Introduction aux SCM [Toutes Années Confondus!]

« Grouille-toi, la porte est en train de se fermer ! »

Les deux Gryffondor foncèrent dans le couloir comme si un Troll était à leurs trousses. Rodé par l'expérience, Donald atteignit la susdite porte en premier. Son camarade de dortoir Neils Osborn lui rentra dedans. Haletants, ils furent les derniers à pénétrer dans la salle et se dirigèrent vers le fond de la classe, malgré les places libres du rang de devant. Donald n'aurait pas dit que Neils et lui étaient amis comme il l'était avec Ben. N'empêche qu'ils s'entendaient assez bien car ils partageaient plusieurs points communs : un dortoir, une volonté indestructible de s'amuser, une attitude turbulente d'élève dissipé, de médiocres résultats propres aux cancres et enfin, une fâcheuse tendance à arriver en retard. Ce jour-là, ils s'étaient tous deux débrouillés pour quitter le lit trois minutes avant le début du cours et avaient donc été contraints de piquer un sprint matinal à travers le château. Une introduction aux Soins aux Créatures Magiques, ça ne se séchait pas. Même si pour y assister, il avait fallu à Donald faire une croix sur son cher et tendre petit-déjeuner et renoncer à faire sa toilette – bien que ça, ça ne le dérangeait pas trop.

Donald sentit quelque chose remuer dans sa poche. Sans aucune crainte, il plongea sa main à l'intérieur et en ressortit un crapaud. Ce dernier l'avertit de son réveil par un croassement sonore. Le bruit se fondit dans le brouhaha ambiant bien qu'il fit se retourner toute la rangée la plus proche. Feignant une expression honteuse, Donald plaqua sa main potelée contre sa bouche, ce qui leur soutira quelques mimiques dégoûtées avant qu'ils ne dirigent à nouveau leur attention vers le cours.

« Neils ! appela Donald, inquiet. Tu penses que c'est grave si je garde mon crapaud avec moi pendant le cours ? Tu crois qu'elle le verra de si loin ?
- Je pense pas, répondit son voisin, on est au dernier rang et la salle est grande puisque c'est tout niveaux confondus ; en plus regarde, elle a bien ses chats avec elle, alors... »

Il se tut car l'intéressée leur demanda le calme, au fond. Donald ne l'avait pas remarqué en entrant mais elle était effectivement suivie de ses chats partout où elle allait. Ceux-ci, au nombre de trois, se baladaient paresseusement entre le bureau et la fenêtre. L'un était particulièrement rond ; cela devait être un gros mangeur, comme lui, songea-t-il. C'était aussi rare que curieux qu'un professeur fasse cours avec ses animaux de compagnie. Si elle s'octroyait ce droit, alors pourquoi pas lui ? En dépit du caractère insubordonné du jeune garçon, ce n'était pas de la provocation. Son crapaud avait simplement l'habitude de s'endormir dans l'uniforme roulé en boule de son maître et c'était en toute ignorance que ce dernier l'avait amené en cours. Les poches de son pantalon étant pleines de sucreries et autres objets hétéroclites, il n'avait pas distingué une quelconque différence de poids dans sa précipitation. Le Gryffondor posait son crapaud sur le bureau quand la jeune femme commença à parler.

L'adolescent découvrit à cet instant que dans sa hâte, il ne s'était pas habillé correctement. Tout en détaillant sa tenue débraillée, il eut le loisir de constater qu'il avait oublié de retirer son haut de pyjama. Celui-ci baillait en dessous du pull qu'il avait enfilé par dessus ; Donald l'enfonça dans son pantalon pour que son accoutrement ne soit pas trop voyant. Du côté du bas, ça semblait relativement correct – mais le summum du ridicule se situait au niveau de ses chaussures. En effet, il portait à droite une tennis jaune tandis qu'à son pied gauche pendait lamentablement une pantoufle en forme de patte de lion (cadeau de sa tante Odette pour ses treize ans). De quoi faire pâlir Victor Lloyd de jalousie ! Heureusement que le bureau dissimulait la partie inférieure de son corps, se dit Donald en refaisant le nœud de sa cravate qu'il avait nouée à l'envers. Trop occupé à se rendre un peu plus présentable, il n'avait pas écouté leur nouveau professeur expliquer les origines de son célèbre nom, ni présenter sa matière. Il raccrocha au moment où elle réprimandait une fille qui bavardait avec sa voisine – Lisa Berckley, dans la même classe que lui. Une fort jolie fille, d'ailleurs.

« Eh, Donald ! Réveille-toi, Ollivander nous a demandé de sortir un parchemin !
- Hein ? marmonna l'interpellé, émergeant de sa rêverie. Elle s'appelle Ollivander ? Comme le magasin de baguettes ? La classe ! »

Donald sortit de sa besace une feuille de parchemin froissée et s'arma de sa plume tout aussi chiffonnée. Il était déjà fatigué à l'idée de devoir écrire. Il commença à griffonner de sa grosse écriture brouillonne les informations exigées : nom, prénom, maison – comment ça, il n'avait pas écouté ? –, pourquoi avait-il pris Soins aux Créatures Magiques... Mais parce que c'était génial ! Déjà, cette option était la seule matière qui se passait à l'extérieur à part le Vol et il aimait le grand air. Autant dire qu'après plusieurs heures de cours enfermé à l'intérieur, sachant qu'il était incapable de rester calme et concentré sur une chaise plus de cinq minutes, c'était une libération de passer une heure ou deux dans le parc ! Ça aérait l'esprit et surtout, c'était distrayant : l'une des rares leçons pendant lesquelles il ne s'ennuyait pas à mourir. L'autre aspect de son amour pour la matière résidait en son programme : beaucoup de pratique, très peu de théorie. La capacité de concentration quasi-inexistante du Gryffondor n'était pas adéquate à la deuxième sorte d'approche du savoir, aussi avait-il du mal avec les longues leçons tirées des livres. En revanche, manipuler était une bien meilleure méthode d'apprentissage pour un élève de son type, plus apte à agir qu'à réfléchir.

