans des hôtel anonymes et dénué du moindre charme.

Elle ne se reconnaissait plus, à accepter ces arrangements qu’elle n’aurait jamais toléré auprès d’un autre, mais chacune de ses retrouvailles avec Léopold venait balayer ses frustrations et la laissait plus éprise lui encore.

Clara se présenta à la réception de l’hôtel, le cœur battant d’excitation à l’idée de retrouver son amant. Son sourire s’agrandit quand la réceptionniste lui tendit le double des clés –signe que Léopold était déjà arrivé. Elle se dirigea vers l’ascenseur et profita du miroir à l’intérieur pour se débarrasser de son écharpe et se recoiffer rapidement. Quelques instants plus tard elle poussait la porte de la chambre, les joues rosies par le froid et le sourire aux lèvres. Elle se laissa volontiers attirer contre Léopold et répondit avec douceur à son baiser, s'abandonnant au plaisir de ces retrouvailles tant attendues.

« Moi aussi, répondit-elle en lui caressant la joue. Tu m’as manqué ».

Elle se sépara momentanément de Léopold pour se débarrasser de son manteau, qu’elle accrocha dans le petit placard qui faisait office de penderie. La chambre n’était ni très spacieuse ni particulièrement bien décorée, mais cela n’avait aucune importance. Clara n’eut qu’à faire deux pas dans la pièce pour rejoindre Léopold sur le bord de lit, où elle s’installa en l’observant avec inquiétude. Elle l’avait rarement vu si fatigué.

« Tout va bien ? s’enquit-elle en attrapant sa main. Tu as l’air préoccupé. »
Leopold Marchebank
Leopold MarchebankMinistre de la Magie
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Mourir peut attendre  Icon_minitimeVen 24 Avr 2020 - 12:22
La réponse de Clara lui tira un sourire satisfait. Loin de se tarir une fois assouvie, la passion qu'il partageait avec la fleuriste se trouvait renforcée par chacune de leurs retrouvailles et par tous les moments privilégiés qu'ils continuaient de s'octroyer l'un à l'autre. Parfois, lorsque la routine des jours et un emploi du temps trop chargé l'empêchait de voir Clara pendant trop longtemps, il se surprenait à se languir. Combien de réunions interminables avait-il passé à laisser son imagination courir entre les jupons de son amante ? Certainement trop... mais le poids des responsabilités qui étaient les siennes pouvait s'avérer écrasant et ne laisser que trop peu d'espace à de telles escapades, salutaires pour son équilibre mental...

Un équilibre aujourd'hui bien malmené. Leopold se décala de quelques centimètres sur le matelas pour laisser une place à Clara et attrapa doucement une de ses mèches de cheveux, qu'il fit crisser entre ses doigts.

"Tout va bien, c'est...", commença-t-il avant de s'interrompre. Son regard accrocha les pupilles claires de sa maîtresse et il sentit son souffle se couper. Une ridule s'était creusée sur son front, signe de sa sollicitude. Pouvait-il réellement ignorer plus longtemps l'angoisse qui lui étreignait la poitrine depuis la prophétie de Joséphine ? Leopold était lassé de prétendre, à longueur de journée, être ce qu'il n'était pas, éprouver des émotions qu'il n'éprouvait pas. Feindre la compassion et la sympathie pour les orphelins ou les blessés dans les hôpitaux. Mentir aux délégations étrangères qu'il se devait de recevoir. Faire amende honorable auprès de son épouse et prétendre qu'on ne l'y reprendrait plus. Seulement, auprès de Clara il retrouvait quelque chose de précieux et salutaire : une authenticité et une simplicité dénuée d'artifices. Auprès d'elle, il sentait avec urgence ce besoin de sincérité, peut-être parce qu'il avait l'impression qu'elle ne la jugerait pas, qu'elle pouvait le comprendre et l'aimer néanmoins.

Pouvait-elle comprendre ? Pouvait-il alléger enfin son fardeau ? Une idée folle traversa son esprit, qu'il médita un instant. Les mèches miel de Clara s'échappèrent de ses doigts et il ramena sa main auprès de lui, pour la poser doucement sur celle de son amante. Pour la première fois peut-être, Leopold laissa paraître un instant de faiblesse.

"En réalité, non, cela ne va pas très bien, je... j'ai beaucoup d'ennemis, tu sais, et je les sens se multiplier, se rapprocher inexorablement, chaque jour qui passe... J'ai beaucoup d'ennemis", répéta-t-il en penchant légèrement la tête sur le côté, comme pour tenter de voir Clara sous une différente perspective. Ennemie ou amie ? Aurait-il réellement un jour une réponse honnête à cette question ?

"Je crains que l'un d'entre eux ne finisse par avoir ma peau. Peut-être que je le mérite", estima-t-il avec lucidité. Il accrocha son regard à celui de la femme qu'il aimait, comme l'on s'accroche à une ancre. Il y avait quelque chose de désespéré dans ces prunelles sombres, alors qu'il pressait ses doigts entre les siens dans l'espoir de quelques paroles réconfortantes...
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Mourir peut attendre  Icon_minitimeDim 26 Avr 2020 - 8:52
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Clara Lorgan - 48 ans - Fleuriste

Clara suspendit son souffle en même temps que la réponse de Léopold. Elle avait le sentiment qu'il hésitait à lui dire quelque chose, et elle l'encouragea en plongeant son regard dans le sien avec un doux sourire. Quelques secondes silencieuses s'étirèrent entre les deux amants, pendant lesquelles elle remarqua ses rides plus marquées, ses cernes plus prononcées, son air soucieux.

Son coeur se serra quand il lui répondit avoir beaucoup d'ennemis, et les sentir se rapprocher de lui. Clara secoua la tête pour chasser cette idée. Elle savait, bien sûr, que le Ministre de la magie ne faisait pas l'unanimité auprès de la population. Il était évident que certains sorciers devaient lui vouloir du mal, mais elle refusait de leur accorder la moindre importance. Ils n'avaient aucun pouvoir. Ils ne pouvaient pas lui nuire. Léopold avait un garde du corps et un service de sécurité qui veillaient sur lui et elle avait décidé de leur faire pleinement confiance. Peut-être qu'elle se voilait la face en refusant de voir le danger mais c'était la seule façon qu'elle avait trouvé pour ne pas mourir d'inquiétude.

Un frisson parcourut son dos et sa main tressaillit dans celle de Léopold quand il lui avoua redouter que l'un de ses ennemis ne finisse par avoir sa peau.

"Non, protesta-t-elle quand il ajouta que c'était peut-être ce qu'il méritait. Bien sûr que non ! N'écoute pas ce ces ennemis peuvent dire, tu es quelqu'un de bien, Léopold !" affirma-t-elle en se tournant un peu plus vers lui.

Clara ne suivait pas l'actualité de très près. Elle parcourait les titres de la Gazette, de temps en temps, sans lire le détail de chaque article, et la seule chose dont elle était persuadée était qu'elle n'aurait pas aimé être à la place de son amant. Léopold devait prendre des décisions difficiles et avait énormément de responsabilités et elle pouvait comprendre que cela le tienne éveillé la nuit, mais il ne devait pas se laisser submergé par le stress de la fonction.

Elle, elle voyait l'homme derrière la fonction. Un homme bon, qui se souciait des autres, qui était attentionné, qui était toujours doux avec elle. Un homme sur qui elle savait pouvoir compter, qui la protégeait et qui vengerait la mort de leur fille. Elle aurait aimé qu'il se voie à travers ses yeux à elle.

"Tu ne le mérite pas, affirma-t-elle d'un un ton sans appel. Qu'est-ce qui te faire dire ça ? s'enquit-elle d'une voix plus douce en fronçant légèrement les sourcils. Tu peux tout me dire..." ajouta-t-elle pour le pousser à la confidence.

