Comme une journée d'été en Novembre [Dave & Emma]

Honnêtement ? Dave ne s’imaginait pas qu’il trouverait si vite un équilibre dans sa relation avec Emma. Les choses étaient plus simples qu’il ne le pensait au premier abord. Novembre était déjà arrivé et leur couple tenait toujours, apprenant chaque jour à un peu plus se connaître. Un petit train de vie qui convenait pour le moment à Dave, car il estimait qu’il ne savait pas encore tout d’Emma, et cela l’amusait de découvrir de nouvelles choses sur elle. Il n’avait pas l’impression d’être transporté par l’amour -il n’y croyait pas vraiment, de toute façon- mais il commençait à développer une sincère affection pour elle, même si parfois… Il restait quelque peu dubitatif face à certains de ses traits de caractère. Il y avait quelques petites choses chez elle qui le laissaient circonspect, comme cette façon qu’elle avait d’accourir vers lui comme s’il était venu sur son cheval blanc, ou ces gloussements irritants qui la prenaient, dès que Marlene Barclay était de passage.

Bah. Elle était mignonne, quand même. Et puis, il avait peut-être trop passé de temps avec Samantha et Lauren, qui n’étaient pas exactement l’idée classique de la féminité.

Heureusement, Emma était une jeune fille intelligente, avec qui il pouvait converser, il serait difficilement resté avec elle, sinon. Dave sourit contre ses lèvres, satisfait de pouvoir avoir un petit moment en sa compagnie, après cette longue journée de cours.

« Pas mal. Les cours de Virtanen sont toujours intéressants, commenta Dave, qui faisait partie de cette espèce d’élève en voie de disparition à aimer les runes. Il l’entraîna de la main vers le banc qu’elle avait quitté. Et toi, ta journée ? »

Dave haussa les sourcils au commentaire d’Emma, feignant le scepticisme.

« Plus canon que moi ? Ah, fais attention à ce que tu vas dire, ma petite Emma. »

Bien sûr qu’il ne faisait pas le poids face à Virtanen, comme face à beaucoup d’autres hommes, mais elle avait cherché à le faire réagir avec ce commentaire. Elle méritait bien qu’il lui renvoie la balle. Dave s’était senti complexé par son physique pendant des années, il avait plus ou moins tourné ce chapitre de sa vie, en apprenant à cultiver ses autres qualités. Et puis, le fait d’avoir une petite amie ne pouvait que lui redonner un peu confiance en lui, sur cette question.

« Oh tu lisais quoi ? »

Curieux, Dave s’empara du livre avant qu’Emma n’ait eu le temps de répondre. Connaître les lectures d’une personne était selon lui un bon moyen d’apprendre des choses sur elle. Il savait que sa petite amie était passionnée par l’histoire des civilisations anciennes -ce qui ne pouvait que la faire monter dans son estime- mais le livre qu’il découvrit n’avait rien à voir avec ceux qu’il s’imaginait. Déconcerté, Dave lut le titre à haute voix :

« Les Hauts de Hurlelune, de Mildred Magpie… Sérieusement, tu lis ce navet ? »

Un sourire moqueur s’étala sur son visage. Emma ne commettait aucun crime en lisant ce roman à l’eau de rose très en vogue, mais Dave était un garçon naturellement taquin qui aimait embêter sa petite amie, de temps en temps.

La façon dont Emma prit la mouche lui parut si brutale que Dave ne prit pas vraiment au sérieux le revirement d’attitude. Il s’approcha de sa petite amie, sourire aux lèvres.

