« Professeur, j'ai une... Oups, j'ai encore dépassé le couvre-feu... » ~ Léa

Fermant le livre sur lequel elle travaillait depuis plusieurs heures, Léa soupira. La bibliothèque, à cette heure-ci, était quasiment déserte. Il était très rare de croiser des professeurs dans le temple du savoir puisqu'ils étaient censé tout connaitre de leur matière, mais Léa n'avait pas peur de remettre en cause cette idée reçue pour aller faire des recherches sur des sujets divers et variés. Après avoir fait des recherches à l'université d'Aberystwyth à plusieurs reprises pour connaitre ce que les moldus savaient de certaines créatures magiques, elle s'était employé à savoir à quelle moment les sorciers se préoccupaient du savoir des moldus les concernant. Cela concernait des créatures aussi diverses que les centaures, les licornes, le "monstre du Loch Ness", ou encore les fées et les lutins. Ces derniers -fées et lutins- attirait autant son attention que le Kelpy qui avait élu domicile au Loch Ness. Les savoirs sorcières et moldus s'entrecoupaient sur de nombreux points pour ce dernier alors que le savoir commun sur les fées ne concernait que leur physique, et encore! Les origines de ses différences, le fait que ces créatures hantaient encore l'imaginaire et les livres des moldus l'intéressait, surtout la forme qu'ils prenaient. Bien qu'elle n'est pas encore tranché entre prendre un sujet et le développer ou faire un livre sous forme d'encyclopédie groupant savoir moldus et sorciers sur certaines créatures, Léa continuait de remplir ses parchemins pour accumuler ses connaissances et en tirer des questions pertinentes. Elle trouvait ça étonnant qu'avec le courant pro-moldus qui agitait la société magique, personne ne s'y soit encore intéressé mais c'était l'occasion et de rapprocher moldus et sorciers, et de souligner le danger de tels rapprochements.

Politiquement engagée dans aucun parti, avec une légère tendance vers l'APPEL, Léa n'avait pas moins d'opinions sur les sujets qui secouaient les cercles politisés du monde de la magie. Bien qu'elle réprouve les idées d'un SPAM ou d'un FMI trop archaïque, elle approuvait certaines volontés, comme celui de faire respecter le code du Secret. D'un autre côté, si elle était pour une meilleure coopération avec le monde moldus, elle n'était pas vraiment pour que les sorciers aillent vivre chez les moldus, d'obliger les jeunes à aller à l'université quand ça ne leur était d'aucune utilité. Elle n'aurait pas voulu que l'université ferme, mais l'obligation la dérangeait, encore plus la sévérité de la sanction en cas de refus. Ce n'était pas normal, à ses yeux, d'imposer à la majorité de la population ce que seul une minorité voulait et avait besoin.

Remettant ses parchemins dans plusieurs dossiers annotés "licorne" "farfadet" ou encore "dragon", la jeune femme se leva et alla remettre les livres où elle les avait trouvés. A Aberystwyth, c'étaient les bibliothécaires qui s'en occupaient, mais Léa ne voulait pas surcharger davantage son collègue qu'il ne devait déjà abattre de travail. Après 5 minutes à ranger les ouvrages qu'elle avait emprunté, Léa se dirigea vers la sortie. L'heure du couvre-feu sonnerait bientôt et Léa était en charge, ce jour-ci, de faire le tour de l'aile sud du château pour vérifier que les élèves ne trainent pas. Elle en profiterait en même temps pour récupérer sa cape qu'elle avait oublié dans la salle des professeurs le matin-même. Bon, elle n'allait pas s'envoler et qu'on lui vole ces affaires n'était pas digne de ces collègues, mais tout de même...

Comme pour confirmer ses pensées, après avoir descendu deux étages, la cloche sonna le couvre-feu et les quelques élèves qu'elle croisa étaient des Serdaigles et des Gryffondors qui se dirigeaient vers leur tours respectives. Léa n'était pas de ces professeurs qui sanctionnait dès que l'heure était dépassé car, à ses yeux, si l'élève se dirigeait vers sa salle commune, c'était qu'il était juste prit par le temps. Elle n'allait pas leur retirer des points pour 2 minutes. La jeune femme se contenta donc de les presser un peu avec le sourire.

