Si l'on devait décrire Euriell en quelques adjectifs, ceux-ci seraient probablement: élancée, gracieuse, et distinguée. Son port de tête parfait, sa chevelure dorée toujours impeccablement coiffée et ses vêtements chics des années 50 ne laissent aucun regard indifférent. Ses airs bourgeois et sa toilette raffinée engendrent des premières impressions relativement partagées entre la fascination, la jalousie, la moquerie, le dénigrement et autres réactions diverses et variées. Pourtant, cette coquetterie relève plus de l'habitude et de son éducation stricte que d'un réel besoin d'être présentable.
Et si l'expression sévère sur ce visage à la peau délicatement laiteuse participe à sa réputation de femme froide et inaccessible, il sera quasiment impossible de ne pas être charmé ou ébloui par la sincérité et la chaleur qui se dégage d'un sourire de sa part. Ceci dit, il faudra le mériter, et ce ne sera pas tâche facile !
Ses yeux d'un bleu gris à la fois acéré et captivant déstabilisent au point qu'il en est parfois difficile de maintenir son regard.
Bref, un simple coup d'oeil vers Euriell fait naître en chacun des sentiments très antagonistes, suscitant la curiosité et l'intérêt de tous pour cette femme si secrète.
Euriell a toujours préféré le calme et la solitude à l'animation et la foule. C'est une personne plutôt effacée, très discrète sur sa vie privée, presque mystérieuse, si bien qu'il se dégage parfois d'elle une certaine froideur. Elle déteste être au centre de l'attention, et cherchera toujours à détourner une conversation la concernant vers un autre sujet quelconque, ou se contentera de répondre brièvement à la question, quitte à paraître ennuyeuse.
Elle est pourtant une femme des plus chaleureuses et attentionnées, qui a simplement fait le choix de se dévoiler naturellement aux personnes qu'elle considère digne de confiance. C'est une amie fidèle et bienveillante, mais gare à celui ou celle qui abuserait de sa sincérité, car cette personne n'obtiendrait rien d'autre que son ignorance la plus totale et définitive. En revanche, il en faudra beaucoup pour soutirer une quelconque malveillance ou parole déplacée de la part de la magistrate, qui ne souhaite pas se rabaisser à de tels enfantillages.
Cette sagesse d'esprit cache pourtant une certaine naïveté qui se reflète dans son désir d'apporter le bonheur à tous et de percevoir le bien en chaque être humain. Ne pas y parvenir est une des choses qui la meurtrit le plus, puisqu'elle ne peut s’empêcher d'être envahie par un sentiment de devoir inaccompli, de culpabilité et de désillusion. Pourtant, elle parvient à chaque fois à s'extirper de cette mauvaise passe et à retrouver son optimisme, principalement pour son fils à qui elle ne souhaite qu'une chose : lui offrir un monde meilleur et sûr.
Ceci est d'ailleurs l'une des raisons qui lui permet de faire son travail correctement : envisager ce qu'il y a de mieux pour le plus grand nombre et pour l'avenir du monde magique, et ceux en faisant preuve d'intégrité et en respectant l'équité. Et même si attribuer une peine lourde est à chaque fois un moment douloureux, elle souhaite que chaque décision soit prise avec la plus grande objectivité, car l'injustice est bien ce qu'elle exècre au plus au point.
Enfin, et parce que la naïveté n'est pas son seul défaut, Euriell est une femme versatile lorsqu'il s'agit de sa vie personnelle et de ses propres choix. Prendre une décision est toujours une épreuve, car elle ne sait jamais qui suivre entre sa tête et son cœur, redoutant l'erreur ou l'échec. C'est pourquoi elle est souvent sujette à des périodes de mélancolie, de regrets, et à des sautes d'humeur lorsqu'elle est tourmentée. Son compagnon ne cesse de lui répéter qu'elle est beaucoup trop sensible, et qu'elle devrait prendre plus de recul sur les choses, mais c'est une tâche bien ardue pour la belle blonde...
8 Mai 1969 – Maison des FlatrezAprès avoir passer un long moment à s'habiller et se coiffer avec l'aide de sa nourrice, Euriell entendit sa mère toquer doucement à la porte de sa chambre avant d'y entrer, un sourire satisfait se dessinant sur ses lèvres alors qu'elle aperçoit sa fille joliment pomponnée.
