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Love of my life, you've hurt me [Jeremy & Juliet]

Juliet E. Wilson
Juliet E. WilsonCapitaine de l'équipe nationale de Quidditch
Messages : 2269
Profil Académie Waverly
Love of my life, you've hurt me [Jeremy & Juliet] Icon_minitimeSam 10 Aoû 2019 - 16:54
20 août 2010

Le calme de leur appartement lui arracha un hoquet de surprise et Juliet s’appuya contre la porte d’entrée, le cœur battant la chamade. Elle observa Jeremy retirer sa veste et gagner le salon, trop sonnée pour l’imiter. Ses grands yeux gris fixaient un point invisible, et le tremblement de ses mains trahissait la nervosité qui ne l’avait pas quitté depuis Flaquemare. Elle se força à prendre de longues inspirations, sa main gauche posée sur son abdomen, et ferma les yeux un instant pour se concentrer sur cet acte si simple. Elle sentit peu à peu la colère qu’elle avait ressentie face à Afghan refluer, la laissant vidée et épuisée, mais étonnement apaisée, avec l’impression d’avoir ouvert une ancienne plaie pour mieux cicatriser.

Ce fut la voix de Jeremy qui la tira de cet état ; ainsi que la mention de Théo, à laquelle elle réagit un peu violemment en se décollant brusquement de la porte d’entrée. Evidemment que Jeremy n’avait pas hésité un seul instant à laisser leur fille chez son parrain et qu’il ne voyait aucun problème à lui confier pour la nuit. Evidemment que Théo s’était montré particulièrement inquiet en apprenant qu’elle était en danger. Un lourd poids sembla tomber dans sa poitrine et Juliet retira doucement sa veste pendant que Jeremy envoyait un patronus à leur ami – à son amant. L’absurdité de la situation la frappa une nouvelle fois tandis qu’elle le rejoignait dans le salon.

Car rien n’était terminé, réalisa-t-elle avec effroi en prenant place à côté de lui. Sa confrontation avec Afghan lui avait peut-être permis d’avancer personnellement, mais elle n’avait en rien réglé la situation impossible dans laquelle elle s’était elle-même empêtrée. La peur qu’elle ressentait à l’idée de perdre Jeremy voulu la pousser à ne rien dire, à taire cette infidélité et à ne jamais – plus jamais – en évoquer ne serait-ce que le souvenir. Elle repoussa cette éventualité de toutes ses forces, bien décidée à ne plus se laisser mener par d’aussi bas instincts. Mentir ne lui ressemblait pas. En y réfléchissant bien, tromper ne lui ressemblait pas non plus, et Juliet se demanda brièvement si elle avait été véritablement elle-même ces derniers mois. Sûrement pas, lui répondit la sage petite voix de la raison qui s’était faite bien silencieuse dernièrement, mais cela ne changeait rien, et elle le savait pertinemment. Son acte restait le même, la souffrance qu’il causerait à Jeremy lorsqu’il apprendrait la vérité n’en serait pas atténuée. Pour autant, elle ne pouvait pas continuer à lui mentir pour le préserver de la vérité – notamment parce qu’elle savait qu’au fond, il s’agirait d’un acte égoïste parce qu’elle n’était pas certaine de pouvoir supporter sa perte.

Elle avait été suffisamment égoïste pour le restant de ses jours, il était grand temps que cela change. Elle avait blessé l’homme qu’elle aimait le plus au monde d’une manière dont elle n’était pas certaine qu’il pourrait un jour lui pardonner. Elle l’avait repoussé, elle avait nié sa peine, elle l’avait trompé, parce qu’elle avait si mal qu’elle n’avait trouvé que cette manière de faire taire sa tristesse : en l’oubliant dans les bras d’un autre homme. C’était lâche, et cruel.

Ses ongles qui s’enfonçaient dans la paume de sa main la tirèrent de ses pensées et elle plongea son regard dans celui de Jeremy. Elle se sentait nauséeuse, fébrile et savait pertinemment que cet état empirerait à l’instant même où elle se mettrait à parler. Elle conserva le silence une seconde de plus, juste pour préserver pendant un instant le potentiel dernier moment de son mariage.

« Non, ça ne va pas vraiment. » lâcha-t-elle avec une honnêteté déstabilisante. « Ca fait quelques mois que ça ne va pas vraiment. » rajouta-t-elle dans un souffle.

Cela faisait désormais quelques temps qu’elle ne se sentait plus elle-même, qu’elle survivait plus qu’elle ne vivait. Elle était devenue l’ombre d’elle-même, une pâle copie d’une jeune femme normalement enjouée et vive. Elle s’était laissée engloutir par un état mélancolique duquel elle n’était sorti que quelques minutes auparavant lorsqu’elle s’était enfin autorisée à ressentir tous ces sentiments qu’elle s’était efforcée de refouler.

« Jeremy… » sa voix se brisa et elle se racla la gorge. « Je suis tellement désolée. » débuta-t-elle, les larmes aux yeux.

Elle laissa s’écouler quelques instants, pendant lesquelles elle s’efforça de rassembler ses esprits. Elle devait aller jusqu’au bout de cette conversation, elle ne pouvait décemment pas y couper, même si Merlin seul savait à quel point elle en avait envie.

« J’ai été… » Elle ne trouvait même pas de mot suffisamment fort pour décrire son attitude. « J’ai été atroce avec toi. Et… Et je te dois des explications. »

Elle avait tellement de choses à dire que toutes se bousculaient au bord de ses lèvres. Elle prit une profonde inspiration, et se lança.

« A l’hôpital, quand je me suis réveillée et que le médicomage m’a expliqué tout ce qu’il s’était passé… J’étais abasourdie, je ne voulais pas le croire. Ça me paraissait impossible. Je n’ai gardé quasiment aucun souvenir de l’attaque. La dernière chose dont je me rappelle avec précision, c’est lorsqu’on mangeait un éclair au chocolat sur le port. La minute d’après, j’ai l’impression de me réveiller à Ste Mangouste. Et entre les deux… Rien, si ce n’est quelques flashs qui me reviennent de temps à autre. Alors j’apprends que j’ai failli mourir, là-bas, que mon cœur s’est arrêté, trois fois, que j’ai des côtes cassés, un poumon perforé, je ne sais pas combien de bleus sur le corps mais… Mais ça ne me paraît pas réel. Je sens que j’ai mal, oui, mais pas plus qu’après ma chute en balai en sixième année. » Elle avait passé une semaine à l’infirmerie après leur match contre Serdaigle – qu’ils avaient perdu, en plus. « Et puis le médicomage m’a parlé du bébé et c’est là que je l’ai véritablement ressenti. Le vide. » Machinalement, elle posa sa main à l’endroit où une cicatrice courrait sur son ventre. « Je ne sais pas comment t’expliquer l’effet que ça m’a fait, mais c’était monstrueux. J’avais l’impression que ça m’avalait, toute entière. Alors, au début, je me suis débattue. J’ai pensé que, si je retrouvais ma vie d’avant, tout rentrerait dans l’ordre. Je suis rentrée à la maison, je suis retournée à Flaquemare, on a repris notre vie là où on l’avait laissé… Sauf que c’était toujours là. Que chaque moment de joie était absorbé par ce vide. Que j’avais beau me battre, il avait toujours le dessus. Plus les jours passaient, et plus je me sentais vide, creuse. J’étais épuisée et… Et je me sentais seule. » Elle leva un regard incertain vers Jeremy. « Je sais que tu étais là – je le sais – mais… Mais au fond de moi, j’étais seule face à ce vide. J’en suis venue à avoir des pensées… » Elle déglutit difficilement. « Je me sentais morte, Jeremy. J’avais l’impression d’être un fantôme, j’avais l’impression d’être inexistante. Comme si tout ce qui faisait que j’étais moi, avant, n’avait jamais quitté les quais de Bristol. Alors j’en suis venue à me dire que… Que j’aurais peut-être dû mourir là-bas. » Son menton trembla un peu. « Je me détestais de penser ça, si tu savais à quel point ! Quand je voyais Gaby, quand je te voyais toi… Mais ça m’obsédait, j’arrivais pas à penser à autre chose. »

Et ça l’obsédait, jour et nuit. Elle en avait perdu le sommeil, comme en témoignait les larges cernes qui se creusaient sous ses yeux.

« J’ai abandonné, Jeremy. » Des grosses larmes roulèrent sur ses joues et s’écrasèrent dans le creux de son cou. « J’ai abandonné, j’ai tout laissé tomber. Toi, Gaby, notre vie, notre famille… J’y arrivais plus. C’était comme si… Comme si je me regardais vivre de l’extérieur. Comme si je n’étais pas à l’intérieur de mon corps, mais que je regardais la scène d’en-haut. Et ce soir... » Elle hésita un instant, sécha ses larmes d’un revers de main. « Face à Afghan j’ai complètement… J’ai complètement explosé. J’ai cru que… Si tu n’étais pas arrivé, Jeremy, je ne sais pas ce j’aurais été capable de faire. » La présence de son mari à ses côtés lui avait fait reprendre contact avec la réalité, l’empêchant de commettre l’irréparable. « Et c’est assez paradoxal, mais au final, je me suis sentie… Je me suis sentie vivante. Comme si je ressentais enfin. »

Les battements de son cœur s’accélérèrent drastiquement alors qu’elle reprenait sa respiration après une aussi longue tirade. Elle savait parfaitement qu’il était plus que temps d’avouer ce lourd mensonge qui lui pesait sur le cœur depuis bien trop longtemps maintenant. Une boule se forma dans sa gorge et elle joignit ses mains pour les empêcher de trembler.

« Jeremy, il faut que je te dise quelque chose. » Son ton, pressant et sa voix, tremblante, indiquaient tous les deux que le sujet qu’elle s’apprêtait à aborder était loin d’être gai. « J’ai… J’ai complètement déconné. Je me sentais tellement mal, et tellement seule, que j’ai… Que j’ai vu quelqu’un d’autre. » Ces quelques mots semblèrent danser dans le calme du salon un instant, avec que Juliet ne reprenne la parole, les larmes aux yeux. « Je suis tellement, tellement, tellement, tellement désolée, ça… Ça ne voulait rien dire. »

Evidemment, que ça ne voulait rien dire. Qu’elle n’avait jamais ressenti pour Théo ne serait-ce qu’un centième de ce qu’elle ressentait pour Jeremy. Sûrement passerait-elle l’intégralité de son existence à se maudire d’avoir pris une aussi mauvaise décision.

« Je crois que c’était une façon de… De combler le vide. De changer de vie. C’était idiot, j’étais encore plus malheureuse qu’avant parce que… Je n’échangerais ma vie avec toi pour rien au monde. » déclara-t-elle avec un sérieux troublant. « Je suis désolée, » répéta-t-elle encore, « et je ne cesserai jamais de m’en vouloir pour ça. Je n’étais pas moi-même je… » Elle s’interrompit, bien consciente qu’elle se cherchait des excuses alors que son acte ne l’était pas. Elle avait trompé son mari avec le parrain de leur fille. «  Je  ne te mérite pas, Jerem. » murmura-t-elle, en écho à cette dernière pensée.