« Oh, tu ne vas pas me dire que tu es vexée pour ça ? »

Et pourtant… Emma détournait la tête, comme pour l’empêcher de lui voler un baiser. Dave soupira. Elle était donc sérieuse quand elle lui reprochait son « romantisme de Strangulot » ? Bien qu’un peu piqué, Dave décida de ne pas se laisser aller à la dispute sur un sujet si futile. Il pouvait faire un effort, pour comprendre, au moins. Son grand bras lui permit d’atteindre le livre dans le sac qu’Emma gardait derrière elle. Cette fois-ci, il daigna mieux l’examiner, en lisant rapidement la quatrième de couverture, qui parlait de l’histoire saugrenue d’un loup garou tombant amoureux d’une femme qui se transformait en biche. Sourcils froncés, Dave ouvrit le livre et lut à haute voix quelques passages au hasard.

« Sa main retint désespérément celle du loup, prostré dans un coin de la pièce, tandis qu’elle laissait éclater toute la force de ses émotions : « L’amour que j’éprouve pour toi est plus fort que tous les dangers que je peux courir à rester avec toi ! Alors laisse-nous une chance, je t’en prie. » Puis quelques pages plus loin : « Tu es sûre que c’est ce que tu veux ? - C’est toi que je veux, pour toujours » Il en lut une dernière : « T'entendre respirer est mon cadeau le plus précieux... »

Le Serpentard referma temporairement le livre, pour poser son regard sur Emma.

« C’est le genre de choses que tu aimerais que je dise ? »

Dave, fais au moins l’effort d’avoir l’air moins dubitatif.

Cela devait être la première fois qu’il voyait Emma en colère. Elle qui était si réservée, si douce… C’était déstabilisant de la voir répliquer avec froideur et indignation. Non pas parce que Dave craignait ce genre de réaction, mais parce qu’il n’en avait pas l’habitude, venant d’elle.

Il dut rester hébété une seconde de trop, car Emma en profita pour se lever et prendre la fuite. Dave n’eut pas de mal à la rattraper, de quelques grandes enjambées, pour se planter face à elle, la forçant à s’arrêter.

« Je ne me moquais pas de toi ! Non, il se moquait de ce livre, nuance. J’essaye juste de comprendre, mais si tu te braques comme ça à la moindre remarque… »

Dave croisa les bras, décidé à montrer qu’elle n’était pas la seule à pouvoir lui faire des reproches. Elle le vexait aussi en sous-entendant qu’il n’était qu’une brute incapable de romantisme. Surtout qu’il n’avait pas l’impression d’avoir fait quoique ce soit de mal. Il assumait pleinement son avis quand il qualifiait les Hauts de Hurlelune de navet, si Emma n’était pas d’accord avec ça, il était prêt à en discuter, il ne voyait vraiment pas pourquoi elle prenait la mouche de la sorte.

« Ce n'était pas dans mon intention de te vexer, tu sais. Si tu as quelque chose à me reprocher, dis-le clairement, au lieu de me laisser en plan. »

Dave vit les épaules de sa petite amie trembler. Allons bon, elle n’allait pas pleurer pour cette histoire, tout de même ? Il sentit qu’elle retenait ses sanglots face à lui. Désemparé par son attitude, et par sa réponse pour le moins énigmatique, Dave soupira. Emma était comme la coquille d’une huître : difficile à ouvrir du premier coup.

Sans un mot, il attira à lui et la serra dans ses bras un certain temps, pour qu’elle se calme. Elle pouvait pleurer si elle le souhaitait, c’était peut-être plus simple pour elle quand il ne la regardait pas. Dave n’était peut-être pas le prince romantique dont elle rêvait, mais il n’était pas un petit ami ingrat au point de la laisser dans son mal-être sans rien faire. Cela le peinait de la voir triste, encore plus quand il ne savait pas quoi faire pour arranger les choses.

« Explique-moi, alors. Ne garde pas tout pour toi, je ne peux pas t’aider si tu ne me dis rien. Qu’est-ce qui ne va pas ? »

Dave s’était bien rendu compte qu’Emma manquait de confiance en elle. Parfois, il trouvait sa timidité adorable, mais en même temps, il aurait aimé qu’elle fasse preuve de plus de caractère. Il avait la sensation d’être celui qui menait la barque, et si cela flattait son ego d’homme, il ne cachait pas qu’il aimait qu’on lui tienne tête. Il n’était pas meilleur ami avec Samantha et Lauren pour rien. Il n’avait pas eu une période où il ressentait un petit béguin pour la batteuse pour rien non plus.