- "Merci Minella, elle est parfaite. Vous pouvez disposer."La nourrice se courba poliment, attribuant une caresse affectueuse sur la joue de l'enfant avant de la laisser seule avec sa génitrice. Cette dernière s'approcha de sa fille et s'accroupit devant elle, replaçant une dernière petite mèche rebelle derrière son oreille.
- "Euriell chérie, tu te souviens de ce que l'on a dit ? Comment tu dois te comporter aujourd'hui ?"- "Je dois être patiente, essayer de m'amuser et de parler avec les autres enfants, et ne pas rester dans mon coin comme à chaque fois", répondit-elle mollement après avoir soupiré, peu emballée.
- "Je sais que tu n'aimes pas la foule et que tu préférerais lire tranquillement dans ta chambre, mais c'est l'anniversaire de ton père, et il a invité de nombreux amis haut placés. Et toi chérie, en tant que sa fille, tu joues un rôle important dans l'image qu'il renvoie, tu comprends ? Tu ne veux pas que ses amis pensent que tu es une petite fille mal élevée n'est-ce pas... ?"La blondinette secoua la tête avec une légère moue, tête baissée . Sa mère lui releva alors le menton doucement et déposa un baiser sur le haut de son crâne.
- "Alors évite de soupirer toutes les cinq secondes, salue poliment les gens qui te disent bonjour, profite de la fête, et tu pourras ensuite retourner à tes propres occupations, d'accord ?"La petite acquiesça avec un sourire forcé. Sa mère lui prit la main et elles se dirigèrent ensemble vers l'immense salon où les invités commençaient déjà à arriver en masse.
Cette fête allait lui paraître terriblement longue, et elle détestait devoir jouer la petite fille parfaite...
13 Juillet 1971 - Plage grecqueReyan Flatrez ne supportait pas les moldus. Il ne pouvait pas même concevoir qu'on puisse témoigner un quelconque intérêt à ces êtres primitifs. Mais sa femme Deneris l'avait harcelé depuis déjà plusieurs mois pour que la famille prenne des vacances bien méritées, et son choix s'était porté sur une destination moldue: la Grèce. Et plus particulièrement une plage sur laquelle elle se rendait elle-même régulièrement avec ses parents étant plus jeune.
Ce jour-là, Euriell connut son premier voyage en portoloin grâce auquel les Flatrez se retrouvèrent en quelques secondes sur une toute petite
plage blottie entre de grandes falaises rocheuses sur lesquelles nichait une forêt verdoyante, le tout encerclé d'une splendide eau turquoise.
Lorsque ce spectacle s'offrit soudainement à elle, Euriell en resta bouche-bée, comme figée sur place par ce parfait mélange de couleurs et d'odeurs. Le sable était chaud sous ses pieds, et la douce odeur de sel portée par la brise lui donnait l'impression de pouvoir respirer pleinement pour la première fois de son existence.
- "Alors, qu'en penses-tu ma chérie ?" la questionna sa mère, l'extirpant de l'état d’hypnose dans lequel elle se trouvait depuis déjà de longues secondes.
- "C'est... beau... Vraiment beau mère..." réussit à articuler l'enfant sans pour autant détacher son regard de la mer qui semblait l'attirer comme un aimant.
Elle s'en approcha doucement, à la fois curieuse et méfiante, puis entra lentement dans l'eau jusqu'à ce qu'elle atteigne ses genoux. C'était tiède et agréable, vraiment agréable, mais alors qu'elle entreprit de poursuivre son avancée, elle aperçut quelque chose bouger près de son pied avec une grande vivacité, ce qui la surprit et l'effraya immédiatement.
- "Mère !! Mère !! Il y a une bête !!" cria-t-elle en se précipitant hors de l'eau.
- "Euriell, s'il-te-plaît.", rétorqua fermement sa mère.
"Ne joue pas les froussardes, tu sais bien que je ne te laisserais pas t'éloigner s'il y avait un quelconque danger. Tu as dû voir un poisson."- "Un poisson...? Qu'est-ce qu'un poisson ?" - "C'est un animal moldu chérie. Il vit dans l'eau, et il en existe une multitude de toute sorte, taille, et couleur. Certains sont dangereux, mais ils sont très gros et il n'y en a aucun ici, tu ne risques absolument rien, d'accord ?" lui expliqua-t-elle tout bas.
"Mais évite d'en parler à ton père ou de le questionner à ce propos, tu sais qu'il n'aime pas tout ce qui touche au monde moldu..."La blondinette acquiesça, et sa mère hocha la tête avec un air satisfait.