Consciente que son aveu n’était pas tout à fait terminé, Juliet releva les yeux vers Jeremy pour affronter son regard, tétanisée ce qu’elle pourrait y lire. Elle prit une dernière inspiration pour lâcher, dans un dernier souffle :

« C’était Théo. »
Jeremy Baker
Jeremy BakerJérémie Levain
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Love of my life, you've hurt me [Jeremy & Juliet] Icon_minitimeDim 11 Aoû 2019 - 11:42
Comme Juliet le considérait en silence, Jeremy sentit une appréhension sourde le gagner. Il pouvait lire en elle comme dans un livre ouvert, et pressentait la conversation lourde et difficile qui s'annonçait. Il était temps, car son épouse n'était plus que l'ombre d'elle-même, avec ses grandes cernes qui lui mangeaient la moitié du visage et son teint trop pâle. Juliet n'avait jamais été bien épaisse, même après sa grossesse, mais elle lui paraissait particulièrement amaigrie. Son regard accrocha une poussière qui lui maculait le front, mais il n'esquissa pas un geste pour la lui enlever : l'instant était grave, et il osait à peine bouger.

Finalement, Juliet sembla enfin se décider à parler. Après des mois de silence, le barrage qui s'était érigé entre eux venait de céder, et un torrent de paroles se mit à engloutir Jeremy. Les mains serrées l'une contre l'autre à s'en faire blanchir les jointures, il écouta son récit avec la plus grande des attentions, le cœur battant à tout rompre dans sa poitrine. Il aurait voulu l'interrompre, lui dire que c'était à lui de fournir des explications, que c'était lui qui avait été atroce avec elle, mais sa curiosité était trop grande pour arrêter ce flot de paroles et il devinait qu'elle avait besoin, enfin, de s'ouvrir à lui. C'était étrange, de l'entendre mentionner l'accident, ce grand tabou qui s'était immiscé dans leur couple, et d'entendre enfin ce qu'elle avait ressenti pendant tout ce temps. C'était étrange, et douloureux. Quand elle posa la main sur son ventre, la blessure encore fraiche du deuil se manifesta en lui. Il enveloppa Juliet d'un regard empreint de compréhension, un regard désolé : désolé de ne pas avoir pris la pleine mesure de ce qu'elle avait ressenti, de ne pas avoir su trouver les mots ni la bonne attitude pour lui faire sentir qu'il était là, et qu'elle n'avait pas besoin de rechercher ailleurs ce qu'il pouvait lui apporter. La culpabilité enfla en lui de manière exponentielle au fil de sa tirade. Il se sentait déçu de lui-même, pour ne pas avoir été suffisant pour remplir ce vide en elle et lui insuffler de la joie. Car cette joie, ce souffle de vie devait venir d'elle-même, et seule Juliet pouvait en retrouver la source.

Finalement, la perte de cet enfant, c'était la fin de leurs illusions d'adolescence. Ce milicien n'avait pas seulement tué leur bébé à naître, il avait aussi tué Jeremy et Juliet, ce couple parfait et fusionnel qui était né sur une plage d'Aberystwyth, ce duo fougueux, aventureux, qui était cap de tout. Eux ou nous. Eux ou nous, il lui avait laissé le choix et elle avait choisi - "nous", "nous contre le reste du monde". Et c'était ainsi que leur relation s'était épanouie, enracinée profondément et avait grandi plus forte jour après jour. Eux contre le reste du monde, eux unis et uniques, comme une seule entité, rendue plus forte par un amour puissant et naïf, aussi naïf que leur jeunesse. Juliet et Jeremy, Jeremy et Juliet, un couple devenu mythique auprès de leur entourage par toutes les épreuves qu'ils avaient enduré, et surmonté, avec le sourire, par les choix difficiles pris trop jeunes et par cet amour qui semblait transpirer entre eux. Jusqu'à ce que la réalité ne les rattrape, comme elle le faisait toujours. Et cette réalité, c'est que Jeremy ne suffisait pas à Juliet, et Juliet ne suffisait pas à Jeremy. Ce simple sort perdu avait failli ôter l'un à l'autre, le rendre orphelin et le rappeler à cette triste vérité : un être humain naissait et vivait seul, toute fusion n'était qu'illusion, et toute relation pouvait mourir un jour.

Ce sortilège avait opéré une séparation chirurgicale entre elle et lui, comme une déchirure totale de ce lien qu'ils pensaient indestructibles. Et maintenant ? Maintenant qu'ils avaient fait ce constat, seraient-ils capables de se retrouver ? De reformer un couple, différent, peut-être, dépouillé de certaines illusions, mais peut-être plus solide ? Jeremy aurait aimé le croire, vraiment. Mais, alors que Juliet progressait dans son récit, il perçut instinctivement la conclusion qui s'approchait. Il eut cette impression très nette de voir la catastrophe arriver, comme un train qui déraillerait au ralenti.

Un sentiment de danger grandit en lui, alors il se mit à supplier Juliet du regard - de quoi ? De lui dire la vérité, vite et bien, comme un pansement qu'on arrache ? De garder le silence à jamais ? Il ne le savait pas vraiment lui-même.  

"Jeremy, il faut que je te dise quelque chose."

Le verdict tomba comme un couperet, et il accusa le coup, fermant les paupières brièvement pour se soustraire à sa vue. Elle avait "vu quelqu'un d'autre". Les termes choisis n'étaient pas anodins, elle ne l'avait pas trompé une seule et unique fois, non, elle avait vu quelqu'un d'autre - autrement dit, elle avait entretenu une liaison. C'était quelque chose de plus ou moins sérieux et engageant, un lien qui menaçait le frêle esquif qu'était devenu leur mariage.

Jeremy rouvrit les yeux et hocha la tête doucement, en signe d'acceptation, tentant de réfréner l'amertume qui se répandait en lui. Il n'était pas surpris, pas vraiment, quand bien même il avait longtemps lutté contre cette intuition, et puis lui aussi l'avait trompé, même s'il constatait à présent à quel point cela ne permettait pas un seul instant d'atténuer la douleur qu'il ressentait.

Lorsqu'elle souffla qu'il ne la méritait pas, Jeremy secoua la tête en signe de dénégation et tourna vers elle un regard malheureux. Il s'apprêtait à lui répondre, à lui avouer sa propre faute quand elle reprit la parole, et le foudroya sur place. Il lui sembla que le ciel s'était abattu sur ses épaules et il écouta, sonné, le nom qui tintait à l'infini dans ses oreilles. Peut-être avait-il mal entendu ? Peut-être avait-il mal compris ? Affolé, il fouilla le regard de son épouse, pour y chercher un signe de dénégation, ou le sens de son erreur.

"Théo ? Théo Nott ?", s'enquit-il d'une toute petite voix, comme celle d'un enfant. La confirmation n'était pas réellement nécessaire. Bien sûr, Théo Nott, qui d'autre ? Théo et sa gentillesse, sa sollicitude et sa présence, toujours prêt à rendre service aux Baker, toujours là pour garder Gabrielle quand ils en avaient besoin, toujours disponible pour passer une journée avec Juliet et l'éloigner de son quotidien. Théo et ses fossettes, ses traits droits et nobles de sang-pur, ses petites bouclettes et cette mèche blanche piquée sur le sommet de son crâne, Théo et son corps parfait dont Olivia lui avait rabattu les oreilles à une époque - car il intriguait les adolescentes, Théo Nott le solitaire, sombre et torturé, Théo Nott le cultivé, Théo Nott à l'histoire si chevaleresque finalement, le fils de mangemort repenti qui avait tout quitté par amour, une histoire digne d'un conte de fées.

Un gouffre béant s'était ouvert dans sa poitrine. Il aurait dû s'en douter. D'ailleurs, tout au fond de lui, il s'en était douté mais n'avait jamais accordé le moindre crédit à cette thèse. C'était la thèse d'un paranoïaque, rendu fou par la jalousie, et il s'était cru suffisamment mature pour ne pas y adhérer - Juliet et Théo ne lui feraient jamais ça.

C'était impensable. Impensable que le parrain de sa fille ait pu le regarder droit dans les yeux, pendant plusieurs - quoi, semaines ? mois ?, ait gardé Gabrielle, ait plaisanté avec lui tout en couchant avec sa femme. Impensable que Juliet ait tenu un secret aussi lourd sous leur propre toit. La trahison était impensable, elle était horrible et elle l'étouffait, d'une douleur si intense qu'elle était insupportable. Cela s'était passé sous ses yeux, sans qu'il ne se rende compte de rien, trop naïf et trop confiant pour accepter ce que sa raison soupçonnait.

Des larmes d'impuissance jaillirent au coin de ses yeux, sans même qu'il ne s'en aperçoive. Envahi par une vague d'émotions trop forte pour lui, Jeremy aurait voulu se lever, rester assis à côté de Juliet lui était insupportable à cet instant, mais tous ses membres semblaient engourdis. C'était comme si une puissance invisible le maintenait assis là, seul et humilié sous le regard intense de Juliet. Incapable de se soustraire à elle, alors qu'elle venait de concrétiser sa plus grande crainte.

Le verdict était implacable et sans appel. Jeremy s'en était remis à elle, il lui avait ouvert son âme, lui avait offert son amour et sa vie et elle en avait préféré un autre. Juliet était sa famille, mais lui ne représentait pas la même chose à ses yeux. C'était une histoire vieille comme le monde, finalement. L'histoire d'un amour perdu.

"Mais comment tu peux dire que ça ne voulait rien dire ?", réagit-il enfin, d'une voix sourde. "C'est Théo, bien sûr que ça veut dire quelque chose. Je ne sais pas si c'est plus insultant pour lui, ou pour moi."

Mais si, il le savait.
Il savait pertinemment qui restait en arrière dans ce trio-ci.

"De tous les hommes, comment tu as pu... Sa voix se brisa. Il marqua un silence, puis explosa : "Mais moi aussi je t'ai trompé, Juliet ! Mais pas avec Olivia !", aboya-t-il finalement avant de bondir du canapé. Il traversa la pièce en trois enjambées furieuses, pris sa tête entre ses mains. Des images de Gabrielle, réclamant son parrain, jouant aux legos moldus ou à la pâte à modeler dans ses bras, dansaient devant ses yeux.

Il reporta son attention sur elle, le cœur battant furieusement contre ses côtes. Il lui aussi devait des explications, et meilleures que celle-là.

"C'est arrivé une fois, une seule et unique fois, avec une fille de Lycaon, Shamita, parce que je te sentais partie à la dérive, parce que je sentais que je t'avais perdu... et j'ai tellement, tellement regretté, si tu savais, je m'en rends malade depuis que c'est arrivé, à me sentir coupable de ne pas être là pour toi et coupable de t'avoir trahi. Et je suis coupable, bien sûr, mille fois coupable ! Et je suis tellement désolé, mais Juliet, comment t'as pu faire ça ? Pourquoi lui ? N'importe qui d'autre, j'aurais pu comprendre, on aurait eu une chance, mais..."

Il laissa mourir sa phrase, comme pétrifié. Son ego était meurtri, terriblement, mais ce n'était pas la seule raison de sa colère : il songea que de cette épreuve-là était celle de trop, celle dont leur mariage ne se redresserait pas - il songea aussi que Juliet n'avait probablement même pas envie qu'il se redresse, au fond. Une idée affreuse germa en lui, l'image irréelle d'une autre famille, heureuse, épanouie - une famille sans lui. Juliet, Théo et Gabrielle... Contournant la table-basse, il réduisit à peau de chagrin la distance de sécurité qu'il avait érigé entre eux, pour planter son regard meurtri dans le sien. Le sentiment d'injustice le faisait trembler comme une feuille.