Pourquoi pensait-il qu'un ennemi aurait bientôt sa peau ? Et surtout, pourquoi pensait-il le mériter ?
Leopold Marchebank
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Mourir peut attendre  Icon_minitimeSam 9 Mai 2020 - 12:27
Un sourire amer étira les lèvres du ministre de la magie alors que sa maîtresse lui disait précisément les mots qu'il avait envie d'entendre. Pourtant, loin de le procurer le réconfort auquel il s'attendait, ses paroles ne firent que renforcer la conviction de sa propre culpabilité. Mentir aussi ouvertement à quelqu'un d'aussi aimant, d'aussi pur que Clara renforçait la boule d'oppression qui grandissait dans sa poitrine. Soudain, la tendresse et la sollicitude qu'il pouvait lire dans son regard lui devenaient insupportables. Pour la première fois peut-être, Leopold aspirait à être aimé par un autre être humain, à être aimé réellement, pour ce qu'il était et non pas pour l'image complètement idéalisée que Clara avait de lui. Ce constat faisait cogner douloureusement son cœur contre sa poitrine, tandis qu'une expression désespérée passait sur son visage.

Secouant la tête de gauche à droite, Leopold écarta les paroles de sa maîtresse comme si elle n'avaient aucun sens.

"Je ne suis pas quelqu'un de bien, Clara. Tu n'as aucune idée de tout ce que j'ai fait...", avoua-t-il d'une voix basse, serrant un peu plus fort ses mains délicates dans les siennes. "Si tu savais..."

Sa voix se brisa alors qu'il baissait la tête, pour se soustraire au jugement de ces grands yeux expressifs. Des millions de citoyens bafoués et ignorés, une vie entière à mépriser le jugement d'autrui, balayés en l'espace d'une seconde par une jolie fleuriste au grand cœur. S'en était presque risible, pourtant Leopold ne pouvait ignorer la peur béante qui grandissait en lui, à la pensée de ce qui se passerait si Clara savait, si elle apprenait...

Le visage fantasmatique de Kelsey se superposa aux traits fins de Clara dans l'imagination fertile du dictateur. Redressant le regard sur la sorcière, il confessa du bout des lèvres :

"Si tu en avais la moindre idée, tu ne voudrais plus me voir, et je ne peux pas te perdre."

A cinquante-neuf ans, Leopold découvrait pour la première fois que son bonheur était lié à celui d'une autre personne. En quelques mois, ses moments privilégiés avec Clara étaient devenus essentiels à son équilibre. Petites bulles d'oxygène, salutaires dans un contexte extrêmement anxiogène, qui menaçaient d'éclater à tout moment... car quelle valeur avaient-elles, lorsque Clara ignorait le secret funeste qui flottait entre eux, dont la révélation était inéluctable ? Combien de temps Leopold échapperait-il à son destin ? Dans le silence lourd de cette petite chambre d'hôtel sordide, Leopold se sentait oppressé par une angoisse suffocante.
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Mourir peut attendre  Icon_minitimeLun 11 Mai 2020 - 8:22
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Clara Lorgan - 48 ans - Fleuriste

Clara devinait sans mal que Léopold avait quelque chose sur la conscience. Son coeur se serra quand il répéta qu'il n'était pas quelqu'un de bien et elle se demanda quelle genre de situation délicate il avait du affronter pour se retrouver à penser de telles choses. Elle ne pouvait qu'imaginer les responsabilités qui pesaient sur les épaules de son amant, mais se doutait que celles-ci venaient avec leurs lots de choix difficiles et de regrets. Elle avait conscience de ne pas être la mieux placée pour discuter de ces choses-là avec lui -elle ignorait tout ce que pouvait impliquer de gouverner un pays- mais elle était prête à l'écouter tout de même, et persuadée que ce n'était pas si grave qu'il le pensait.

"Quoi que tu aies fait, je suis certaine que tu as fait au mieux, assura-t-elle doucement en posant délicatement sa main sur sa joue, cherchant à accrocher son regard. Tu as beaucoup de responsabilités, tu dois faire des choix difficiles, tu ne dois pas te blâmer si tu fais parfois des erreurs, c'est humain..."

Une vive inquiétude s'empara de son coeur face à la gravité du regard que Léopold posa sur elle, mais Clara refusa de laisser cette crainte s’exprimer et entreprit de la chasser à grands coups de paroles rassurantes.  

"Bien sûr que non, tu ne me perdras pas, jamais. Elle secoua négativement la tête, comme pour éloigner cette idée. Jamais je ne pourrai avoir envie de ne plus te voir. »

Ces paroles n’avaient rien d’une fausse promesse réconfortante, elle les pensait sincèrement. Elle pouvait sentir ses propres mots résonner au fond d’elle-même avec force. Elle aimait Léopold, plus fort qu’elle n’avait aimé qui que ce soit depuis longtemps. Clara avait un coeur d’artichaut. Elle avait eu quelques amants, au cours de sa vie, et s’était construit avec le temps une réputation de croqueuse d’hommes,  pourtant elle n’avait rien de la briseuse de coeurs insensible qui trouvait son bonheur dans les aventures sans lendemain. Elle avait toujours de la tendresse pour ceux qui partageaient son lit, de l’affection, et souvent même de l’amour. Ils ne s’en rendaient généralement même pas compte, ou préféraient fermer les yeux sur ces sentiments malvenus, mais elle les avait tous aimés, au moins un peu. Léopold avait fait partie de ceux-là. Elle était tombée amoureuse de lui, il y a vingt ans, et elle avait retrouvé des sentiments encore plus forts, quelques mois plus tôt.

Elle s’était attachée à lui, trop vite et trop fort, et s’était jetée corps et âme dans cette nouvelle histoire. Elle s’était dévoilée, tant physiquement qu’intellectuellement, elle s’était dénudée, elle s’était offerte, elle s’était confiée, et même si elle avait parfois eu peur de le regretter, elle n’avait jamais essayé de lutter contre cette vulnérabilité. C’était ainsi qu’elle aimait, entièrement et sans retenu. Elle ne savait pas faire autrement. Ce soir elle avait envie d’offrir cette possibilité à Léopold, lui qui ne s’autorisait jamais la moindre faiblesse, qui taisait ses sentiments et s’enfermait dans la fierté. Elle voulait qu’il sache qu’il n’avait rien à lui cacher, et qu’il pouvait s'autoriser à être vulnérable. Il n'avait rien à craindre d'elle. Il n’avait pas à être le Ministre de la magie, il pouvait être simplement Léopold Marchebank, ce jeune cadre du Ministère dont elle était tombée amoureuse vingt ans plus tôt.

"Je t’aime, souffla-t-elle, le coeur battant et toujours serré par une angoisse qu'elle avait hâte de voir disparaitre. Et rien de ce que tu pourrais dire ne changera ça, je te le promets."

Elle s'était elle-même convaincue que c'était la vérité, et qu'elle était capable de tout entendre de la part de Léopold. Elle se trompait.
Leopold Marchebank
Leopold MarchebankMinistre de la Magie
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Mourir peut attendre  Icon_minitimeSam 23 Mai 2020 - 12:46
Les paroles réconfortantes de Clara n'avaient pour effet que de renforcer les angoisses de son amant. Plus elle insistait, plus il avait envie de lui crier que non, elle ne pourrait jamais lui pardonner ce qu'il s'apprêtait à lui dire - ce qu'il désespérait de lui dire. Mentir à Clara avait été aisé au début. Il avait trouvé du réconfort dans ses bras, avait satisfait ses envies de luxure, avait même réussi à se complaire, par moments, dans cette situation. Il s'était promis qu'il emporterait ses secrets - et surtout le secret - dans sa tombe. Persuadé que Clara n'avait pas d'autre importance pour lui que celle d'une maîtresse occasionnelle, il avait baissé sa garde et avait négligé de constater l'emprise grandissante qu'elle exerçait sur lui.