Cette journée fut riche en découvertes pour la jeune fille, et elle profita pleinement de ce nouvel environnement. Deneris Flatrez se délectait du bonheur de sa fille, se remémorant ses propres premières vacances.
Seul Reyan semblait s'ennuyer, mais il fut pourtant contraint de rester jusqu'au soir.
Alors que le soleil se couchait et que le temps était venu pour la famille de rentrer, Euriell, assise dans le sable les pieds dans l'eau, observait l'horizon. C'était probablement l'une des plus belles journées de sa vie, et quoi qu'en dise son géniteur, elle voulait en découvrir plus sur le monde moldu. Elle voulait connaître tous les lieux tels que celui-ci, et apprendre toutes les sortes de poissons qui existaient.
Une passion naquit ce jour-là, et ne la quitta jamais.
Septembre 1974 – Gare de King's Cross Euriell était déjà terriblement stressée par sa rentrée à Poudlard, et le brouhaha ambiant n'était pas pour la calmer. Le sifflement du train, les exclamations joyeuses de certains, les pleurs mêlés d'inquiétude et de fierté des parents, sans oublier les animaux de compagnie gesticulant dans leur cage, les pauvres bêtes étant probablement aussi effrayés qu'elle ne l'était... Tout cela ne faisait qu'accroître l'angoisse qui lui rongeait l'estomac.
- "Tout va bien se passer Euriell. Tu vas te faire de nombreux amis à Poudlard, tu verras. C'est une école fantastique", la rassura sa mère avec un sourire d'encouragement.
- "Ce n'est qu'une rentrée scolaire, rien de bien terrifiant", rétorqua son père.
"Tout ce que tu as à faire, c'est être studieuse et te faire des amis. Se faire des relations est important, même à ton âge. Je dois dire que je serais particulièrement fier si tu rejoignais la maison Serpentard, mais te connaissant, je ne me fais pas trop d'illusion. Je suppose que tu feras une excellente Serdaigle, comme ta mère." dit-il en souriant à sa femme, bien qu'une pointe de déception était perceptible dans le ton de sa voix, ce qui n'échappa pas à la future élève.
Pour Reyan Flatrez, il n'existait que deux maisons qui en valaient la peine dans l'école de magie : Serpentard et Serdaigle. La première réunissant selon lui les sorciers les plus puissants et les plus disposés à un avenir prestigieux, et la seconde rassemblant les élèves les plus brillants et intelligents. Quant à Gryffondor, c'était le paradis des casse-cous sans cervelle, bien qu'il admettait que leur bravoure était indéniable. Et Poufsouffle... Poufsouffle n'était rien d'autre que la poubelle de Poudlard où y été réunit tout le reste, autrement dit des personnes sans intérêt...
Finalement, après avoir dit au revoir à ses parents et sa petite sœur Lizenn âgée de seulement 1 an, Euriell monta dans le Poudlard Express avec sa grosse valise et son chat Oddie. Elle s'installa dans une cabine dans laquelle se trouvait un garçon surexcité qui semblait avoir très envie de discuter, mais malgré les sourires polis de la blondinette, ses réponses plus que brèves ne l'incita pas à poursuivre la conversation. La jeune fille semblait clairement plus attirée par les magnifiques étendues d'herbes que lui offrait le paysage.
Le train arriva finalement à destination, et les enfants embarquèrent dans les petites barques qui les attendaient. Durant le trajet, Euriell pu enfin admirer le fabuleux château qu'était l'école des sorciers, et ne fut que plus émerveillée encore une fois à l'intérieur.
Les petits nouveaux furent conduits à la grande salle où avait lieu la cérémonie de répartition, et le stress revint soudainement au galop, effaçant toutes les choses fantastiques qu'elle venait de découvrir d'un revers de main. Les noms défilaient, les applaudissements se succédaient, jusqu'à ce que vienne le tour d'Euriell. Elle s'avança, et le professeur McGonagall déposa le chapeau sur sa petite tête blonde.
- "Mmmmm.... Mais c'est une Flatrez peu commune que nous avons là... Voyons cela.... Je vois de nombreuses qualités...Intégrité... Tolérance...Curiosité... Mmm...le choix est difficile... Cependant, je pense que tu ferais un excellent membre de la maison... POUFSOUFFLE !!"Les cris et applaudissements tonnèrent, mais Euriell resta simplement tétanisée sur le petit tabouret en bois, si bien que le professeur McGonagall dut gentiment lui demander de regagner sa table, ce qu'elle fit presque en titubant.