"Tu l'aimes, c'est ça ?", interrogea-t-il finalement d'une voix douloureuse. "Vous vous aimez, et c'est pour ça qu'il a quitté Samaël."

Cette idée s'enracina profondément en lui, elle faisait sens. Tout ce qui s'était déroulé ces derniers mois, la froideur de Juliet, sa distance, son attitude fuyante, tout cela prenait un sens nouveau et recomposé dans l'esprit blessé de Jeremy.

"Tu veux vivre avec lui, mais tu es trop loyale pour me quitter. Mais rassures-toi, je ne vais pas te retenir contre ton gré dans un mariage malheureux. On s'est mariés trop jeunes, on s'est trompés et tu regrettes. Ça arrive."

Ce dernier mot lui arracha la bouche et il dut se détourner pour dissimuler l'expression de son visage à Juliet. Il fallait qu'il parte, il fallait qu'il parte très vite car il n'aurait pas la force de faire ça deux fois. Lui rendre sa liberté, pour qu'elle vole dans les bras de son ami, serait la chose la plus difficile qu'il aurait à faire de toute sa vie.

Le souvenir de Kylian s'imposa à son esprit, et il sentit sa gorge se serrer alors que l'ironie de la situation l'emplissait d'amertume. Il se souvenait de la dernière fois où Juliet avait aimé son meilleur ami.

Peut-être que c'était bien fait pour lui.


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Juliet E. Wilson
Juliet E. WilsonCapitaine de l'équipe nationale de Quidditch
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Love of my life, you've hurt me [Jeremy & Juliet] Icon_minitimeDim 11 Aoû 2019 - 18:12
Juliet hocha doucement la tête, rendue silencieuse par l’aveu qu’elle venait de faire à son mari. Son cœur, déjà lourd de son mensonge et de sa trahison, se serra davantage lorsque des larmes roulèrent sur les joues de Jeremy. Elle resta immobile, incapable d’esquisser le moindre geste vers lui pour essuyer les traces de la peine qu’elle lui avait causé.

Un lourd silence tomba dans le salon, tellement pesant qu’elle eut l’impression de suffoquer. D’un regard, elle le supplia de dire quelque chose ; qu’il hurle, qu’il crie, qu’il la maudisse ; tout plutôt que ce silence assourdissant qui l’engluait dans une détresse intense.

Mais ça ne voulait rien dire ! avait-elle envie de répondre, d’affirmer, de répéter, encore et encore, parce qu’il s’agissait d’une vérité sur laquelle elle n’avait aucun doute. Même s’il s’agissait de Théo – surtout parce qu’il s’agissait de Théo. Leurs deux âmes peinés s’étaient trouvées et ils s’étaient perdus ensemble dans les bras l’un de l’autre. Juliet avait cherché auprès de lui un réconfort qu’elle ne trouvait chez personne, parce qu’elle avait eu brièvement l’impression qu’il la comprenait. Elle s’était sentie écoutée, comme si elle avait besoin qu’on valide sa peine pour la ressentir. Elle avait eu la sensation, avec lui, de revivre, de respirer un air frais dont elle était privée dans son quotidien. Elle semblait aller mieux, pendant de brefs instants.
Evidemment, qu’elle s’était fourvoyée.
Evidemment, que rien de tout cela ne l’aidait à avancer.
Evidemment, que la brève relation qu’elle avait entretenu avec Théo n’avait aucun sens.
Tout au plus, elle avait posé un minuscule pansement sur une plaie béante qui ne cicatrisait pas.

« Je… » débuta-t-elle pour répondre à Jeremy, avant que celui-ci explose et que son éclat de voix résonne dans leur appartement comme un coup de tonnerre. « Quoi ? » fut sa seule réaction alors que son regard, hagard, suivait Jeremy qui venait de bondir du canapé.

La révélation lui avait coupé le souffle, et elle accusa le coup en silence, l’esprit bouillonnant de questions qui n’osèrent pas franchir ses lèvres, tant elle craignait d’obtenir les réponses. La gorge serrée, incapable de formuler un mot, de nouvelles larmes roulèrent sur ses joues, et finirent leur course dans le creux de son cou. Toute concentrée qu’elle l’avait été sur sa peine, puis sur sa culpabilité, elle n’avait pas imaginé une seule seconde que Jeremy ait pu avoir une liaison avec une autre femme. Elle l’avait idéalisée pour sa droiture autant qu’elle s’était maudite pour son acte.
Elle tombait de haut.

Imaginer Jeremy avec quelqu’un d’autre était insupportable, et elle ferma les yeux alors qu’il reprenait la parole, comme si elle pouvait se soustraire à cette vision de cette façon. Elle ne voulait rien entendre, rien savoir. Ni son prénom aux sonorités exotiques, ni l’endroit où ils s’étaient connus, ni même les raisons de cette infidélité. Ce fut cependant ce dernier point qui la tira de son déni et elle chercha son mari des yeux pour le fusiller du regard. Elle refusait de se rendre coupable de sa tromperie et c’était la sensation qu’elle avait lorsque Jeremy mentionnait qu’il l’avait senti « partie à la dérive », comme si son attitude justifiait cet acte. Après tout, songea-t-elle avec une amertume qu’on ne lui connaissait guère, ce n’était pas la première fois que Jeremy, qui pensait l’avoir « perdu », oubliait sa peine dans les bras d’une autre femme. Le visage de Rosaleen Lestrange s’imposa à son esprit, et elle s’efforça de ravaler une rancœur qui menaçait de la submerger. Que pouvait-elle dire ? Jeremy ne semblait même pas s’arrêter sur ce fait.

« N’importe qui d’autre, j’aurai pu comprendre, on aurait eu une chance, mais… »

Juliet arrêta de respirer et le monde cessa de tourner. Le temps se suspendit, les oiseaux se turent, la vie se figea autour d’elle. Jeremy venait de condamner leur mariage. Cinq mots qui avaient l’amer goût de la fin.
Cinq mots qui ne laissaient guère place à l’imagination.
Et c’était fini.

Un poids immense tomba dans la poitrine de Juliet, balayant toute l’amertume qui s’était répandue dans ses veines quelques secondes plus tôt. Le ressentiment, la rancœur, la colère ; tous ces sentiments n’avaient plus leur place dans son cœur, désormais occupé par une tristesse douloureuse. Elle suivit Jeremy du regard, accablée par une décision qu’elle avait deviné dans ses mots. Alors voilà comment prenait fin leur relation, songea-t-elle, un peu hébétée. Dans la pénombre d’un salon, dans le silence qui suivait des aveux douloureux. Les traits tirés, Juliet observa Jeremy qui se dirigeait vers elle. Tant bien que mal, elle soutint son regard.

« Non. » souffla-t-elle sans la moindre hésitation.

Non, elle n’aimait pas Théo, et cette certitude raisonnait si fort en elle qu’elle ne pouvait même pas la remettre en question.

« Non… » murmura-t-elle une nouvelle fois. « Non ! » affirma-t-elle une troisième fois, de manière plus forte et plus assurée.

Elle se leva brusquement pour faire face à Jeremy, désormais incapable de rester immobile. Elle sentait des fourmillements lui parcourir le corps, comme si chacune de ses cellules prenaient conscience de l’urgence de la situation.

« Je n’aime pas Théo. » Il n’y avait aucune trace de doute dans son regard. « Théo et Samaël se sont séparés pour des raisons qui les regardent et qui n’ont rien à voir avec moi. Je n’aime pas Théo et je ne veux pas vivre avec lui. » Elle plongea son regard dans celui de Jeremy, refusant de détourner les yeux. Un long moment de silence s’écoula, puis elle reprit, d’une voix plus douce. « Je ne veux pas te quitter Jeremy, et jamais – jamais, tu m’entends ? – je n’ai jamais regretté notre mariage. »

Son cœur battait si fort dans sa poitrine qu’elle avait l’impression que le monde entier pouvait l’entendre.

« Je suis désolée Jeremy. Désolée pour tout ce qu’il s’est passé. Pour Théo, pour mon attitude ces derniers temps, pour avoir été aussi distante, aussi fuyante. Désolée de ne pas avoir vu à quel point tu souffrais aussi. » souffla-t-elle. Elle esquissa un geste vers lui, mais se ravisa au dernier moment. « Je suis tellement désolée. » répéta-t-elle une nouvelle fois. « Mais je te le promets, je te le jure sur tout ce que j’ai de plus cher, que je ne ressens rien pour Théo. C’était… C’était stupide, j’étais perdue, j’étais désespérée, je me sentais seule et il était là et… Et je n’aurais jamais dû. » Elle secoua doucement la tête.

Elle demeura silencieuse un court moment, inspira profondément pour tenter de se calmer.

« Alors non, « ça » n’arrive pas. Pas à moi. Je t’aime Jeremy, même si je sais que tu peux avoir des difficultés à le croire aujourd’hui. Je t’aime depuis des années. Tu es la personne que j’ai choisi depuis mes dix-sept ans, l’homme avec qui j’ai eu envie de passer le restant de ma vie avec, et le seul avec qui j’envisage mon avenir. On ne s’est pas mariés trop jeunes, on s’est mariés parce que c’était une évidence de nous lier jusqu’à la fin de nos jours. » Elle parlait vite, si bien qu’elle en eut rapidement la respiration courte. « Je t’aime, même quand je t’en veux. » ajouta-t-elle, une pointe d’amertume transpirant de ces dernières paroles. « Et je ferai n’importe quoi pour te le prouver. Demande-moi de déménager avec toi et Gaby à l’autre bout du monde et je te suivrai. Demande-moi de ne plus jamais revoir Théo et je le ferai. Demande-moi une nouvelle fois de nous choisir nous, contre le reste du monde, et tu sais très bien que je le referai sans hésiter. » Elle l’observa avec une lueur de défi dans les yeux. « Si tu veux me quitter, fais-le. Si tu ne m’aimes plus, je ne peux pas te retenir. » Elle retint de justesse un hoquet de douleur. « Si tu restes avec moi à cause de l’accident, ta porte de sortie, je te l’offre maintenant. » Elle croisa ses bras sur son ventre pour cacher le tremblement de ses mains. « Peut-être que tu regrettes notre mariage. Peut-être que tu serais plus heureux avec Shamita. Peut-être que tu peux lui donner une chance, à elle. » lança-t-elle avec rancœur en détournant le regard.

Au fond, elle savait qu’elle était en grande partie responsable de cette situation.

Et peut-être qu’elle l’avait bien cherché, finalement.
Jeremy Baker
Jeremy BakerJérémie Levain
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Love of my life, you've hurt me [Jeremy & Juliet] Icon_minitimeDim 11 Aoû 2019 - 22:17
Au troisième "non" de Juliet, Jeremy fit volte-face pour soutenir le regard de son épouse, qui l'avait rejoint. Le regard amarré au sien, il bu chacune de ses paroles comme un assoiffé. Ces mots, dont il devinait la sincérité, lui firent du bien, bien sûr, car il s'était auto-persuadé qu'il ne les entendrait plus jamais ; mais c'était trop peu, et surtout trop tard. Comme une pommade appliquée sur une plaie béante, la tirade de Juliet n'apaisa que trop brièvement la douleur vive de Jeremy, pour un soulagement instantané mais aussitôt dissipé.