Désormais, il ne pouvait plus se passer de leurs retrouvailles, car c'était dans ses bras seulement qu'il avait l'impression de recommencer à respirer. Comme si elle représentait un lien avec cette fille qu'il n'avait jamais pu connaître, cette fille qu'il avait tué. Leopold avait désespérément besoin de ces instants avec Clara, tant et si bien qu'il n'avait pu y renoncer, malgré l'épée de Damoclès qui pesait sur son mariage. Il avait été incapable d'ignorer ce besoin irrépressible qui le prenait aux tripes, cette soif incompréhensible de retrouver Clara, de la serrer dans ses bras, de l'embrasser et de la faire sienne - et de lui appartenir, lui aussi. Leopold avait besoin de son amour, désespérément, il s'en nourrissait comme un Détraqueur s'emplit de l'âme de sa victime, pour remplir ce vide qui, tel un trou noir, grandissait en lui et menaçait de l'engloutir tout entier. Clara était la lumière qui guidait sa vie, sa seule lueur d'espoir, car elle lui apportait un amour innocent et inconditionnel, dont il n'avait pourtant jamais eu besoin auparavant mais qui s'avérait essentiel. Un amour qui ne connaissait pas de limites, car à l'en croire, rien de ce qu'il pourrait faire ou dire ne changerait cela.

Ces paroles ôtèrent un poids des épaules de Leopold, qui sentit quelque chose céder en lui. Il ne pouvait plus porter le poids de cette culpabilité plus longtemps. Il avait besoin que l'amour de Clara lui soit donné en toute connaissance de cause, qu'il soit accompagné, non seulement de son amour, mais de son pardon... et peut-être en était-elle capable, songea-t-il, emporté par ses illusions. Peut-être qu'elle pouvait lui pardonner.

"Je t'aime aussi", répondit-il en glissant ses mains sur sa nuque, pour capturer ses lèvres en un long baiser passionné, teinté d'une avidité proche du désespoir. Ses mains agrippèrent celles de Clara, tandis que ses prunelles sombres accrochaient les siennes. Claires comme de l'eau de roche. Il l'observa un instant avec ardeur, souffla : "Promets-moi... promets-moi que tu ne m'abandonneras pas, quoi qu'il arrive... J'ai tellement besoin de toi, Clara."

Et elle promit, et il était tellement désespéré de la croire qu'il la crut. Oubliant un adage dont il avait pourtant fait sa marque de fabrique : les promesses n'engagent que ceux qui les croient. Emporté par la folie de ses illusions, son cœur battant à tout rompre dans sa poitrine, Leopold finit par rompre le silence de cette petite chambre d'hôtel pour avouer le plus grand crime de toute une vie...

"Clara, notre petite fille, Kelsey... Notre petite fille, je sais qui l'a tué. C'était moi. Je l'ai tué. Je... Je ne savais pas qui elle était, j'ignorais son existence et... et c'était moi, c'est de ma faute."

Ses mains tremblaient tellement qu'il les ôta de celles de Clara pour cacher son visage, et dissimuler les larmes amères qui coulaient sur ses joues.

"C'est de ma faute si elle est morte", avoua-t-il d'une voix étranglée, avant d'émettre un sanglot pathétique, et de s'affaisser sur ses genoux.
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Mourir peut attendre  Icon_minitimeMar 26 Mai 2020 - 8:22
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Clara Lorgan - 48 ans - Fleuriste

Clara répondit avec douceur au long baiser passionné de son amant, sans comprendre cette étrange énergie qui s’en dégageait. Il avait le goût et la ferveur d’un baiser d’adieu, d’une dernière chance. Les mains de Léopold emprisonnèrent les siennes et elle les pressa en retour avec affection, soutenant son regard alors qu’il plantait ses yeux sombres dans les siens. Il y brillait une sorte de désespoir qu’elle s’était convaincue de pouvoir faire disparaitre, aussi elle n’hésita pas une seconde à répéter sa promesse.

« Je te le promets, assura-t-elle. Je ne t’abandonnerai pas, jamais. »

Et à cet instant, elle ne pouvait pas envisager une seule raison de ne pas respecter cet engagement. Elle tenait à l’aider et à le soulager de ce mal qui le rongeait. Elle était persuadée de pouvoir partager un peu de ces remords qui l’écrasaient et des angoisses qui le tourmentaient. Elle voulait tout connaitre de lui, pas seulement les bons côtés. Elle se sentait capable de l’aimer malgré cette part d’ombre dont il semblait lui-même avoir peur.

Son coeur se serra douloureusement et elle pressa les mains de Léopold un peu plus fort dans les siennes quand il se mit à parler de Kelsey. Sa fille. Leur fille. La fille qu’il ne connaitrait jamais. Celle dont elle l’avait privé pendant toutes les années de sa trop courte vie. « Qui ? » voulut-elle demander avec empressement quand il lui avoua savoir qui l’avait tuée. Mais les mots restèrent coincés dans sa gorge nouée et elle se tint silencieuse alors que Léopold poursuivait ses aveux. Des aveux qu’elle ne comprit pas, qu’elle refusa de comprendre.

Elle ne pouvait pas considérer la confession de Léopold pour ce qu’elle était réellement : l’aveux du meurtre de leur fille. Il délirait. C’était la tristesse de ne pas l’avoir connue et la culpabilité de ne pas l’avoir protégée qui parlaient. Bien sûr que non, il ne l’avait pas tuée. Pas plus qu’elle ne l’avait tué en ne veillant pas suffisamment sur elle. Bien sûr que non, il n’avait pas pointé une arme moldue sur son propre enfant pour l’assassiner.

« Non, répondit-elle simplement, d’un ton sans appel. Ce n’est pas ta faute. Tu ne savais pas, tu n’aurais pas pu l’empêcher. »

Léopold arracha ses mains tremblantes aux siennes pour y enfouir son visage, sur lequel Clara eut le temps de distinguer les sillons humides creusés par ses larmes. Une vive inquiétude la saisit alors que son amant répétait ses aveux absurdes. Ses dernières paroles tournaient en boucle dans l’esprit de la fleuriste, qui leur cherchait désespérément un autre sens. Elle se sentit comme prise de vertiges alors qu’elle envisageait malgré elle que cela puisse être la vérité. Elle lutta contre cette idée de toute ses forces, sans succès. Et si…? Non, c’était impossible.

« Tu n’as pas fait ça, souffla-t-elle, blême. Tu ne savais pas, tu… Pourquoi ? Elle regretta sa question à l’instant où elle franchit les lèvres. Elle se fichait de pourquoi. Il n’y avait pas lieu de demander pourquoi, parce que ce n’était pas arrivé. Tu n’as pas fait ça, » répéta-t-elle, comme pour se défendre d’envisager le contraire.

Elle avait besoin de l’entendre de sa bouche à lui. Elle avait besoin qu’il lui explique d’où lui venait cette idée absurde, qu’il lui dise qu’il s’était mal exprimé, qu’il n’avait pas les idées claires, qu’il faisait difficilement son deuil de cet enfant dont elle l’avait privé. Elle pouvait gérer sa propre culpabilité, ses regrets, sa tristesse. Elle pouvait absorber ceux de Léopold aussi. Elle l’acceptait tourmenté, troublé, amer ou triste, mais pas ça. Ses aveux elle n’en voulait pas. Elle ne pouvait pas y croire, c’était au delà de ses forces. Léopold était la meilleure chose qui lui soit arrivé depuis la mort de Kelsey. Elle avait enfin le sentiment de revivre un peu, entre ses bras. Il ne pouvait pas être à la fois son sauveur et le responsable de tous ses malheurs. C’était impossible.

« Dis-moi que tu n’as pas fait ça, » ordonna-t-elle d’une voix vibrante d’émotions.
Leopold Marchebank
Leopold MarchebankMinistre de la Magie
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Mourir peut attendre  Icon_minitimeDim 31 Mai 2020 - 18:40
Pourquoi ? Leopold écarta ses doigts crispés à l'entente de l'interrogation de sa maîtresse, qui était en train de prendre lentement conscience de l'aveu qu'il venait de lui faire. Pourquoi, en effet ? C'était une question essentielle à laquelle elle avait parfaitement droit à une réponse. Leopold le savait au plus profond de lui, s'il y avait bien une chose qu'il devait à Clara, et la seule chose qu'il soit en mesure de faire, c'était de lui accorder la vérité. Toute la vérité, aussi terrible soit-elle, et quand bien même elle impliquait la fin de leur relation.