Alors qu'elle se dirigeait vers la salle des professeurs, elle vit une jeune gryffondor marcher devant elle. Accélérant le peu, Léa la rattrapa, posant sa main sur son épaule pour l'inciter à se retourner, lui faisant peur involontairement. Miss Ollivander reconnut une jeune élève de 6ème année, River Oswin dont la chevelure rousse la rendait facilement identifiable. Très surprise, la jeune fille la salua pourtant, l'air un peu gênée. Avec un sourire amusée, Léa répondit :

"Bonsoir Miss Oswin. Votre salle commune est à l'opposée, vous vous êtes perdue?"

La jeune River Oswin passa par divers visages avant de lui livrer une explication à sa présence dans un coin aussi reculée de l'endroit où elle était censé se trouver. Après lui avoir donc sourit, et re-sourit en silence pendant quelques secondes durant lesquelles Léa la suspecta de chercher une excuse plausible, la lionne finit par se lancer en remettant ses cheveux en place. Un geste pour se donner plus de contenance. Le genre de geste que Léa connaissait par cœur. D'abord parce qu'elle avait été une élève avant d'être adulte et qu'elle avait déjà vu des camarades se faire épingler quand ils violaient le règlement, mais également parce qu'elle en avait énormément usés lorsqu'elle travaillait au ministère où le moindre dérapage verbale pouvait entrainer de lourdes conséquences. Il fallait donc garder son calme -et pourtant Léa ne se serait pas qualifier de colérique, loin de là- et pour cela, garder son sang-froid. Rejeter ses cheveux, serrer les poings, soupirer, réaffirmer la prise qu'on avait sur un objet sur l'on tenait... Tout cela étaient des signes pour quiconque savait les repérer. Léa n'avait nullement appris à les repérer, elle avait reconnut dans ce geste ce qu'elle faisait autrefois... Sauf qu'elle-même mettait rarement ses cheveux derrière ses oreilles, préférant les rejeter en arrière.

Avec aplomb, Miss Oswin lui livra la réponse qu'elle avait soigneusement préparé. Il était vrai que cette partie du château était plus connue pour être proche des salles de cours et de la salle des profs que de l'accès au cuisine et son explication pouvait donc être valable. Amusée, Léa lui laissa donc le bénéfice du doute et accepta sa réponse avec un hochement de la tête. Voire une gryffondor travailler ne devait pas se faire tous les jours, les lionceaux n'étaient pas réputés pour leur application dans leurs études, mais Léa avait déjà eu la jeune Rouge & Or dans son cours et si elle n'atteignait pas l'excellence, elle était sans conteste une élève intéressée et pertinente la plupart du temps, elle voulait donc bien croire que cela lui arrive de fournir un travail appliquée quand cela était nécessaire.

Avec subtilité, la jeune gryffondor essayait même de retourner la situation à son avantage. Mais peut-être était-elle vraiment en train de travailler ses cours de Soins aux Créatures magiques et dans ce cas, elle avait une chance fantastique de la croiser ici car Léa s'occupait le plus souvent des rondes de l'aile nord du château, vers la salle d'astronomie. Avec amusement, Léa regarda donc River Oswin tenter de s'échapper du guêpier où elle s'était fourré en négligeant de regarder l'heure puis secoua la tête comme si la situation la dépassait mais toujours avec malice.

"Allez, accompagnez-moi. Je dois aller récupérer ma cape dans la salle des professeurs, vous n'avez qu'à m'expliquer sur le chemin ce qui vous tracasse au point de perdre la notion du temps."

Avec un signe de tête l'invitant à la rejoindre, Léa commença à se diriger vers la salle des professeurs pour y récupérer son précieux vêtements, sans négliger sa peine pour écouter la question de son élève. Ce n'était pas souvent que l'on venait la voir pour ses cours. La dernière personne à s'y être risqué était Artémis Nott, une arrière-cousine ou une petite-cousine, et ce n'était réellement pour parler de créatures magiques puisque la dite Artémis ne suivait pas ses cours... Être disponible pour ses élèves... était l'un des objectifs de Léa. Si elle avait réussit à inspirer assez confiance à une élève pour que celle-ci vienne la voir pour s'interroger sur ses cours, elle n'allait certainement pas s'en plaindre.