L'injustice de la situation était telle que son indignation et sa colère surpassaient sa volonté d'arranger les choses avec elle. Chaque fois qu'elle prononçait le prénom de Théo, il ressentait comme une douleur physique, comme un poing serré à l'intérieur de sa poitrine, et il faillit l'interrompre plusieurs fois pour lui crier de se taire. Jeremy se retint, cependant, désespéré d'entendre la suite de ses propos. "Demande-moi de ne plus jamais revoir Théo et je le ferai". Mais serait-ce suffisant au regard de l'étendue du problème ? Était-ce vraiment ce qu'il voulait ?

En réalité, Jeremy était incapable de le savoir à cet instant. Il était incapable de réfléchir à une solution, à un moyen d'arranger les choses avec elle, ou à un après sans elle. Les conséquences de ces aveux, il ne pouvait pas les envisager pour le moment, pas tant que son instinct premier lui dictait de rouler dans un coin pour pleurer. Il lui fallait d'abord encaisser cette journée terrible, laisser passer la tornade. Il s'était passé trop de choses, en trop peu de temps : son inquiétude vive pour Juliet, qui l'avait précipité à Flaquemare, son altercation avec ce milicien et leur confrontation, ce que Jeremy avait été à deux doigts de faire, ce qu'il avait été prêt à proposer - tout ça pour quelqu'un qui avait trahi sa confiance, amplement.

Juliet avait raison, elle ne le méritait pas, cracha-t-il intérieurement, avant de se reprendre. De toute évidence, il n'était pas en état de lui répondre quoi que ce soit. Les traits de son visage tordus par l'amertume, il constata avec une certaine passivité qu'elle aussi lui en voulait et qu'elle aussi doutait de sa volonté à sauver ce mariage. Hélas, Jeremy n'avait pas la force de la démentir, ni de la rassurer, pas à cet instant. Son esprit était cotonneux, il n'arrivait plus à former deux pensées cohérentes, sa tristesse l'engloutissait tout entier. Il ressentait une formidable impression de gâchis et une envie de tout envoyer balader, là, maintenant, mais qu'il ne fallait pas écouter. S'ils décidaient de mettre fin à leur mariage, ce serait à tête reposée, et de façon réfléchie, pas entre deux aveux de trahisons et une altercation avec la milice. Après tout ce qu'ils avaient vécu, ils se le devaient, et, plus important, ils le devaient à leur enfant.

Jeremy porta sur Juliet un regard empreint de gravité, et expira lentement.

"Tu es la femme de ma vie. Tu l'as toujours été. Mais là, je ne sais pas quoi te dire, Juliet, je ne sais pas si... C'est trop, je n'arrive pas à réfléchir, j'ai juste besoin d'être seul."

Il se sentait sur le point de s'effondrer. S'il prononçait un mot de plus, il le sentait, il allait se désagréger sous yeux, or sa fierté l'exhortait à prendre la fuite, à trouver refuge quelque part où il pourrait se rouler en boule, en toute intimité. Cette pudeur de sentiments n'avait plus lieu d'être entre eux depuis bien longtemps, mais tout avait changé désormais, et il ressentait le besoin d'être physiquement seul, aussi seul qu'il se sentait à l'intérieur.

Sans lui laisser le temps de placer une réponse, Jeremy fit volte-face et se précipita hors du salon et s'engouffra dans le couloir. Il avait à peine passé le coin du couloir qu'il avait prit sa forme d'animagus pour trottiner jusqu'à la chambre conjugale, dont il repoussa la porte du bout de la truffe. Un jappement aigu s'échappa de la gueule du grand chien, semblable à un sanglot, et l'animal regagna le coin le plus éloigné de la pièce. Il s'allongea et posa sa tête sur ses pattes antérieures, posant un regard malheureux sur la pièce alentour. Bientôt, le rythme effréné de sa respiration s'apaisa alors que son instinct animal atténuait doucement l'intensité de ses sentiments humains. Ce n'était probablement pas la façon la plus saine de réagir, mais c'était celle qui lui permettait de survivre, à cet instant. L'état canin et ses instincts animaux avaient toujours le don de l'arracher aux vicissitudes de sa condition humaine, et de le ramener à d'autres considérations, plus primaires et pragmatiques. En un mot, cela lui permettait de prendre un brin de recul, ce qui, en l'état présent, n'était pas plus mal.

Combien de temps resta-t-il ainsi, parfaitement immobile ? Le grand chien avait tendance à perdre la notion du temps, mais il avait eu le temps de voir le soleil décliner par la fenêtre, puis l'obscurité gagner peu à peu la pièce. L'espace d'un instant, il songea à aller arracher sa fille des mains de son parrain - la pensée qu'il la garde pour la nuit paraissait intolérable - et lui fit regagner sa forme humaine. Mais, la main posée sur la poignée de la porte, Jeremy songea qu'il lui faudrait traverser le salon, et découvrir ainsi si Juliet s'y trouvait encore. Il lui faudrait aussi ramener Gabrielle dans un foyer déchiré, auprès de parents dans un état émotionnel cataclysmique. Aussi, il se ravisa, conscient que Théo aimait sa fille de tout son coeur et qu'il ne lui ferait aucun mal. Loin de l'apaiser, la certitude de l'amour de Théo pour sa fille l'indignait plus que tout le reste.

La plus grande trahison dans cette histoire restait encore celle de Théo envers Gabrielle. Émotionnellement lessivé, Jeremy écarta cette pensée qu'il aurait tout le loisir d'explorer pour les semaines à venir. Pour l'heure, il se sentait envahi par la plus grande des lassitudes. Grimpant sur le lit, il s'y laissa tomber de tout son long, à plat ventre et le visage enfoui dans un large oreiller. Engourdi par le chagrin, il finit par s'endormir d'un sommeil agité...

*

Le réveil sur la table de chevets affichait 3h45 quand il se réveilla en sursaut, éveillé par le hululement du hibou du voisin du dessus qui tapotait à ses volets. Après une première seconde d’hébétement, les évènements de la veille se rappelèrent à son bon souvenir et il sentit ses entrailles se tortiller douloureusement, comme si un serpent particulièrement sinueux avait pris la place de son estomac. Merlin, comme il aurait aimé que tout cela ne soit qu'un mauvais rêve ! Fiévreux, nauséeux et déshydraté, Jeremy réalisa qu'il n'avait pas bu la moindre goutte d'eau depuis de trop nombreuses heures. D'une démarche chancelante, il gagna la salle de bain et bu de longues gorgées à même le robinet, avant de s'asperger généreusement le visage.

Lorsqu'il croisa son regard dans le reflet, il constata qu'il avait l'air aussi affreux qu'il ne se sentait à l'intérieur, son visage marqué par des émotions trop vives. La colère de la veille, sans avoir disparu complètement, s'était apaisée pour laisser place à la raison et au remord. Comme il avait laissé Juliet, hier ! Comme il avait coupé court à leur discussion, après ce qu'elle avait dit ! Il n'osait imaginer ce qu'elle avait ressenti, la crainte qui avait dû l'envahir, et qui le gagnait à son tour. Avait-il définitivement tout gâché ? Etait-il réellement prêt à prendre ce risque, la fin de son mariage, par fierté ? Allait-il perdre Juliet pour un ego blessé ? S'il y avait une chance, même infime, qu'ils puissent se retrouver, se retrouver vraiment, ne devait-il pas la saisir ? Mais peut-être qu'il le regretterait, s'il craquait maintenant. Peut-être qu'il ne fallait pas céder à cet accent aigu de tristesse et de manque.

Ou peut-être que c'était la seule chose saine à faire.

Toutes ces pensées traversèrent son esprit en moins d'une minute. Il ne lui fallut pas plus de temps pour comprendre le murmure de son cœur. De toutes les choses qui lui paraissaient intolérables à l'heure actuelle, l'une surpassait toutes les autres. Et c'était la seule qui ne pouvait pas attendre le petit matin, et la sagesse apportée par une nuit de repos. Décidé sur la conduite à tenir, Jeremy se détourna du miroir et regagna le couloir plongé dans la pénombre.

En quelques pas hésitants, il rejoignit le salon et s'immobilisa contre le cadran de la porte. Il était hypnotisé par la vue de cette silhouette familière, recroquevillée sur le canapé, qui paraissait si frêle. Elle n'était pas partie, et cette vision l'envahit d'un soulagement immédiat qui le conforta dans son action.

Après quelques instants à la considérer en silence, Jeremy finit par se diriger vers elle dans le noir. Il contourna la table-basse pour s'accroupir à côté du canapé et placer son visage à hauteur du sien.

"Est-ce que..."

Il s'interrompit à l'entente de sa propre voix, rauque et hésitante, qui rompait le silence presque surnaturel du salon.

"Est-ce que je peux te prendre dans mes bras ?"

Son regard, suppliant, s'amarra au sien, trahissant sa crainte et sa tendresse. Après ces quelques heures, il n'avait trouvé aucune réponse, mais était convaincu d'une seule chose : se séparer d'elle lui briserait le cœur. C'était une solitude qu'il ne se sentait pas prêt à affronter. Alors il n'y avait qu'une seule option possible : l'aimer, tout simplement.



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Juliet E. Wilson
Juliet E. WilsonCapitaine de l'équipe nationale de Quidditch
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Love of my life, you've hurt me [Jeremy & Juliet] Icon_minitimeLun 12 Aoû 2019 - 1:22
Juliet observa Jeremy s’éloigner, impuissante. Son cœur lui hurlait de le retenir quand sa raison lui ordonnait sagement de lui laisser le temps dont il avait besoin. Ecoutant pour une fois qui n’était pas coutume cette sage voix, la jeune femme n’esquissa pas un geste, et fixa le point où son mari venait de disparaître, prenant probablement la direction de leur chambre.

Il ne savait pas. Ce constat laissa un goût amer à Juliet, qui finit par se laisser tomber sur le canapé, lessivée. Reposant son visage contre ses paumes de main, elle expira longuement, évacuant de cette façon tout le stress qui s’était accumulé, au fil des dernières heures, dans son corps. Peu à peu, sa respiration s’apaisa, les battements de son cœur ralentirent, les tremblements qui la secouaient cessèrent. L’angoisse, la colère, l’amertume, laissèrent place à une tristesse lasse, à une douleur lancinante qui lui vrillait l’estomac et la poitrine. Il ne savait pas.

Ces quelques mots tournaient en boucle dans son esprit, s’imprimaient dans chaque pensée qui lui traversait la tête. Parce qu’elle avait beau être, selon ses propres mots, la femme de sa vie, cela n’était peut-être pas suffisant. Et comment l’en blâmer, songea-t-elle en soufflant, la tête penchée vers le sol. Elle avait trahi sa confiance, son amour, leur mariage et leur famille. A quoi s’attendait-elle ? A rien, réalisa-t-elle, mais cela ne rendait pas la chute moins douloureuse, à mesure qu’elle se rendait compte qu’elle risquait de perdre, pour toujours, la personne qu’elle aimait le plus au monde.

Peut-être Jeremy était-il plus lucide qu’elle sur le sujet. Peut-être avait-il compris que leur relation avait pris un virage trop extrême pour revenir à la normale. Peut-être avait-il décelé avant elle que, désormais, ils allaient droit dans le mur. Ils avaient été si heureux, autrefois – aujourd’hui, ce temps lui semblait si loin. Ils s’étaient aimés si fort, d’un amour si inconditionnel et fusionnel qu’elle avait toujours été persuadée qu’ils pouvaient tout surmonter, ensemble. Peut-être était-ce l’épreuve de trop, celle qui aurait raison d’eux. Juliet ferma les yeux ; cette pensée était trop douloureuse à accepter, et même à assimiler.