Emma était à mille lieues de cela, comme elle le lui avouait à présent. Dave était partagé entre l’envie de la rassurer et celle de la secouer. Il avait toujours été un garçon franc. Pour autant, il n’avait pas envie de blesser davantage Emma. Plein de bonnes intentions, Dave était convaincu qu’il pouvait se montrer patient avec elle, et composer avec sa fragilité. Pour le moment.

« Je suis désolé, je ne savais pas que tu pensais tout ça, Emma. Je n’ai pas dit ça pour te juger, tu as le droit d’aimer ce que tu veux. Si je suis avec toi, c’est parce que j’en ai envie et que tu me plais, alors aie un peu plus confiance en toi, d’accord ? Sur ces mots qu’il voulait rassurants, Dave ajouta pour détendre l’atmosphère : Crois-moi, Dave Marchebank ne sortirait pas avec une fille nulle. »

La suite le surprit un peu, il ne s’attendait pas à ce qu’elle évoque Sorden. Bien sûr, Dave avait lu l’annonce de son exécution dans le journal, qui avait ravi et rassuré certains. Peur ? De quoi Emma avait-elle peur ?

« Mais non, y a aucune raison, elle ne pourra plus faire de mal à qui que ce soit, maintenant… commença t-il, hésitant. Tu as encore peur d’elle ? »

Dave fronça les sourcils à la réponse d’Emma. Il tentait d’amasser les souvenirs de cette affaire, deux ans plus tôt. Il ignorait qu’Emma avait témoigné au procès de Sorden, son identité avait été tenue secrète, pour la protection des témoins. S’il l’avait su, il aurait peut-être eu davantage de clés en main pour comprendre l’angoisse de la jeune fille.

« Si c’est au point que tu en pleures… Alors, c’est important, non ? »

Il savait qu’Emma était fragile, sans doute encore plus lorsqu’elle n’avait que quatorze ans. Apprendre qu’une de leur professeur était une terroriste sanguinaire avait du la traumatiser. Mais s’il y avait autre chose ? De plus profond ? De secret ? Dave avait l'impression qu’elle ne lui disait pas tout, mais il ne pouvait pas la forcer à se confier. Et puis, peut-être qu’il se faisait des idées. Il saisit le visage de sa petite amie entre ses deux grandes mains, pour lui demander doucement :

« Tu veux en parler ? »

Dave hésitait. Il sentait qu’Emma n’était pas complètement franche, mais d’un autre côté, il ne voyait pas comment la pousser à se confier sans la brusquer. Ils avaient bien manqué de se disputer, et il avait réussi à rattraper à peu près le coup. Dave décida finalement de conserver cet équilibre précaire et de ne pas insister. Pour cette fois.

« Bon. Très bien. Il fit glisser ses mains sur les épaules de sa petite amie, puis précisa une dernière chose qui lui paraissait importante. En tout cas, si quelque chose ne va pas, tu sais que tu peux m’en parler. Je ne peux pas t’aider si tu gardes tout pour toi. »

Oui, il aurait aimé qu’Emma lui fasse plus confiance, à défaut de se faire confiance à elle-même. Il y avait des sujets sur lesquels elle se fermait tant que Dave désespérait de réussir à tirer quoique ce soit d’elle. On lui avait toujours appris à s’exprimer, il ne concevait pas qu’Emma puisse vivre en intériorisant tant de secrets, comme si se livrer un peu aux autres allait la détruire. A ce train-là, elle risquait d’imploser, ce qui n’était pas mieux.

Dave mit la question de côté pour le moment, et saisit la main de sa petite amie, avec un sourire.

« Il y a quelque chose que tu voulais faire, aujourd’hui ? »

FIN DU RP