Les pas de deux sorcières frappèrent dans une cadence asynchrone le sol carrelagé qui les menait droit à la salle des professeurs dans le silence. A feuilleter les pages de son livres à la recherche de sa fameuse question, la gryffondor qui marchait à ses côtés ne rendait pas pour autant ce bref silence pesant. Lui laissant le bénéfice du doute, le professeur Ollivander avait choisit de laisser la jeune élève aller au bout de sa démarche, à savoir chercher de l'aide quant à son devoir en son propre cours de Soins aux Créatures Magiques. La regardant du coin de l’œil de temps à autres, Léa vit la chevelure rousse de la jeune fille tournoyer légèrement alors qu'elle tournait vers elle après l'inspection de son livre. Un petit rappel pour bien formuler sa question peut-être? La jeune Miss Oswin était-elle donc une jeune fille studieuse ou peu respectueuse du règlement? A moins qu'elle ne soit un complexe mélange des deux éléments? Si son prétexte était véritable, c'était à parier et cela la rendait on ne peut plus intéressante. Léa n'avait jamais été une élève du genre à violer le règlement, cette pratique l'avait toujours dépassé parce qu'elle n'en avait jamais saisit l'intérêt. Bien sûr, elle était assez intelligente pour savoir que ses camarades voulaient juste faire un tour, retrouver leur petit ami, faire un duel ou bien était-ce juste pour l'argent d'un duel. Mais toutes ses raisons, au yeux de Léa, n'avait jamais représenté un quelconque intérêt. Même si Daniel, son premier ami, lui avait demandé de le rejoindre dans les méandres du château la nuit, Léa n'aurait jamais pu s'y résoudre, le ventre tordu par la crainte d'être prise en flagrant délit. En réalité, ça n'avait jamais été nécessaire car l'adorable Daniel était dans la même maison qu'elle. Quant à manger, se battre ou récolter de l'argent, rien de tout cela ne l'intéressait au point de violer le règlement. En y repensant, Léa se trouvait quelque peu intransigeante, mais elle avait grandit depuis, et murit. Et si les escapades nocturnes lui paraissaient toujours d'une absurdité sans nom, il n'en restait pas moins qu'elle était plus réputée auprès de ses élèves pour la compagnie de ses chats et de sa constante bonne humeur que pour sa sévérité.

La jeune gryffondor attira son attention en exposant son problème. Oui, les poils de démiguises étaient utilisés pour faire des capes d'invisibilités, si jamais ces objets méritaient le terme d'invisibilité. Qu'y avait-il de mystérieux là-dedans? La jeune fille le lui livra rapidement l'objet de ses tourments. Léa lui jeta un coup d'oeil étonnée. Elle ignorait qu'elle avait une élève attachée au droits des créatures magiques dans sa classe. Après quelques mois à enseigner à Poudlard, elle s'était rapidement rendue compte que peu d'élèves avaient un minimum de considération pour les créatures magiques autre que pour leur donner quelques caresses. Cela n'empêchait pas qu'elle décelait chez certains un intérêt pour ce qu'elle racontait. Mais c'était la première fois qu'une élève venait se renseigner d'elle-même.

Léa se retourna pour ouvrir la porte de la salle des professeurs qu'elles avaient atteintes en lui répondant :

"En effet. En Angleterre, le commerce des éléments provenant de créatures magique est contrôlés, vous verrez cela l'an prochain. Cela dit, on se borne simplement à vérifier que les démiguises ne sont pas tués pour leurs poils dans les élevages de démiguises. Lorsque la marchandises arrivent d'autres pays, aucune vérification ne sont faites. Et certains élevages sont illégaux donc non vérifiés parce qu'ils ne sont pas reconnus."

Léa avait reprit sa cape sur sa chaise et était revenu vers la jeune Miss Oswin qui attendait devant la porte. Porte qu'elle referma en concluant :

"Aujourd'hui, au Royaume-Uni, on ne tue pas les demiguises pour leur fourrure. On se contente de les épiler vivant, un tiers de leur fourrure par an. Et croyez-moi, ce n'est pas beau à voir."

Soupirant, Léa resta immobile devant la jeune gryffondor. Rien que d'en parler, ça la révoltait, mais elle ne pouvait plus rien faire maintenant qu'elle était à Poudlard, juste espérer qu'elle parviendrait à sensibiliser suffisamment pour qu'ils s'indignent à leur tour et reprenne le combat. Avec un léger sourire désabusée, elle ajouta :

"Rassurez-vous, on s'assure qu'ils soient inconscient avant de faire cela. La violence gratuite aux créatures magiques n'est pas tolérée, mais là, il y a contournement de la loi. Du moment que les créatures n'ont pas mal lorsqu'on leur prends ce qu'on veut, tout semble aller dans le meilleur des mondes."