Elle ne parvenait pas à concevoir un monde dans lequel elle était séparée de Jeremy, mais elle avait l’atroce impression que toutes ces belles pensées lui parvenaient bien trop tard pour réparer un mal qui avait déjà été commis. C’était la vérité, pourtant, une vérité si forte et si intense qu’elle avait envie de la hurler à qui voudrait l’entendre. Elle aimait Jeremy, Merlin qu’elle l’aimait ! Et cet amour, à cet instant, bien que teinté d’une culpabilité lancinante et d’une rancœur amer, lui donnait envie de croire à leur histoire. Parce que, comment admettre que leur mariage puisse prendre fin de cette manière ? Non, que leur mariage puisse prendre fin, tout simplement ? Elle en était incapable.

Incapable, peut-être, lui souffla une petite voix désagréable, mais le fait était qu’elle ne prenait pas cette décision seule et que Jeremy n’avait absolument pas témoigné d’une volonté de sauver leur couple. Ne pouvant se soustraire à cette pensée, Juliet se leva d’un bond et commença à parcourir le salon, l’air hagard. Elle fut surprise de découvrir l’obscurité qui régnait dans la pièce, absolument inconsciente du temps qui s’était écoulé depuis que Jeremy l’avait laissé seule. Ce brusque retour à la réalité la figea sur place, dans un silence assourdissant qu’elle peinait à supporter. Elle devait quitter ce salon dans lequel semblait encore résonner leurs paroles. Mais pour aller où ? L’idée de quitter leur appartement ne lui traversa même pas l’esprit ; Juliet avait cessé de fuir.

Sur la pointe des pieds pour éviter de faire grincer le parquet, Juliet gagna la salle de bain. Face au miroir, son reflet lui tira une grimace. Ses cheveux étaient emmêlés, plusieurs feuilles y étaient coincées, et elle avait des traces de terre sur les joues et le front. Elle fronça les sourcils un instant, avant de se souvenir que, plus tôt dans cette journée qui lui semblait durer une éternité, elle avait joué au Quidditch. Elle portait encore sa tenue de sport – celle qu’elle revêtait à la fin des entraînements, avant de quitter le club, et qui était notamment composée d’un t-shirt aux couleurs du club, floqué à son nom. Elle le retira, ainsi que le reste de ses vêtements, qui s’échouèrent sur le sol  et qu’elle envoya, du bout du pied, dans un coin de la pièce. Sa maigreur la frappa – elle pouvait voir ses côtes se dessiner sous sa peau diaphane – et elle détourna rapidement le regard du miroir pour entrer dans douche. Elle alluma le jet d’eau, qui ne tarda pas à chauffer jusqu’à devenir brûlant. Elle se glissa dessous, laissant l’eau ruisseler sur son corps. Elle resta immobile un long moment, appuyée contre le carrelage froid du mur, à moitié endormie, apaisée par la chaleur ambiante. Finalement, lentement, elle se savonna, lava ses cheveux en les démêlant comme elle le pouvait avec ses doigts, et finit par sortir pour s’envelopper dans une serviette.

Chaque geste lui paraissait requérir une énergie incroyable, tant elle se sentait lasse et épuisée. Ses cheveux gouttaient encore dans son dos lorsqu’elle revêtit une vieille blouse de Quidditch qui lui servait de pyjama, et qu’elle sortit de la salle de bain embuée. Un regard dans sa chambre lui confirma que Jeremy dormait profondément dans leur lit, et elle lutta contre l’envie qu’elle avait de le rejoindre. A la place, elle gagna sagement le salon, où le temps semblait toujours suspendu.

Juliet se laissa tomber lourdement sur le canapé, et entoura un coussin de ses bras pour le serrer contre elle, dans une maigre tentative de réconfort. Ironiquement, son regard trouva une photo de Jeremy et elle, qui avait été prise l’année dernière par Irving lorsqu’ils avaient passé un weekend à l’auberge : il avait ses mains glissées autour de sa taille et ils riaient en regardant l’objectif. Une boule se forma au fond de sa gorge, alors que ses yeux parcouraient les différents cadres qui témoignaient du couple heureux et unis qu’ils avaient été.

Recroquevillée sur elle-même, Juliet posa sa tête sur le dossier du canapé, les yeux dans le vague. Elle se sentait tellement fatiguée que, paradoxalement, elle n’était pas certaine de réussir à s’endormir. Ses yeux se fermèrent d’eux-mêmes, brièvement, et elle tomba dans un sommeil agité, ponctué de nombreux réveils en sursaut qui l’empêchaient de se reposer totalement. Un craquement la tira d’un cauchemar, et il lui fallut quelques secondes pour comprendre où elle se trouvait. Elle resta immobile, avec l’étonnante sensation d’être observée. Finalement, Jeremy se décida à approcher et s’agenouilla à sa hauteur. Elle plongea son regard dans le sien, suspendue à ses lèvres.

« S’il-te-plait, oui. » murmura-t-elle immédiatement en posant sa main sur la sienne.

Ce contact la fit tressaillir et elle l’attira à elle. Cette étreinte avait une saveur toute particulière, et elle préféra ne pas l’interpréter, de peur de se laisser espérer quoique soit – ou au contraire, craignant d’y déceler des adieux. Elle enfouit son visage dans le cou de Jeremy, respirant son odeur si familière, retrouvant des sensations d’une douceur infinie : la douceur de sa peau sous ses doigts, la chaleur de ses bras, les battements apaisant de son cœur qui résonnait en écho avec le sien.

L’étreinte dura longtemps – si bien que Juliet perdit complètement la notion du temps. Certains moments se passaient de paroles, et cet instant faisait complètement partie de l’un d’eux. Ils se retrouvaient, enfin, après tant de temps où la séparation, aussi physique qu’émotionnelle, avait été déchirante. Ses mains se perdirent dans les cheveux de Jeremy, ses doigts caressèrent sa mâchoire, glissèrent le long de ses épaules, au fur et à mesure qu’elle redécouvrait ces sensations qui lui avaient tant manquées. Elle finit par se détacher de lui, un peu à contrecœur, mais posa son front contre le sien, refusant de s’éloigner plus que nécessaire. Elle resta un long moment ainsi, leurs souffles se mélangeant dans le silence de l’appartement.

« Tu es l’homme de ma vie. » murmura-t-elle, craignant de rompre l’instant. « Tu l’as toujours été, et tu le seras toujours. Je le savais déjà quand j’avais dix-huit ans, mais je ne savais pas encore ce que ça signifiait véritablement. » Elle laissa un moment de silence passer. « Je ne sais pas ce que tu es capable de me pardonner. Je ne sais pas si tu as envie de le faire. Je comprendrai, si ce n’était pas le cas. » souffla-t-elle douloureusement, bien consciente de la portée de ses paroles. « Je t’ai fait du mal. On s’est fait du mal. » reprit-elle, alors que le prénom « Shamita » dansait dans sa mémoire. « Mais je pense toujours ce que je t’ai dit, tout à l’heure. Je serais prête à n’importe quoi pour toi, pour nous, pour notre famille. » Elle hésita un instant, avant de rajouter : « J’ai trop longtemps pensé que ma vie ne valait pas la peine d’être vécue à cause de tout ce qu’on m’avait arraché. Je me trompais, évidemment. C’est pour vous, qu’elle vaut la peine. C’est grâce à vous, qu’elle est aussi belle. »

Brusquement, le fait de ne plus pouvoir avoir d’autres enfants lui paraissait dérisoire, tant elle mesurait la chance qu’elle avait d’avoir dans sa vie une fille qu’elle aimait plus tout et un homme qu’elle chérissait tout autant.

« Il y a quelques années, tu m’as demandé si j’étais cap de passer le restant de ma vie avec toi. Je l’étais. Je le suis toujours. Parce que c’est nous, et que ça a toujours été nous. » affirma-t-elle doucement. « Moi, j’aimerais te demander si tu es cap d’essayer, une nouvelle fois, de passer ta vie à mes côtés. » Elle ajouta, immédiatement : « Je sais que tu n’es pas en mesure de me promettre de réussir. Mais au moins d’essayer. »
Jeremy Baker
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Love of my life, you've hurt me [Jeremy & Juliet] Icon_minitimeLun 12 Aoû 2019 - 15:50
Jeremy se laissa attirer sur le canapé et enveloppa Juliet entre ses bras. Il enfouit son visage dans son cou et la serra contre lui longtemps, savourant sa présence tout contre lui. C'était un moment particulier, d'une douceur infinie, qui soulagea et rassura le jeune homme plus que n'importe quelle parole. C'était bon de retrouver sa Juliet, de la retrouver vraiment, après avoir été si près de la perdre. C'était tellement bon qu'il osait à peine bouger, de peur de briser l'instant et de voir s'évanouir cette harmonie fragile et salvatrice. Finalement, Juliet s'écarta la première, et il resta silencieux à l'observer, front contre front, pendant qu'elle s'exprimait.

Jeremy était plus silencieux ce soir qu'il ne l'avait jamais été, plus grave qu'à son accoutumée. De nouveau, il écouta la jeune femme, et de nouveau, elle l'assura de son amour. Saisi par le remord quand elle évoqua le mal qu'ils s'étaient fait, Jeremy caressa doucement sa joue du pouce, sans pour autant l'interrompre. Ce qu'elle disait était important, l'instant était décisif, ils le sentaient tous les deux. Finalement, à l'entente de sa requête, il s'écarta quelque peu pour mieux pouvoir la considérer du regard, laissa passer quelques secondes de silence, puis esquissa un petit sourire bravache.

"Cap. J'suis cap de tout, moi."

Glissant une main sur sa nuque, il exerça une petite pression pour l'attirer à lui et captura ses lèvres. Ce baiser fut fougueux, passionné, presque désespéré - il avait trop de choses à lui dire, trop de messages à faire passer, à travers ce baiser. Ne me quitte plus jamais. Ne me laisse plus jamais seul comme ça. Tu m'as tellement manqué. Jeremy s'écarta, le souffle court et le regard assombri par des émotions tourbillonnantes.

"J'serais cap de tout pour toi, Juliet. Je te l'ai prouvé hier, et ça n'a pas changé parce que j'ai appris ce qui s'est passé entre lui et toi, ni parce que tu as appris pour... cette fille et moi. Alors oui, je suis prêt à essayer, si tu y es prête aussi. Je pense qu'il faudra du temps et qu'on a encore beaucoup de choses à se dire, si on veut que ça marche, mais... ça en vaut la peine."

Oui, il lui faudrait du temps, beaucoup de temps pour oublier cette impression qu'on lui avait planté un coup de poignard dans l'estomac. L'expression assombrie de son visage témoignait du fait que tout l'amour qu'il portait à Juliet ne suffirait pas à effacer ce qui s'était passé, qu'il ne pouvait pas tout oublier d'un coup de baguette magique. Il y avait certains choix aux conséquences inéluctables, et même si ça le peinait énormément, Jeremy doutait de pouvoir de nouveau voir Théo comme un ami un jour.