Elle, une Poufsouffle... ? Sa famille lui avait pourtant répété un nombre incalculable de fois qu'elle avait toutes les qualités d'une Serdaigle...
Mais tout ce qui la préoccupait à ce moment précis, c'est ce que son père allait penser en apprenant que sa propre fille avait rejoint la « poubelle » de Poudlard...
23 Mars 1978 - Couloir de PoudlardEuriell venait de sortir de son cours d'histoire de la magie, un cours qu'elle pourrait trouver intéressant si le professeur n'avait pas décider de le rendre soporifique au possible... Elle traversait le couloir de sa démarche gracieuse et assurée pour se rendre à son option d'études des runes lorsqu'elle fut soudainement bousculée contre le mur, s'y rattrapant de justesse. Ses livres en revanche tombèrent tous à la renverse et ses notes s'éparpillèrent au sol, ce qui l'agaça profondément étant donné qu'elle veillait toujours à ce que ses ouvrages soient impeccables et ses cours organisés. Cependant, sa colère s'évapora instantanément en réalisant qu'elle avait été poussée par une autre
étudiante qui était la vraie victime de la bousculade. La brunette avait durement rencontrer le sol, et son bras s'en retrouva meurtri alors qu'elle avait essayé de rattraper sa chute tant bien que mal.
Theodor Vanfresh, un Gryffondor aussi musclé que stupide, ricanait de bon cœur face à son geste puéril en compagnie de son acolyte au niveau intellectuel tout aussi élevé.
- "Est-ce que tout va bien.. ?" demanda-t-elle à la brunette dont le regard désolé la décontenança.
- "Alors quoi la ratée, tu sais déjà pas monter sur un balai, t'es pas non plus foutu de tenir debout ? Tu fais vraiment honte à notre maison, tu l'sais ça ?" cracha le cogneur de l'équipe de Quidditch des Gryffondor à l'adolescente avant même qu'elle n'ait le temps de répondre.
- "Par Merlin, est-ce naturel d'être aussi sot, ou bien est-ce voulu ?" lâcha Euriell sur un ton méprisant à l'attention de celui qui avait abîmé ses livres qui s'avança légèrement d'un air menaçant, à la fois amusé et agacé par le ton de la blonde.
- "T'as un souci, blondasse ? Tu veux qu'on en discute ensemble ?"- "Laisse tomber Theodor, tu vas avoir des emmerdes si tu touches à cette foutue bourge... !" intervint son ami en l'attrapant par l'épaule.
"Viens, faut qu'on se casse avant qu'un prof se ramène."Le tas de muscle se laissa faire, mais adressa un petit signe aux deux jeunes filles comme quoi il allait les surveiller de près avant de partir.
Euriell soupira de désolation face à la sottise de ces babouins sans cervelle, et aida la Gryffondor à se relever. C'est alors qu'elle se rendit compte que tous les élèves du couloir les fixaient, d'un air embarrassé pour certains, moqueur pour les autres.
- "Merci... cet idiot ne me lâche pas depuis qu'il a appris que j'avais le vertige. Ce crétin n'a que le quidditch dans la tête alors forcément..." s'expliqua le brunette en époussetant sa jupe.
- "Ce... ce n'est rien..." la rassura-t-elle en essayant sans succès de cacher sa gène face à tous ces regards braqués sur elle. Elle ramassa ses livres et ses feuilles avec empressement avec l'aide de l'autre adolescente, et reprit son chemin d'un pas pressé.
- "A...attends, tu oublies ça... !" l'interpella le brunette en brandissant une feuille oubliée, seulement son interlocutrice était déjà loin...
****
Après le repas du soir, Euriell était restée dans la grande salle pour trier ses cours à présent complètement désordonnés, et elle risquait d'y rester pendant une longue partie de la soirée... Plus rien n'était à sa place !
Alors qu'elle s'adonnait à sa laborieuse tâche depuis déjà trois bons quart d'heure, quelqu'un déposa doucement une feuille sur la table, juste à côté d'elle.
- "Tu as oublié ça dans le couloir tout à l'heure ", lui fit remarquer la brunette avec un sourire.