Leopold abaissa lentement ses mains sur ses genoux et redressa le buste, en un véritable effort pour soutenir le regard horrifié de Clara. Ce regard qu'il avait tant craint de voir, mais auquel il ne pouvait plus échapper désormais. C'était trop tard, c'était fait, il avait fait son aveu et n'avait plus la possibilité de le reprendre. Il allait désormais devoir vivre avec les conséquences de son acte, et supporter le terrible prix à payer pour son ascension au pouvoir...

L'expression de son visage parla d'elle-même quand Clara lui intima de reprendre son aveu. Elle pouvait lire sur ses traits marqués par la culpabilité des excuses criantes de sincérité, qui ne laissaient pas place au doute : Leopold avait bien assassiné sa propre fille.

"Je me trouvais dans cette ruelle de Londres, en train de partager des informations confidentielles avec... avec un homme. Des choses qu'elle n'aurait jamais dû entendre, que personne, absolument personne ne devait connaître, un plan qui devait me mener au pouvoir", révéla-t-il d'une voix éraillée par les émotions. "Malheureusement, elle était là, je l'ai surpris et quand j'ai compris qu'elle avait entendu, et qu'elle essayait de s'enfuir alors je n'avais pas le choix, et je...je l'ai tuée."

Un silence d'une demi-seconde suivit cet aveu glaçant. Puis Leopold se décala légèrement vers Clara pour s'emparer de nouveau de ses mains, et ancrer son regard dans le sien. De lui-même, il rectifia :

"Je pensais que je n'avais pas le choix, mais c'était une erreur, la pire erreur de toute ma vie. Si j'avais su, si j'avais seulement imaginé qu'elle puisse être ma fille, jamais je... Mais si je pouvais revenir en arrière, Clara, si je pouvais te rendre Kelsey, je le ferai sans hésiter une seule seconde, il faut que tu me croies. Je serais prêt à tout sacrifier pour pouvoir la ramener et t'épargner cette douleur. Malheureusement je ne le peux pas."

Il ne le pouvait pas. Tout ce qu'il pouvait faire, c'était tenter d'obtenir une forme de rédemption, et espérer qu'elle ait en elle suffisamment de bonté pour pouvoir lui pardonner. Et il avait beau savoir que c'était énormément lui demander, que cet espoir n'avait rien de réaliste, il ne pouvait s'empêcher d'espérer...
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Mourir peut attendre  Icon_minitimeLun 1 Juin 2020 - 10:11
Léopold ôta finalement ses mains de son visage et Clara fut frappée par l'expression de profonde douleur qu'elle pouvait lire sur ses traits marqués. Son regard troublé par la culpabilité semblait la supplier de bien vouloir le pardonner. C'est à cet instant qu'elle comprit ce qui s'était réellement passé. Il lui disait la vérité. Il avait tué Kelsey. Cette révélation la heurta de plein fouet et elle fut brusquement prise de vertige alors qu'elle revivait en accéléré les derniers mois passé en compagnie de son amant.

Pendant tout ce temps, il avait su. Depuis leur retrouvailles dans sa boutique, en mars dernier, depuis qu'elle lui avait appris l'existence de cette fille qu'il n'avait jamais connue, il savait. Il l'avait laissé pleurer, il l'avait réconforté, il lui avait apporté le soutient dont elle avait besoin, mais il lui avait menti, depuis le début. Elle était tombée amoureuse de celui qui avait assassinée sa fille. Cette pensée lui étreignit le coeur, le tordit douloureusement, le broya sans pitié. Les explications de Léopold lui parvenaient mais elle les entendaient à peine. Elle se fichait de ses raisons, elle ne voulait plus rien entendre, elle ne supportait même plus le son de sa voix.

Clara sursauta quand Léopold s'empara de ses mains et les lui arracha aussitôt pour les ramener contre elle. Elle ne put toutefois pas se soustraire au regard désespéré qu'il planta dans le sien et fut touchée, l'espace d'un instant, par la sincérité de ses regrets. Mais une colère noire, amère, balaya aussitôt cette vague empathie pour ne lui laisser que la haine. Jamais elle n'en avait tant voulu à quelqu'un. Il lui avait pris sa fille. Il avait pointé une arme sur elle et l'avait abattue. Sa propre fille. Clara se retrouva forcée à imaginer cette scène insupportable, à penser à la peur de Kelsey, à la cruauté de Léopold. Ses mains se mirent à trembler et elle serra les poings alors que ses yeux se remplissaient de larmes.

"Tais-toi !" souffla-t-elle, livide, dans un murmure qui eut le même impact que si elle avait hurlé.

Elle ne voulait pas de ses excuses. C'était trop tard. Il était sincèrement désolé, elle le voyait, mais ce n'était rien. Rien comparé à ce qu'elle ressentait à cet instant, rien face à la douleur qu'elle avait enduré. S'il était capable de tuer son propre enfant et de cacher la vérité pendant des mois, alors il était incapable de comprendre sa souffrance. Il n'avait pas de coeur. Elle se leva, chancelante, pour s'éloigner de lui.

"Tu savais, depuis tout ce temps, reprit-elle d'une voix plus forte, vibrante de colère. Tu savais et tu ne m'as rien dit. Ses yeux pleins de larmes jetaient des éclairs et tout son corps était tendu par la rage. Comment tu as pu ?" explosa-t-elle finalement, ses traits déformés par la douleur.

Elle avait envie de hurler, elle avait besoin de le frapper, de lui faire du mal. Elle voulait qu'il paye, qu'il paye pour ce crime odieux et pour tout ses mensonges. Il ne méritait pas de vivre, pas après avoir tué Kelsey, pas après l'avoir trompée pendant des mois. Il l'avait laissé tomber amoureuse, il avait profité de son affection et de sa tendresse. Pendant tout ce temps, elle avait embrassé et caressé le meurtrier de sa fille. Cette idée lui donnait envie de vomir, et envie de le tuer.

Clara fit deux pas dans la pièce et s'empara de sa baguette, qu'elle avait abandonné sur la petite commode en face du lit. Elle fit volte-face et la pointa sur Léopold, le regard brillant de tristesse et de rage.

"Tu disais que tu trouverais son meurtrier. Sa voix tremblait autant que sa main. Tu disais que tu le retrouverais et que tu le ferais payer. Elle se souvenait de cette promesse comme si c'était hier. Tu m'as promis qu'il mourrait, et qu'il saurait pourquoi."

Et d'une certaine façon, Léopold pouvait encore tenir cette promesse.
Leopold Marchebank
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Mourir peut attendre  Icon_minitimeLun 1 Juin 2020 - 11:16
Leopold sentit son cœur se déchirer lorsque Clara arracha ses mains aux siennes. Maintes fois, il avait vu ces mêmes expressions de peur et de dégoût s'imprimer sur le visage de ses ennemis, et il s'en était maintes fois délecté. Persuadé qu'il ne méritait rien d'autre que ces émotions négatives, il s'en nourrissait comme il avait pu savourer susciter l'amour, voire l'adoration de personnes auxquelles il n'accordait pas plus d'attention qu'à un gentil petit animal de compagnie. Pourtant, cette fois, c'était différent, si bien qu'il pouvait à peine soutenir la vue de Clara qui s'éloignait de lui. Aussitôt, son esprit malade se prit à espérer que c'était simplement le choc de la nouvelle qui la faisait réagir ainsi, qu'il pourrait encore tout rattraper et la convaincre. La convaincre de lui pardonner, de continuer à lui donner cet amour dont il avait tant besoin. Après tout, savoir convaincre était son plus grand talent...