"Par contre", reprit-il d'un ton sans appel, "en effet, je ne veux plus qu'il s'approche de toi, ni de Gabrielle, jamais. Et je n'approcherai plus Shamita non plus. Si on veut se donner une chance, je suis désolé mais je ne vois pas comment faire autrement."

Il ne savait rien du contexte de cette idylle, il ne savait pas combien de temps cela avait duré, si des sentiments s'étaient développés du côté de Théo et à vrai dire, il n'était pas pressé de le savoir. La seule idée de son épouse dans les bras de son ami suffisait à le rendre fou de jalousie. Pourtant, avec le temps Jeremy devrait faire sa paix avec cet épisode de leur vie, car il ne voulait pas nourrir de rancœur qui viendrait le rendre aigri et l'empoisonner de l'intérieur. Et elle devrait le pardonner aussi. Il espérait en être capable, et le serait certainement une fois passée la colère du moment : Jeremy était aussi conscient que Théo avait apporté, momentanément, à Juliet ce dont elle avait besoin pour survivre. Alors oui, il pourrait lui pardonner, tant que Théo n'était pas sous ses yeux pour le lui rappeler. C'était quelque chose qu'il leur faudrait travailler avec le temps, comment surmonter ensemble les prochaines épreuves que la vie mettrait en travers de leur chemin, car son intuition lui soufflait que c'était loin d'être la dernière...

Jeremy attrapa les mains de Juliet et les serra entre les siennes.

"J'espère que tu comprends, et j'espère qu'on arrivera à se pardonner et à repartir sur de nouvelles bases. Parce que si jamais quelque chose comme ça arrive encore une fois, un nouveau drame...", il secoua la tête, "il faut qu'on arrive à le surmonter ensemble, sans se faire encore plus de mal. J'veux dire, nos vies sont déjà assez compliquées comme ça, et puis soyons honnêtes, on a quand même le don pour s'attirer les pires ennuis tous les deux."

Un sourire éclaira son visage alors qu'il se remémorait toutes les situations inextricables dans lesquelles Juliet et lui avaient été se fourrer depuis qu'ils se connaissaient. Et ce n'était pas en s'investissant dans le Lexit sur l'impulsion de Lilly que les choses allaient s'arranger.

"Tu m'as tellement manqué", avoua-t-il à mi-voix, en retrouvant son sérieux, une certaine timidité au fond du regard. Oui, elle avait été sous son nez pendant tout ce temps, mais leur intimité et leur complicité, elles, avaient pris le large bien trop longtemps...


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Juliet E. Wilson
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Love of my life, you've hurt me [Jeremy & Juliet] Icon_minitimeMar 13 Aoû 2019 - 16:55
La réponse de Jeremy résonna dans le salon aussi fort qu’elle résonna dans son cœur, et Juliet laissa un sourire fleurir sur ses lèvres, en réponse à celui, bravache, qu’il affichait. Elle se laissa attirer contre lui, accueillit son baiser avec un soupir heureux, alors qu’elle nouait ses bras autour de son cou et qu’elle pressait son corps contre le sien. Il y avait dans ce geste une saveur toute particulière, comme s’ils venaient tous deux de prendre conscience qu’ils auraient très bien pu ne jamais plus connaître une étreinte comme celle-ci.

Elle se retrouva dans les bras de Jeremy, se sentit réintégrer véritablement son corps, et eut l’impression que sa douleur s’apaisait enfin. Elle avait cherché si loin un bonheur accessible à bout de doigt, et elle ne cesserait de s’en vouloir pour cela. Mais il était temps d’avancer, à présent. De grandir, de mûrir. En observant Jeremy, Juliet le sentit vieillit et réalisa qu’elle-même semblait avoir perdu une partie de sa jeunesse.

All of these lines across my face
Tell you the story of who I am
So many stories of where I’ve been
And how I got to where I am


Toute Gryffondor qu’elle était, Juliet avait toujours fait preuve d’une imprudence frisant parfois la folie ; d’ailleurs, elle en gardait sur le corps différentes marques qu’elle ne voyait désormais plus. Sous son arcade sourcilière, une minuscule cicatrice blanchâtre ressortait, acquise le jour où elle s’était battue contre des Acromentules dans la forêt interdite. A l’intérieur de son bras, une marque, plus fine, qui résultait d’un match particulièrement virulent contre les Serpentard du temps où Darren O’Connor en était capitaine ; ils avaient gagné, ce jour-là. Sur le tibia, une ancienne marque de brûlure, qui datait de l’été de ses seize ans lorsqu’elle avait parcouru Londres, assise derrière le scooter de son cousin et qu’elle s’était malencontreusement brûlée avec le pot d’échappement. A cette liste non-exhaustive de blessures minimes, s’ajoutait désormais une cicatrice blanchâtre qui lui barrait le ventre, dernier rappel visible de son accident sur les quais de Bristol. Il lui faudrait s’y faire, songea-t-elle, alors que l’habituel dégoût qu’elle ressentait lorsqu’elle y pensait lui montait aux lèvres. Tout autant que ces minuscules cicatrices qui parcouraient son corps, celle-ci ne faisait qu’expliquer une partie de son histoire, de son passé, qu’elle ne pouvait pas renier.

But these stories don't mean anything
When you've got no one to tell them to
It's true, I was made for you


Cette épreuve les avait frappé de plein fouet, avec une violence inouïe, si bien qu’ils avaient failli y laisser leur couple. Et il leur en faudrait, du temps, pour retrouver une relation saine et apaisée mais au fond d’elle, Juliet y croyait. Il était « cap de tout », puisque c’était ses mots, et elle aussi. A deux, ils étaient capables de gravir des montagnes et de briser des murs ; elle avait une confiance aveugle en leur volonté et en leur amour.

Parce que ça en valait la peine, comme venait de l’expliquer Jeremy. Elle hocha la tête, doucement, et posa une main sur sa joue rugueuse. Bien évidemment, que leur mariage en valait la peine, et elle ne comprenait même pas comment elle avait pu en douter un jour, alors que son amour pour Jeremy lui paraissait aussi évident. L’heure n’était pas au regret, songea-t-elle, mais aux promesses. Elle promettait de mieux faire, de tout faire.

I climbed across the mountain tops
Swam all across the ocean blue
I crossed all the lines, and I broke all the rules
But, baby, I broke them all for you


Parce qu’au final, c’était ça, qu’ils s’étaient jurés, le jour de leur mariage. De tout faire l’un pour l’autre, quoiqu’il advienne et quel que soit le coût. C’était un précepte qu’ils avaient mis en place si tôt dans leur relation qu’il lui avait toujours semblait évident. Parce que c’était « nous » contre « eux », contre le reste du monde, contre leur famille. Parfois, Juliet se remémorait le début de leur histoire, où elle avait dérogé à la seule règle qu’elle n’était pas censée enfreindre : « surtout, ne tombe pas amoureuse de ton meilleur ami. » De son meilleur ami, du fils de l’amante de son père, de l’ami de son petit-copain, du petit-copain de son amie. Elle avait tant repoussé cette idée qu’elle avait vécu dans un déni magnifiquement orchestré pendant des mois, jusqu’à ce que leur idylle naisse sur une petite plage venteuse d’Aberystwyth.

Oh because even when I was flat broke
You made me feel like a million bucks
You do
I was made for you


Et de cette idylle avait découlé une évidence qu’ils avaient cessé de combattre pour l’accepter pleinement. Parce que, malgré tout, comment un amour aussi pur, aussi fort, pouvait-il être fondamentalement mauvais ? Comment quelque chose qui la rendait aussi heureuse pouvait s’avérer être dangereux ? Et bien vite, Juliet s’était rendue compte que, si elle devait choisir une personne parmi son entourage – une personne dont elle ne pouvait pas se passer – il s’agirait sans la moindre hésitation de Jeremy. Alors, bien sûr, avec les années, leur relation était devenue plus adulte, moins fusionnelle, mais cette certitude n’avait pas changé.  Et lorsqu’on lui demandait si elle regrettait, si elle n’avait pas peur d’avoir gâché une partie de sa jeunesse, Juliet souriait, presque amusée par de telles inepties. La plupart de comprenait pas, c’était certain, mais Jeremy était une de seules personnes avec elle se sentait entière ; le seul avec qui elle envisageait l’avenir et le seul qui parvenait à l’aider à surmonter – à surmonter réellement – des situations difficiles dont elle se sentait incapable de se relever sinon.

« Bien sûr que ça en vaut la peine. » souffla-t-elle alors qu’un doux sourire s’étirait sur ses lèvres.

You see the smile that's on my mouth
It's hiding the words that don't come out


Et même s’il restait des choses à dire, pour le moment, cette simple certitude suffisait à les faire tenir, à les persuader que, même s’ils s’engageaient sur un long chemin, ils n’en ressortiraient que plus solides. Alors oui, il y aurait des sacrifices à faire mais n’étaient-ils pas prêts à tout ? Si, bien sûr que si, parce que, face au désastre, elle était capable de tout. Même de dire au-revoir à l’un de ses amis les plus proches.

« Bien sûr. » répondit-elle alors, lorsque, d’un ton sans appel, Jeremy lui demanda à ce que Théo ne s’approche plus de leur famille. « Ne sois pas désolé. » elle caressa doucement sa joue avec son pouce, « On va récupérer Gabrielle et après, je te le promets, je n’aurais plus aucun contact avec lui. »

Elle sentit son cœur se serrer légèrement, alors qu’elle prenait conscience de la portée de ses paroles, mais elle se résolut à ne pas explorer ce sentiment davantage. Elle savait ce qu’elle perdait en prenant cette décision, mais elle avait également parfaitement conscience de ce qu’elle gagnait en échange et, aussi fort chérissait-elle sa relation avec Théo, celle-ci ne surpasserait jamais celle qu’elle avait avec Jeremy. Alors oui, s’il fallait s’éloigner, s’il fallait ne plus jamais le voir, elle s’y résoudrait. Elle en souffrirait, évidemment, mais tellement moins qu’elle aurait souffert de perdre Jeremy. Finalement, ce serait Gabrielle qui pâtirait le plus de l’absence de son parrain et c’était elle, véritablement, qui souffrirait la première des conséquences de la trahison de sa mère.

And all of my friends who think that I'm blessed
They don't know my head is a mess


Mais comment refuser à Jeremy une demande aussi légitime ? Et, même si elle ne l’avait pas formulé, n’aurait-elle pas, d’elle-même, coupé les ponts avec son ami ? Probablement, parce que, au fond d’elle, elle savait ce qui était bon pour son couple et que la présence de Théo dans sa vie ne l’était pas. Elle était bénie, elle le savait et on le lui répétait suffisamment pour qu’elle l’intègre. Elle avait rencontré si tôt l’homme qui la comblerait pour le restant de ses jours et ils vivaient, aux yeux de tous, une idylle sans nuage. Elle était chanceuse, avait-elle entendu récemment, et une telle phrase lui avait tiré un sourire ironique, tant elle peinait à prendre conscience de cela. Chanceuse d’avoir un mari formidable, une fille merveilleuse, une carrière prometteuse. Chanceuse d’être en vie, tout simplement. Juliet avait eu des difficultés à accepter ce terme, incapable de prendre un recul suffisant sur les derniers mois de sa vie pour les qualifier ainsi. Mais c’était la vérité, malgré tout. Malgré les épreuves, les cauchemars qu’elle vivait, les heures de sommeil perdus à revivre son accident. Elle était brisée, mais elle était heureuse.