- "Oh, merci beaucoup... Je...Je m'excuse d'être partie aussi précipitamment tout à l'heure, je n'aime pas vraiment... me faire remarquer..."- "Pas de problème, je peux comprendre. Et puis... je voulais surtout te remercier pour ce que tu as fait, la plupart des gens n'aurait pas bouger le petit doigt pour moi alors... merci." l'informa la Gryffondor.
"Je suis Lonnie Brinscott, on est ensemble au cours de botanique... Tu es Euriell, c'est bien ça.. ?" poursuivit-elle un peu anxieuse de paraître trop collante.
- "C'est bien cela, Euriell Flatrez", se présenta-t-elle en retour avec un sourire sincère qui décrispa immédiatement la brunette.
- "Dans ce cas Euriell, tu ne m'en voudras pas si j'insiste pour t'aider à trier tes cours ? Même si ce n'est pas directement ma faute, je pense que c'est la moindre des choses après avoir tout fait tomber..."- "Et bien...d'accord, avec plaisir", accepta la blonde, étonnée que quelqu'un réclame sa compagnie.
Dire qu'elle n'avait pas d'amis serait un peu gros, il y avait bien quelques camarades avec qui elle discutait régulièrement et mangeait parfois, mais dans l'ensemble, elle avait toujours fait fuir les autres de par son attitude et sa manière de s'exprimer trop guindées.
Pourtant Lonnie ne semblait pas s'en préoccuper, ou du moins, ça ne la faisait pas glousser comme les autres.
Elles passèrent la soirée à discuter de tout et de rien. Euriell, sur la réserve dans un premier temps, se livra de plus en plus.
Cette rencontre sonna comme la fin de ses premières années de solitude à Poudlard, et comme le début d'une longue et solide amitié avec la douce Lonnie Brinscott.
22 Février 1993 - Maison des FlatrezCela faisait déjà quelques mois que Lizenn Flatrez était en couple avec le "charmant"
Derek Mendrish, et avait décidé qu'il était temps de présenter son fabuleux petit ami à ses parents.
C'est d'ailleurs la raison pour laquelle tous les Flatrez se retrouvaient réunis autour d'un repas de famille concocté par Deneris elle-même pour l'occasion. Pourtant, Lizenn qui d'habitude faisait la conversation pour toute la famille à elle seule semblait faire une tête de six pieds de long, et lançait des regards noirs à son aînée assise juste en face d'elle.
En effet, la présence d'Euriell ne faisait pas vraiment partie du programme de l'exubérante cadette, mais leur mère s'était permise de l'inviter sans sa concertation, ignorant le froid qui régnait entre ses deux filles depuis des mois.
Euriell ne s'attendait pas spécialement à un accueil chaleureux de la part de sa sœur, mais ce repas était l'occasion pour elle de revoir ses parents qu'elle n'avait pas vu depuis un moment, elle qui était très prise par sa carrière juridique. Cependant, cet investissement en valait la peine, car la magistrate semblait déjà s'être forgé une certaine réputation au sein du Ministère, pour la plus grande fierté de sa mère, et pour une fois, de son père également. Cela n'empêcha pas ce dernier de dénicher la petite tâche qui gâchait ce beau tableau....
- "J'espère que je vivrai assez longtemps pour rencontrer également le compagnon de ma fille aînée un de ces jours. Je sais que ton travail t'accapare beaucoup Euriell, mais il serait peut-être temps que tu fondes une famille, tu ne crois pas ?" fit remarquer le notaire, ce qui éveilla immédiatement la fourberie de la jeune Lizenn qui ne put restreindre un rictus malin.
- "Oui c'est vrai ça, comment se fait-il que tu n'aies toujours pas quelqu'un à déjà 30 ans, c'est étrange non ? Il y sûrement une explication plausible à tout cela n'est-ce pas ?" la
questionna-t-elle sur un ton plein de sous-entendus qui crispa soudainement son aînée qui peinait à avaler son tendre morceau de viande.
Euriell savait pertinemment à quoi sa sœur faisait allusion. Elle avait manqué de prudence quelques mois plus tôt, lorsque la cadette vint lui rendre une visite à l'improviste dans son appartement à Londres alors qu'elle discutait avec Lonnie Brinscott, son amie de longue date. Ce jour là, la plus jeune des Flatrez tomba sur une
scène qu'elle n'aurait pas du voir entre sa sœur et son amie, une scène qui la scandalisa alors qu'elle quittait l'appartement outrée, non sans jeter une multitude d'insanités au visage de sa sœur au préalable.