Soudain, être assis sur ce lit qui aurait dû abriter leurs ébats lui était insupportable et il se leva en même temps qu'elle, se rapprochant doucement à mesure qu'elle s'écartait. Son éclat de voix le figea momentanément sur place et il s'enfonça dans le silence, conscient du danger auquel il s'exposerait en prononçant la moindre parole. Clara avait besoin d'extérioriser cette colère immense qu'elle ressentait. Leopold venait de lui donner ce qu'elle attendait depuis tout ce temps, un coupable, quelqu'un à blâmer pour la plus grande tragédie qu'elle ait vécu. Mais il avait aussi été celui qui l'avait aidé à se relever, à continuer à avancer, mois après mois, et quelle cruauté, que de trouver le premier pour perdre le deuxième ! Comment avait-il pu, en effet ? Sans sourciller, comme il avait pu commettre tant d'autres crimes avant celui-ci, car il le pouvait, car c'était facile et naturel que de tendre la main pour prendre ce qui lui revenait de droit, car il manipulait et tuait comme il respirait. Car il n'avait pas d'âme.

Pas d'âme, alors pourquoi est-ce qu'il avait l'impression d'en perdre un petit bout supplémentaire, à cet instant, alors qu'il était placé face aux conséquences de ses actes ? Pourquoi faisait-il sienne la douleur de Clara ? Pourquoi cette culpabilité qui lui étreignait la poitrine et l'empêchait de respirer ? Et la peur, par Salazar, cette peur qui grandissait en lui, cette peur de l'oubli qui dirigeait chacun de ses gestes...

"Je suis désolé", fut tout ce qu'il arriva à répondre, d'une voix si basse qu'elle parvint à peine à Clara. Il n'y avait rien d'autre à dire de toute façon, il n'avait jamais réussi à se faire comprendre par un autre être humain et avait d'ailleurs cessé d'essayer depuis longtemps.

Leopold sentit son pouls s'accélérer lorsque Clara fit volte-face pour s'emparer de sa baguette magique. Il sortit de son immobilisme et contourna à son tour le lit pour se rapprocher d'elle, se figeant de nouveau lorsque la pointe de la baguette fut tournée sur lui. Ses paroles rageuses firent pulser l'adrénaline en lui et il sentit son esprit de joueur d'échec fonctionner à toute allure. Clara avait-elle réellement en elle ce qu'il fallait pour le tuer ? Il pouvait presque sentir la haine qui exaltait de tous ses pores à cet instant, une haine si féroce qu'elle suffirait peut-être à alimenter un sortilège de mort. Lui-même était seul et non armé, son pistolet gisait sur le matelas avec sa veste. Le constat s'imposa de lui-même à son esprit : il était complètement à sa merci.

"Clara", dit-il d'un ton d'avertissement, levant doucement les deux mains face à elle, en signe d'apaisement. "Tu as raison, je t'ai dit ça. Et je vais mourir, mais pas aujourd'hui."

Pas aujourd'hui, pas encore, songea-t-il alors qu'un sentiment d'urgence croissait en lui. Tout son être se révoltait contre cette fin qu'il voyait se dessiner, trop tôt, contre ce destin qui semblait finalement lui glisser entre ses doigts. Il n'était pas encore prêt à partir, pas maintenant, pas de la main de la femme qu'il aimait, c'était peut-être la fin qu'il méritait mais certainement pas celle à laquelle il se destinait.

Tout doucement, comme s'il approchait une proie farouche en pleine forêt, Leopold réduisit quelque peu la distance qui les séparait. Le regard vrillé dans le sien, s'exprimait de cette voix chaude, rassurante, qu'il lui réservait souvent, le ministre s'avança, centimètre par centimètre, jusqu'à sentir la pointe de cette baguette magique effleurer son torse.

"Je vais mourir bientôt, Clara. Mais pas de ta main. Tu n'es pas une tueuse, et tu ne veux pas faire ça, crois-moi, tu ne veux pas faire la même erreur que moi, tu ne veux pas tuer quelqu'un de sang froid... Si tu me tues, tu le porteras toute ta vie. Tu ne veux pas te transformer en tueuse, pas à cause de moi, je n'en vaux pas la peine."

Il prononçait ces mots comme un serpent qui charme sa proie. L'amour, pourtant sincère, qu'il éprouvait pour Clara avait disparu pour ne laisser la place qu'à un instinct de survie puissant. Lentement, sans ciller, il abattit ses mains sur celles de Clara et exerça une légère pression pour abaisser la baguette magique.

"Kelsey n'aurait pas voulu cela pour toi", souffla-t-il en la suppliant du regard de sauver son âme - de les sauver tous les deux...
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Mourir peut attendre  Icon_minitimeLun 1 Juin 2020 - 15:06
Clara ne voulait plus rien entendre. Tout son être était tiraillé entre des sentiments incompatibles et les paroles de Léopold ne faisaient qu'ajouter à sa confusion. Elle ne voulait plus l'écouter, et pourtant ses paroles jetèrent en elle un trouble nouveau. Il avait l'air si sûr de lui quand il affirmait qu'il allait bientôt mourir qu'elle sentit son coeur se serrer à cette idée, alors même qu'elle avait sa baguette pointée sur lui, frémissante de rage et dévorée par la haine. Elle le détestait autant qu'elle l'avait aimé, et était incapable de savoir ce dont elle avait réellement besoin. Elle avait à la fois envie de le voir souffrir et de se réfugier entre ses bras.

Léopold s'approchait doucement d'elle et la fleuriste voulut faire un pas en arrière mais se heurta contre la commode derrière elle. Elle s'immobilisa. Elle savait qu'il avait raison, elle n'était pas une tueuse. Ce n'était pas dans sa nature. Et pourtant, elle avait tellement rêvé de ce jour. Du jour où elle se tiendrait en face de l'assassin de Kelsey, et où elle pourrait enfin la venger. Elle n'avait jamais imaginé ce moment de la sorte, et le meurtrier n'avait jamais eu les traits de Léopold, mais la scène s'achevait toujours de la même façon : elle l'assassinait froidement, d'un avada kedavra en pleine poitrine. Elle s'était vue le faire, elle avait fantasmé ce moment, alors pourquoi n'en serait-elle pas capable ? Ce n'était que deux petits mots.

Mais elle resta silencieuse, désarmée par ce regard braqué dans le sien, par cette voix chaude et rassurante. Par cet homme dont elle était tombée amoureuse déjà deux fois. Elle était incapable de l'aimer à présent, et incapable de le pardonner. La force des sentiments qu'elle avait éprouvé pour lui nourrissait sa colère à son encontre, et elle le haïssait plus qu'elle n'aurait détesté n'importe qui d'autre dans la même position. Personne n'aurait pu lui faire plus de mal en lui prenant sa fille que Léopold. Parce qu'elle était obligée de se demander, maintenant. Et si elle lui avait tout avoué, des années plus tôt ? Si elle lui avait présenté Kelsey ? Si elle ne l'avait pas privé de sa fille pendant vingt ans, il ne l'aurait pas tuée. Et elle le haïssait de la pousser vers ce raisonnement. C'était lui le coupable. Seulement lui. Il était le coupable qu'elle cherchait depuis plus de deux ans, alors qu'attendait-elle pour le tuer ?

Elle se fichait de trainer cette culpabilité pour le reste de sa vie. Elle vivrait plus sereinement avec la certitude d'avoir vengé la mort de Kelsey qu'avec le regret d'avoir aimé son assassin. Elle n'avait plus rien à attendre de son avenir, elle avait perdu son unique enfant et celui qui avait peut-être été l'amour de sa vie. Elle se fichait de perdre son âme en tuant Léopold. Elle savait bien qu'il n'en valait pas la peine, mais Kelsey, elle, en valait la peine. Elle le faisait pour elle, songea-t-elle en raffermissant sa prise sur sa baguette, alors que son amant continuait de s'approcher lentement. Pour sa fille, pour son bébé, son seul enfant.

Les mains de Léopold se posèrent sur les siennes et exercèrent une légère pression qui lui fit baisser les bras. Les doigts de Clara s'écartèrent et sa baguette tomba au sol alors qu'elle relevait la tête pour planter son regard dans celui de Léopold. Elle n'avait pas réussi à le tuer. Elle avait réellement cru en avoir envie, pourtant. Elle s'était sentie prête à le faire, l'espace d'un instant, mais elle n'avait pas franchi le pas. Elle avait eu peur. Peur de ce qu'elle pourrait ressentir en le voyant mort, peur de la solitude, et peur des regrets. Elle détestait l'idée d'être encore attachée à lui après ce qu'il lui avait dit, mais c'était indéniable.