No, they don't know who I really am
And they don't know what
I've been through like you do
And I was made for you


« La vie s’acharne. » constata-t-elle simplement avec un sourire qui avait léger un goût d’amertume. « Mais tu as raison, on doit avancer ensemble. »

Parce qu’elle avait essayé d’avancer seule et force était de constater que cela n’avait absolument pas fonctionné. Elle avait besoin de Jeremy parce qu’au fond, c’était la seule personne qui la connaissait véritablement ; qui savait ses espoirs et ses craintes, ses peurs et ses faiblesses. Il lisait en elle comme dans un livre ouvert, si bien qu’elle ne ressentait parfois même plus le besoin de formuler ses pensées à voix haute.

Aussi, le simple regard qu’elle lui renvoya lorsqu’il avoua qu’elle lui avait manqué remplaça tous les mots qu’elle aurait pu dire et qu’elle n’aurait jamais trouvés suffisamment forts pour exprimer ce qu’elle ressentait. Elle garda le silence un moment, les yeux plongés dans les siens, et entremêla doucement ses doigts avec ceux de son mari.

« Tu ne peux pas savoir comme je suis heureuse de te retrouver. » finit-elle cependant par souffler avant de déposer un baiser sur les lèvres de Jeremy.

Elle joua un instant avec leurs mains enlacées, savourant ce contact.

« Il faut qu’on fasse tout ce qui est possible pour que les choses fonctionnent. » commença-t-elle doucement. « Et pour que j’aille mieux. Je ne peux retomber dans un état comme celui-là, c’était trop… Trop. » Elle ne parvint même pas à terminer sa phrase. « J’ai besoin d’aide, Jeremy. Je pense que je devrais aller voir quelqu’un et… » Elle hésita un instant. « Je me dis que ça ne serait peut-être pas complètement idiot qu’on y aille ensemble. » Elle posa sur lui un regard interrogateur, un peu mal à l’aise d’avoir formulé une telle pensée. « Peut-être pas dès demain. On peut partir en vacances, avant. » rajouta-t-elle, un peu précipitamment. Puis, l’idée germa dans son esprit et un sourire germa sur ses lèvres. « Pour profiter de l’été indien. »

It's true, I was made for you
Jeremy Baker
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Love of my life, you've hurt me [Jeremy & Juliet] Icon_minitimeLun 26 Aoû 2019 - 17:42
Les doigts entremêlés à ceux de Juliet, Jeremy médita la réponse qu'elle lui avait faite pendant ces quelques instants de silence. Il n'y avait pas eu la moindre hésitation dans sa réponse, et il se sentait conforté dans sa décision de leur donner une seconde chance. Juliet l'aimait vraiment, et elle le choisissait lui, sans équivoque, quitte à perdre Théo pour de bon. Pour autant, il faudrait du temps et des efforts pour que la confiance soit réellement rétablie entre eux, et il lui faudrait du temps pour digérer la trahison de Théo, quand bien même il sortirait de leur vie.

Une boule s'était de nouveau formée au fond de sa gorge à cette idée, alors que les souvenirs des dernières années affluaient dans son esprit. Ils avaient été présents pour Théo alors qu'il était rejeté de tous, l'avaient accueillis dans leur famille en le nommant parrain de Gabrielle. Leurs deux couples s'étaient serrés les coudes dans des moments difficiles, avaient été présents lors des évènements heureux, et partageaient de nombreux souvenirs ensemble. Théo rejoignait désormais l'innombrable liste des amis de Jeremy qui appartenaient au passé, et il n'avait même pas le bon goût d'être mort, contrairement à Aaron, Swann ou encore Danny.

Jeremy fut tiré de ses pensées cyniques par la jolie déclaration de Juliet, qui raccrocha un sourire à son visage. Il l'écouta avec attention, soucieux de ce dont elle pouvait avoir besoin pour aller mieux, et entoura ses épaules de son bras à la mention de son "état". L'idée d'aller voir "quelqu'un" ne le mettait pas particulièrement à l'aise, pour un ensemble de raisons. Déjà, il n'avait jamais pensé qu'il pourrait être le genre de personnes à avoir besoin d'aller voir un spécialiste. Ensuite, leur histoire et leur quotidien comportaient un certain nombre de zones d'ombres qui impliquerait de passer certaines choses sous silence, ce qui pouvait s'avérer inconfortable. Enfin, ils étaient Juliet et Jeremy, par Merlin, ils n'avaient pas besoin de thérapie de couple ! Mais, avec un soupir, il se résolut à regarder la vérité en face : leur relation pouvait difficilement aller plus mal qu'aujourd'hui de toute façon.

La suggestion de partir en vacances, très curieusement, eut plus de succès auprès du jeune homme qui esquissa un sourire fatigué.

"Bien sûr, ce sont de bonnes idées", répondit-il en la serrant un peu plus contre lui, pour profiter de la chaleur de son corps. Il se sentait profondément las, abruti par les émotions des dernières heures, et aspirait surtout à nicher son nez dans le cou de Juliet pour y mourir là. "Je suis prêt à faire tout ce qu'il faut pour que ça marche. Si tu veux qu'on voit quelqu'un ensemble, je peux peut-être me renseigner auprès du Lexit pour avoir un psychomage safe. Ce sera peut-être plus pratique si on veut parler de... l'accident."

Et des dangers qu'ils pouvaient être amenés à prendre au sein de la résistance, songea-t-il sans les mentionner. Il y avait certaines choses qu'il valait mieux ne pas évoquer, au creux de la nuit, dans l'obscurité d'un appartement.

"Quant aux vacances, c'est une excellente idée. On pourrait se retrouver tous les deux", commença-t-il avant de se corriger : "Tous les trois. En famille, avec Gabrielle. Des apéros sur la plage, je ne connais pas de meilleur remède, qu'est-ce que t'en dis ?"

Sans vraiment laisser le temps à la jeune femme de lui répondre, il glissa son bras au creux de son dos pour l'attirer un peu plus à elle, et capturer de nouveau ses lèvres. Un baiser un peu trop possessif, et il en avait conscience, mais ce serait un problème pour un autre jour - pour la thérapie. Se détachant de ses lèvres, il déposa une lignée de baisers impérieux le long de sa mâchoire, puis plongea dans son cou. Sa peau était brûlante, et il huma son odeur familière en laissant échapper un soupir de frustration. Merlin, elle lui avait manqué si fort qu'elle lui manquait encore, là, dans ses bras, comme s'il n'y avait pas assez d'une Juliet pour rattraper le temps perdu. Un mélange d'émotions trop fortes manqua de le submerger de nouveau, et il s'éloigna un peu brusquement, pour poser sur elle un regard fiévreux.

"Tu voudrais aller où ?", souffla-t-il avec un mince sourire.



Love of my life, you've hurt me [Jeremy & Juliet] Batch_10
Juliet E. Wilson
Juliet E. WilsonCapitaine de l'équipe nationale de Quidditch
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Love of my life, you've hurt me [Jeremy & Juliet] Icon_minitimeMar 27 Aoû 2019 - 19:25
Un intense sentiment de soulagement saisit Juliet et elle se blottit un peu plus contre Jeremy, le cœur plus léger. Elle avait senti la réticence dans son regard lorsqu’elle avait évoqué la possibilité qu’ils aillent voir ensemble un psychomage et, très honnêtement, elle le comprenait. Elle-même n’était pas très à l’aise à parler de sa vie privée avec quelqu’un, quand bien serait-il un professionnel de santé ; c’était d’ailleurs pour ça qu’elle avait soigneusement décliné tous les rendez-vous qu’on lui avait proposé lorsqu’elle était encore à Ste Mangouste.

« Merci. » souffla-t-elle avec reconnaissance en effleurant sa joue d’un geste tendre.

Parce que, même si elle se sentait profondément angoissée à l’idée d’évoquer à nouveau son accident, elle sentait qu’elle en avait besoin pour avancer. Elle avait déjà essayé de garder tous ces sentiments pour elle, sans y parvenir.

Mais pour l’instant, songea-t-elle en reportant son regard sur Jeremy, elle voulait simplement passer quelques journées sans drame, auprès de sa famille. Elle ne voulait plus penser à son accident, à Afghan, à la milice ou au LEXIT, ni même à Flaquemare. Elle ne désirait que dormir, des heures et des heures, dans les bras de Jeremy, et être réveillée au petit matin par les cris enthousiastes de Gabrielle qui venait tirer ses parents du lit. Elle rêvait de balades, de rires, de baignades, de tous ces petits moments hors du temps dont ils n’avaient pas pu profiter depuis si longtemps. Rien qu’à cette pensée, un doux sourire s’étira sur ses lèvres.

« J’en dis que c’est parfait. » affirma-t-elle avant de se laisser attirer contre Jeremy. Elle referma ses bras autour de sa nuque, et répondit à son baiser avec la même ardeur que lui. Fermant les yeux, elle poussa un léger soupir en sentant ses lèvres parcourir sa gorge et frissonna lorsqu’il effleura le creux de son cou. Elle passa une main dans ses cheveux blonds, descendit l’autre le long de son torse, avant de se détacher à contrecœur de ses lèvres lorsqu’il reprit la parole.

« Je ne sais pas… » réfléchit-elle en jouant avec le t-shirt de son mari. Elle faillit proposer Mallowsweet, mais se ravisa au dernier moment ; quand bien même elle aimait de ton son cœur Nora et Irving, elle avait envie de se retrouver uniquement en famille pendant quelques jours. « On pourrait passer quelques jours à Dungloe ? » proposa-t-elle avec un éclair de lucidité. Sa mère avait une maison là-bas depuis des années ; petite, elle y passait tous ses étés. C’était une maison modeste – bien éloignée des grands manoirs des Flint dans le pays de Galle, mais elle bénéficiait d’un accès direct à la plage, et était isolée du reste du village. Bref, le lieu parfait pour s’échapper de toute civilisation durant quelques jours. « Personne n’y est à cette période de l’année, et Gabrielle sera contente de voir la mer… Et je suis sûre que toi aussi. » plaisanta-t-elle un sourire en coin ; Jeremy adorait prendre sa forme canine pour se jeter dans les vagues. « On sera bien. » conclut-elle en faisant courir ses doigts le long du torse de son époux.

Lorsqu’elle releva le regard pour croiser celui de Jeremy, elle capta dans son regard la même envie qu’elle ressentait dans chaque parcelle de son être. Dans un silence absolu trahit uniquement par le bruit de leurs respirations, elle bascula sur ses genoux, les yeux brillants, et fit glisser son t-shirt par-dessus sa tête pour coller sa peau brûlante contre la sienne. Un soupir ravi, apaisé, heureux lui échappa, alors que le soleil commençait à pénétrer dans la pièce et que les lèvres de Jeremy parcourait son corps.

***

Assise en tailleur sur le canapé, Juliet triturait ses mains avec nervosité. Elle avait passé son ancien sweat « Gryffindors rule the universe », et avait attaché ses cheveux en une queue de cheval haute.

« A toute à l’heure, mon amour. » lança-t-elle d’une voix douce, alors que Jeremy se dirigeait vers l’entrée, les traits tirés, et passait son manteau.

Dans quelques instants, il serait chez Théo pour récupérer Gabrielle. A cette pensée, elle ferma douloureusement les yeux, alors que la porte d’entrée se refermait sur son mari.