Ensuite, qu'attendait-il de ce cours ? Franchement, ce qu'il préférait, lui, c'était côtoyer les animaux. Il n'était pas spécialement passionné par eux ni très délicat en leur prodiguant des soins, contrairement à Nora par exemple. Pourtant, l'idée de pouvoir les approcher, les observer et peut-être même les toucher le mettait en joie. Avant chaque cours de Soins aux Créatures Magiques, il frétillait d'allégresse grâce à ce « Magiques », justement. Pour un Né-Moldu comme lui, quel émerveillement ce fut lorsqu'il découvrit que les dragons, les trolls, les goules et toutes ces créatures sorties tout droit de ses contes de fée existaient bel et bien ! Et même de nombreuses autres dont il ignorait jusqu'au nom, des Scroutts à Pétard et des Pitiponks et des Botrucs et des... Il attendait avec grande impatience de s'en approcher. Il exerçaient une telle fascination sur lui que les regarder manger, bouger, vivre – mourir –, cela provoquait chez lui un ravissement non feint. Donald, la main déjà endolorie, abrégea sa pensée sur le papier.

Question suivante : que souhaitait-il faire plus tard ? Pensif, il mordilla le bout de sa vieille plume (celle qui avait l'air de s'être fait rouler dessus par le Magicobus). En vérité, il savait parfaitement bien quel serait son futur métier... ou plutôt, ses futurs métiers. Car des idées, il en avait des dizaines, des centaines, il en changeait toutes les heures. Un jour il trouvait sa vocation, le lendemain il voulait exercer une trentaine de professions à la fois. Il y avait tant de choix, tant de choses à faire ! Langue de Plomb, aventurier, Oubliator, inventeur, sauveur du monde... Si encore il avait du talent sur un balai, il aurait ajouté joueur de Quidditch pro à la liste. Comment résumer les projets de toute une vie sur un si petit morceau de parchemin ? Donald s'en tint à ses rêves les plus chers, tout en y ajoutant sa lubie du moment. Quand on y regardait de plus près, tout ce qu'il avait marqué rentrait dans un unique espoir : la gloire. Il voulait être connu, reconnu, renommé, célèbre, aimé. Il voulait qu'on sache qui il était et combien il était grand et fort. Il voulait qu'on reconnaisse son génie et qu'on l'adule. Qu'on le remarque enfin.

Pour finir, Miss Ollivander leur demanda quel était leur niveau en leur donnant le choix de le traduire avec des mots ou des notes. Donald choisit les mots : pour se faire bien voir d'un professeur, mentionner ses notes à lui, ce serait courir au désastre.

« Bordel de Troll ! » jura-t-il dans sa barbe.

Son maudit crapaud venait de renverser son encrier et posait à présent ses deux pattes avant sur le parchemin. C'était bien la cinquième fois qu'il lui faisait ce coup-là ! Son maître s'empressa de l'attraper pour le mettre à terre, sans prendre garde aux belles traces d'encre s'apposant maintenant sur le sol.

Pendant ce temps, Miss Ollivander avait posé une question au reste de la classe et Frost était en train d'y répondre. Depuis quand elle participait en cours, celle-là ? Elle se présenta sous un nom bien connu, celui de Danny Sneals. Cela fit un peu mal au cœur à Donald d'entendre cela. Pas grand monde, à Poudlard, ne devait regretter le vrai Danny. Il paraissait qu'il avait raté ses BUSEs et qu'il était parti vendre des planches de surf quelque part en Angleterre. Ce bon vieux Danny... La seule personne avec qui Donald pouvait parler de ses délires et expériences bizarres sans faire fuir. Il lui manquait, son ami. C'était en apprenant qu'il ne reviendrait plus jamais à Poudlard que Donald avait pris la peine d'écrire une lettre pour la première fois.

Donald fut assez impressionné par le professeur Ollivander qui ne se démonta pas. Elle remit Frost à sa place avec le sourire. Le Gryffondor, tout à fait d'accord avec la définition qu'avait donnée sa camarade de maison, décrocha du cours juste avant qu'un autre élève soit interrogé.

« Psssst, Neils ! » chuchota-t-il à l'intention de son voisin de table.

Donald déplaça entre eux deux son morceau de parchemin dans un coin duquel il avait rapidement tracé une grille de morpion. Neils y inscrivit volontiers une première croix et ainsi de suite jusqu'à un match nul. Le parchemin fut récupéré par son propriétaire, puisqu'il fallait le rendre à la fin de l'heure. À ce moment-là, Miss Ollivander leur demanda s'il y avait une autre hypothèse. Donald se dispersait vite en cours mais contrairement à ce que l'on pourrait croire, il participait... souvent pour dire des choses stupides. Soudain animé par l'envie de se bouger la langue, il leva le bras tout en commençant à parler sans y être invité :

« Donald McWilde ! Selon moi, dans ce cours, on est censés apprendre à reconnaître les différentes créatures magiques qui existent afin de savoir à quoi s'en tenir et comment réagir si un jour on venait à en croiser une. »