Le monde du contrôle et de la régulation des créatures magiques n'était pas pour autant sombre et perverti. Une section du communément appelé département 4 était spécialisé dans la régulation des commerces et veillaient à réduire au maximum les détournements de loi, le braconnage ou encore les trafics. Mais une dizaine de personnes se tuant à la tâche ne pouvait que très difficilement venir à bout de ces problèmes. Léa n'avait jamais travaillé dans ce bureau, mais elle avait été en liaison avec eux quand elle avait travaillé au département de la justice et celui de la coopération internationale. Sans oublier le bureau de recherche et du contrôle des dragons où elle avait découvert que les trafics de parties d'anatomie de dragon -foie, sang, etc...- était assez florissant... Mais ne couvrait que 5% de son domaine de compétence.

Penchant la tête sur le côté, trahissant ainsi son intérêt pour la jeune gryffondor qui lui faisait face, Léa demanda :

"Était-ce simplement par curiosité ou intérêt personnel, ou le sujet des créatures magiques vous tient à coeur?"

La jeune River Oswin avait attisé l'intérêt et la curiosité de Léa qui trouvait sa réaction parfaitement normal. Peu d'élèves se sentaient concernés par le sort des créatures magiques, ou bien, c'était juste sur le coup et l'oubliait quand ils sortaient de cours. Mais au moins étaient-ils sensibilisés à la question. Peut-être y repenserait-il si jamais, un jour, ils devaient être confrontés aux sujets dont elle leur parlait. Sa réflexion la fit sourire. Non pour se moquer de sa naïve indignation, mais parce qu'elle aussi lui avait ressembler un jour et qu'elle était heureuse de voir qu'il existait encore des jeunes gens qui étaient capables de s'indigner contre les injustices prêt à prendre les "armes" pour aller combattre le "crime". Bref, une perle qui restait simplement à polir. Avec un sourire indulgent, la jeune enseignante écouta la jeune fille avant de lui répondre gentiment :

"Égoïste, non. Malgré les apparences, des progrès sont faits régulièrement. L'interdiction de tuer les demiguises pour leur fourrure ne date d'à peine plus de 20 ans. Le ministère préfère croire naïvement que les poils sont retirés de démiguises morts naturellement quand ils viennent d'Angleterre, plutôt que de croire que cette pratique d'épilation est la plus courante. Le problème, c'est que lorsqu'ils sont vieux, la capacité d'invisibilité des démiguises est moins efficace. En utilisant leur poil, on fabriquerait des capes de moins bonne qualité et ça leur perdre énormément d'argent. C'est un problème assez complexe entre épilation dérangeante et une mauvaise qualité qu'ils ne peuvent se permettre."

Après 8 longues années au département de régulation et de contrôle des créatures magiques, Léa avait appris que pour se battre, les bons sentiments ne suffisaient pas, il fallait avoir des arguments en béton. "Ca fait mal" ne suffisait jamais quand la qualité ou l'argent était en jeu. Elle avait passé des soirées entières à travailler pour trouver des points d'appuis que certains juristes, en faisant passer des lois, lui fournissait. Un de ses plus éminents soutiens, même si Léa ne la connaissait pas personnellement, était Hermione Granger qui avait donné une impulsion certaine aux droits des créatures magiques.

La jeune gryffondor resta un instant pensive face à la curiosité de sa professeur avant de lui avouer qu'elle était du genre à se révolter pour toutes les injustices existantes. Sa dernière réflexion la fit sourire :

"N'en ayez aucune gène, ce sont des sorciers comme vous qui peuvent changer les choses même s'il faut essayer de garder son sang-froid la plupart du temps. C'est une chose difficile à accepter quand quelque chose nous révolte, mais les sentiments ne convaincs jamais personne."

Léa en savait quelque chose... Jamais le fait que les gobelins soient injustement traités n'avait jamais apitoyé Frasen, l'un de ses anciens collègues les plus conservateurs. En même temps, les gobelins n'attirant pas franchement la sympathie et ayant parmi eux quelques "Frasen" à eux, difficile de ne pas comprendre cette difficulté de communication... Bien plus intéressée qu'elle ne le prétendait par les créatures magiques, la lionne lui posa une question fit réfléchir Léa pendant quelques secondes.