"Kelsey n'aurait pas voulu cela pour toi."

Ce fut l'électrochoc. L'impulsion qui lui avait manqué un instant plus tôt. Entendre son prénom, dans la bouche de celui qui lui avait ôté la vie, lui était insupportable. Elle ne voulait plus jamais l'entendre parler. Il ne méritait pas de pouvoir se défendre, il ne méritait pas son pardon. Il avait tué Kelsey, il avait tué sa fille, leur fille. Il lui avait promis de tuer celui qui avait fait ça, et Clara comptait bien lui faire tenir cette promesse.

"Comment oses-tu ? rugit-elle d'une voix étranglée par les sanglots qu'elle retenait difficilement. Comment oses-tu parler d'elle ? Tu ne l'as jamais connue, cracha-t-elle, son regard plein de larmes et de haine planté dans celui de Léopold. Tu ne l'as rencontré qu'une seule fois... poursuivit-elle plus faiblement, le souffle court et la gorge nouée. Et tu l'as tuée. Tu as tué Kelsey, répéta-t-elle comme pour ancrer cette vérité au plus profond d'elle. Et tu vas le payer."

Oubliant sa baguette tombée au sol, oubliant sa petite taille et son manque de force, elle se jeta sur lui avec l'énergie du désespoir et le fit basculer en arrière sur le lit. Ses mains se refermèrent autour du cou de Léopold, et elle serra, de toutes ses forces.
Leopold Marchebank
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Mourir peut attendre  Icon_minitimeLun 1 Juin 2020 - 16:09
"Tu ne l'as jamais connue." Un éclair de colère passa dans le regard de Leopold face à ce reproche qui lui explosa en pleine figure. Oui, il ne l'avait jamais connu, mais à qui la faute ? Il n'aurait pas demandé mieux que de la connaître et de la voir grandir, comme il avait aspiré à élever Cassandre. N'avait-il pas accueilli Kessy dans sa famille lorsque sa mère avait décidé de cesser de lutter, et de vivre dans le mensonge ? Ne l'avait-il pas accepté comme sa véritable fille, ne lui avait-il pas fait une place ? Kessy, qui ressemblait tant à sa grande soeur, avec qui elle aurait pu être si proche - il le pressentait, sans même la connaître, rien qu'avec les récits que lui avait fait Clara au sujet de leur fille. Oui, il n'avait jamais connu Kelsey, il ne l'avait rencontré que pour planter une balle dans sa poitrine et c'était le plus grand regret de toute sa vie. Et s'il endossait la responsabilité du meurtre, en revanche, il refusait d'entendre qu'il n'avait pas été présent dans la vie de Kelsey, qu'il ne s'était pas intéressé à elle.

Son visage s'était assombri mais Leopold eut le bon sens de ne pas formuler ses pensées à voix haute. Fasciné par les émotions vives qui émanaient de Clara, elle d'ordinaire si douce et lumineuse, il ne réagit pas tout de suite lorsqu'elle se jeta sur lui. Peut-être parce qu'il ne l'avait-il jamais perçue comme un véritable danger, mais il lui fallut quelques secondes de sidération pour réaliser ce qui se passait, malgré la dureté du matelas sous son poids, et la sensation de ses doigts glacés qui se serraient autour de sa gorge. Quelques secondes confuses s'écoulèrent alors que l'air commençait à se raréfier dans ses poumons. Leopold se débattit, d'abord mollement, puis un peu plus fortement en réalisant qu'elle était réellement déterminée, et qu'elle était véritablement en train de tenter de le tuer.

"C...C...Clara", coassa-t-il alors que ses mains s'agrippaient à ce qu'elles pouvaient, les épaules, les cheveux de sa maîtresse. La colère de Clara semblait lui donner une force surhumaine, tandis que la sidération de Leopold le privait de la sienne. Il ne voulait pas que les choses se passent ainsi, il refusait de se battre contre Clara, de prendre le dessus sur elle alors qu'elle méritait tant d'avoir le dessus sur lui. Elle méritait sa vengeance, elle méritait de le faire payer pour l'acte immonde qu'il avait commis - pour tous ses actes, réellement - et, alors que ses yeux s'écarquillaient de plus en plus, alors que l'asphyxie le gagnait, il envisagea l'espace d'un instant de la laisser faire. De cesser la lutte, de laisser ce monde devenir meilleur, par le simple fait qu'il cesse d'y exister. De laisser la femme qu'il aimait apaiser son âme et aller de l'avant.

Ses yeux convulsés accrochèrent le plafond blanc de cette pièce sordide, avisant les rais de lumière qu'un lampadaire moldu jetait à travers les stores en plastique. Une sirène d'ambulance retentit au loin, seul son perceptible à part son propre râle et les halètement de Clara qui, en d'autres circonstances, auraient pu accompagner une scène beaucoup plus tendre. Et puis son propre instinct de survie prit le dessus. Soudain, la situation lui parut insupportable, tout son corps sembla se révolter à la pensée qu'il puisse périr ici et maintenant, dans l'anonymat de cette chambre d'hôtel moldu, aux mains de la femme de sa vie. Alors il agrippa à son tour la gorge de Clara, offerte à travers son décolleté alors qu'elle se penchait pour mieux l'étrangler. Il banda ses muscles et se projeta de toutes ses forces pour la faire basculer en arrière et la renverser sous son poids.

Leopold n'était pas un homme très grand, ni très musclé, il était plutôt petit et sec mais c'était toujours plus de puissance physique que Clara. Alors il parvint, non sans difficulté, à la renverser à son tour sur le matelas, à emprisonner son corps du sien. Ce mouvement surprit la fleuriste qui relâcha momentanément sa gorge, lui permettant de prendre quelques bouffées d'oxygène bienvenues. Mais elle reprit bien vite ses esprits, un accent de rage et d'impuissance sembla décupler ses forces et elle reprit son attaque sur Leopold dont le corps pesait une tonne.

"Arrête Clara, arrête", parvint-il à émettre d'une voix rauque, des larmes se mêlant à la sueur sur ses joues. Il se pencha un peu plus contre elle et resserra à son tour son étreinte, ses doigts s'agrippant à sa gorge pour la contraindre, la forcer à lâcher prise. *Arrête Clara, je t'aime, ne me force pas à faire ça, arrête, je t'en prie...*, semblait-il murmurer, par un regard suppliant, incapable de parler, parvenant à peine à respirer. *Arrête...* Ses pensées se faisaient de plus en plus incohérentes, il en perdait le fil, son esprit n'était plus irrigué, ses larmes l'embuaient. De longs instants de lutte silencieuse s'écoulèrent ainsi, de longs instants qui virent l'un des opposants perdre petit à petit le dessus, perdre de ses forces et relâcher son étreinte. L'autre ne sembla pas s'en apercevoir, emporté par la folie de ses émotions, et resserra d'autant la sienne sur la gorge fragile, jusqu'à faire ployer définitivement son ennemi sous le joug de son autorité.

Les deux corps se relâchèrent brusquement, l'un à côté de l'autre, sur la couette immaculée, l'un tendu et crispé, reprenant difficilement son souffle, l'autre raide, sans vie.

Spoiler:
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Mourir peut attendre  Icon_minitimeMer 3 Juin 2020 - 8:23
Plus une seule pensée cohérente ne traversait l'esprit de Clara, qui agissait avec un instinct presque animal, telle une lionne face à sa proie. Son seul objectif était de ne pas relâcher sa prise. Elle devait serrer aussi fort qu'elle le pouvait, serrer jusqu'à ce qu'il ne puisse plus parler, qu'il ne puisse plus lui mentir, la manipuler. Des larmes coulaient sur ses joues et venaient s'écraser sur le visage de Léopold, ses bras tremblaient sous l'effort mais elle en avait à peine conscience, entièrement obsédée par cette lutte qui mobilisait toute son énergie. Elle se découvrait une force et une volonté qu'elle n'aurait jamais soupçonnés et était incapable de s'arrêter. Elle ne remarqua même pas le manque de réaction de son amant, qui luttait à peine pour se défendre. Elle ne réfléchissait ni à ce qu'elle était en train de faire, ni au fait que Léopold soit le Ministère de la magie ou qu'il ait une famille, ni à ce qui se passerait ensuite. Il n'y avait que ce moment de folie pure, où plus rien d'autre ne comptait que ce combat qu'elle devait gagner.