C’était pour le mieux, songea-t-elle avec une pointe de culpabilité, en gagnant la cuisine. Elle ouvrit un tiroir, sortit le nécessaire pour réaliser un gâteau au chocolat – le favori de Gabrielle – et se mit à la tâche, en guettant la porte d’entrée, avec la seule envie d’y voir passer son mari et sa fille.

La vie pouvait reprendre son cours.
Théo Nott
Théo NottBibliothécaire
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Love of my life, you've hurt me [Jeremy & Juliet] Icon_minitimeMer 4 Sep 2019 - 19:08
Quelque chose n'allait pas.

Plus la matinée se renforçait, sans le moindre signe de Jeremy, et plus Théo en était convaincu. Debout devant le comptoir de sa cuisine, son tablier flanqué du blaireau de Poufsouffle ceint autour de ses reins, Théo fouettait ses œufs distraitement. Lui qui aurait été incapable de faire cuir des pâtes lorsqu'il avait commencé à vivre seul avait peu à peu appris que cuisiner lui permettait de s'apaiser, de se focaliser sur autre chose que ses pensées négatives et ses obsessions. A cet instant, c'était salutaire.

Gabrielle dormait encore à poings fermés, ce qui lui paraissait étrange au vu de l'heure qui tournait. Peut-être qu'elle aussi sentait que quelque chose était arrivé. Ajoutant de la farine à sa préparation, Théo s'efforça de ne pas céder à l'inquiétude qui montait en lui, de ne pas ressasser ces éternelles pensées. En vain.

Il avait toujours cru au pouvoir de l'intuition, et la sienne lui soufflait que quelque chose venait d'irrémédiablement changer. Le temps en suspension dans lequel il vivait depuis plusieurs semaines s'était achevé. Il le sentait, depuis quelques jours maintenant, depuis la dernière fois qu'il avait serré Juliet dans ses bras, que ses lèvres avaient trouvé les siennes. Elle lui avait dit au revoir en un souffle, et il avait eu cette impression furtive qu'il la voyait pour la dernière fois. Théo se rappelait très nettement de cet instant, de son sourire doux-amer alors qu'elle se détournait, du soleil couchant qui jouait avec les reflets de ses cheveux, de ce petit geste de la main qu'elle lui avait fait juste avant de transplaner. Une respiration, et elle était partie, le laissant avec cette impression de vide au creux de la poitrine, comme un froid intense. Et cette intuition, cette idée qui ne le quittait pas depuis, qui lui soufflait que le pire était en train d'arriver, qu'il ne pourrait rien faire pour l'empêcher...

Il attendit et redouta le retour de Jeremy toute la matinée. Quelque chose était arrivé, quelque chose d'irrémédiable, et il s'apprêtait à savoir quoi. Théo était tellement tendu qu'il sursauta brusquement à l'entente des coups frappés à sa porte, et envoya une gerbe de pâte à pancake s'éclater sur le mur. Il expira lentement, posa son saladier sur le plan de travail et s'efforça de discipliner les battements erratiques de son cœur. La peur qui s'était insinuée en lui depuis plusieurs jours avait planté profondément ses racines en lui. Elle se lisait au fond de ses yeux clairs quand il ouvrit la porte, la main tremblant sur la poignée. Qu'allait lui annoncer Jeremy ? Et s'il était encore arrivé malheur à Juliet ?

Ou bien...

Le regard flamboyant de Jeremy lui coupa le souffle au moins aussi sûrement que le coup de poing qu'il lui envoya brutalement dans la figure. Théo se sentit partir en arrière et ressentit une douleur fulgurante à la mâchoire, à laquelle il posa la main, un peu hébété. Jeremy en profita pour pénétrer dans l'appartement et fermer la porte derrière lui. Quand il le vit se saisir de sa baguette, Théo eut un geste de recul avant de se reprendre, mortifié, alors que le jeune homme lançait un assurdatio pour isoler la pièce.

"Jeremy...", souffla Théo d'une voix rauque. Ces trois petites syllabes étaient chargées d'une émotion que le concerné ne manqua pas. Reportant son attention sur Théo, Jeremy, enfermé dans un silence contenu, se contenta de l'observer. Son visage était crispé par la colère, ses poings étaient serrés de rage, mais ses yeux noisettes débordaient surtout d'une déception telle que Théo se sentit tout petit face à lui. La culpabilité lui serrait la gorge et il mourrait d'envie de détourner les yeux, mais il n'en fit rien, et prit de plein fouet toute la mesure du sentiment d'injustice et de trahison que ressentait Jeremy.

Théo ne pouvait se défendre, ni se justifier, car il n'avait pas de mots, pas d'explications pour ce qui s'était passé et les choix qu'il avait fait. Oui, il l'avait trahi, lui, son ami, lui, son frère. Oui, il avait fait le choix de risquer de le perdre, pour Juliet, oui, il aurait pu tout risquer pour elle, même Jeremy, même Gabrielle. Juliet avait été une terrible erreur, mais une erreur qu'il referait encore s'il le fallait.

Même maintenant, même confronté à la douleur qu'il avait causé à son ami, alors qu'il avait son visage face à lui et qu'il se rappelait de tout ce qu'ils avaient vécu ensemble, Théo ne pouvait se résoudre à regretter. Théo aimait Jeremy, il était terriblement désolé d'avoir contribué aux malheurs de sa famille, et son cœur se fendait de tristesse à la vue de ce regard noir, écœuré qu'il portait sur lui, mais il ne pouvait regretter.

Combien de temps s'écoulèrent ainsi, dans ce silence assourdissant ? Théo n'aurait pu le dire. Il resta figé, soumis au jugement de ce regard implacable, tandis que son fouet goûtait lentement sur le plancher jusqu'à former peu à peu une petite flaque de pâte à pancake. La tension était telle qu'il finit par craquer.

"Jeremy, je suis désolé", souffla-t-il en le suppliant du regard.

Le second coup parti avec une violence et une spontanéité telle que Théo n'esquissa pas le moindre geste pour l'éviter. Sidéré, il posa une main sur la tempe et essuya doucement le sang qui s'écoulait depuis son sourcil, envahissant sa vision. Il l'avait mérité. Il savait qu'il l'avait mérité, et pourtant il ne pouvait s'empêcher de sentir la peur s'ancrer d'avantage en lui. Théo abaissa sa main, se redressa et fit face à Jeremy. Il semblait l'inviter du regard à poursuivre, stoïque, à faire ce qu'il était venu pour faire, ce qu'il avait besoin de faire. Théo ne l'en empêcherait pas. Il n'essayerait pas de se défendre, de se faire pardonner, de tenter d'atténuer la peine déchirante de Jeremy ni de l'emmener à revoir son opinion de lui. Il ne tenterait pas plus de prétendre qu'il n'était pas terrifié par la fureur qui semblait émaner de chacun de ses pores, par les étincelles rouges et or qui crépitaient à l'extrémité de sa baguette ; par la violence dont il faisait preuve, avec sa propre fille dans la pièce d'à-côté. Il ne dirait rien, non, plus, car qui était-il pour juger, vraiment ?

Finalement, Jeremy parvint à desserrer les dents suffisamment pour cracher son message, d'un ton sans appel :

"Ne t'approche plus jamais d'elles. Ne t'approche plus jamais de Gabrielle, ni de Juliet. Tu m'entends ? Plus jamais. Si je te vois t'approcher de ma famille encore une fois, ce sera la dernière chose que tu feras."

Il cracha sa menace et la laissa planer, confronta son regard une dernière fois. La culpabilité de Théo et la déception de Jeremy se heurtèrent l'une à l'autre. La supplication muette de l'un fut étouffée par le silence meurtri de l'autre. Le temps d'une ultime seconde, l'amour qu'ils se portaient l'un à l'autre transparut dans cet échange de regard, que Jeremy brisa aussitôt, la lèvre tremblante. Comme s'il ne pouvait se résoudre à laisser quoi que ce soit l'atteindre. Jeremy se devait de rester fort. Un homme, un vrai. Celui que Théo n'avait jamais pu être.

Tandis que Jeremy s'éloignait rapidement en direction de la chambre, Théo se détourna et fit quelques pas chancelants à travers la pièce. Toute la tension des dernières secondes s'envola, le laissant pantelant, et il se laissa tomber dans le fauteuil le plus proche, le visage enfoui entre ses mains. Son coeur battait à tout rompre dans sa poitrine tandis qu'un froid intense se répandait dans chacun de ses membres. Elle lui avait tout dit. Elle lui avait tout dit et, de toute évidence, Jeremy allait lui pardonner, ils n'allaient pas se séparer. Son intuition se confirmait, cette intuition qu'il s'était efforcé de toutes ses forces d'ignorer. Sa pire crainte se concrétisait, elle l'abandonnait, elle le quittait comme elle était venu, comme une bourrasque dans sa vie. Ce dernier baiser, au soleil couchant, serait le dernier.

Le bruit des pas rapides de Jeremy lui fit redresser la tête. Le jeune papa tenait sa petite-fille serrée contre lui d'un bras, le sac avec ses affaire jeté sur son autre épaule. Jeremy et Gabrielle lui jetèrent un même regard, et il fut frappé par leur ressemblance comme jamais auparavant.  

Le cœur lourd, il fit mine d'esquisser un geste en direction de la petite-fille, qui l'observait d'un oeil ensommeillé, mais la voix cassante de Jeremy le cloua sur place.

"Rappelle-toi. Plus jamais."

Une seconde plus tard et la porte d'entrée claquait sur leur passage. Le silence revint dans l'appartement, il était seul.

Et c'était fini.

Juliet, Jeremy et Gabrielle étaient sortis de sa vie, en une fraction de secondes. Samaël était sorti de sa vie. Théo était irrémédiablement, désespérément seul. Sans personne vers qui se tourner, sans une âme qui s'inquiète de son sort, auprès de qui reposer son cœur fracassé.

Mais était-ce vraiment le cas ? N'y avait-il pas quelqu'un pour s'inquiéter de son sort ? N'y avait-il pas une personne, une seule, prête à lui vouer un amour inconditionnel ? Le visage de sa mère s'imposa à lui et, comme un petit garçon apeuré, il ressentit le besoin de la voir, de se réfugier auprès de sa seule vraie famille. Car c'était ce que les mères faisaient, elles aimaient, elles acceptaient leurs enfants en dépit de leurs pires erreurs, les accueillaient quoi qu'il arrive et à n'importe quel âge. Peut-être que sa mère l'aimait comme Juliet aimait Gabrielle. Alors peut-être qu'il pouvait rentrer, qu'il le pouvait, maintenant que son père était parti. Peut-être que l'eau et les années avaient coulé et apaisé les rancoeurs. Peut-être qu'elles le laissaient revenir, avec Artémis, si elles voyaient, si elles sentaient à quel point il était à la dérive. Théo avait tout gâché, tout perdu, il avait déçu et trahi tout le monde. Peut-être que s'il reconnaissait sa défaite, s'il acceptait leurs remontrances et leurs recommandations, s'il promettait tout ce qu'il devait promettre, alors peut-être qu'elles le laisseraient revenir... Peut-être qu'elles avaient encore une petite place pour lui dans leurs cœurs.

Tout à ses illusions, il saisit sa baguette, enfila sa plus belle cape émeraude et transplana.

RP terminé. Choupi Suite par ici puis par là
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