"Non, je ne crois pas. Mais quand vous serez majeur, vous pourrez faire partie d'associations qui se battent pour des êtres magiques. La plus connue est la SALE, fondée par Hermione Granger, mais il existe un certain nombre de ligue pour la défense des gobelins. Malheureusement, comme elles sont principalement composés de gobelins, elles n'ont pas beaucoup de poids. Je n'en ai jamais fait partie -manque de temps- mais j'ai déjà eu l'occasion de converser avec eux. Malheureusement, pour les créatures magiques, il n'existe rien. Pas à ma connaissance en tout cas. Certains collectifs essayent de se battre pour les dragons ou les vivets dorés par exemple, mais c'est le plus souvent par intérêt pour eux-même que pour les créatures en elle-même. Cela dit, ça a parfois porter ses fruits, les vivets dorés sont devenus une espèce protégés grâce à eux, il y a une dizaine d'années, peu après la chute du Seigneur des Ténèbres."

Un peu trop bavarde, non? Léa prenait toujours soin de répéter ses cours avant de les faire, pour éviter de partir un peu trop dans des sujets s'écartant du cours, autrement, elle aurait pu en parler durant des heures... Se taisant un instant, Léa reprit :

"Je vous raccompagne à votre salle commune?"

L'occasion peut-être de discuter davantage, la jeune lionne l'intéressait assez. Avec curiosité, Léa l'interrogea donc sur sa propre question :

"Vous souhaiteriez fondés une association à Poudlard pour les droits des créatures magiques?"

La fraicheur, la naïveté et la forte volonté de la jeune Gryffondor fit sourire un bref instant la jeune Léa. La jeunesse avait une chose pour elle, l'avenir. Léa n'avait que trente-deux ans, elle avait encore une bonne partie de sa vie devant elle et elle avait l'expérience suffisante pour faire ce qu'elle voulait faire. Et pourtant, elle avait probablement quitté son poste au moment où elle devenait assez efficace pour aller au bout des choses. Sauf que ça ne l'intéressait plus. Se battre contre tout et n'importe quoi, se battre au quotidien pour obtenir toujours les mêmes choses, ça la fatiguait. Au bout d'un temps, elle se lassait, elle reprenait un autre combat à zéro, essayait de soulever des montagnes après s'être adapté à l'environnement et à l'ambiance mais finalement les p'tits habitants de la montagne, préférait rester là où ils étaient plutôt que de regarder où ils étaient ou ce qu'ils y avaient autour d'eux. Certains le faisaient timidement, d'autre ne regardaient que d'un côté et pour finir, Léa finissait par changer de montagne.

La force de la gryffondor résidait dans cet espoir fou de faire entendre raison à des gens qui ne cherchaient qu'une chose : la paye qu'ils empochaient d'ici à la fin de leur mois. Peu de gens choisissaient leur métier par passion, par envie, par choix même parfois, mais parce qu'il leur fallait gagner leur vie et que le département de régulation et contrôle des créatures magiques était l'un de ceux qui demandait le plus de personnel. Léa en avait vue des bureaux croulants sous la paperasse et elle-même n'était jamais à court de travail, que ce soit pour défendre ses opinions que pour remplir des papiers administratifs.

Avec un sourire, celui qui sait parce qu'il est déjà passé par ce genre de pensées, Léa répondit aux espoirs de son élève :

"S'il existe des alternatives, je serais curieuse d'entendre vos suggestions. La seule manière dont on a de se rendre invisible autre qu'avec des capes faites avec des poils de démiguise, c'est d'utiliser un sortilège de désillusion. Vous connaissez ce sortilèges et ces défauts? Il permet de jouer au caméléon, mais un caméléon reste toujours visible si on se concentre suffisamment. Ce sortilège est plus efficace que la capacité du caméléon à se fondre dans son espace, mais ça ne vaudra jamais l'invisibilité dont sont pourvus les demiguises."