Euriell savait pertinemment que Lizenn ne se tairait pas éternellement et que le sujet ressortirait tôt ou tard, mais elle ne la pensait pas sournoise au point de tout divulguer à ses parents en plein repas, qui plus est devant un inconnu.
- "Je présume que ce genre de rencontres arrivent en temps voulu." répondit-elle simplement en adressant un regard désapprobateur à sa sœur.
- "Foutaises !!" hurla la cadette en se levant brutalement sous les regards interloqués des autres.
- "Ne commence pas Lizenn..."- "Tu joues les saintes, mais tu n'es rien d'autre qu'une sale débauchée ! Dis-leur ! Dis-leur ou c'est moi qui le fais !!"- "Ma vie privée ne te regarde ni te concerne en aucune façon, Lizenn ! Ni toi ni personne !"- "Qu'est-ce qui ne nous regarde pas Euriell ? Que tu bouffes la bouche de ta sale coincée de Lonnie Brinscott dans notre dos ?! C'est bien de cela dont tu parles ?!" laissa finalement exploser la cadette, créant une ambiance soudainement bien lourde alors que tout le monde se tournait vers Euriell d'un air choqué.
La magistrate resta figée par la cruauté dont sa sœur venait de faire preuve, la
fixant d'un air déçu et indigné.
- "De quoi parle-t-elle ? Est-ce vrai ?" demanda Reyan à sa fille aînée qui ne savait plus où se mettre.
- "Je les ai vu de mes propres yeux !"- "Silence Lizenn ! C'est à ta soeur que je m'adresse, pas à toi !" la coupa-t-il avant de se retourner vers la magistrate.
"Euriell, réponds-moi."- "C'est la vérité", avoua-t-elle après avoir pris une longue inspiration tout en se levant de table.
"Mais je ne m'étendrais pas plus sur le sujet, je crois avoir été suffisamment humiliée pour aujourd'hui, et je n'ai pas à justifier mes choix de vie. Merci pour ce délicieux repas mère, et navrée pour tout ce scandale..." dit-elle à sa génitrice en lui pressant doucement l'épaule, avant de partir enfiler son manteau sous les yeux éberlués de Derek et Deneris, et fous de rage de Lizenn et Reyan.
- "Tes choix de vie..? Est-ce donc cela tes choix de vie ?! Me décevoir et me ridiculiser sans cesse ?! Faire honte à toute ta famille ?!" hurla son père qui ne pouvait plus contenir sa colère.
- "Malheureusement père, je crains que vous ne soyez éternellement insatisfait de ma personne, et ce malgré ma bonne volonté à vouloir combler vos attentes me concernant. J'ai accepté depuis longtemps le fait de ne jamais y parvenir, pour être honnête. Hélas, il faut croire que nous sommes trop différents pour nous entendre, vous et moi." confessa-t-elle sur le ton doux et calme qui lui était propre avant de quitter la maison.
Mais à peine eut-elle franchi le seuil de la porte qu'une larme s'écoula le long de sa joue lisse comme de la porcelaine, ne pouvant contenir plus longtemps les émotions qu'elles masquaient depuis de trop longues minutes.
Jamais elle ne s'était sentie aussi humiliée ni embarrassée de toute son existence, et elle d'habitude si indulgente nourrissait une profonde amertume à l'encontre de sa sœur et de son géniteur. Elle avait trop de fois pardonné leurs médisances, mais elle ne passerait pas l'éponge cette fois-ci.
Elle fit appel à un taxi magique et rentra chez elle, jetant un dernier
regard attristé à la maison où elle avait grandi et dans laquelle elle ne remettrait plus jamais les pieds de toute sa vie...
28 Mai 1999 – Bibliothèque londonienneEuriell aimait avoir ses petites habitudes, et sa favorite était probablement celle qui consistait à se rendre chaque dimanche à la bibliothèque dévorer tout un tas d'ouvrages divers et variés. Et comme à chaque fois, après avoir salué la jeune bibliothécaire de son plus beau sourire, c'est la section moldue qui était la première victime de ses recherches. Son regard cristallin balayait les étagères avec aisance, sans s'attarder sur les livres déjà consultés, jusqu'à ce qu'un roman attire son attention.
Le saisissant avec délicatesse, la blonde caressa la couverture du bout des doigts.
Frankenstein. Un titre bien étrange, qui la poussa à le feuilleter quelque peu pour en savoir plus.