Ce fut son prénom, prononcé de la voix étranglée de Léopold, qui la ramena brièvement à la raison. Pendant un instant elle se vit, penchée sur lui, ses deux mains autour de son cou, en train de l'étrangler. Elle prit conscience de ce qu'elle était en train de faire, mais aussi des conséquences de cet acte. Si elle continuait elle allait le tuer. Alors elle serra encore plus fort, ignorant les mains de Léopold qui s'accrochaient à ses épaules et lui arrachaient les cheveux. Là où elle avait agi sans réfléchir jusque là, uniquement sous le coup de la colère, elle avait désormais parfaitement conscience de ce qu'elle faisait, et n'avait aucune intention de renoncer. Mourir c'était tout ce qu'il méritait. Une vie pour une vie. En vengeant Kelsey, elle l'empêcherait de prendre d'autres vies. Ce n'était que justice.

Ce n'est que lorsque Léopold, qui semblait lui aussi avoir réalisé qu'elle n'abandonnerait pas, se mit soudainement à se débattre avec plus de hargne qu'elle réalisa à quel point il était immobile jusque là. Les mains glacées de son amant se refermèrent autour de sa gorge et elle dut lutter pour ne pas relâcher sa propre prise. En le voyant lutter pour reprendre le dessus elle sentit sa détermination vaciller. Il était bien plus facile de s'acharner à lui ôter la vie quand il ne faisait pas mine de la défendre que d'opposer si brutalement sa volonté à la sienne. Il voulait vivre. Et Clara n'était soudainement plus si certaine de vouloir le contraire. Cette hésitation se ressentit dans son énergie qui faiblissait et il ne fallut pas plus de quelques secondes au Ministre pour rassembler plus de forces qu'elle n'en possédait et la renverser sur le matelas. Un instant plus tard il se retrouvait au dessus d'elle, leurs rôles inversés.

Clara n'eut pas le temps de récupérer ses esprits que les mains de Léopold s'emparaient à nouveau de sa gorge, l'empêchant de reprendre son souffle. Brusquement saisie par la peur, elle tendit les bras pour attraper à son tour le cou de son amant, mais elle n'avait plus la même force. Elle était fatiguée, de ce combat et par la vie. Elle était forcée de constater qu'elle luttait avec moins de hargne pour défendre sa vie qu'elle ne l'avait fait pour ôter celle de Léopold. Et pourtant, elle ne pouvait pas abandonner. C'était à peine conscient, mais tout son corps voulait se défendre face à la menace de la mort. Sa vision se troublait, elle avait des vertiges et une douloureuse sensation de brûlure dans les poumons, mais ses bras continuaient d'essayer, en vain, de gagner cette lutte.

"Leo..." supplia-t-elle dans un souffle qui la priva du peu d'oxygène qui lui restait.

Elle avait beau le haïr, elle avait beau souhaiter sa mort, il était à cet instant le seul à pouvoir la sauver. Il pouvait renoncer, au nom de leur amour et de tout ce qu'ils avaient partagé. Mais il savait certainement qu'elle, elle ne renoncerait pas. Elle n'aurait de cesse de vouloir le faire payer pour la mort de Kelsey. S'il voulait vivre avec ce secret, il n'avait pas d'autre choix que la tuer. Pour la première fois s'insinua dans l'esprit troublé de Clara l'idée que ce soit elle, qui doive payer. Peut-être était-ce à elle de mourir pour venger la mort de sa fille ? Pour avoir caché son existence à son père biologique pendant vingt ans. Pour avoir fermé les yeux quand il était évident qu'elle n'allait pas bien. Pour l'avoir laissée s'éloigner d'elle. Pour n'avoir pas su la protéger.

Pardon, Kelsey, songea-t-elle alors que ses bras privés de forces retombaient mollement sur le matelas à coté d'elle. Petit à petit ses sensations se raréfièrent. Elle ne voyait déjà plus le plafond de la chambre d'hôtel au dessus d'elle. Elle n'entendait plus le bruit des sirènes au loin. Elle ne sentait même plus le poids du corps de Léopold contre le sien. Il ne lui restait que cette horrible sensation de brûlure dans les poumons, et ces mains froides qui continuaient de se resserrer autour de sa gorge. Et puis d'un seul coup, plus rien.

Clara était déjà morte depuis quelques secondes quand son amant se décida finalement à lâcher prise. Elle était étendue sur le lit, ses cheveux blonds éparpillés autours de sa tête, offerte au regard de celui qui lui avait ôté la vie exactement comme Kelsey l'avait été avant elle. Elle avait voulu la venger mais n'avait réussi qu'à la rejoindre dans ce funeste destin. Si elle retrouvait sa fille, elle espérait seulement que celle-ci pourrait la pardonner de ne pas avoir su la protéger de la folie son père. De cet homme que Clara avait aimé plus que n'importe quel autre, et qui l'avait tuée elle aussi.
Alessandro Vigliola
Alessandro VigliolaGarde du corps
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Mourir peut attendre  Icon_minitimeLun 3 Aoû 2020 - 18:41
Appuyé contre le mur de briques sales, une main enfouie dans la poche de son manteau et l'autre tenant une cigarette fine, Alessandro s'efforçait de lutter contre la torpeur qui l'envahissait peu à peu. L'air humide de la nuit l'enveloppait depuis plusieurs heures désormais, et avait pénétré ses vêtements si profondément qu'il se sentait sur le point de grelotter. Pas question d'allumer un feu magique dans cette ruelle, néanmoins. Seul un lampadaire isolé projetait sa lumière blafarde sur l'asphalte, mais l'on n'était jamais assez prudent. Suivant du regard les gouttes régulières qui s'échappaient d'une gouttière pour former une petite flaque, Alessandro retint un soupir en songeant avec nostalgie à sa Naples adorée. Leopoldgrad ne lui avait pas fait le plaisir de se poser en bord de mer depuis plusieurs mois, et il aurait donné cher pour passer une heure à se promener dans les dédales du quartier sorcier napolitain au lieu de faire le pied de grue des heures durant.

De fil en aiguille, son esprit divagua vers ses souvenirs de jeunesse et il s'offrit le luxe de se complaire dans cette nostalgie douce-amère qui accompagnait la mémoire de sa vie en Italie. Bientôt, il fut tant et si bien absorbé par cette occupation qu'un bruit métallique à deux mètres de lui le fit sursauter. Un juron s'échappa de sa bouche à la vue de la queue luisante d'un gros rat, qui venait de sauter sur un couvercle de poubelle métallique. Merlin, s'il venait à être surpris par les rats, c'était qu'il était ici depuis beaucoup trop longtemps. D'un geste absent, il jeta son mégot au sol et l'écrasa de la pointe de son impeccable chaussure, puis jeta un coup d'oeil à la montre luxueuse qui ornait son poignet. Un froncement de sourcils à peine perceptible trahit l'inquiétude du garde-du-corps. Marchebank était en retard, très en retard, et si c'était dans ses habitudes, il n'était pas censé découcher cette nuit. S'était-il endormi auprès de sa belle ? Cela ne lui ressemblait pas, mais mieux valait s'en assurer : il ne tenait pas à affronter les foudres de la première dame, ou, plus probablement, la mauvaise humeur d'un Leopold qui aurait été pris sur le fait.