Le monde n'était pas tout noir ou tout blanc. Ca aussi, Léa l'avait appris au ministère. Elle avait crut parfois faire les choses bien dans sa vie, avant de se rendre compte que ça n'avait rien de "bien", que ce n'était que pour se donner bonne conscience... Puis, elle avait compris que ça ne dépendait pas de notions mais des gens qui les prononçait. Alors, certes, elle avait fait de mauvais choix, et parfois pour de mauvaises raisons, mais c'était toujours ce qui lui avait semblé être le mieux. Et parfois, c'était tout simplement parce qu'elle n'avait pas le choix. On ne faisait jamais comme on voulait, on faisait avec ce qu'on avait. Et parfois, ce qu'on avait, c'était choisir entre une collision dans une maison ou mourir sous le petit feu d'un dragon. Allégoriquement bien sûr. Alors, si le choix n'était pas évident, il ne restait qu'à choisir quels conséquences étaient les moins mauvaises, ou mieux, dont on pouvait tirer parti. Choisir entre une noyade et la varicelle du dragon, c'est qu'on guérissait de ce dernier par exemple. Croire que quelqu'un, parce qu'il n'avait pas les même aspirations que soi, pouvait être un obstacle, ou quelqu'un qui fallait rallier à sa cause n'était pas une bonne idée. Parler de ses aspirations n'était pas néfaste, mais pas de là à faire que tout le monde qui gravitait autour de soi les partage. En revanche, se servir de leur talent, de leur savoir, était une bonne chose. Régulation et Contrôle étaient les mots magiques de ce département. Du moment que les gens se retrouvaient là-dessus, généralement, ça marchait plutôt bien. Le problème venait quand on travaillait dans un bureau s'occupant d'êtres magiques... car loin du contrôle, Léa aspirait à une plus grande autonomie des peuples magiques et pour certains, les loups-garous pour ne citer qu'eux, les mêmes droits. Elle avait essayé de faire supprimer l'obligation pour un loup-garou de mentionner son état lors de la recherche d'un emploi. Sans succès. On n'achetait pas son voisin avec de bons sentiments quand les seules choses qui l'intéressaient était la réputation de son entreprise, et la sécurité des gens qui tournaient autour de son commerce. Voir plus loin que leur bout de nez leur était impossible. Pire qu'impossible : impensable.

Alors oui, les espoirs et les aspirations de la jeune River Oswin faisaient sourire Léa. Une partie d'elle souriait avec indulgence, et l'autre aspirait à ce que toute la populace magique soit touché par ce genre de concept, ce genre de pensées. Folle Utopie, bien entendu. Mais l'espoir ne faisait pas de mal.

"Vous saviez que Hermione Granger était à peine plus jeune que vous lorsqu'elle a crée la SALE?" demanda Léa, mine de rien, après avoir entendue Miss Oswin parler de s'atteler à la création d'une association défendant toutes les créatures magiques. "Il existe un âge requis pour faire parti d'association officielles tels que la SALE car le ministère estime qu'avant, vous êtes trop influençable. Mais rien ne vous empêche de la créer à Poudlard, de ramer pour trouver des membres et des actions à effectuer et surtout les buts que vous souhaitez atteindre avant de l'officialiser à votre sortie de Poudlard."

Léa se souvenait d'avoir voulu rejoindre une ligne pour les droits des gobelins quand elle travaillait au bureau de liaison des gobelins. Son chef l'en avait dissuadé. Les ligues gobelines étant principalement peuplés de gobelins, et ayant peu de crédit auprès du ministère, cela la discréditerait et rendraient ces actions et ses opinions inutiles. D'autant plus que de l'autre, les gobelins lui mettraient davantage de pression puisqu'elle avait un poste au sein du bureau. Le meilleur moyen d'être noyé d'un côté sans personne pour vous repêcher de l'autre. Joindre une quelconque groupe était donc pour elle, une vague utopie. Cela ne l'avait jamais empêchée de soutenir leurs actions et leurs paroles, ou de donner un peu d'argent quand elle en avait aux associations dont elle approuvait la cause Et les actions.

Peut-être que la fraicheur de la soirée était montée à la tête de la jeune gryffondor car celle-ci, après que Léa lui ait demandé si elle souhaitait donc créer un groupe pour le droit des créatures magiques, lui demanda, avant même sa création, si elle souhaitait en être la marraine. Léa resta silencieuse un instant, considérant la jeune gryffondor d'un oeil critique et réfléchissant. La détermination de la gryffondor faisait plaisir à voir et elle semblait volontaire. Le genre de personne qui pouvait très bien gérer un groupe, un genre de leader. Le genre de personnes qui pouvaient soulever des montagnes quand un sujet les passionnaient. D'un autre côté, à trop s'emporter, on se lassait facilement et gérer un groupe était loin d'être plaisant et facile.