- "Très bon choix, un classique moldu !", déclara une voix près d'elle qui la fit sursauter.
- "Oh, par Merlin... ! Vous m'avez fait une de ses frayeurs.. !", laissa-t-elle échapper en posant une main sur son cœur alors qu'elle se tournait vers l'inconnu : un homme brun au regard pétillant, dont le sourire en coin marquait un certain amusement face à la réaction de la blonde.
"J'étais..."- "Concentrée ? Je vois ça ! Navré de vous avoir effrayé", s'excusa l'homme, bien que son ton indiquait clairement qu'il n'était pas aussi désolé qu'il ne le prétendait.
"Je suis Daryl Trevis, écrivain", se présenta-t-il avec un charmant sourire.
- "Euriell Flatrez, enchantée de vous connaître Mr. Trevis", répondit-elle poliment sans savoir si elle devait se sentir gênée ou amusée par l'attitude de l'homme en face d'elle.
- "Moi de même, Mme Flatrez. Je vois que vous vous intéressez aux romans moldus ?"- "Mademoiselle", le corrigea-t-elle gentiment.
"Et...oui, en effet, j'apprécie beaucoup leur littérature, mais mon intérêt pour eux s'étend sur d'autres domaines... tous les domaines à vrai dire. Vous semblez vous y connaître vous-même, je me trompe ?"- "Tout juste ! Ils sont même ma principale source d'inspiration. Je présente justement mon dernier roman cet après-midi, ici-même. Je serai vraiment très honoré d'y voir votre resplendissante personne Mlle. Flatrez !" la complimenta-t-il, recevant en échange un regard mi-examinateur, mi-rieur.
- "Vous moqueriez-vous de moi Mr. Trevis ?"- "Mais point du tout ! Je ne me permettrais pas !"- "Et est-ce que vous venez souvent effrayer les gens dans les bibliothèques dans le but de les traîner à vos conférences ? C'est une technique qui doit être terriblement efficace à n'en point douter."- "A vous de me le dire ? C'est la toute première fois que je teste celle-ci, pour être honnête", fit-il avec un air faussement innocent.
Pendant quelques secondes, ils restèrent tout deux à se fixer, un rictus au coin des lèvres, sans dire un mot. Puis la magistrate se retira, le dépassant pour rejoindre la bibliothécaire et lui tendre le roman de Frankenstein, le tout sous le regard diverti de l'écrivain qui
observait cette femme pleine de manières emprunter son livre comme s'il s'agissait de la chose la plus intéressante qui soit.
- "14h30 cet après-midi Mlle Flatrez !" cria-t-il à son attention avant qu'elle ne sorte du bâtiment.
Euriell se stoppa, roulant des yeux sans pour autant pouvoir cacher son
amusement, avant de finalement passer la porte.
13 Septembre 2009 - Zoo de Londres- "Woaaaaa !! Il est gigantesque !!" s'émerveillait le jeune Solal en admirant une magnifique girafe.
"Qu'est-ce que c'est papa ?? Et ça là-bas ? Tu as vu maman ??" cria-t-il en courant vers le coin des éléphants.
Pour une fois depuis près de deux ans, les membres de la petite famille prenait du bon temps tous ensemble au zoo de Londres, se baladant tranquillement en admirant les divers animaux moldus qui y résidaient en cet après-midi ensoleillé.
L'enfant était particulièrement excité, et ne cessait de demander à ses parents le nom des animaux sans même prendre le temps de lire le panneau de renseignement, trop occupé à courir d'un enclos à l'autre.
Daryl se réjouissait de l'enthousiasme de sa progéniture, jusqu'à ce qu'il remarque l'air distrait de sa femme à côté de lui.
- "Tout va bien chérie? Tu as l'air préoccupée..." lui demanda-t-il, l'extirpant de ses pensées.
- "Oh...oui, tout va bien, je suis juste un peu fatiguée voilà tout." le rassura-t-elle avec un sourire crispé avant de poser son regard sur son fils au sourire rayonnant dans un léger soupir.