Un énième soupir franchit ses lèvres alors qu'il poussait la porte de l'hôtel et s'aventurait dans le hall silencieux. Une fois de plus, il questionna la pertinence du choix qu'il avait fait en acceptant ce poste, et se réconforta en songeant aux sommes d'argent rondelettes qui s'accumulaient dans son coffre de Gringotts. Il s'empara de sa baguette magique à titre de précaution et s'engagea dans les escaliers, qu'il avala quatre à quatre jusqu'au bon étage. Leopold s'assurait toujours de lui indiquer le numéro de la chambre au cas où une attaque aurait lieu, ce qui ne paraissait pas être le cas ce soir. A tous les coups, il allait retrouver son patron confortablement installé dans les bras de sa maîtresse, en train de ronfler, et allait se faire enguirlander pour l'avoir dérangé. Bah ! Ce serait l'occasion de lui rappeler qu'il n'avait pas signé pour une nuit blanche...

Parvenu devant la bonne porte, Alessandro frappa quelques coups en interrogeant à voix basse : "Patron ? Tout va bien ?"

Inutile de réveiller tout l'hôtel, songea-t-il en tendant l'oreille. Un silence absolu lui répondit, et son froncement de sourcils s'accentua. Il frappa quelques coups supplémentaire, prononça des interrogations de plus en plus pressantes à travers la porte, laissa une minute s'écouler. Si Leopold et Clara dormaient, ils auraient dû l'entendre, et se réveiller, songea-t-il en sentant une décharge d'adrénaline évacuer brusquement sa torpeur. Après un coup d'oeil de précaution dans le couloir endormi, Alessandro pointa l'extrémité de sa baguette magique sur la poignée dorée et lança un Alohomora informulé. La porte céda sans difficultés, et il pénétra précautionneusement dans la chambre obscure.

Quelques rayons de lumière artificielle filtraient à travers les stores et éclairaient une scène étrange - tout d'abord, il eut l'impression que Clara dormait. Sa tête reposait sur les genoux de Leopold qui, prostré sur elle, caressait lentement ses cheveux dorés. Il lui tournait un dos qui paraissait tressauter, comme s'il pleurait.

"Patron ? Tout va bien ?", répéta-t-il en murmurant, son regard alarmé se posant sur la jeune femme alors qu'il s'approchait du lit. Une appréhension monta en lui alors que Leopold continuait d'ignorer sa présence, entièrement absorbé par son étreinte. Un mauvais pressentiment s'empara d'Alessandro alors qu'il contournait le lit, pour embrasser le couple dans son champ de vision. Le visage de Clara paraissait tellement innocent dans la mort, tellement paisible, qu'il exerça une brève fascination sur Alessandro.

"Oh... Leopold..." , souffla-t-il, abasourdi, sans poursuivre la suite de sa phrase. *Qu'avez-vous fait.*

L'entente de son prénom sembla enfin atteindre le ministre, qui redressa sur Alessandro un visage éperdu. Son regard déchirant lui fit l'effet d'un coup de poing dans le plexus, alors qu'il y lisait une douleur incommensurable, qui lui parut terriblement familière. L'espace d'un instant, il fut de nouveau renvoyé en Italie, à Rome, et lui aussi dans un quartier sordide tenait l'amour de sa vie sur ses genoux. Lui aussi caressait son visage paisible et serrait ses membres déjà rigides en espérant lui insuffler la vie, par la seule force de ses sentiments, de sa volonté. Déstabilisé par la puissance de ces souvenirs, Alessandro s'accrocha à la vue de la cicatrice luisance de Leopold qui lui zébrait le visage, puis aux marques violacées qui ornaient le cou de Clara, pour revenir à la réalité. Contrairement à lui, son patron avait provoqué son propre malheur, songea-t-il sans parvenir réellement à le blâmer : il savait à quel point le ministre était déjà puni pour son crime. Alessandro pouvait l'aider à le maquiller et à en éviter toutes les conséquences matérielles et judiciaires, mais il ne pourrait rien faire contre les petits bouts d'âme que Leopold venait d'abandonner auprès de Clara.

"Je ne sais pas ce qui s'est passé... Je ne sais pas comment ça a pu arriver", murmura Leopold d'une voix rauque. Ses yeux paraissaient divaguer, cherchant ceux d'Alessandro sans toutefois parvenir à s'y accrocher. Merlin, c'était la première fois qu'il le voyait perdre le contrôle et cette vision l'effrayait plus qu'il ne pouvait le dire. Un homme aussi puissant que Marchebank devait savoir rester maître de lui-même en toute circonstance - et pas seulement aux yeux du peuple. Il ne pouvait pas se permettre de perdre la raison, les enjeux étaient trop grands.

"Il ne faut pas rester ici", répondit Alessandro en s'avançant vers le duo macabre. Il s'accroupit aux côtés de Leopold et leva prudemment les mains pour attraper les doigts de Leopold et le forcer à lâcher prise. Ils s'étaient tellement crispés sur la main blanche de Clara qu'il lui fallut forcer un peu.

"Je vais m'occuper d'elle, d'accord ?", tenta-t-il de le persuader. Il avait l'impression de parler à un animal rétif, ou à un petit garçon perdu, qui ne comprenait pas tout à fait ce qui lui arrivait. Formidable. Un ministre en état de choc, et sa maîtresse assassinée, en plein territoire moldu. Au moins Alessandro n'était pas déçu du voyage... Depuis combien de temps le drame avait-il eu lieu ? Combien d'heures Leopold avait-il passé dans cette position, à pleurer la mort de la femme qu'il aimait, à prendre toute la mesure de son crime ? Un sentiment d'horreur s'empara d'Alessandro alors qu'il imaginait la scène. Parvenant tant bien que mal à extraire le corps des bras de son meurtrier, il serra Clara contre lui et s'écarta du lit pour inciter Leopold à le suivre.

"Un lieu paisible, il lui faut... un bel endroit", murmura Leopold en posant sur Clara un regard d'une tendresse indicible, inspirant à son garde-du-corps une pitié contenue. Comment avait-il pu connaître un tel amour et le sacrifier ainsi ? Car c'était bien de l'amour qu'exprimaient tous ses gestes, et non pas l'indifférence froide qu'il aurait attendu face à la perte d'une simple amante. Comment avait-il pu agir ainsi et sacrifier une telle relation à la légère ? Que pouvait-il y avoir de plus précieux à sauvegarder que cela ? Non, décidément, Alessandro ne comprenait pas. Leopold Marchebank était probablement l'homme le plus chanceux du monde, mais aussi celui qui savait le moins apprécier la beauté de ce qu'il avait...

"Nous allons lui trouver un bel endroit où reposer, c'est promis", répondit Alessandro en réfléchissant à toute allure. "Posez la main sur mon épaule, maintenant."

Il lui fallut prendre trois bonnes inspirations pour retrouver un semblant de calme et réussir son double transplanage d'escorte. Bientôt, le paysage sordide de cette chambre d'hôtel moldue disparut pour laisser place aux bruissements d'une forêt endormie. Ils se trouvaient à l'orée d'une petite clairière entourée de chênes, inondée par un rayon de lune.

"Ici, est-ce que cela ira ?", s'enquit Alessandro en désignant l'herbe moelleuse qui s'étalait sous un grand chêne. Il s'y dirigea péniblement, le corps toujours dans ses bras. Elle n'en avait peut-être pas l'air, mais Clara Lorgan pesait son poids.

"Oui, cela ira", répondit Leopold, en s'avançant à son tour, le visage blême. L'air frais de la nuit semblait lui remettre peu à peu les idées en place.

Alessandro hocha sobrement la tête, puis déposa délicatement Clara sur un tapis de mousse, avant de s'emparer d'une grosse branche morte qu'il métamorphosa en pelle. Après avoir échangé un regard avec son patron, il lui tendit l'outil, en conjura une seconde, puis les deux hommes se mirent à l'ouvrage. Ils observèrent tous deux un silence religieux, uniquement rompu par les hululements d'une chouette perchée au-dessus de leurs têtes, qui semblait les considérer avec sévérité. Le temps des explications viendrait plus tard, s'il venait seulement. Pour l'heure, aucun des deux sorciers n'avait envie de parler, chacun absorbé par la gravité de l'instant, et par ses propres souvenirs. Pour la première fois peut-être, ils sentirent l'un comme l'autre qu'un lien indicible les unissait : non seulement celui d'un secret, mais aussi d'un douleur partagée.

RP terminé


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