Léa s'arrêta et fit face à la jeune gryffondor, soudain sérieuse. Une expression bien étrange sur un visage toujours souriant.

"Est-ce que vous réalisez le travail que cela vous demanderait? Si vous êtes sûre de ce que vous voulez, je veux bien vous y aider. Mais le droit des créatures magiques est un sujet extrêmement vaste et toutes ne réclament pas les mêmes attentions. Je ne peux pas me porter caution d'une association dont je ne connais ni les objectifs, ni les actions, ni même le nom. Vous en avez conscience?"

Léa haussa un sourcil inquisiteur avant de poursuivre :

"Je ne peux pas accepter d'être marraine de votre association à ce stade où nous venons que d’effleurer l'idée de sa création."

Connaitre les choses avant d'y adhérer était le B.A.ba. Le visage de la jeune Léa se détendit pourtant avec un sourire :

"Mais je pense que vous avez la force pour créer cette association. Revenez me voir d'ici une semaine ou deux avec une ébauche de ce projet. Ce que vous voulez obtenir à travers votre association, quel nom vous imaginez, qui seraient capable de vous suivre ou y trouvez un intérêt, quel action vous imaginez pouvoir mener, et comment vous espérez vous faire connaitre. Plus on vous entendra, plus vous aurez de poids, mais si vous n'avez aucune revendication, aucun argument, ce sera comme souffler dans une ballon crevé. Réfléchissez-y vraiment. Prenez le temps qu'il vous faut mais ne tardez pas trop. Quand vous aurez quelque chose qui tient debout à me présenter, venez me voir, nous en discuterons et je verrais si je m'y associerais. Cela vous semble correct?"

Léa avait bien conscience que cela semblait certainement beaucoup à demander à la jeune gryffondor qui venait tout juste d'émettre une idée, mais il fallait qu'elle sache où elle mettait les pieds avant de partir sur un coup de tête. Pour qu'un château tiennent debout, il fallait commencer par les fondations pour être sûr que les murs tiennent, autrement, ce ne serait qu'un château de sable, oublié au premier souffle de vent.

Léa fut ravie de voir qu'elle avait touché juste. Hermione Granger était l'exemple classique pour motiver les élèves modèles et si la jeune River semblait être moins exigeante sur le règlement, l'ancienne gryffondor semblait toujours être un modèle pour la jeune génération. Léa avait été à Poudlard en même temps que le trio, si ce n'est qu'elle avait arpenté les couloirs de l'école quelques années avant eux. Quand ils entraient à Poudlard, Léa était déjà en 5ème année. Hermione Granger était un modèle, c'était vrai et elle était surprise qu'on lui demande pas encore des autographes à la sortie de son boulot. Mais peut-être était-elle déjà passé par là et que les chose s'étaient calmées depuis.

Malgré tout le sérieux avec lequel la jeune gryffondor prenait les choses, elle ne semblait rien perdre de son enthousiasme. Et c'était une bonne chose. Avoir de la motivation était essentiel dans une entreprise comme la sienne, mais garder les pieds sur terre était nécessaire pour ne pas tomber.

"Évitez de penser à ce que les autres peuvent penser de ce que vous projetez. C'est vrai que ce sont les autres qui assurons en partie la réussite de votre projet. Mais le but est de faire ce qui vous semble juste, pas de leur plaire. Il vous faudra faire des concessions sur certaines choses parfois, mais il ne faudra jamais perdre de vue ce qui vous parait essentiel et qui est la raison d'exister de cette association, c'est le meilleur moyen de ne pas perdre pied."

Continuant à marcher, Léa continua d'écouter la tirade de son élève. Elle semblait prendre la mesure du travail qu'elle devait effectuer, mais sans se décourager. Le sourire de Léa s'épanouit en l'entendant dire qu'elle ne devait pas s'éparpiller alors que son discours partait pourtant dans tous les sens. Les gens, le plan, les idées, l'officialisation, les membres, tout cela semblait un peu se bousculer dans l'esprit de Miss Oswin. Léa se souvenait de ses sursauts d'enthousiasme quand un éclair lui traversait l'esprit, quelque soit l'idée qu'elle venait d'avoir. Il était alors impossible de l'arrêter tant qu'elle n'avait rien mit de tout cela en forme. Sincèrement, cela arrivait assez régulièrement, et le reste du temps, elle bossait, tout simplement, avec application et rigueur. Mais elle savait à présent comment gérer ses pics d'excitation. Écrire toutes ses idées sur papier avant de dérouler le fils de ses idées pour y mettre des liens entre elles. Il fallait juste trouver l'idée de base, ou ce qui serait la base de ses idées, pour réussir à construire quelque chose de tenable.