"Je ne me souviens même plus de la dernière réelle activité que nous ayons fait tous les trois... C'était une bonne idée de venir ici, Solal est tellement heureux... !"- "C'est vrai... Pourtant tu n'as pas l'air de savourer cette journée. Qu'est-ce qui te trouble au point de ne pas pouvoir profiter pleinement du bonheur de ton fils ? Je ne suis pas aveugle Euriell, je vois bien que ça ne va pas depuis ces derniers mois. Je te l'ai dit un million de fois, parle-moi, je suis là pour ça..!"Euriell soupira, passant une main parfaitement manucurée sur son front délicat. Elle ne tenait pas spécialement à parler de ses soucis, mais elle ne voulait pas que son compagnon s'imagine quoi que ce soit. Leur couple bâtait de l'aile depuis déjà plusieurs années, et lui cacher encore plus de choses n'améliorerait en rien la situation.
- "Je suis simplement stressée par le travail... Les procès expéditifs se succèdent au Ministère, et j'ai dû prendre des décisions difficiles dernièrement. Et le problème, c'est que je n'ai pas toujours l'impression de prendre les bonnes..." s'expliqua la blonde en triturant nerveusement ses mains.
- "Écoute Euriell, je t'ai aussi répété ça cent fois : tu n'es pas une machine. Tu es humaine, et une humaine qui a de lourdes responsabilités sur les épaules, mais je te connais, il n'y a pas de personne plus juste que toi, et je suis sûre que tu fais parfaitement ton travail", la rassura-t-il avec un sourire d'encouragement, lui pressant doucement le bras.
- "Je ne sais pas Daryl... Il y a de cela deux semaines, j'ai..." commença-t-elle alors que les mots restèrent soudainement bloqués dans sa gorge. Elle prit une grande inspiration, la mâchoire crispée, avant de reprendre,
"...j'ai envoyé une gamine à peine majeure à Azkaban Daryl... j'ai dû envoyer en prison une jeune résistante qui aurait pu être ma propre fille, et cela pour la simple et unique raison qu'elle se battait pour ses idéaux... Et ce n'est pourtant pas la première fois que je juge ce genre de cas, mais cela me ronge, parce que je réalise que...que je ne fais que punir bien trop sévèrement des gens qui ne le méritent pas..."Car si une part de la magistrate savait pertinemment que les résistants connaissaient les risques encourus en se confrontant au Ministre et donc à la loi elle-même, elle avait conscience que la punition en retour était trop abusive. Pourtant, elle supportait à 100% le programme de Leopold Marchebank malgré la rudesse de ses méthodes, et ne comprenait pas que l'on puisse risquer si gros en s'opposant à lui. C'était une cause qui selon elle n'en valait pas la peine, car il n'y avait rien dans les objectifs du politicien qui puisse pousser à la rébellion. Et même si tout n'était pas parfait, quel gouvernement pouvait se vanter de l'être ?
En revanche, Daryl ne partageait pas l'avis de sa femme concernant le F.R.E.E et son fondateur, mais avait arrêté de chercher à lui ouvrir les yeux. Il savait qu'elle se braquerait comme à chaque fois, et lui dire que cet événement était la preuve qu'il avait eu raison depuis le début n'arrangerait pas son moral...
- "Je ne sais pas quoi te dire chérie... Mais ton travail consiste à appliquer des peines en fonction des lois mises en place, et c'est ce que tu as fait, tu n'as donc rien à te reprocher de ce côté-là. Maintenant, si tu penses que la justice elle-même est injuste, mais que tu es persuadée que Marchebank est bien intentionné, alors peut-être écoutera-t-il tes revendications à ce propos.. ? Tu as toujours été de son côté après tout."Parler directement au Ministre ? Elle ne savait pas si elle avait son mot à dire là-dessus en tant que simple juge.. Elle était cependant une proche collaboratrice de Marchebank, et peut-être pouvait-elle montrer son implication en participant à l'amélioration du système juridique actuel, après tout.
Elle acquiesça pour toute réponse à son compagnon, mais son sourire reconnaissant suffisait à lui faire comprendre qu'il avait su l'apaiser. Il y parvenait toujours à vrai dire. Aucun jugement, aucune parole déplacée, tout n'était qu'empathie, tact et objectivité avec l'écrivain. Evidemment, il n'était pas parfait, mais Euriell devait admettre qu'il n'en était pas loin. Pourtant quelque chose clochait depuis le début, qui empêchait la blonde de s'engager pleinement dans son couple même après ces dix années de relation. La magistrate savait parfaitement de quoi il s'agissait, et s'en voulait chaque jour de ne pas pouvoir éprouver un amour à la hauteur de son merveilleux compagnon pour la seule raison qu'il était....un homme.
Mar 24 Mai 2016 - 2:21