"Mettez toutes vos idées à plat d'abord. Et essayer en premier lieu de trouver le fils rouge de votre association. Quand vous aurez les objectifs à atteindre -et ça ne se fait pas sans se renseigner un minimum sur ce qui se fait déjà- vous pourrez envisager le reste, les membres, la façon d'être connu. Sur le chemin, vous pourrez peut-être trouver des gens qui vous aideront ou vous donneront d'autres idées. Je vous donnerais des noms d'élèves qui pourraient éventuellement être intéressés quand vous m'aurez ramener quelque chose."

La jeune Oswin était toujours débordante d'enthousiasme et son cerveau semblait fourmiller d'idées en tout genre. Un fait que Léa connaissait bien. Mais elle prenait ses recommandations au sérieux sans se décourager pour autant et ça faisait plaisir. Se décourager était la pire chose à faire car le plus dur n'était pas de créer quelque chose car ça avait quelque chose de très excitant, mais de le maintenir en vie une fois créer et pour cela, la jeune gryffondor aurait été avisé de ne pas se décourager à la première difficulté.

Elle posa le délai de deux semaines pour revenir la voir et Léa réfléchit un instant avant de répondre. Deux semaines était un délai que Léa ne voulait pas imposer. Se poser des règles étaient parfois une bonne chose et parfois, ça ne l'était pas. Et elle ne souhaitait pas que la lionne s'impose un temps imparti pour elle. Avec un sourire, la jeune femme lui répondit :

"Vous pouvez aussi venir avec des questions, si vous en avez. Poudlard ne s'est pas fait en un jour. J'avais écrit un livre il y a quelques années sur le droit des créatures magiques. C'est assez superficiel parce que ça parle d'énormément de créatures et que ça ne va pas au fond des choses, mais ça repose principalement sur des expériences vécus au ministère. Si cela vous intéresse, je pourrais vous en fournir un exemplaire, je ne crois pas que Mr. Greengrass l'ait dans ses rayons. Cela dit, il doit pouvoir avoir plusieurs ouvrages là-dessus dans la section juridique. Vous pourriez aller lui demander."

Toujours enthousiaste, la jeune gryffondor semblait néanmoins prendre en compte les conseils et les remarques que lui donnait l'enseignante de SCM. Le travail ne semblait pas lui faire peur et elle gardait foi en elle malgré ses doutes. Si elle pouvait avoir que des River Oswin dans ses classes, enseigner serait un véritable plaisir. Avec un sourire, Léa acquiesça ses dires en continuant d'écouter la jeune fille qui acceptait qu'elle lui passe son livre. Dit ainsi, cela pouvait paraitre un peu prétentieux, mais cela lui éviterait de dire ce que la jeune fille pouvait lire. Et elle n'aimait pas faire dans la fausse modestie. Elle avait fait un travail, elle n'allait pas le déprécier, tout aussi imparfait qu'il soit. Elles tournaient au coin d'un escalier quand Léa lui répondit avec le sourire :

"Et bien, repassez demain soir, je vous le passerais."

Elles étaient bientôt arrivés devant la salle commune des Gryffondor et Léa estima qu'il était temps de souhaiter une bonne soirée et une bonne nuit à sa jeune et assidue élève. Mais la jeune lionne la devança, la remerciant pour ses conseils et le temps qu'elle lui avait accordé. Léa lui répondit avec un sourire. Elle n'avait pas une vie très pressée, régler sur des horaires strictes, en dehors de ses heures de cours et de ses rondes. Elle n'avait rien qui l'attendait dans ses appartements hormis quatre chats affamés... ou peut-être trois, Moon devait avoir déjà attraper un casse-croute... Dont un très très affamé, Bastet étant un ventre sur pattes à lui tout seul. Passer du temps en agréable compagnie, fut-ce une élève ou un chat, n'était pas une perte de temps à ses yeux. S'arrêtant à son tour, Léa fit face à la Rouge & Or avec le sourire :

"Bonne soirée, Miss Oswin."

Elle la regarda s'éloigner quelques instants avant de tourner les talons et de reprendre la direction de ses appartements, maintenant qu'elle avait récupéré sa veste.